Connaissance du troisième genre

Questions et débats touchant à la conception spinozienne des premiers principes de l'existence. De l'être en tant qu'être à la philosophie de la nature.
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hokousai
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Messagepar hokousai » 12 déc. 2011, 00:48

à recherche

J' attends le jour où on m'expliquera ce que c'est qu' une certaine part d'indéterminisme. J'ai déjà beaucoup de mal à comprendre le déterminisme ( qui semble le plus facile des deux ).
J' entendais, il y a peu, un physicien s' extasier sur la mesure très précise du temps. On nous dit que le temps sera mesuré de plus en plus précisément ( on espère bien !). Prodige mathématique.
Qu'est- ce que je pense quand je fais des mathématiques ? Je n'ai rien contre Les mathématiques mais savoir ce que je pense quand j' en fais.
La physique quantique voyez -vous, pour moi , c'est l'albatros de Baudelaire.

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bardamu
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Messagepar bardamu » 13 déc. 2011, 00:55

recherche a écrit :Ce bout d'article me semble fautif.

La partie importante est "tant que n'intervient pas un processus de mesure".
recherche a écrit :Que dire des "variables cachées non locales" ?
Je ne suis pas assez calé pour m'y avancer.

En 50 ans, elles n'ont rien apporté. Une des théories les plus évoluée, dérivée de celle de Bohm, est encore plus ésotérique que la quantique normale, elle ne donne aucun résultat nouveau et a bien du mal à retrouver les résultats standards.
Globalement, il a été démontré que pour retrouver ces résultats, il fallait une théorie non-locale et contextualiste.
Contextualiste signifie que le système expérimental est compris dans la théorie, qu'on ne dit pas : "un photon est là" mais "un détecteur électromagnétique a fait bip".

La non-localité est d'ailleurs peut-être impliquée dans le contextualisme : quand le système est "étoile - filtre - cache à 2 fentes - plaque photographique", on traite l'ensemble du système de manière holiste, sans se soucier des distances. Que la source lumineuse soit une ampoule électrique dans un labo ou une étoile à 10 milliards d'années-lumière est considéré de la même manière, donne le même résultat. Ce qui compte c'est la logique du système source-appareils intermédiaires (polariseur, écran avec fente etc.)-détecteur.

Il faut bien saisir que la quantique n'est pas foncièrement "mécanique" dans sa manière de traiter le système expérimental, qu'elle ne se base pas sur l'idée d'un continuum spatio-temporel qu'on parcourrait de proche en proche. C'est plus une logique dispositionnelle, une définition des choses en terme de rapport les uns par rapport aux autres, d'effet général sur un résultat de mesure.

Un peu de théâtre, dialogue autour d'une inondation :

Fiction, hypothèse : soit l'espace-temps comme le sol d'un appartement inondé avec de l'eau qui circule de-ci de-là et qui se met à couler à l'étage en-dessous où deux physiciens, Einstein et Bohr, observent avec attention le plafond.

Einstein : mon cher Bohr, je vous assure qu'on peut rendre ce plafond transparent, et voir la circulation de l'eau pour avoir la description complète des gouttes qui tombent.

Bohr : je crains hélas que le plafond ne reste opaque et qu'on doive se contenter d'établir les probabilités qu'une goutte tombe, sans savoir exactement ce qu'il se passe à l'étage du dessus.
Ce n'est pas parce que dans un coin du plafond (gamme d'expérience), on a suffisamment de fuites pour penser les choses comme à notre étage, une mare avec des ondes dans l'eau ou des gouttes roulant ici ou là, qu'on doit en déduire que c'est pareil au-dessus. D'ailleurs dans tel coin du plafond (autre gammes d'expériences), on ne voit pas ça (inégalités d'Heisenberg), ça arrive goutte à goutte et notre théorie permet de rendre compte de ces gouttes qui se forment (mesures) et finissent par faire des taches, des figures d'interférences etc.
Alors bien sûr, on ne prétend pas dire ce qu'il se passe là-haut et on se contente de dire comment est notre plafond (construction expérimentale), ce qu'il laisse passer comme gouttes et comment il le fait. Et certes, on le fait avec ce système bizarre qui ne donne que des probabilités qu'une goutte tombe à l'instant t sur un endroit donné, mais enfin, on connaît suffisamment notre plafond pour savoir au moins qu'en tel endroit il donnera finalement telle figure et en tel endroit telle autre figure.

