"Dieu miséricordieux"

Questions et débats touchant à la conception spinozienne des premiers principes de l'existence. De l'être en tant qu'être à la philosophie de la nature.
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Re: "Dieu miséricordieux"

Messagepar Vanleers » 02 nov. 2014, 17:58

A recherche

Alexandre Matheron écrit (p.95) :

« Ce que l’étude des textes lui [Spinoza] a permis d’établir, c’est que les multiples livres de l’Ancien et du Nouveau Testament, par-delà leurs divergences, ont un point commun et un seul : tous, sans exception, nous recommandent d’obéir à Dieu en aimant notre prochain. De là il déduit [souligné par Matheron] les sept articles de foi, en montrant que ce commandement les implique nécessairement ; d’où il conclut que le Credo minimum ainsi explicité constitue l’unique dénominateur commun spéculatif de toutes les œuvres scripturaires. »

Pour répondre à votre question, il faudrait, d’abord, voir comment Spinoza procède à cette déduction des sept articles à partir du commandement unique.
Il faudrait ensuite se demander ce qu’entendait Spinoza à propos du contenu de ces articles.
Je ne sais pas si c’est possible. En tout cas, cela exige une lecture approfondie du chapitre XIV du TTP à partir de son début, sans doute des deux chapitres qui précèdent et, probablement, de tout le TTP.
Je n’ai pas cette connaissance approfondie.

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Re: "Dieu miséricordieux"

Messagepar hokousai » 02 nov. 2014, 22:46

recherche a écrit :Comment comprenez-vous donc qu'il rattache cela à Dieu (à ce qu'il entend par Dieu) ?
Spinoza ne rattache pas les 7 articles de la foi à ce que lui (philosophe p)entend par Dieu, mais à ce que la théologie( l'écriture en fait ) entend pas Dieu .

Spinoza donne de plus une leçon à la théologie. On peut se demander si la théologie est prête à recevoir des leçons de la philosophie ( Spinoza l 'espère )

L' espoir est formulé ainsi

Chap 14 TTP
Spinoza a écrit : Ainsi la foi donne à tout le monde la liberté pleine et entière de philosopher à son gré, afin que chacun puisse sans crime penser sur toutes choses ce qui lui semble convenable ; elle ne condamne comme hérétiques et schismatiques que ceux qui enseignent des opinions capables de porter à la rébellion, à la haine, aux disputes et à la colère ; elle ne répute fidèles que ceux qui conseillent, de toute la force de leur raison et de leurs facultés, l’esprit de justice et de charité.

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Re: "Dieu miséricordieux"

Messagepar recherche » 03 nov. 2014, 03:03

Merci pour vos réponses qui, en fait, se recoupent.

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Re: "Dieu miséricordieux"

Messagepar Vanleers » 03 nov. 2014, 11:39

A recherche

J’ajouterai encore ceci que m’inspire votre question initiale.

Vous vous interrogiez sur le sens à donner à « miséricordieux » dans l’expression « Dieu miséricordieux » de l’article 1 de la religion universelle.
Mais qu’est-ce qu’être miséricordieux pour un homme ?

Dans l’Ethique, mise à part l’expression « miséricorde de femme » (muliebri misericordia) de la fin de la partie II, Spinoza parle une première fois de miséricorde dans l’explication qui suit la définition 18 des affects :

« Entre la pitié et la miséricorde, il semble qu’il n’y ait aucune différence, sinon peut-être que la pitié concerne un affect singulier, et la miséricorde l’affect devenu manière d’être »

Mais la pitié est définie comme une tristesse :

« La pitié est une tristesse qu’accompagne l’idée d’un mal arrivé à un autre que nous imaginons semblable à nous »

Or, un peu plus loin, la définition 24 posera que la miséricorde est une joie, plus précisément un amour :

« La miséricorde est l’amour en tant qu’il affecte un homme de telle sorte qu’il est content du bonheur d’autrui, et au contraire qu’il est attristé du malheur d’autrui »

Cette définition, et Spinoza précise qu’il la donne « en dépit du sens du mot » (explication de la définition 23), s’oppose symétriquement à celle de l’envie :

