La fierté

Questions touchant à la mise en pratique de la doctrine éthique de Spinoza : comment résoudre tel problème concret ? comment "parvenir" à la connaissance de notre félicité ? Témoignages de ce qui a été apporté par cette philosophie et difficultés rencontrées.
Avatar du membre
LaPhilosophieAuMarteau
passe occasionnellement
passe occasionnellement
Messages : 33
Enregistré le : 08 juin 2008, 00:00

Messagepar LaPhilosophieAuMarteau » 08 juin 2008, 20:20

Cher(e?) Bardamu,

DGsu, en m'accueillant gentillemment sur ce site, m'a informé que l'humour était également apprécié sur le forum: je vois que tu n'en manque pas.

"Spinoza et Nous, Philosophie de l'Affirmation": je souhaitais simplement savoir si certains participants du forum, par exemple publiaient des livres ou avaient constitué des think tanks produisant des propositions concrètes en vue d'influencer les décisions politiques.... Il n'y a en effet que des problèmes concrets.

A mon humble avis Bardamu, tu n'écris pas assez... :)

Bon dimanche,

Enegoid
participe avec force d'âme et générosité
participe avec force d'âme et générosité
Messages : 452
Enregistré le : 10 févr. 2007, 00:00

Messagepar Enegoid » 08 juin 2008, 20:37

hokousai a écrit :Sur la puissance du corps , justement , il ne dit pas grand chose ( on ne sait pas ce que peut le corps !!)


Il ne dit pas grand’ chose certes sur ce qu’il appelle réellement la « puissance du corps ». C’est bien dommage, car il dit aussi que ce qui augmente ou diminue la puissance du corps augmente ou diminue la puissance de notre âme (E3 p11) et que notre âme s’efforce d’imaginer ce qui accroît la puissance du corps (E3 p12).

Le corps et l'âme sont unis . L' esprit humain est l'ideé du corps humain pas de celui des moules


Oui, mais il me semble que, dans le scolie que vous avez cité (p13 et non p12), Spi cherche à démontrer, par la comparaison des corps, la supériorité de l’esprit humain sur les autres esprits et non la supériorité de certains esprits humains sur d’autres.
Pour ma part je ne nie pas l’idée d’une hiérarchie des esprits. Encore faut-il savoir sur quoi la fonder.

Il me semble que le héros de" into the wild " est des plus dépendant qui soit et de plus dépendant de corps qui ne concourent pas d'emblée à sa conservation ( à la différence de la vie en société


Le héros est plus indépendant par rapport aux autres hommes, et par la, il est plus dépendant par rapport à la nature. Nos corps sont de toutes façons très dépendants d’autres corps, et de façon à peu près équivalente pour tous (dans une société donnée). De ce fait je ne vois pas comment certains esprits seraient supérieurs à d’autres (si la supériorité de l’âme dépend, comme le dit Spi, de la non dépendance des actions du corps par rapport à l’action d’autres corps).

Avatar du membre
hokousai
participe avec force d'âme et générosité
participe avec force d'âme et générosité
Messages : 4105
Enregistré le : 04 nov. 2003, 00:00
Localisation : Hauts de Seine sud

Messagepar hokousai » 09 juin 2008, 00:21

Cher Enegoid

Vous semblez butter (entre autres ) sur « moins il y a de corps qui concourent avec lui pour agir » (scolie prop 13/1)

Imaginez vous ne pas pouvoir bouger le bras sans le secours ( la volonté, l’autorisation , la force… que sais je de cet ordre ) d’un organisme jumeau du votre , mais distinct du votre , qui serait donc un corps qui concourrait avec vous pour agir .

Auriez -vous un esprit plus apte à comprendre de manière distincte l’ acte de bouger le bras ?

Enegoid
participe avec force d'âme et générosité
participe avec force d'âme et générosité
Messages : 452
Enregistré le : 10 févr. 2007, 00:00

Messagepar Enegoid » 09 juin 2008, 21:28

Je bute, je bute, oui...sur beaucoup d'autres choses aussi, ce que vous avez remarqué.

D'accord, vous voyez les choses à ce niveau. Moi j'étais plutôt à un niveau plus général : le boulanger qui fabrique le pain que je mange, et toutes ces considérations sur l'interdépendance.

Si je vous suis, et si je suis une certaine façon d'interpréter Spinoza, qui me parait possible, il me semble qu'il faut conclure que l'esprit supérieur est celui du gymnaste ?

(Je tombe par hasard sur l'annonce d'un programme télé 20h55 ce soir "vie privée vie publique" où un invité doit expliquer qu'il s'est "reconnecté avec lui-même" par la pratique intensive d'une activité physique. Je ne regarderai pas mais c'est pour dire...)

