Il n’y a PAS de « modes infinis médiats » chez Spinoza !

Questions et débats touchant à la conception spinozienne des premiers principes de l'existence. De l'être en tant qu'être à la philosophie de la nature.
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Messagepar Vanleers » 24 juin 2013, 16:31

A sescho

Vous avez écrit, dans votre premier message sur ce fil :

« 4) Lu simplement et donc sans complications inutiles, le scholie de E1P28 indique qu’il n’y a rien entre les modes infinis (« immédiats ») et les modes finis (choses particulières, ou « singulières » en acte.) »

Bien que cela soit un peu long (et me prenne un certain temps pour le taper), je cite Sévérac qui défend, avec arguments à l’appui, une analyse de ce scolie différente de la vôtre, (op. cit. pp. 69-71) :

« Pour en saisir le sens, commençons par expliciter à quoi le scolie fait référence lorsqu’il parle des « choses produites par Dieu immédiatement ». Si l’on entend cette formule par réflexe plutôt que par réflexion, on pense alors (immédiatement…) aux modes infinis immédiats : Dieu en est la cause absolument prochaine, alors qu’il ne l’est point des choses singulières. Cette compréhension du scolie néanmoins se heurte au sens de la première phrase : Spinoza y distingue-t-il les modes infinis immédiats, et ceux qui, par l’intermédiaire de ces premiers (mediantibus his primis), sont produits par lui, à titre donc de modes infinis médiats ? Pourquoi le ferait-il, d’ailleurs, dans un scolie se préoccupant d’expliciter le rapport entre Dieu et les choses singulières, entre l’infini substantiel et le fini modal ? La distinction que présente cette première phrase paraît bien plutôt renvoyer aux deux conséquences qui suivent dans le scolie : 1) des choses immédiatement produites par lui, Dieu est cause absolument prochaine ; 2) des choses singulières, il est cause relativement lointaine (il n’est pas absolument cause lointaine, mais il l’est par comparaison avec les premières).
Pour faire la lumière sur ces difficultés, il faut ici être attentif à une formule qui explicite, par deux fois, ce que signifie être « immédiatement » produit par Dieu : c’est suivre « de sa nature absolue (ex absoluta natura) ». Cette expression apparaît pour la première fois dans les propositions 21 et 23 d’Ethique I, consacrées en même temps que la proposition 22 à la déduction des modes infinis.
La proposition 21 pose que tout ce qui suit de la nature absolue d’un attribut divin est nécessairement éternel et infini. L’éternité et l’infinité sont des propriétés communes à Dieu et à certains modes, désignant une certaine façon d’exister (sur l’infinité, voir E I 8 sc. 1 et sur l’éternité voir E I déf. 8). Si ce qui suit de la nature absolue d’un attribut divin était fini et temporel, il serait déterminé par une autre chose, finie et temporelle, et donc ne serait pas déterminé absolument par l’attribut divin, mais de façon relative seulement.
Les propositions 22 et 23 posent ensuite que tout mode suivant d’un attribut modifié par un mode éternel et infini est lui aussi éternel et infini, et que réciproquement tout mode éternel et infini nécessairement suit soit de la nature absolue d’un attribut divin, soit de cet attribut modifié par une modification elle-même éternelle et infinie. Et la fin de la démonstration de la proposition 23 donne une précision cruciale pour notre propos :

« Un mode qui existe et de façon nécessaire et comme infini, a dû suivre DE LA NATURE ABSOLUE de quelque attribut de Dieu, et ce ou bien IMMEDIATEMENT (à ce sujet prop. 21), ou bien par la MEDIATION de quelque modification, qui suit de sa nature absolue. » (mis en majuscules par Sévérac)

