Le « parallélisme » : une erreur de Spinoza ?

Questions et débats touchant à la conception spinozienne des premiers principes de l'existence. De l'être en tant qu'être à la philosophie de la nature.
Règles du forum
Cette partie du forum traite d''ontologie c'est-à-dire des questions fondamentales sur la nature de l'être ou tout ce qui existe. Si votre question ou remarque porte sur un autre sujet merci de poster dans le bon forum. Merci aussi de traiter une question à la fois et d'éviter les digressions.
Avatar du membre
hokousai
participe avec force d'âme et générosité
participe avec force d'âme et générosité
Messages : 4105
Enregistré le : 04 nov. 2003, 00:00
Localisation : Hauts de Seine sud

Messagepar hokousai » 04 juil. 2012, 20:53

Non. On peut très bien avoir là un effet d'interaction entre modes sans pour autant faire remonter la subjectivité / objectivité à la nature naturante.
Le parallélisme concerne la nature naturée ( me semble- t -il ). Cela dit les modes de la nature naturée sont ceux d' un attribut ou d' un autre.
S' ils ne sont pas actualisés parallèlement vous être obligé d introduire de la causalité entre les attributs . Ou bien comme je le dis de n'avoir qu'un seul attribut . Et pourquoi plus la pensée que la matière ? Les physicalismes de tout temps s évertuent à nous dire qu' il n y a que de la matière ( voir Diderot et son spinozisme aménagé ).

Avatar du membre
hokousai
participe avec force d'âme et générosité
participe avec force d'âme et générosité
Messages : 4105
Enregistré le : 04 nov. 2003, 00:00
Localisation : Hauts de Seine sud

Messagepar hokousai » 05 juil. 2012, 00:07

cher Serge

Je vous disais
Les corps interagissent et les idées d' autres part interagissent.
S'il y a une idée de l'arbre dans la nature , elle interagit avec une idée de l' affection du corps voyant l'arbre .


Vous me répondez que"<b> cela semble plus complexe</b> chez Spinoza : les corps interagissent, mais par exemple une idée de choc de deux corps n'est pas le "choc" des deux idées des deux corps".

Bien sûr que les idées ne s'entrechoquent pas , la pensée comprend l'interaction par la causalité.
Quelle que soit l' origine de cette idée( critiquée par Hume) et même si la pensée refusait d'attribuer une efficience( cause efficiente) à l' idée précédente elle a au moins le sens d' un ordre de l'enchainement ( comme il ya un ordre de l'enchainement des chocs dans l'étendue )
.....................................................
Quand je dis que il y a une idée de l'arbre dans la nature ,qu' elle interagit avec une idée de l' affection du corps voyant l'arbre, c' est que l' arbre est ( censée être) pensé par Dieu ( qui pense beaucoup de chose mais en ce qu'il ne constitue pas l'esprit humain). L' idée de cet arbre ( qui est un corps précis dans l'étendue ) n' est pas dans l'esprit humain quand l' homme ne voit pas l' arbre
L'idée de l'arbre perçu qu' a l' esprit humain quand il voit cet arbre interagit avec une idée qui n'est pas dans<b> l'esprit humain comme idée des affects du corps</b> . Car l'arbre là bas n' est pas un affect du corps propre . Ce qui me fait dire que la psyché sort de l'esprit humain .

pour resumer: si l'arbre au fond du jardin est pensé par Dieu et s'il est pensé par l'esprit humain, il faut que l' idée dans l'esprit interagisse avec l' idée de l' arbre, idée extérieure à l'esprit humain. Ce qui signifie que l'esprit humain quand il perçoit le monde est<b> expansé</b> au delà des idées des affections de son corps propre. Expansion inconsciente .

Je ne peux m' expliquer autrement la prop16/2
<b>" l'idée d' une quelconque manière dont le corps humain est affecté par les corps extérieurs doit envelopper la nature du corps humain et en même temps la nature du corps extérieur "</b>

C'est<b> l'enveloppement de la nature du corps extérieur</b> qui pose problème .
Vous le maintenez toujours à l'extérieur . On est pas avec Spinoza dans la représentation chère à Schopenhauer( me semble- t- il )

Avatar du membre
sescho
participe avec force d'âme et générosité
participe avec force d'âme et générosité
Messages : 1127
Enregistré le : 30 mai 2002, 00:00
Localisation : Région Centre
Contact :

Messagepar sescho » 05 juil. 2012, 15:30

hokousai a écrit :
Ou faut-il dire que le récepteur fait alors là partie de sa nature ? Si oui, quelle pertinence reste-t-il à le considérer en propre ?

oui et il n'y a pas de pertinence à le considérer en propre .