Enegoid
participe avec force d'âme et générosité
participe avec force d'âme et générosité
Messages : 452
Enregistré le : 10 févr. 2007, 00:00

Messagepar Enegoid » 09 juin 2008, 21:54

...aumarteau a écrit :Dans quelle mesure les participants de ce forum DEDIE A SPINOZA, c'est à dire aux les lecteurs du TRACTATUS POLITICUS (?), ont un impact sur l'organisation de notre société?
En d'autres termes, existe-il sur ce site une véritable volonté de puisssance, ou est-ce simplement un site que des névrosés utilisent pour satisfaire de manière détournée, et au moyen de la plume virtuelle, leurs pulsions réprimées?


Merci, cher intervenant nouveau et tonitruant, de me donner l’occasion d’un (modeste) « coming out ».


Oui, je l’avoue, je suis névrosé (je parle pour moi, évidemment), et je ne cherche pas à avoir un impact sur la société en participant à ce forum.

Souvent, je me donne des claques, en constatant que mon esprit n’a rien de mieux à faire que de se préoccuper de choses aussi ésotériques que la question de savoir s’il existe des essences singulières, ou s’il existe une hiérarchie réelle des êtres humains, voire des êtres humains par rapport aux moules. Il y a certainement beaucoup de choses plus utiles (pour qui ?) à faire…
Mais c’est ma nature, et j’y trouve malheureusement du plaisir. Qui cela pourrait-il gêner ?
De plus, j’avoue un péché mortel (du point de vue Spinoziste) : je suis parfois triste, voire plus. Alors, décortiquer ce qu’a pu dire le philosophe de la joie, ça m’intéresse…

Quant à avoir un impact sur l’organisation de la société : vous voulez rire, sans doute…enchaînement des causes et des effets, et voilà tout. Mettre un grain de sel la dedans : on en est tous là, à le vouloir. Si on le veut, il faut accepter le bain dans la piscine des passions. Passé un certain âge, on se lasse (mais il me paraît indispensable de le faire quand on est jeune !)

Quant à la société (mais c’est un autre débat), je pense que les corps et les esprits s’adaptent à l’évolution technologique (le tigre dans le moteur). Point final.
(Spinoza a dit que l’on avait déjà tout inventé en matière d’organisation sociale : pourquoi ne pas faire comme lui ?)

Avatar du membre
hokousai
participe avec force d'âme et générosité
participe avec force d'âme et générosité
Messages : 4105
Enregistré le : 04 nov. 2003, 00:00
Localisation : Hauts de Seine sud

Messagepar hokousai » 09 juin 2008, 23:19

à Enegoid


.
D'accord, vous voyez les choses à ce niveau.

Je commentais UNE phrase de Spinoza .

Mais Spinoza ne parle pas(in fine ) d'esprits supérieurs , il parle du sage qui est fort et vaut mieux que l'ignorant .

Dans le scolie /pro p13/ 2 il parle de reconnaitre la supériorité d’un esprit sur les autres ( peut être parle-t- il de l’esprit humain comparé à l’esprit des animaux )

La phrase intrigante de ce scolie est celle ci """et ensuite voir la raison qui fait que nous n’avons de notre corps qu’une idée tout à fait confuses "";
il semble que plus l’esprit est apte à comprendre de manière distincte moins il est capable de connaître le corps
il y a comme l’introduction d’un clivage irréductible entre le corps et l’ intelligence des choses de la substance corporelle (des notions communes en particuliers )

on est très loin du gymnaste .(et même à l opposé )

Enegoid
participe avec force d'âme et générosité
participe avec force d'âme et générosité
Messages : 452
Enregistré le : 10 févr. 2007, 00:00

Messagepar Enegoid » 10 juin 2008, 18:37

La phrase intrigante de ce scolie est celle ci """et ensuite voir la raison qui fait que nous n’avons de notre corps qu’une idée tout à fait confuses "";
il semble que plus l’esprit est apte à comprendre de manière distincte moins il est capable de connaître le corps


Oui : intrigante.

Définition 7 : "...Si plusieurs individus concourent à une seule action, étant ainsi tous à la fois cause d'un seul effet , je les considère tous, du moins sous ce rapport comme une seule chose singulière.


Quand j'agis, mon corps est une chose singulière composée de nombreux corps, muscles et organes, etC. qui concourent à une même action.
Donc l'esprit associé à mon corps considéré comme assemblage de corps n'a de cet assemblage qu'une connaissance confuse.