Un mode éternel et infini peut donc suivre de la nature absolue de Dieu par la médiation d’un autre mode, qui lui-même suit de la nature absolue de Dieu. Cette médiation ne peut être celle d’un mode fini, ce qui contredirait la proposition 21 ; c’est nécessairement celle d’un mode lui-même éternel et infini. Il faut donc bien saisir ce que signifier considérer « la nature absolue d’un attribut » : non pas nécessairement la considérer comme non modifiée, non relativisée par un mode (si tel était le cas, seul le mode infini immédiat dériverait d’une telle nature) ; mais la considérer en soi, sans la rapporter à une autre chose que soi. Ainsi, la nature absolue de l’attribut de la pensée infinie est, nous l’avons vu, la pensée infinie pure, sans considération d’un objet. Ce n’est pas la pensée de quelque chose, contrairement à l’idée de Dieu (son entendement), qui est la pensée infinie considérée en rapport avec son objet.
Par conséquent, de la nature absolue d’un attribut se déduit une infinité de choses (elles-mêmes nécessairement infinies et éternelles). Suivre de la nature absolue d’un attribut divin caractérise d’abord le mode éternel et infini immédiat, mais aussi tout mode éternel et infini non immédiat.
Cette remarque textuelle que nous avons faite sur la démonstration de la proposition 23 est d’importance, car elle nous permet non seulement de mieux saisir le sens du début du scolie de la proposition 28, mais surtout de mettre en question ce que la plupart des commentateurs acceptent comme une évidence : à savoir qu’il n’existe que deux modes éternels et infinis par attribut, l’immédiat et le médiat. En effet, dans les propositions 21 à 23, Spinoza distingue bien deux types de modes éternels et infinis : ceux qui sont produits immédiatement, ceux qui sont produits par la médiation d’autres modes – mais ces autres modes, qui suivent de la nature absolue de Dieu, ne sont pas nécessairement immédiats ! Pourquoi n’y aurait-il que deux modes éternels et infinis par attribut ? Ce chiffre a quelque chose d’arbitraire, et même de troublant : à quelle logique obéit-il, Pourquoi deux, et pas trois ou quatre ? Pourquoi même un nombre fini de modes infinis ? Nulle part Spinoza ne l’affirme : il dit bien qu’il ne saurait y avoir, par définition, qu’un seul mode éternel et infini immédiat par attribut, mais pas que seul un tel mode est productif d’un autre mode éternel et infini. Non seulement il se peut, d’après la lettre des textes, qu’il n’y en ait pas que deux (1) ; mais de surcroît cela est même nécessaire, puisque « rien n’existe, sans que de sa nature ne suive quelque effet » (E I 36) ! Un mode éternel et infini, parce qu’il n’est pas immédiat, n’en devient pas pour autant stérile : comme toute chose, il produit des effets ; et ces effets sont nécessairement des modes eux-mêmes éternels et infinis.

(1) Même la proposition 21 est formulée avec un pluriel (omnia), de telle sorte que l’on puisse comprendre, après coup, que « toutes les choses qui suivent de la nature absolue de quelque attribut de Dieu » ne se réduisent pas au seul mode éternel et infini immédiat, mais concernent tous les modes éternels et infinis qui appartiennent à cet attribut.

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Messagepar Vanleers » 24 juin 2013, 17:39

A sescho

Vous écrivez :

« L’effet (compris dans sa cause) d’un mode infini (« immédiat ») ce sont tous les « modes finis, » tout simplement, comme l’indiquent tous les extraits précédents par ailleurs… »

Ce qu’écrit Sévérac, à la suite du texte que j’ai cité précédemment est bien plus élaboré mais il serait trop long de rapporter, ici, la dizaine de pages qui en parlent.

Je me contenterai donc d’esquisser sa solution.

Le fini renvoyant nécessairement à du fini, le fini ne se comprend pas directement par l’infini, ce que je commente par : l’effet d’un mode infini ne peut consister dans les modes finis.

La solution de Sévérac consiste à dire que (op. cit. p. 76) :

« Les modes éternels et infinis sont comme la médiation entre Dieu et les choses singulières (temporelles et finies), en tant qu’ils sont eux-mêmes composés de modes éternels.
Nous avons donc :
1) les modes éternels et infinis, produits par la nature absolue de Dieu (ce sont les modes infinis immédiats et médiats). Par exemple, dans l’attribut de la pensée, l’idée infinie qu’a Dieu de lui-même, ainsi que l’amour infini qu’il se porte ;
2) les modes éternels qui sont des parties constitutives de ces modes infinis : par exemple, notre esprit en tant qu’il participe de l’idée infinie de Dieu (c’est-à-dire notre entendement, partie de l’entendement divin) ; ou notre amour intellectuel, en tant que partie de l’amour divin ;
3) les modes singuliers qui sont temporels et finis : par exemple, notre esprit, en tant qu’il a une durée et une puissance de penser limitées »

