Failles spinozistes

Questions et débats touchant à la conception spinozienne des premiers principes de l'existence. De l'être en tant qu'être à la philosophie de la nature.
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hokousai
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Messagepar hokousai » 26 mars 2011, 14:33

cher Henrique

Je ne confonds pas "étendue" et espace(cf Newton). Disons que je parlais le langage ordinaire (et volontairement dans message ci dessus).

Je vous fais part d' idées qui viendraient à l'esprit de correspondants intéressés par la philosophie mais qui n' auraient pas acquis tel vocabulaire précis issu de tel système philosophique précis .Vos élèves par exemple .

Je vous fais part d'une opinion ordinaire:
1) aucun corps ne limite les autres corps de telle manière qu'il soit lui même non limité par d'autres corps .
2) le monde des corps n'a pas de limites assignable dans le temps d' existence des corps étendus, antérieurement et postérieurement.

Voila, c'est plus technique, mais c'est la même chose .
............................................................................

J'ai aussi tenté (20/03/2011 01:24) de faire une démonstration de l' étendue comme attribut de Dieu .( je me cite )

Que Dieu soit une chose étendue Spinoza ne le démontre pas, du moins renvoit-il à la démonstration de Dieu comme chose pensante.
Ainsi on peut admettre qu'un corps (tous les corps singuliers) enveloppent ( non pas le concept par lequel ils se conçoit )mais la corporéité par laquelle il est un corps.
La corporéité étant éternelle et infinie.


1) Si nous avons l'idée générale de corporétité ( nommée étendue ) nous devons attribuer l' existence aux idées générales ( dits: universaux ). C'est le prix à payer pour admettre la validité ontologique du concept d 'attribut .
2)L'idée générale de corporéité n' implique pas l’infinité. Du moins pas pour tout le monde. On sait bien que pour Aristote le monde des corps était fini .
Pour Kant on a d' ailleurs là la première des antinomies de la raison pure. ......................................................

Vous me dites que rien n’empêche de faire de même pour la pensée . Certes, mais de fait l'expérience intime la plus commune sans l'empêcher en contrarie fortement le désir.
Estimer que la nature toute entière pense alors que je n'ai l' expérience que d'une pensée limitée (la mienne et médiatement celle d'autrui ) c'est faire un saut dans la croyance pour ne pas dire la foi.

Ainsi Ulis peut-il me dire que son spinozisme est matérialiste et qu' importe s' il est tronqué .
........................................................

Faites de même pour la pensée : une idée peut être limitée par une autre


Autant je ne peux imaginer de bordures/limites / frontières à l'étendue autant lors qu'il agit de penser je suis bien contraint de reconnaître que de temps en temps et même assez souvent je perds cette conscience de penser si chère à la pensée puisque c'est là le lieu où elle se connait comme existante.

Ainsi est-ce que je pense encore quand je ne me sais plus penser ?
Le commun des mortels vous dira que bien avant que d être mort il cesse parfois de penser.

bien à vous
hokousai
...................................

PS: vous pouvez avoir l'infinité au sein de structure finie ( un segment de droite par exemple ). Ainsi ma pensée peut être infinie mais cesser.

Je peux même avoir l'idée de l' infini et puis ne plus l'avoir. Cette idée n'est bornée par aucune autre (théoriquement) et pourtant elle disparaît de mon champ de conscience.
Comment se fait -il que je ne sois pas absorbé absolument par cette idée de Dieu ?

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Henrique
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Messagepar Henrique » 26 mars 2011, 19:13

Hokousai,
Vous voulez que Spinoza parte des présupposés de la pensée et de l'expérience communes. Effectivement, il ne le fait pas. Mais ça ne fait pas une faille dans son système. Il n'y a aucune croyance dans ce que je vous ai dit, seulement un enchaînement logique de concepts. On peut reprocher à cet enchaînement d'être "contre-intuitif" parce qu'il va contre l'expérience commune, mais pour cette expérience, nous pouvons vouloir une chose plutôt qu'une autre sans cause, la terre est immobile, le soleil est plus petit que notre planète, un élément matériel est soit corpusculaire, soit ondulatoire etc. L'expérience commune n'est jamais qu'une représentation partielle et souvent confuse de ce qui peut exister.

Quant à l'expérience d'une perte temporaire de conscience pendant le sommeil, cela peut faire une difficulté au principe d'une pensée infinie mais ce n'est pas une faille. Je vous répondrai tout de même que si la pensée est tout ce qui peut résider "dans" notre conscience, cela ne veut pas dire qu'en dehors de la conscience il n'y a aucune pensée. Si vous restiez toujours immobile, vous n'auriez pas conscience de votre corps ou du moins très faiblement, pourtant votre corps n'en serait pas moins étendu. De même que les corps sont faits de mouvement et de repos, les idées finies, comme notre esprit, sont faites d'entendement et d'ignorance. En phase de sommeil, l'ignorance l'emporte sur l'entendement dans l'esprit. S'il n'y avait qu'ignorance dans votre esprit, comme ce doit être le cas pour l'esprit d'une pierre, vous n'auriez pas conscience de votre esprit même, il n'en serait pas moins pensant comme votre corps reste étendu alors qu'il est au repos.

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Messagepar hokousai » 26 mars 2011, 20:06

cher Henrique

Je vous ai dit que j' empruntais des arguments et que je les empruntais à ce qui me semble être la pensée non pas commune, mais du sens commun .
Louisa me reproche souvent de me faire l'apologiste du bon sens . Il y a de ça chez moi, je fus un lecteur émerveillé d' Austin .
.............................................

Mais pour en revenir à Spinoza, je pense qu'il part d'une expérience de pensée ordinaire ,celle de l'absolument inconditionnée. Cette expérience de pensée est celle de Dieu, du Dieu des monothéismes, celle du brahmanisme, mais celle aussi des naturalismes matérialistes .