« L’envie est la haine en tant qu’elle affecte un homme de telle sorte qu’il est attristé du bonheur d’autrui, et au contraire, qu’il est content du malheur d’autrui »

Quoi qu’il en soit, la miséricorde est un affect et un homme miséricordieux c'est d’abord un homme qui éprouve cet affect.
Mais cet homme aura le désir, déterminé par cet affect, de faire quelque chose car :

« Le désir est l’essence même de l’homme en tant qu’on la conçoit déterminée, par suite d’une quelconque affection d’elle-même, à faire quelque chose » (définition 1 des affects)

Que fera cet homme miséricordieux ?
Dans l’article 7 de la religion universelle, Dieu est dit miséricordieux car il remet les péchés. On dira, ici, que l’homme miséricordieux est celui qui pardonne.
Comment s’effectue le pardon ?
Je cite à nouveau la transposition spinoziste de l’article 7 par Henrique :

« La nature nous pardonne tout (d'autant plus qu'elle n'attend rien de nous) : si nous nous éloignons de l'obéissance à la nature, si nous en venons à faire comme si nous haïssions la vie (ce qui en fait est impossible, E5P18) et à haïr les hommes y compris nous-mêmes, nous nous punissons nous-mêmes. »

« La nature nous pardonne tout » et, concrètement, lorsqu’un homme pardonne, c’est la nature qui pardonne, non pas la nature en tant qu’elle est infinie mais la nature en tant qu’elle s’explique par cet homme (cf. E II 11 cor.)
On retrouve ici l’expression « Dieu en tant que » (Deus quatenus), véritable Sésame de l’Ethique.
L’homme est un être modal et non substantiel et cela devient facile de pardonner quand on n’oublie pas cela. Car, d’une certaine façon, le pardon, nous n’y sommes pour rien : c’est Dieu qui pardonne. Il n’y a donc pas d’effort à faire, rien « à prendre sur soi », simplement se rappeler que nous sommes des expressions particulières de Dieu.
On comprend alors mieux cette bizarre définition de la miséricorde : se réjouir du bonheur d’autrui et s’attrister de son malheur car, au fond, pardonner ce n’est que cela, pour le reste, Dieu y pourvoira.

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Re: "Dieu miséricordieux"

Messagepar Vanleers » 09 nov. 2014, 14:43

Je complète le précédent message qui, à la réflexion, est insuffisant.

Etre miséricordieux, écrivions-nous, c’est éprouver un affect de miséricorde, affect qui détermine un désir de pardon.
Mais la miséricorde est une passion, un affect passif. Rappelons sa définition :

« La miséricorde est l’amour en tant qu’il affecte un homme de telle sorte qu’il est content du bonheur d’autrui, et au contraire qu’il est attristé du malheur d’autrui »
L’amour, c’est-à-dire une joie qu’accompagne l’idée d’une cause extérieure (E III 13 sc.)
Or l’Ethique vise à nous rendre actifs et, parmi les remèdes aux affects, relevons la proposition E V 2 :

« Si nous éloignons une émotion de l’âme, autrement dit un affect, de la pensée d’une cause extérieure, et la joignons à d’autres pensées, alors l’amour ou la haine à l’égard de la cause extérieure, ainsi que les flottements d’âme qui naissent de ces affects seront détruits. »

La miséricorde, c’est-à-dire un amour, serait alors détruit.
Dans ce cas, l’homme qui, au départ, éprouvait un affect de miséricorde, ne serait plus déterminé à pardonner.
Mais Spinoza a démontré en E IV 59 que :

« A toutes les actions auxquelles nous détermine un affect qui est une passion, nous pouvons être déterminés sans lui par la raison. »

Récapitulons.
L’homme qui éprouve un affect de miséricorde pardonne mais, du fait qu’il est mû par un affect passif, il est lui-même passif et n’est donc pas cause adéquate de son pardon : celui-ci ne peut pas se comprendre clairement et distinctement par lui seul.
Pour que son pardon soit actif, pour qu’il en soit cause adéquate, cet homme devrait être déterminé par la raison conformément à E IV 59 et, préciserons-nous, par un désir actif issu de la raison.
Spinoza introduit les affects actifs en E III 58. Citons le début du scolie de la proposition suivante :