Sévérac développe une réflexion sur ces « modes éternels qu’on dit finis », riche de conséquences éthiques. Je me contente de citer le passage suivant (p. 75) :

« Ainsi, pour un mode, être une partie de la nature naturée ne saurait signifier nécessairement en être une partie finie.
Certes, on ne dira pas de ces parties qu’elles sont infinies, ni par elles-mêmes, ni même par leur cause : l’entendement humain, l’amour qu’il porte à Dieu, ne sont pas infinis comme l’est l’entendement de Dieu, ou l’amour qu’il se porte à lui-même. Mais en tant qu’ils sont éternels, ces modes ne sont pas bornés, limités, niés. Ils ne sont ni finis (car ils ne sont pas rapportés à ce qui les borne), ni infinis (car ils ne sont que les parties constituantes de modes eux-mêmes infinis). Ce sont seulement des modes éternels, de la pensée, de l’étendue ou de tout autre attribut. »

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Messagepar hokousai » 25 juin 2013, 01:14

à Vanllers

le texte de Sévérac est long je m 'en tient pour le moment à ce qui est dit au début du texte sur le scolie de prop 28/11)
1)des choses immédiatement produites par lui, Dieu est cause absolument prochaine ; 2) des choses singulières, il est cause relativement lointaine (il n’est pas absolument cause lointaine, mais il l’est par comparaison avec les premières).

Non il n'est pas dit dans ce scolie que Dieu soit cause relativement lointaine .
Dire que Dieu est cause lointaine peut se dire peut être pour distinguer l' immédiat du médiat. Du point de vue de la cause Dieu est cause immanente dans les deux cas .
L'absolument ne renvoie pas à la proximité ( conjointe ou moins conjointe ) mais à ce dont elle est la cause Dieu est cause "absolument" prochaine de ce qui est produit immédiatement ( de ce qui suit de sa nature absolue ) et Dieu est cause prochaine de ce qui n'est pas produit immédiatement .
On pourrait à la limite dire que Dieu est pour les choses singulières cause relativement prochaine mais pas "relativement lointaine"
………………………………
bon en fait j' ai continué

deuxième question beaucoup plus difficile à trancher

sur cela

Et la fin de la démonstration de la proposition 23 donne une précision cruciale pour notre propos :

« Un mode qui existe et de façon nécessaire et comme infini, a dû suivre DE LA NATURE ABSOLUE de quelque attribut de Dieu, et ce ou bien IMMEDIATEMENT (à ce sujet prop. 21), ou bien par la MEDIATION de quelque modification, qui suit de sa nature absolue. » (mis en majuscules par Sévérac)

C'est le immédiatement du scolie de la prop 23/qui embarasse .
De mon point de vue
je re pense pas qu'il y ait "médiation". Spinoza ne parle pas de médiation. Un attribut est modifié d 'une modification sans médiation. Il est modifié par nature .
Une modification telle qu'il est dit dans la prop 23/1(et 21/1 et donc 23/1) est quelque chose qui suit de la nécessité absolue de la nature de cet attribut. je veux dire que le statut ontologique de la nature absolue de l'attribut et celui de sa nature modifié est un statut d' équivalence .

et cela parce que l'effet est le même . L' effet c'est existence nécessaire et infinie .

Il n 'y a pas d" engendrement donc de médiation d"une modification qui existe nécessairement et comme infinie.

Dans la dem de la prop 21/1 Spinoza associe l'idée de Dieu et toute chose qui dans l' attribut suit nécessairement de la nature absolue de cet attribut. Spinoza met à égalité ontologique l'idée de Dieu et quoi qu' on prenne dans un attribut de Dieu .

""Un attribut modifié d'une modification qui existe nécessairement et comme infinie ""cela me parait suivre nécessairement de la nature absolue de cet attribut. Les manières qui suivent de la nature absolue on le même statut ontologique que ce soit immédiatement ou moyennement une modification. Il faut rendre compte de cette équivalence elle est supérieure à cette distinction de l'immédiat et du médiat . Pour un même effet il y a une même cause .
..................................
Vous écrivez ( vous ou Sévérac écrit je ne sais pas où s'arrête Sévérac )
Un mode éternel et infini peut donc suivre de la nature absolue de Dieu par la médiation d’un autre mode, qui lui-même suit de la nature absolue de Dieu.