Remarques préliminaires : pour éviter tout malentendu, précisons que, sauf erreur, en l'absence de réaction chimique interne, à part les corps luminescents dans le spectre visible et en particulier phosphorescents, ou d'une température suffisamment élevée pour rayonner dans le visible, un corps n'émet pas de lumière visible mais ne fait que la réfléchir ou l'absorber (en fonction de la longueur d'onde) ; il n'est donc pas lumineux "en lui-même" ; c'est la lumière qui est lumineuse par définition... Cependant, tout corps rayonne (en particulier dans l'infra-rouge) - je laisse de côté les trous noirs... - Ceci montre bien que la structure particulière de l’œil est plus ou moins en cause dans tous ces termes (y compris "lumière".) Elle l'est aussi pleinement en termes de couleur : c'est l’œil qui perçoit en couleur ; un rayonnement électromagnétique n'a pas de couleur en soi. Nous sommes bien en plein dans le problème...

Votre position se défend certainement, mais alors de quel monde visible même sans œil pour le voir parliez-vous plus haut ?

Est-ce que la seule chose qui reste n'est pas : il y a de l'être qui se pose là (la formule est trop compliquée, mais bon...) ? On peut ajouter : "varié" et "en mouvement."

Ne faut-il pas en déduire que tout modèle qui postule une séparation entre modes est voué à l'échec ? En particulier, tout modèle qui pose une séparation sujet-objet (qui semble pourtant quelque part naturelle) n'est-il pas voué de la même manière à l'échec ?
Connais-toi toi-même.

Avatar du membre
sescho
participe avec force d'âme et générosité
participe avec force d'âme et générosité
Messages : 1127
Enregistré le : 30 mai 2002, 00:00
Localisation : Région Centre
Contact :

Messagepar sescho » 05 juil. 2012, 16:41

hokousai a écrit :Le parallélisme concerne la nature naturée ( me semble- t -il ). Cela dit les modes de la nature naturée sont ceux d' un attribut ou d' un autre.

"Parallélisme" n'étant pas un terme de Spinoza, tout dépend de ce qu'on entend par-là. Mais à la base il s'agit bien de la nature naturante : les attributs sont ceux de la substance substrat même, pas des modes : ils sont la substance même... vue par l'entendement suivant une dimension particulière de l'être... Ils ont individuellement toutes les propriétés d'une substance, et c'est par eux uniquement qu'une substance est perçue (c'est seulement parce que Dieu est défini a priori comme absolument infini qu'ils passent du statut de substances à celui d'attributs de l'unique substance ; Dieu est de son côté l'affirmation a priori de l'unité de l'être sous toutes ses formes perçues par l'entendement.) Les attributs, qui sont sensés ne rien avoir en commun, sont les substrats de mondes parallèles (qui n'en font qu'un...) : il est donc normal de placer le terme "parallélisme" à leur niveau.

Au niveau des modes, il s'agit plutôt de "miroir", mais il est une conséquence du parallélisme : il s'agit dans tous les cas de la seule et unique nature divine, donc les modes se correspondent "en miroir" : il n'y a qu'une seule structure modale, mais exprimée dans chacun des attributs (mondes) en parallèle...

hokousai a écrit :S' ils ne sont pas actualisés parallèlement vous être obligé d introduire de la causalité entre les attributs . Ou bien comme je le dis de n'avoir qu'un seul attribut . Et pourquoi plus la pensée que la matière ? Les physicalismes de tout temps s évertuent à nous dire qu' il n y a que de la matière ( voir Diderot et son spinozisme aménagé ).

Au niveau de la substance substrat même (par définition ; à l'échelle du mode humain, c'est différent), il n'y a qu'un seul attribut, et donc pas d'attribut (j'insiste : pour moi, si c'est "un seul", la notion même n'a plus de sens, étant entendu que par "unique substance" j'entends bien "un Être qui se pose là", pas un pur concept.)