Quand j'agis, mon corps, considéré comme partie du monde, d'un groupe social, etc. a une connaissance d'autant plus claire des choses qu'il a à connaître, que son action est indépendante des contraintes des autres corps. (C'est un plaidoyer explicite pour la connaissance de l'ermite !) Plus mon corps est engagé dans une action qui le dépasse (rôle dans la société ...) et moins il a une connaissance claire des choses connues par l'"esprit " de la société, vue en tant que corps.

Avatar du membre
LaPhilosophieAuMarteau
passe occasionnellement
passe occasionnellement
Messages : 33
Enregistré le : 08 juin 2008, 00:00

Messagepar LaPhilosophieAuMarteau » 11 juin 2008, 01:25

A ...goid,

C'était un simple question. Pas une attaque.

De ce fait, concernant tes occupations, l'utilité de celles-ci ainsi que ta nature, je ne vois pas pourquoi tu sembles avoir besoin de te justifier.

Etre triste, ce n'est simplement qu'une réaction physico-chimique. Et en bon lecteur de Spinoza, tu devrais savoir que le reproche, le blâme et ce genre de choses n'ont pas de sens.

Enfin, une névrose est la satisfaction de pulsions sexuelles réprimées par des voies détrounées. Nous sommes tous névrosés...

Ton discours semble être le produit d'une volonté de puissance déclinante. Tient bon.

Avatar du membre
nepart
participe avec force d'âme et générosité
participe avec force d'âme et générosité
Messages : 172
Enregistré le : 07 déc. 2007, 00:00

Messagepar nepart » 20 juin 2008, 12:22

Louisa a écrit :A Nepart

Peut-on dire que par "vouloir que les gens sont aussi puissant que nous", tu veux notamment dire "vouloir qu'ils réussissent aussi bien que nous"?

Si oui, on pourrait par exemple, en tant qu'étudiant, souhaiter d'une part que tous obtiennent un résultat égal au nôtre (si j'ai 16/20, je désire que tout le monde ait 16/20), mais en souhaitant cela, je perds la Joie d'avoir un résultat plus élevé que les autres, donc de mieux réussir, d'être plus puissant. Par conséquent, je suis tiraillé entre deux désirs qui s'opposent, et qui dès lors exigent des actions différentes:

- si je souhaite que tous obtiennent 16, je dois partager mes notes, donner des explications à ceux qui étaient absents au cours, etc.

- si je souhaite être le premier (ou parmi les premiers) de la classe, il vaut mieux ne pas trop aider les autres, car alors je risque que certains obtiennent une meilleure cote que moi.

La question est alors de savoir ce qu'il faudrait faire, d'un point de vue spinoziste, sachant que l'un exclut l'autre.


ayant entre-temps un peu réfléchi à ce problème, voici une première tentative de réponse.

D'abord, comme l'a déjà suggéré Enegoid, on peut immédiatement commencer à faire tout pour aider ceux dont on sait que même avec de l'aide, ils n'obtiendront jamais notre niveau de résultats (je suppose un instant qu'il s'agisse d'une moyenne de 16, mais n'importe quelle moyenne au-dessus de 12 permettra déjà d'illustrer l'idée de base).

Quant à ceux dont on sait qu'ils auront facilement 16 ou plus: il y en a souvent parmi eux qui sont très généreux, qui partagent déjà tout eux-mêmes, qui peuvent t'offrir une aide "morale" pendant la période des examens, te donner de bons conseils etc. Il est évident qu'essayer de les aider maximalement toi aussi sera alors précisément ce qui te donne le même genre d'aide "en retour", aide dont tu as même besoin pour avoir un résultat le plus élevé possible. Ici aussi, il est utile pour toi-même d'aider maximalement les autres. Dans ce cas, probablement celui qui a réellement le plus de capacités aura le plus de points, ce qui n'est qu'une situation "honnête".

Le dilemme ne se pose donc que dans le cas où ceux qui sont capables d'avoir plus de 16 pour l'une ou l'autre raison sont assez "égoistes", et ne partagent rien eux-mêmes. Que faire alors?

Je crois que d'un point de vue spinoziste, on ne sait pas ne pas faire ce qui est le plus utile pour soi-même. Si les autres transforment la situation en un genre de "compétition" pour être le premier, quitte à se servir de moyens peu honnêtes, bon, dans ce cas c'est chacun pour soi, donc il vaut mieux ne pas trop partager non plus. Eventuellement c'est cela qui serait le plus raisonnable/"rationnel". Car Spinoza dit en tout cas qu'il vaut mieux refuser les bienfaits des "ignorants", et ceux qui ne sont pas capables de créer des liens d'amitié et d'aide mutuelle envers des étudiants avec qui ils sont dans la même classe, en ce sens sont bel et bien des "ignorants", incapables de comprendre le grand intérêt de l'amitié et de la concorde. Il vaut toujours mieux de continuer à essayer de les aider, bien sûr, mais uniquement pour ces choses qui ne mettent pas trop ta propre position en danger.