Ce que fait Spinoza c'est de réintroduire les corps (l'étendue ) dans l absolu inconditionné , ce qui (de mon pt de vue) est très judicieux .
Il tient dans une seule pensée le théisme, le matérialisme et in fine toute interprétation possible ( infinité des attributs ).
On a une vraie totalité .
..........................................

Je maintiens qu 'attribuer l'existence à une caractères général ( un universel ) est une croyance .
On a fait plus que gloser des siècles de scolastiques durant, sur l'existence ou non de la caballéité .
Spinoza se méfie des universaux mais généralise les pensées singulières en un attribut celui de la pensée .
...........................................

Sur la pensée

Vous supposez que je pense quand je ne pense pas consciemment . Je ne sais( au sens strict ) quoi vous dire de ce qui se passe et qui soit du même ordre que la pensée ( si c'est possible ) quand je ne pense pas .
Si vous voulez maintenir un panpsychisme il faut élargir l' idée de pensée (le sens de ce concept ) à plus que la pensée consciente d elle même .

Mais là vous marchez sur des œufs . Vous n'avez pas d' expérience de pensée qui alimente le concept. Il faut recourir à la spéculation sur par exemple la forme des corps. Ce qui nous ramène dans les parages d' Aristote.

bien à vous
hokousai

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Messagepar Ulis » 26 mars 2011, 22:34

@Hokousai
Vous me dites que rien n’empêche de faire de même pour la pensée . Certes, mais de fait l'expérience intime la plus commune sans l'empêcher en contrarie fortement le désir.
Estimer que la nature toute entière pense alors que je n'ai l' expérience que d'une pensée limitée (la mienne et médiatement celle d'autrui ) c'est faire un saut dans la croyance pour ne pas dire la foi.

Ainsi Ulis peut-il me dire que son spinozisme est matérialiste et qu' importe s' il est tronqué .


.

Précisément, le statut d'attribut à la pensée me paraît (entre autres) être contestable car elle ne concerne que le corps humain. Comment "attribuer" à l'homme, qui n'est pas un empire dans un empire un attribut (pensée) qui le singularise (le déifie) parmi l'infinité étendue des corps. Une immensité de corps, une pensée humaine (encore que certains hommes ne pensent pas) et 2 attributs ?
Ce n'est plus observer l'homme du point de vue de dieu ce que prétend faire le monisme de Spinoza.

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Messagepar hokousai » 27 mars 2011, 00:57

cher Ulis

Si j ai bien compris, vous estimez que seul l' homme pense et encore pas tous. Mais ai -je bien compris ?

Remarque de ma part : ne pensez -vous pas que notre pensée va bien au delà de notre corps tel que perçu ici et maintenant dans sa corporéité naturelle et communément reconnue ?
(en gros ce qui n excède pas les limites de ma peau)

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Messagepar Ulis » 27 mars 2011, 19:16

Cher Hokousai,

Si j ai bien compris, vous estimez que seul l' homme pense et encore pas tous. Mais ai -je bien compris ?

En vérité, je crois aussi que les animaux, et peut-être tous les êtres vivants "pensent" mais que tous peuvent "exister" sans la pensée puisqu'elle est manifestement liée à certaines parties du corps dont l'ablation la supprime sans supprimer le corps.
ne pensez -vous pas que notre pensée va bien au delà de notre corps tel que perçu ici et maintenant dans sa corporéité naturelle et communément reconnue ?

Je crois que la pensée est une extension du corps qui n'est pas distincte de lui et dont la stratégie est sa conservation.

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Messagepar hokousai » 28 mars 2011, 00:48

à Ulis

Une extension manifeste puisque nous pouvons penser à l'étoile polaire ...alors qu' une pierre ne le peut .

On devrait alors lier la pensée à toutes ces sensations qui nous font nous étendre hors du corps (par la pensée).

Spinoza est assez réticent sur la perception. Berkeley (qui lui est postérieur) en fait le fondement de la pensée ( même abstraite ).

Pour Spinoza ce que nous percevons indique plus l'état de notre corps que l' état du monde.
Il y a une défiance chez lui (comme chez Descartes ) par rapport à la perception, aussi accorde- t- il toute l'importance à l' idée adéquate.

Mais si nous attribuons la pensée aux animaux, et néanmoins qu' on ne puisse guère leur attribuer le concept, il faut que notre idée de la pensée soit étendue à ce que nous propose la perception.

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Messagepar aldum » 28 mars 2011, 11:10

si la pensée est un attribut infini de Dieu, elle est partout ou nulle part; comment dès lors en faire l'exclusivité du vivant? En associant irréductiblement pensée et conscience ? Mais il faut définir d'abord « conscience » et « être vivant » ; et pour définir, il faut rapporter d'abord le terme à d'autres concepts; mais ces concepts- conscience, vie- ne sont-ils pas réductibles à rien d'autre qu'eux mêmes? Peut-on en dire autre chose que « la conscience c'est la conscience » et « la vie c'est la vie », de façon immédiate et strictement intuitive ? L'une et l'autre me semblent être, comme le pensait Hume, des forces de la nature dont les effets nous sont connus, mais dont l'essence nous reste incompréhensible; nous ne pouvons associer entre eux de façon exclusive du reste du réel pensée, conscience et vivant que de façon empirique, par rapport à notre stricte expérience immédiate. C'est un choix: admettre la logique démonstrative de Spinoza, ou vouloir la faire entrer absolument dans nos schémas de pensée formatés par notre seule expérience. La raison humaine peut-elle tout comprendre, ou faut-il admettre, que ce « qui est à jamais inintelligible, c'est que le monde soit intelligible »


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