Non pas par la médiation d'un autre mode . On ne peut dire autre chose qu'un mode éternel et infini suit de la nature absolue d 'un attribut .

En gros je veux dire que la modification ( dont on parle ) est immédiate . Quand on me parle d' infini , d'éternité , d 'existence nécessaire infinie et éternelle j' ai du mal à voir un engendrement . Je vois plutôt une coexistence , une statique et pas là une dynamique. C'est mon éternalisme à moi .

Le dynamisme est dans la nature naturée.

ce qui est sans doute critiquable ...mais j' aime bien mon hétérodoxie

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Messagepar Vanleers » 25 juin 2013, 09:54

Il est clair que la proposition E I 28 démontre que seul le fini cause, et est causé par, le fini, dans un enchaînement infini, n’y ayant aucune première cause finie.

En lisant E I 21 à 23, il est naturel de penser que l’infini cause l’infini. Il est en effet plus difficile de comprendre que l’infini puisse causer le fini.
Il est donc naturel de penser que le mode infini immédiat cause un autre mode infini.
Pourquoi le mode infini immédiat ne pourrait-il causer un mode infini et n’avoir pour effet que des modes finis alors que Spinoza, dans les propositions E 22 et 23, nous invite, au minimum, à envisager le contraire ?
Le mode infini immédiat serait donc « sans lendemain » infini !
Les modes finis seraient produits, d’une part, dans un enchaînement infini de modes finis et, d’autre part, par le mode infini immédiat, mais la démonstration d’E I 28 précise qu’un mode fini ne peut suivre « non plus de Dieu, ou d’un certain attribut de Dieu, en tant qu’il est affecté d’une modification qui est éternelle et infinie (par la prop. 22) ».

Je suis perplexe.

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Messagepar sescho » 25 juin 2013, 10:24

Vanleers a écrit :Bien que cela soit un peu long (et me prenne un certain temps pour le taper), je cite Sévérac qui défend, avec arguments à l’appui, une analyse de ce scolie différente de la vôtre, (op. cit. pp. 69-71)...

Je n'ai pas tout lu en détail, mais je vois de quoi il parle vu que cet aspect ne m'avait pas échappé... : le "immédiatement" est apposé et même sous-classé par Spinoza dans E1P28S par rapport à "suivre de la nature absolue de l'attribut", et cette dernière locution apparaît s'appliquer dans E1P23Dm - comme je l'ai moi-même souligné plus haut - à la fois à l'objet de E1P21 ("immédiat") et à celui de E1P22 ("médiat".)

A noter quand-même que ni E1P22 ni E1P23 n'attribuent per se cette locution auxdits "modes infinis médiats." E1P23 apparaît même très explicitement - par soit..., soit... - faire la distinction (tout en mettant en tête le "nécessairement" qui s'imposait alors qu'absent de E1P22.) Il apparaît donc qu'en première intention Spinoza ne l'accorde qu'au premier rang. Il faut attendre la fin de la démonstration de E1P23, qui est supposée conclure en redisant la proposition elle-même, pour en fait trouver quelque chose de modifié par rapport à cette proposition : la présence d'un "suivre de la nature absolue d'un attribut" en tête. En fait, E1P22, contrairement à sa citation ("Prop. précéd."), ne dit rien sur l'équivalence de "suivre de sa nature absolue" et "nécessaire et infini."

Bref..., ceci permet à la rigueur de laisser passer une hypothèse en tirant des bords (mais si l'on continue à passer comme cela dans des trous de souris, on sent bien de plus en plus que c'est à la cave qu'on va : c'est bien trop tortueux et compliqué pour être conforme à la Nature et à l'esprit de Spinoza.)