Enfin, encore une fois, ceci n'est qu'une première tentative de réponse. Toute critique est la bienvenue.


Même en aidant, ceux qui nous ne serrons jamais aussi bon que nous, on réduit l'écart entre nous et les autres, dont on devient moins, plus puissant qu'eux...

On abouti donc au fait que l'on ne peut répondre à ces 2 besoins, et qu'il faut répondre à celui qui nous procurerai le plus de plaisir (je deviens hédoniste :D ).

Avatar du membre
Louisa
participe avec force d'âme et générosité
participe avec force d'âme et générosité
Messages : 1725
Enregistré le : 09 mai 2005, 00:00

Messagepar Louisa » 23 juin 2008, 04:14

Nepart a écrit :Même en aidant, ceux qui nous ne serrons jamais aussi bon que nous, on réduit l'écart entre nous et les autres, dont on devient moins, plus puissant qu'eux...

On abouti donc au fait que l'on ne peut répondre à ces 2 besoins, et qu'il faut répondre à celui qui nous procurerai le plus de plaisir (je deviens hédoniste ).


aussi longtemps que tu optes pour un hédonisme "sur le long terme", je crois que d'un point de vue spinoziste il n'y a aucun problème, au contraire! :D

Or justement, ce "hédonisme à long terme" implique nécessairement que tu comprends que "se lier d'amitié" à un maximum de gens, ou, exprimé dans le langage ordinaire, essayer d'aider un maximum de gens, c'est exactement ce qui augmente réellement et maximalement, sur le long terme, ta propre puissance de penser et d'agir. C'est pourquoi les deux besoins (bien compris) ne s'excluent pas mutuellement.

Vouloir avoir une grande puissance est un besoin propre à tout être humain. Mais dès qu'on se penche sur la question de savoir comment l'obtenir, on voit qu'on a vraiment besoin de vivre dans une Cité où les gens soient le plus intelligent possibles, car alors ils vont le plus aider les autres, et ainsi "souder" la communauté constituée par cette Cité. Et plus la Cité est puissante, moins qu'elle court le risque d'être détruite, de l'intérieur ou de l'extérieur. Par conséquent, moins nous courrons nous-mêmes le risque d'être privé de choses essentielles pour notre bonheur.

Autrement dit: c'est parce que l'homme est un "animal social", et partant a besoin d'un environnement cognitif et affectif "constructif", qui lui permet maximalement de s'épanouir soi-même, qu'il doit s'employer lui-même à augmenter la puissance et l'intelligence de ses co-citoyens. Car plus ceux-ci sont heureux, plus ils éprouveront le même désir de se lier d'amitié à un maximum de gens.

Le désir de tout faire pour aider l'autre (aussi appelé "charité", dans le spinozisme) est donc par là inscrite au coeur même de la "béatitude" ou du bonheur suprême qu'un individu peut obtenir. Une fois que l'on a bien compris cela, les deux "besoins" dont tu parles ne s'opposent plus: plus les autres deviennent puissants, au sens spinoziste du terme, plus ils t'aideront à devenir à ton tour plus puissant.

Pour moi, c'est l'essence même du libéralisme économique qui est ainsi sapé de tout fondement: ce n'est PAS la concurrence qui in fine augmente la puissance d'une société, c'est la collaboration. C'est peut-être assez contre-intuitive, à notre époque, où des l'âge le plus tendre on essaie de nous motiver à travailler en nous promettant une position socialement "meilleure" que les autres (devenir le premier à l'école, par exemple).

Mais pour Spinoza la plus grande motivation se trouve bien plutot dans le fait de ressentir la Joie même de comprendre. Car cela seul peut constituer un "moteur" suffisamment puissant pour que l'enfant apprenne à désirer apprendre toute sa vie. Dans l'autre cas, donc dans le cas où la motivation passe par la comparaison avec les autres, l'enfant voudra simplement obtenir plus tard une position sociale que d'autres "glorifient" maximalement, il voudra simplement être "meilleur" que les autres. Ce qui revient à donner la plus grande importance à ce que Spinoza appelle "l'honneur", celui-ci étant hélas un Bien tout à fait périssable et fort changeant, contrairement au Bien que constitue la Joie de comprendre.

Conclusion: soyons hédonistes en effet, mais alors hédonistes "à fond", c'est-à-dire en tenant compte de ce qui nous procurera le plus de bonheur sur le long terme!


Retourner vers « Spinozisme pratique »

Qui est en ligne

Utilisateurs parcourant ce forum : Aucun utilisateur enregistré et 10 invités