« Toutes les actions qui suivent des affects se rapportant à l’esprit en tant qu’il comprend, je les rapporte à la Force d’âme (fortitudo), que je divise en Fermeté (animositas) et Générosité (generositas). Car par Fermeté, j’entends le désir par lequel chacun s’efforce de conserver son être sous la seule dictée de la raison. Et par Générosité, j’entends le désir par lequel chacun, sous la seule dictée de la raison, s’efforce d’aider les autres hommes et de se les lier d’amitié. »

C’est mû par la générosité et non par la miséricorde que l’homme qui pardonne sera cause adéquate de son pardon, sera actif.
Notons qu’en les présentant comme des divisions de la fortitude, Spinoza signifie que la fermeté et la générosité sont indissociables. Pas de fermeté sans générosité et réciproquement.
On dit parfois de quelqu’un qui a subi un grave dommage de la part d’autrui qu’il doit lui pardonner pour se reconstruire. Ceci est clair pour le pardon actif puisque c’est un pardon déterminé par la générosité qu’accompagne nécessairement la fermeté, c’est-à-dire, précisément, le désir de se reconstruire.

Lorsqu’un homme pardonne, écrivions-nous, c’est la nature qui pardonne, non pas la nature en tant qu’elle est infinie mais la nature en tant qu’elle s’explique par cet homme (cf. E II 11 cor.)
Ceci est vrai que l’homme soit cause adéquate ou inadéquate de son pardon. Le corollaire d’E II 11, qui distingue le cas où l’homme perçoit une chose de manière adéquate de celui où il la perçoit de manière inadéquate, précise que, dans les deux cas, c’est Dieu qui a telle ou telle idée, Dieu en tant que... (Deus quatenus).

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Re: "Dieu miséricordieux"

Messagepar balise75 » 11 avr. 2015, 14:01

Vanleers a écrit :A toutes fins utiles, je vous transmets une transposition spinoziste de l’article 7 de la religion universelle par Henrique :

Article 7 : Dieu remet leurs péchés à ceux qui se repentent.
Henrique :
La nature nous pardonne tout (d'autant plus qu'elle n'attend rien de nous) : si nous nous éloignons de l'obéissance à la nature, si nous en venons à faire comme si nous haïssions la vie (ce qui en fait est impossible, E5P18) et à haïr les hommes y compris nous-mêmes, nous nous punissons nous-mêmes.


Cela veut dire en d'autres termes que "tant qu'il y a de la vie, il y a de la vie". A savoir que l'Univers (ou Dieu, ou la Nature) pardonne toutes les actions qui sembleraient capable de le détruire, dans la mesure où il les vainc ?" Et que donc, tant qu'il y aura quelqu'un pour parler, et dire "ceci est mal ou ceci est bien" 'ou d'ailleurs n'importe quoi d'autre) cela signifiera que le bien a vaincu le mal (la vie a vaincu la mort) ?
à
En d'autres termes, que l'univers étant tout neuf à tout instant, l'ensemble des causalités qui précèdent sont résolus à chaque instant en une nouvelle possibilité de vie ? (cette manière de voir ne mettant pas, si je comprends bien, l'individu au centre de l'équation ?)

Tous les péchés sont alors pardonnés, à chaque instant, et je ne vois guère même pourquoi on devrait limiter, dans ce raisonnement, le pardon à "ceux qui se repentent". Si l'univers persiste, d'une certaine manière, cela signifie qu'il pardonne. Tout au plus peut-on l'imaginer, disant comme Jésus à la femme adultère "va et ne pèche plus".

J'en profite pour ajouter (pardon si j'ai l'air d'un troll dans mes premières interventions sur ce forum) que si l'idée de la liberté chez Spinoza consiste à dire que l'homme à la liberté d'obéir ou de ne pas obéir à la nature, je n'y vois guère beaucoup de différence, avec cette idée biblique "tout dépend de l'Eternel, excepté l'obéissance humaine à l'Eternel". J'entends par là, que l'homme, désobéissant devient alors le jouet des causalités, entre dans les tumultes de l'existence, et éprouve "sa liberté de désobéir" dans la douleur, la douleur que provoque l'existence, l'existence qui est "séparation".