Einstein : on ne va quand même pas se contenter de ça ! Dieu ne fait pas son déluge à coup de dés !

Bohr : Einstein, ne dites pas à Dieu comment il doit nous inonder ! Et tiens, passez-moi l'éponge, ça nous fera une belle gomme quantique. En la collant-là, je vais empêcher une figure d'interférence sans voir de goutte ni empêcher l'eau de couler. Marrant, non ? Ah, tiens, v'là Aspect, il tombe bien.

Alain Aspect arrive en tenue de maçon, échelle, ciment et truelle à la main

Aspect : Bonjour messieurs. Il paraît que vous avez besoin de moi.

Bohr : oui, jeune homme. Je voudrais que vous montriez à Mossieur Einstein que si on colle un peu de ciment ici et là, alors il sera pas capable de décrire ce qu'il se passe avec sa théorie.

Aspect : Ok, no problemo.

Aspect fait le boulot et tout le monde attend la série de gouttes d'eau. Pendant ce temps, Bohr fait ses petits calculs, dessine le plafond et en tire des conséquences sur les gouttes qui vont tomber. Einstein un peu agacé, ne prend même pas la peine de faire ses calculs de mécanique aquatique. Les gouttes tombent quelques minutes et...

Bohr, montrant sa courbe : alors, qui c'est qui a raison ?

Einstein : je sais bien que je peux pas y arriver, je sais bien que ça marche votre... machin, mais bon, quand même. C'est pas parce qu'on sait comment se comporte le plafond qu'on plâtre soi-même qu'on sait ce qu'il se passe là-haut.

Bohr : peut-être, mais on sait au moins ça.

Un autre physicien, Bohm, entre en pataugeant.

Bohm : Salut. Vous savez quoi Einstein, je sais comment expliquer ce bordel de gouttes qui tombent n'importe comment : en fait, au-dessus, il y a une gamine cachée, la petite Variable, fille de Dieu, et il faudrait réussir à la joindre pour qu'elle nous dise comment c'est. J'suis sûr que c'est possible, regardez, j'ai construit une super théorie pour la joindre.

Bohr : tsss... arrêtez le délire. Qu'est-ce que ça changera de toute manière puisque ma théorie dis déjà comment tombent les gouttes ?

Einstein : ouais, mais elle dit pas exactement quand et où...

Bohr : et ça change quelque chose à l'usage du plâtre et de la serpillère ?

Bohm : mon cher Bohr, vous êtes un triste sire. Et l'idéal de la science alors ? Vous verrez, un jour on pourra percer le plafond, et on verra bien.

Bohr : percer le plafond ? Bonjour la noyade...

L'eau monte, le grand Witten arrive vêtu de ses jambières de mathématicien.

Witten : Hello, ça éponge ? Alors, vous savez ce qu'il se passe là-haut ?

Einstein, Bohr, Bohm, Aspect en coeur : une inondation !

Witten : Non les gars, j'ai une autre hypothèse : pas une inondation, des inondations ! Eh oui, ça vient de plusieurs étages tout ça, des dimensions supplémentaires, c'est sûr. Il n'y a pas d'autre moyen d'expliquer tout ça. Vous verrez, un jour, avec un bon jet d'eau dans le plafond, bien puissant, on verra qu'il y a un autre plafond au-dessus.

Bohm : c'est justement ce que je disais à Bohr. On finira bien par le crever ce plafond.

Soudain, un choc à la porte, et un type aux cheveux longs entre en maillot de bain, faisant difficilement passer sa planche de surf.

Einstein : Spinoza, mon pote ! Qu'est-ce que tu fais là ?

Spinoza : c'est un tsunami votre affaire, une bonne vague et me voilà chez vous ! Alors, vous en êtes où ?

Einstein : on se demande ce qu'il se passe là-haut. Moi, je dis que c'est comme ici, qu'il y a de l'eau qui coule comme ici, ça me semble raisonnable. T'en penses quoi ?