Je pourrais presque admettre de l'appeler "matière" (mais je préfère nettement "énergie cosmique"), car elle apparaît bien présente partout (mais voir le dernier lien ci-dessus : les fluctuations quantiques du vide : de la matière ?), mais ce qui pend naturellement à cette approximation lorsqu'elle est imaginée être connaissance absolue est "la ruine de l'âme" : la perte de vue de l'enjeu éthique (bien réel, lui-aussi.) Il n'y a pas plus grande déchéance, par définition ; c'est dire l'enjeu de bien parler...

Base-t-on une vie réussie sur exclusivement l'analyse de la nature matérielle de la psyché ? Autant dire : sur une âme en plomb, qui ne peut faire que couler... (bon, c'est tellement idiot - et qui dit "analyse" dit "pensée" - que c'est impossible à tenir en réalité, et heureusement pour le sujet.) C'est tout le contraire : de grands sages n'y connaissaient rien et n'en avaient rien à cirer, et étaient bien de grands sages, de l'avis de tous. La pire ruine est l'ombre du "matérialisme."

La pensée reste la pensée, comme la vue reste la vue : personne qui ne voit ne peut dire ce qu'est la vue, personne, quand-bien même manierait-il les meilleures équations du monde. La science physique ne remplacera jamais la science de l'esprit, même si elle peut aussi apporter quelques indications (mais on s'en sortirait pas plus mal sans, comme on l'a fait, de fait, pendant des millénaires.)

Comme la vue et/ou le toucher qui la révèlent, ce que nous appelons "matière" est une vue subjective (pensée) d'une réalité qui la dépasse ; à ce titre il lui est interdit de couvrir la pensée même, qui appartient à cette même réalité, de fait (au niveau modal.)

Finalement l'enjeu n'est pas là : c'est un faux problème qu'on se pose une fois qu'on a fait l'erreur de séparer ce qui ne peut pas l'être. Il faut trouver autre chose. L'Être d'abord, en tout cas, c'est certain, comme l'a voulu Spinoza, ce qui ne peut être contredit sans déchoir, de mon point de vue. Mais pas le parallélisme des attributs...
Connais-toi toi-même.

Avatar du membre
sescho
participe avec force d'âme et générosité
participe avec force d'âme et générosité
Messages : 1127
Enregistré le : 30 mai 2002, 00:00
Localisation : Région Centre
Contact :

Messagepar sescho » 05 juil. 2012, 19:22

hokousai a écrit :Bien sûr que les idées ne s'entrechoquent pas , la pensée comprend l'interaction par la causalité.
Quelle que soit l' origine de cette idée( critiquée par Hume) et même si la pensée refusait d'attribuer une efficience( cause efficiente) à l' idée précédente elle a au moins le sens d' un ordre de l'enchainement ( comme il ya un ordre de l'enchainement des chocs dans l'étendue )

J'aurais pu glisser sur ce sujet, en fait, car autant l'avouer je me représente très mal ce que Spinoza voit concrètement comme monde pensé en Dieu (et comme notre entendement n'a pas plus de rapport à l'entendement divin que le chien, animal aboyant, etc. ...)

Voyait-il quelque chose de précis lui-même (et ce aussi avec un entendement qui n'a pas plus de rapport...) ? Dieu ne conçoit rien par abstraction et voit les choses telles qu'elles sont... C'est quoi exactement l'idée d'un cercle en Dieu, idée qui n'a ni centre ni circonférence (certes en tant qu'idée, mais en tant que représentation) ?

Par ailleurs l'entendement infini est éternel et donc immuable : pas de causalité transitive là, car pas de transition... Pas de temps (sauf en ce qui concerne l'actualisation des idées concomitantes à l'actualisation des corps... E2P8...)

Est-ce autre chose, actualisé, qu'une vision globale (de type pensée humaine ?) de tous les corps en interaction (E2P3-4) ; E2P7 se réfère certes à la cause, mais tout laisse à penser qu'il s'agit avec E1A4 de causalité immanente (ou raison : la seule vraiment défendable ; la causalité transitive - ou l'interdépendance dans l’Étendue en Mouvement, plus juste - apparaissant seulement dans E1P28.) Dans ce cadre, l'idée cause englobe l'idée effet, et autre chose, interactions et déformations comprises ; et c'est bien ce qui ressort de l'usage de E2P9.

Bref...

hokousai a écrit :... si l'arbre au fond du jardin est pensé par Dieu et s'il est pensé par l'esprit humain, il faut que l' idée dans l'esprit interagisse avec l' idée de l' arbre, idée extérieure à l'esprit humain. Ce qui signifie que l'esprit humain quand il perçoit le monde est<b> expansé</b> au delà des idées des affections de son corps propre. Expansion inconsciente .