Toutefois : 1) Cela ne constitue aucunement une preuve. 2) Une lecture simple et directe de E1P28S indique bien qu'il n'y a rien comme modes à part les modes infinis ("immédiats") et les choses particulières. "... I) que Dieu, des choses produites immédiatement par lui, est la cause absolument prochaine..." ne laisse aucun doute sur "la nature d'immédiateté de "immédiatement"" II) ... choses singulières ... 3) Comme je l'ai déjà indiqué : il faut passer tous les "obstacles" sans exception, pas seulement certains. J'ai bien dit en particulier que E1P28S se comprenait parfaitement en combinaison avec le Court Traité : et là, il n'y a aucun "trou de souris" : le CT dit bien qu'il n'y a pas d'autres modes infinis que le Mouvement et l'Entendement infini. Et il reste encore à dire qu'elle est la jonction avec la lettre 64, appuyée sur E2P13L7S, etc. ...
Connais-toi toi-même.

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Messagepar hokousai » 25 juin 2013, 12:55

à Vanleers

Pourquoi le mode infini immédiat ne pourrait-il causer un mode infini et n’avoir pour effet que des modes finis alors que Spinoza, dans les propositions E 22 et 23, nous invite, au minimum, à envisager le contraire ?


Je ne vous dis pas que le texte de Soinoza n 'évoque pas un "moyennement une modification infinie" (c'est évident qu'il le dit sinon il n'y aurait pas tout ce débat).
Mais je dis que ça n'a pas l'importance que vous lui accordez. Qu'elle soit immédiate ou moyennement (vel mediante) cette manière existe nécessairement et comme infinie .(21 22 et23 vise cela )

Et je dis que la médiation est immediate au sens ou elle est nécéssaire ,de la nature de l'attribut , qu'elle ne peut pas ne pas être et que dans cette éternité il n'y a ni causes ni effets .

Le jeu des cause et effet y est tautologique prop 21
ce qui suit de la nature d 'un attribut ne peut avoir d'existence (ie de durée) déterminée ) .....donc l'idée de Dieu ou qq chose qui suit nécessairement de la nature de l'attribut (et Spinza associe les deux ) est éternel.

Il n'y a pas de cause ni transitive ni efficiente ... seule la cause immanente (universelle) "essendi ".
(A mon avis ) Il n'y a pas de cause interne à l'attribut qui le fait exister telle que sa nature le fait exister. Ça peut se discutter
...........................
Sévérac comme Beyssade essaie d'introduire dans Spinoza ce qui n' y est pas expressément. C 'est à dire de grandes modifications générales mediates ( infinies certes et éternelle aussi ) telle que l'amour ou je ne sais quoi d'autre . Je me demande si à ce rythme là on ne va pas quelques jours y introduire l'espace temps ou les quantas de Planck.

Or à ma connaissance Spinoza n a rien nommé comme mode infini médiat ( sauf tout l' univers ). Je voudrais que vous me citiez un passage où il évoque l 'enchainement infini des modes infinis médiats exprimant la nature de l'attribut. ( si c'est le cas alors je jette l' éponge )

Je ne nie pas qu'il en parle mais pas dans une durée . C'est quand même un problème ça. Rapporté à l'idée de cause .
Car la cause et l 'effet ( hors la cause essendi ) se pense dans la durée . Sil n'y a pas de durée tout ce qui est de la nature de l'attribut me semble immédiat .( non au sens de l' opposer à médiat mais à celui de l' opposer à ce qui dure )

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Messagepar Vanleers » 25 juin 2013, 13:47

A sescho

A la question que je posais :

En vertu de E I 36, quel effet s’ensuit-il d’un mode infini immédiat ?

vous avez répondu :

« L’effet (compris dans sa cause) d’un mode infini (« immédiat ») ce sont tous les « modes finis, » tout simplement, comme l’indiquent tous les extraits précédents par ailleurs… »

Or, c’est tout à fait impossible car, en vertu d’E I 22, ne peut suivre du mode infini immédiat que quelque chose d’infini.

Spinoza reprend cet argument dans la démonstration d’E I 28 : un mode fini ne peut suivre « non plus de Dieu, ou d’un certain attribut de Dieu, en tant qu’il est affecté d’une modification qui est éternelle et infinie (par la prop. 22) ».

Du mode infini immédiat ne peut donc rien s’ensuivre de fini.
Ou bien, de ce mode ne s’ensuit rien, ce qui est en contradiction avec E I 36.
Ou bien s’ensuit quelque chose d’infini.

La cause me paraît donc entendue : pour chaque attribut, il y a un mode infini immédiat et une infinité de modes infinis médiats.