Spinoza : tu sais, moi, je sais pas trop. Ce que je sais, c'est qu'on vit les pieds dans l'eau. Je sais aussi avec certitude que mon corps debout sur un surf déplace une masse d'eau suffisante pour le fun. Et puis, la Nature étant infinie, c'est sûr qu'il y a plus que ce qu'on voit et qu'on sait. Mais bon, déjà, on se dit spontanément qu'on regarde un plafond, c'est-à-dire qu'il y a un étage au-dessus, mais qui sait, c'est peut-être juste une éponge géante, à l'infini.

Bohr : ça spécule, ça spécule... L'Einstein croit toujours voir à travers les murs, Bohm cherche des anges, Witten se demande dans combien d'étages ils vivent et maintenant l'éponge géante. Manque plus que Hawkings pour nous expliquer qu'on vit dans une énorme goutte d'eau non-apparue ex-nihilo ! Heureusement qu'Aspect est là pour mettre un peu de ciment dans les têtes.

Spinoza : ah ! ah ! Mon bon Bohr, faut rêver un peu, on sait jamais. L'éponge géante, c'est pour dire qu'il ne faut pas croire mais savoir. Rien ne vaut une hypothèse pour mettre en doute une autre hypothèse. Je fais tout le temps ça avec le vieux Boyle et ses histoires de chimie.
Mais bon, je repars, la vague n'attend pas. N'oubliez pas de vous mettre à l'eau de temps en temps, à défaut de tout comprendre, appréciez ce que vous comprenez.

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Ne pas confondre genre de connaissance et amour de dieu !

Messagepar Lemarinel » 16 févr. 2012, 22:45

Il y a bien un lien étroit entre les deux notions dans la 5ème partie de l'Ethique, mais on ne saurait confondre la science intuitive et l'amour intellectuel de Dieu. La science intuitive est un genre de connaissance, le 3ème pour Spinoza car le plus adéquat; alors que l'amour intellectuel de Dieu est une affection (la plus joyeuse et libératrice qui soit). Or autre chose est un genre de connaissance, et autre chose est une affection.

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Messagepar hokousai » 17 févr. 2012, 01:22

Il y a bien un lien étroit

ah bonne question!
Oui ou non , lequel et comment le dire . Mais là il est tard.

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Messagepar 8 » 17 févr. 2012, 07:16

il n'y a pas que l'espace qui est infini, le temps qui passe est lui aussi infini.Si la température passe en dessous de zéro le plafond cesse de couler mais la ou les fuites ne seront pas réparés pour autant si de nouveau la température passe au dessus de zéro le gel aura causé des dégâts plus important et le plafond coulera encore plus.Rien de permanent dans tous cela.les infinis attributs de la substance de Dieu s'expriment d'une façon éternelle (et infini).

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Pas d'indéterminisme chez Spinoza!

Messagepar Lemarinel » 17 févr. 2012, 14:33

Le Spinozisme est un déterminisme intégral qui ne laisse place à aucune ombre ou trace d'indéterminisme. Aussi Spinoza pourrait-il dire avec Einstein, qu'il n'a évidemment pas connu, que "Dieu ne joue pas aux dés". Comme vous le rappelez, l'indéterminisme est une thèse de la physique quantique ; or Einstein est un physicien classique (le dernier), un physicien relativiste et non point quantique; et quant à Spinoza, il n'a même pas connu Newton par rapport au modèle duquel Einstein s'est tant éloigné en proposant un modèle relativiste de courbure d'espace-temps, et non plus de gravitation universelle. Il est probable que Spinoza à notre époque verrait d'un mauvais oeil les soupçons d'indéterminisme à l'échelle de l'infiniment petit parce que sa philosophie toute entière est un déterminisme, au point de vue de Dieu (cause libre) comme au point de vue des hommes (causes nécessaires). Même Dieu, en tant que causa sui, n'échappe pas au déterminisme en ce qu'il se détermine lui-même, alors ne parlons pas d'indéterminisme à l'échelle des modes infiniment petits... Au sujet d'Einstein, on peut lire "Einstein philosophe" de Michel Paty (Belles lettres) et "la relativité" de Nayla Farouki, disciple de Michel Serres (Dominos Flammarion).


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