Hum... Il y a le plan divin et le plan du mode fini humain. Spinoza dit : Dieu pense dans un même ensemble l'arbre, le corps humain et l'interaction entre les deux (en passant : par le truchement de l'onde électromagnétique du spectre visible à l’œil humain réfléchie par l'arbre...) Par ailleurs, l'idée d'une affection du corps humain (par exemple) est attachée en Dieu même à l'idée même du corps humain et seulement elle (...) L'âme humaine est à la base l'idée du corps humain, et par conséquent de toute affection du corps humain (E2P12-13 avec E2A4.) Mais cette idée est néanmoins co-générée par l'objet extérieur, toute affection du corps humain soit-elle : c'est donc, du fait de l'attachement au seul corps humain malgré l'interaction, une idée tronquée, un aboutissant sans (tous) les tenants : une idée inadéquate... En passant, E2P19 finit par dire que l'âme ne connaît le corps QUE par les affections du corps humain (par une démonstration que je ne perçois pas clairement.)

hokousai a écrit :C'est<b> l'enveloppement de la nature du corps extérieur</b> qui pose problème .
Vous le maintenez toujours à l'extérieur . On est pas avec Spinoza dans la représentation chère à Schopenhauer( me semble- t- il )

Je pense que si : une représentation (dans mon esprit sinon celui de Schopenhauer que je ne connais que très partiellement) ce n'est pas le corps humain seul, c'est une affection du corps humain par un corps extérieur dans une interaction, mais évidemment ressentie du seul côté corps humain. L'étanchéité entre corps n'existe pour personne dans ce cadre (et heureusement, car cela n'existe pas du tout) : c'est un extérieur relatif, entre modes dit "finis", mais qui ne sont que des phénomènes au sein de l’Étendue infinie, autrement dit des modes d'expression en interdépendance et impermanence perpétuelles de l’Étendue en Mouvement. Nous touchons là au fond du problème : la relation sujet/objet n'est pas, et ne peut pas être, une séparation ; une distinction (altérité, ...) est néanmoins perceptible au sujet (mais des humains accomplis peuvent dire que leur esprit contient / est le monde... puis vous serrer la main en vous disant au revoir...)

Sinon, pour redire le fond de ma pensée : Spinoza pose simplement, et d'une façon qui me semble naturelle, les bases empiriques de la connaissance par E2P19-31 ; la plupart des propositions qui précèdent dans E2 et la complexité éventuelle des démonstrations ne sont dues qu'à une chose : gérer les conséquences du parallélisme posé a priori...
Modifié en dernier par sescho le 05 juil. 2012, 19:46, modifié 2 fois.
Connais-toi toi-même.

Avatar du membre
hokousai
participe avec force d'âme et générosité
participe avec force d'âme et générosité
Messages : 4105
Enregistré le : 04 nov. 2003, 00:00
Localisation : Hauts de Seine sud

Messagepar hokousai » 05 juil. 2012, 19:35

Votre position se défend certainement, mais alors de quel monde visible même sans œil pour le voir parliez-vous plus haut ?


J' admets tres bien que sans ( dans la nature ) aucun appareil sensoriel sensible à la lumière alors le monde n'est pas vu, ce qui ne signifie pas qu'il nest pas visible <b>quand il est vu</b>. Donc il n"est pas visible en soi mais actuellement losrqu' il est vu .
Pour Spinoza ce qui demeure en soi ( me semble t-il) c'est effectivement les <b>mouvements</b> (dans l' étendue) .
...............................................
Les attributs, qui sont sensés ne rien avoir en commun, sont les substrats de mondes parallèles (qui n'en font qu'un...) : il est donc normal de placer le terme "parallélisme" à leur niveau.

à mon avis non. S' il n' y a pas les manières des attributs ( nature naturée ) alosr il n' y a pas de parallélisme .
C 'est une question qui semble vous préoccupper mais je ne vois pas bien votre problème.

Peut être compréhensible par ce que vous dîtes là

<b>Au niveau de la substance substrat même (par définition ; à l'échelle du mode humain, c'est différent), il n'y a qu'un seul attribut, et donc pas d'attribut </b>

Mais alors là vous n' êtes plus spinoziste . Et nous sommes à l' opposé parce que moi c'est l idée de substance qui fait problème et non pas celle d 'attributs .