A Hokousai

Je réfléchis à vos messages.

Bien à vous

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Messagepar Vanleers » 25 juin 2013, 14:13

A Hokousai

1) Je n’ai pas parlé d’enchaînement infini de modes infinis mais de modes finis.

2) Vous parlez de durée. Dans la démonstration d’E I 28, Spinoza se réfère à E I 24 cor. qui parle effectivement de durée. Mais la durée ce n’est pas forcément le temps.
Lorsque Spinoza parle, en E I 28, d’existence déterminée, faut-il l’entendre nécessairement au sens d’existence dans le temps ?

Bien à vous

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Messagepar Vanleers » 25 juin 2013, 14:36

A Hokousai

Je reviens à votre avant-dernier message.

Vous avez écrit :

« je veux dire que le statut ontologique de la nature absolue de l'attribut et celui de sa nature modifié est un statut d' équivalence. »

Du texte de Sévérac que vous avez lu, j’extrais le passage suivant :

« Ainsi, la nature absolue de l’attribut de la pensée infinie est, nous l’avons vu, la pensée infinie pure, sans considération d’un objet. Ce n’est pas la pensée de quelque chose, contrairement à l’idée de Dieu (son entendement), qui est la pensée infinie considérée en rapport avec son objet. »

La différence entre l’attribut et son mode infini immédiat est là : l’attribut de la pensée, c’est la pensée pure, c’est-à-dire sans référence à un objet pensé alors que le mode infini immédiat (l’idée de Dieu), c’est la pensée en tant qu’elle pense quelque chose.
Bien entendu, toute pensée est pensée de quelque chose et Sévérac, dans le passage antérieur auquel il se réfère, l’a bien noté. Mais il n’empêche que l’intellect peut distinguer pensée et pensée de quelque chose.
J’ajoute qu’entre l’attribut et son mode infini immédiat, il n’y a pas de distinction réelle mais seulement une distinction modale.

Bien à vous

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Messagepar hokousai » 26 juin 2013, 00:20

à Vanleers

1) Je n’ai pas parlé d’enchaînement infini de modes infinis mais de modes finis. 25/06/2013 14:13


vous aviez parlé de causalité entre les modes infinis

Pourquoi le mode infini immédiat ne pourrait-il causer un mode infini et "Le mode infini immédiat serait donc « sans lendemain » infini ! "25/06/2013 09:54

..................................................

Lorsque Spinoza parle, en E I 28, d’existence déterminée, faut-il l’entendre nécessairement au sens d’existence dans le temps ?


Du temps Spinoza n'en parle que beaucoup plus tard prop 44/2 et pour dire qu' aussi nous l' imaginons .

Mais dans prop 28/1 ( on est dans les choses singulières ) l'existence n'est pas éternelle et infinie mais
ce qu'il oppose à existence éternelle et infinie c'est modification finie et existence déterminée .

La durée ne peut être définie à partir de la nature de la chose existante ni de la cause efficiente. (def 5/2).
Si la durée est la continuation indéfinie de l'exister cela concerne les choses singulières ( me semble -t- il ) soumises à la cause efficiente.
C' est pourquoi j' ai lié cause efficiente et durée .
Pour qu'il y ait durée il faut le conatus , mais il faut au moins que la cause efficiente pose nécessairement l'existence de la chose . En fait la durée indéfinie est déterminée ( à ne plus exister ) par les causes extérieures .(prop 8 /3). On est dans le domaine des cause et des effets.
.............

Vous parlez de pensée pure .( étendue pure ou pure étendue aussi donc )..c est tentant .... évidemment .

Chaque attribut exprime une essence infinie .. donc quelle est l'essence de l'attribut dit " pensée ". Ce n'est pas la pensée pure mais tout ce qui peut tomber sous un intellect infini .
Dieu est cause de soi il faut le dire aussi cause de toutes les choses. La pensée pure est difficilement distinguable . Il faudrait que l'attribut soit distinguable de ses modifications . Qu'il y ait un statut ontologique en tant que pur et un statut en tant que modifié.

Or ( à mon avis )Spinoza parle d' un mode infini immédiat pour éviter justement de parler de pensée pure . Il ne parle pas d' Etendue pure mais immédiatement en mouvement et repos .


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