Mais je veux bien admette <b>substance</b> comme la physique qui ne peut guère se passer de l 'éther ou d' une idée analogue .(au pire celle du vide, par exemple !!!)
J' entendais hier Etienne Klein faire cet énoncé très problématique du moins pour un spinoziste
maintenant la <b>masse physique des objets </b> ....
"la masse ( des choses ) c'est une propriété qu' elles héritent du fait qu elles interagissent avec le vide."

interaction avec le vide !!! audacieux / pas très clair http://www.franceculture.fr/2012-07-05-higgs-la-revolution-du-boson
Modifié en dernier par hokousai le 06 juil. 2012, 14:09, modifié 1 fois.

Avatar du membre
sescho
participe avec force d'âme et générosité
participe avec force d'âme et générosité
Messages : 1127
Enregistré le : 30 mai 2002, 00:00
Localisation : Région Centre
Contact :

Messagepar sescho » 06 juil. 2012, 10:09

hokousai a écrit :J' admets tres bien que sans ( dans la nature ) aucun appareil sensoriel sensible à la lumière alors le monde n'est pas vu, ce qui ne signifie pas qu'il nest pas visible <b>quand il est vu</b>. Donc il n"est pas visible en soi mais actuellement losrqu' il est yu .

J'ai l'impression que dans ces conditions, il y a un mot de trop. Pourquoi ne pas simplement dire que "l'arbre est vu" (ce qui contient en soi une relation sujet / objet) ? Pourquoi vouloir apposer "visible", qui laisse précisément entendre que cela englobe une propriété de l'objet indépendamment du sujet ? Par exemple si je dis : "l'arbre dont je parle est bien visible" je l'entends qu'il y ait quelqu'un qui le regarde actuellement ou pas (point qui en l'occurrence est parfaitement trivial), ceci tout en sachant qu'il ne peut être vu que par un œil. Et effectivement, sauf évènement particulier, la personne verra bien aisément l'arbre où je lui ai indiqué (mais j'admets en même temps que ce n'est pas sûr, reposant sur la mémoire d'une vision passée.) Ce qui reste au fond est que, en état de perception, quoique l'arbre ne soit perçu qu'au travers d'un arsenal perceptif particulier / subjectif, je ne doute pas qu'il s'agisse d'un étant réel (Spinoza utilise très justement cette expression quelque part.) Et c'est pourquoi, d'après ce que vous en avez dit, même Berkeley admet que les choses resteraient (en quelque nature nouménale que ce soit) même si toute conscience disparaissait de la manifestation. On ne peut sans doute pas dire "visible", du fait de l'absence de l'arsenal perceptif particulier englobé là-dedans et ici supposé absent, mais "étant" oui. La perception de l'être est l'élément constant, que ce soit par la vue ou par autre chose, et comprend une idée de permanence de l'être indépendante de cette perception même (c'est pourquoi je ne doute pas que le monde reste en l'absence de conscience.)

hokousai a écrit :S' il n' y a pas les manières des attributs ( nature naturée ) alosr il n' y a pas de parallélisme .

Il y a les manières des attributs de toute façon, mais le parallélisme est bien constitué au niveau des attributs de la substance, donc de la nature naturante (il est en fait directement lié à la notion même d'attribut), et le "miroir" en est la conséquence au niveau des manières :

Spinoza a écrit :E2P7S : ... tout ce qui peut être perçu par une intelligence infinie, comme constituant l’essence de la substance, tout cela appartient à une substance unique, et, par conséquent, que la substance pensante et la substance étendue ne font qu’une seule et même substance, laquelle est conçue tantôt sous l’un de ses attributs et tantôt sous l’autre. De même, un mode de l’étendue et l’idée de ce mode ne font qu’une seule et même chose exprimée de deux manières. ...


hokousai a écrit :moi c'est l idée de substance qui fait problème et non pas celle d 'attributs .

Les attributs SONT des substances en instance "immédiate". Version de l'Éthique de 1663 :

Spinoza a écrit :Par substance, j’entends ce qui est en soi et est conçu par soi, c’est-à-dire ce dont le concept n’enveloppe pas le concept d’une autre chose. Par attribut, j’entends exactement la même chose, avec cette seule différence que l’attribut se rapporte à l’entendement, en tant qu’il attribue à la substance telle nature déterminée.

L'origine de substance est très claire : posant que ce qui est clair et distinct pour moi est vrai (difficile de faire autrement, mais le nœud du problème est quand-même lié à cela), je constate que je forme des notions en faisant référence à d'autres notions (par exemple un corps est une manière d'être étendu), et des notions (les plus amont, donc) qui se supportent elles-mêmes, sans faire appel à aucune autre notion (par exemple, l'être-étendu est - soit l’ "Étendue est", mais la notion d'attribut est déjà implicitement introduite dans cette seconde façon de l'écrire.) Étant (réputé) clair et distinct, ceci est tout simplement vrai. Si on me demande ce qui cause l'être-étendu, je réponds : rien, il est, point (il existe donc nécessairement.) Il est conçu par soi, en soi, voire à la rigueur "cause de soi."

Le problème est que ce faisant j'ai deux substances (Descartes) : l'être-étendu et l'être-pensé. Or d'un autre côté, il y a manifestement un lien entre "ma" pensée et "mon" corps, ce qui contredit cela : en effet, une substance se concevant par elle-même, elle n'a rien de commun avec une autre. Spinoza dit : la solution c'est qu'en fait l'être-pensée et l'être-étendu sont une seule et même substance... mais vue par l'entendement sous deux angles différents...

Cette substance unique (et c'est d'elle dont je parle en disant "la substance" ; il ne s'agit évidemment plus du concept général de substance de E1D3) je l'appelle "Dieu" (ou "PenMat", ou "l'Être", ou ...), de laquelle j'affirme a priori tous les attributs (Spinoza ne le dit pas comme cela, et c'est un problème, mais c'est bien ce qu'il veut dire.) Comme je définis Dieu avant toute chose, les substances précédentes ne peuvent être que des attributs de Dieu.

Pour l'essentiel, cette position est très supérieure à celle de Descartes en ce qu'elle unifie la Nature (Dieu), mais en fait elle ne résout pas le problème initial : les attributs restent comme des substances, n'ayant aucun rapport entre eux, etc. Spinoza définit l'attribut par l'entendement, mais là-aussi se voit la racine du problème : il ne dit pas si c'est l'entendement humain (c'est en fait forcément au moins le cas, puisqu'il s'adresse au lecteur), ou un supposé entendement divin...

La notion d'attribut ne se justifie QUE parce que l'on a placé plusieurs substances - en parallèle, et alors seulement appelées "attributs" - "à l'intérieur" d'une substance "chapeau" unique, comme étant cette substance même, mais néanmoins "face" particulière de cette substance... Elle implique le parallélisme.

Si vous me dites "il n'y a qu'un seul attribut", je vous réponds donc en toute conséquence (c'est évident par ce qui précède) : alors vous anéantissez la pertinence de la notion d'attribut même. Il n'y a plus aucune raison d'introduire cette notion : la substance unique, Dieu, PenMat, l'Être, ... est, point.

Le cœur du problème - et effectivement vous ne semblez pas faire de différence - est : la distinction pensée-matière est-elle au niveau de la nature naturante même (les attributs sont la nature naturante, qui est seule substance, quand bien même leurs modalités existeraient de toute éternité en elles), ou seulement au niveau de la manifestation ? Voilà ce qui perturbe tout le monde au sujet du parallélisme (par des objections souvent recevables, ou des distorsions destinées à conclure que l'entendement divin est la somme des entendements humains, etc.)

Vous voyez, entendez, touchez, sentez, goûtez, avez conscience de la durée, faim, soif, ... Faites-vous pour autant de tout cela des attributs de l'unique substance (et effectivement, voir détermine plutôt la notion d’Étendue, et toucher la notion de Matière) ? Non.

Eh bien la question se pose, quoique de façon plus délicate, aussi pour la conscience. Et par ailleurs le parallélisme des attributs de l'unique substance de Spinoza ne tient pas l'examen...

hokousai a écrit :interaction avec le vide !!! audacieux / pas très clair

Comme pour le bouddhisme, le "vide" n'est pas ici le néant. Ce n'est pas le "vide" de Spinoza, qu'il définit comme néant de l'étendue, et dont la réalité contesterait l'infinité de l’Étendue ; ceci tout en se référant à l’Étendue, négativement, n'étant rien de positif en lui-même (ce qui est inacceptable pour la pure affirmation, et la totale affirmation d'être qu'est Dieu-Nature.)

En fait cela me semble confirmer de manière fantastique et presque incroyable ce qu'en dit Spinoza : même ce que nous appelons espace vide (mais néanmoins étendu) n'est pas le néant !!!
Connais-toi toi-même.

Avatar du membre
hokousai
participe avec force d'âme et générosité
participe avec force d'âme et générosité
Messages : 4105
Enregistré le : 04 nov. 2003, 00:00
Localisation : Hauts de Seine sud

Messagepar hokousai » 06 juil. 2012, 14:45

si je dis : "l'arbre dont je parle est bien visible" je l'entends qu'il y ait quelqu'un qui le regarde actuellement ou pas (point qui en l'occurrence est parfaitement trivial), ceci tout en sachant qu'il ne peut être vu que par un œil.

Je pense que si l' arbre n'est pas vu ( si aucun appareil sensoriel de la vision n'existe dans la nature ) alors aucun arbre n 'est visible, ni ne sera, ni ne l'a jamais été .

Pourquoi vouloir apposer "visible", qui laisse précisément entendre que cela englobe une propriété de l'objet indépendamment du sujet /

La propriété de l' objet n'est pas indépendante de rien du tout .
Il ya un évènement perceptif qui enveloppe le sujet et l'objet .
ce que dit Spinoza( prop16/2 )
" l'idée d' une quelconque manière dont le corps humain est affecté par les corps extérieurs doit envelopper la nature du corps humain et en même temps la nature du corps extérieur .

Quand je le vois, la nature du corps extérieur est d' être visible ( et pas autre chose ). D' accord que c'est pour moi ( c'est MA * vision de la réalité ) sauf que c'est néanmoins objectif comme relation .

.................................................

La substance et donc l'étendu étant indivisible je doute que Spinoza pense les choses comme limitées en soi . Il n' ya donc pas de choses en soi ( noumènes) chez Spinoza, mais des expressions réelles complètes de ce sont elle sont l'expression.
Si dans l'expression actuelle l'arbre est en <b>relation </b>avec un corps qui le perçoit( le voir ou le toucher ). Il existe sous cette forme d' expression .
Et puis l' arbre existe dans d'autres commerces avec d'autres choses mais ce n'est pas substantiellement<b> le même arbre </b>.
.................................................

Spinoza dit que les choses varient d'une infinité de manières . Ce qui rend le monde à sa réalité et a son objectivité est que les commerces entre les choses sont infiniment variés . Non qu' on ait une infinité de mondes ( pas de pluralité des monde chez Spinoza) mais une nature infiniment variée et variable .
..................................

*Le monde que je perçois a effectivement une part de<b> subjectif</b> en ce que c'est une relation de commerce singulière que j' ai avec cet arbre . La nature actuelle de l'arbre est sous cet aspect singulière comme arbre perçu par moi. Voila pourquoi Spinoza écrit" le corps existe tel que nous le sentons".
Mais on pourrait ajouter que tel corps extérieur existe tel qu'il est senti par dautres choses avec lesquelles il est en relation.

( je lis Spinoza avec un éclairage BerKeléien , <b>certes</b>, mais j' essaie de ne pas trop extrapoler )

Avatar du membre
hokousai
participe avec force d'âme et générosité
participe avec force d'âme et générosité
Messages : 4105
Enregistré le : 04 nov. 2003, 00:00
Localisation : Hauts de Seine sud

Messagepar hokousai » 06 juil. 2012, 14:57

En fait cela me semble confirmer de manière fantastique et presque incroyable ce qu'en dit Spinoza : même ce que nous appelons espace vide (mais néanmoins étendu) n'est pas le néant !!!

je voudrais bien savoir où Spinoza évoque un milieu amorphe/ homogène/ inactif sur lequel se déploieraient les modifications de l'étendue, car c'est à cela qu' Etienne Klein pense ..." imaginez un champ de neige" .

Avatar du membre
sescho
participe avec force d'âme et générosité
participe avec force d'âme et générosité
Messages : 1127
Enregistré le : 30 mai 2002, 00:00
Localisation : Région Centre
Contact :

Messagepar sescho » 06 juil. 2012, 20:17

hokousai a écrit :Quand je le vois, la nature du corps extérieur est d' être visible ( et pas autre chose ). D' accord que c'est pour moi ( c'est MA * vision de la réalité ) sauf que c'est néanmoins objectif comme relation .

D'accord, c'est bien ce que j'ai conclu plus haut : volumique, dur, odorant, bruyant, savoureux, ... quelque part on s'en fout : ce qui reste c'est que l'objet est perçu en acte, comme étant réel ; il n'est pas plus spécialement visible qu'autre chose, mais ce qui est sûr c'est qu'il est, et perçu comme étant (et j'ajoute qu'on voit bien effectivement une face de son être.)

Mais quand-même, du coup, l’Étendue, qui apparaît suivre de la vision...

hokousai a écrit :La substance et donc l'étendu étant indivisible je doute que Spinoza pense les choses comme limitées en soi . Il n' ya donc pas de choses en soi ( noumènes) chez Spinoza, mais des expressions réelles complètes de ce sont elle sont l'expression.

Pour moi "nouménal" ne renvoie pas à une chose en soi (par opposition à une chose en Dieu-Nature), mais à une chose telle qu'elle est par opposition à ce que nous pouvons en percevoir ("tout ce qui existe et que la sensibilité ne peut atteindre") - on peut dire éventuellement "une chose telle qu'elle est en soi", mais cela ne veut pas pour autant dire qu'il s'agit d'une "chose en soi." Cela n'a rien à voir avec une question de divisibilité de la substance, mais du côté partiel de la perception du canevas modal à un instant donné dans la substance.

hokousai a écrit :Si dans l'expression actuelle l'arbre est en <b>relation </b>avec un corps qui le perçoit( le voir ou le toucher ). Il existe sous cette forme d' expression .
Et puis l' arbre existe dans d'autres commerces avec d'autres choses mais ce n'est pas substantiellement<b> le même arbre </b>.

Ce qui est est. Dieu-Nature n'a qu'un être, lui-même, et la réalité nouménale et Dieu de font qu'un. C'est absolu et non relatif.

hokousai a écrit :Ce qui rend le monde à sa réalité et a son objectivité est que les commerces entre les choses sont infiniment variés . Non qu' on ait une infinité de mondes ( pas de pluralité des monde chez Spinoza) mais une nature infiniment variée et variable .

Certes, mais la nature de Dieu-Nature est une et immuable (éternelle.) C'est pourquoi précisément se pose la question de distinguer la nature de Dieu de la nature d'une perception modale "partielle", donc de ne pas faire attribut de Dieu-Nature ce qui n'est que de l'ordre de la perception partielle.

hokousai a écrit :*Le monde que je perçois a effectivement une part de<b> subjectif</b> en ce que c'est une relation de commerce singulière que j' ai avec cet arbre . La nature actuelle de l'arbre est sous cet aspect singulière comme arbre perçu par moi. Voila pourquoi Spinoza écrit" le corps existe tel que nous le sentons".

Je rappelle que E2P13C n'est utilisé que marginalement dans un scholie : E2P17S, pour justifier un modèle mécanique de la mémoire, par "Or, il ne peut plus nous être permis de mettre l’expérience en doute, du moment que nous avons montré que le corps humain existe tel que nous le sentons (voir le Corollaire de la Propos. 13, partie 2)." Cela lui confère une portée faible, outre que l'usage n'est pas immédiat : il s'agit d'expérience alors que le libellé porte sur la nature du corps même. C'est plus une conséquence a priori du parallélisme qu'autre chose, me semble-t-il, et le scholie qui suit est d'ailleurs assez "mesuré" ; il comprend en particulier "... apercevoir aussi pour quelle raison nous n’avons de notre corps qu’une connaissance très confuse...", outre par ailleurs E2P25 : "L’idée d’une affection quelconque du corps humain n’enveloppe pas la connaissance adéquate du corps extérieur", et E2P27 : "L’idée d’une affection quelconque du corps humain n’enveloppe point la connaissance adéquate du corps humain."

Bref, personnellement, je ne vois pas qu'il faille en faire plus de cas que cela... Maintenant, oui, il reste que nous percevons bien objectivement de l'être étendu, et il suffit de regarder ou toucher, etc. autour de soi pour voir avec quel clarté nous le percevons, toute limitée cette perception serait-elle en regard de la réalité nouménale, ou par ailleurs de l'expérience microscopique assistée, par exemple.
Connais-toi toi-même.


Retourner vers « L'ontologie spinoziste »

Qui est en ligne

Utilisateurs parcourant ce forum : Aucun utilisateur enregistré et 78 invités