Séparation de ce qui n'est pas soi. Si l'homme est complètement obéissant, confondu avec la nature et Dieu (ou quand il l'est) alors sans doute éprouve-t-il la joie, mais, en dernier ressort, est-ce qu'il existe encore ?

Maître Eckhart disait quelque chose comme "l'idéal serait de ne pas vouloir, afin d'être traversé par la volonté de... appelez ça la nature, l'Eternel, Dieu ou l'Univers" et donc de coopérer le plus favorablement du monde, ce qui serait le gage de la disparition de la souffrance, qui est la joie de l'union, de la coopération intégrale à "ce qui doit être", c'est à dire au seul principe libre qui ne dépend d'aucune causalité.

Il ajoutait (Maître Eckhart) : mais on ne saurait vouloir ne pas vouloir car ce serait encore vouloir. Il faut donc se rabaisser (humilité) afin de laisser toute la place à Dieu, la Nature, L'Univers, L'Eternel, le Principe libre qui ne dépend d'aucune causalité.... appelez ça comme vous voulez :)

La rationalité ne peut s'extraire de la nature pour la "juger", pour la regarder, et, d'après ce que j'ai lu que vous disiez ce sujet, Spinoza en est parfaitement conscience, et ne semble donc considérer "le désir" d'être maître de ses passions, en en comprenant les causalités, que comme "une approximation", en d'autres termes, quelque chose qui "aide à vivre", "à exister"... une sorte de soin palliatif qui rend le passage terrestre moins douloureux, en permettant la persistance de l'existence qui est, par définition et expérience, "séparation", "soi n'étant pas les autres n'étant pas tout, n'étant pas confondu avec le principe libre sans causalité, Eternel, Dieu, Nature (appelez ça comme vous voulez) est la dynamique même que crée cette séparation étant la dynamique même de l'existence. Spinoza donc invite à une existence plus joyeuse, plus supportable, et les mystiques, quant à eux, invitent à orienter cette dynamique, ce cheminement, avec ardeur, vers l'union dont ils leur semble qu'elle est "promise", afin de se fondre, à en perdre l'existence, dans la joie.

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Re: "Dieu miséricordieux"

Messagepar Vanleers » 23 avr. 2015, 17:00

A balise75

Il n’y a pas de pardon car il n’y a pas de jugement.
C’est le thème du dernier mouvement de la symphonie n° 2 « Résurrection » de Gustav Mahler.
Voyez :

http://documents.univ-lille3.fr/files/p ... _body.html

« Wagner, Berlioz, Liszt, Mahler, acceptent l'irréversibilité du temps, le changement continu, le devenir sans fin. « Mais il s'y intègre une esthétique de l'apothéose, sorte d'idéalisation de l'irréversibilité du temps, dont seul le mouvement ascensionnel de naissance et d'instauration est retenu, dans une véritable fuite en avant de la mort. L'apothéose est une dénégation de la phase crépusculaire de la vie. » .Telle la trajectoire de la Seconde Symphonie. Quelles que soient les différentes versions des programmes élaborés par le compositeur, la fin de cette œuvre pose la question de la fin de l'homme. Selon Theodor Reik, aucune des « victoires » remportées dans ses Finales de symphonies n'est définitive, c'est la raison pour laquelle chacune d'elles repose à son tour la même question. D'après Mahler, et dès ses premières lettres à ce propos à Max Marschalk, en décembre 1895, le dernier mouvement exprime clairement la pensée fondamentale de la symphonie entière. Deux mois après, Mahler propose à Natalie Bauer Lechner et Bruno Walter une version découvrant le sens du dernier mouvement. L'apocalypse y est mentionnée ainsi que Der grosse Appel des trompettes du Jugement dernier. Les créatures marchent en cortège. Puis tout disparaît, même l'oiseau de la Mort : « pas de jugement divin, pas de salut, ni de damnation, ni bons ni méchants, et même pas de jugement. Tout a cessé d'exister. Dans la plus grande douceur montent simplement les paroles suivantes : « ressusciter, oui, ressusciter !... » ; « il n'y a plus ni justice, ni pécheurs ni justes, ni grands ni petits, ni châtiment ni récompense ! Un sentiment tout-puissant nous remplit de certitude et nous révèle l'existence bienheureuse ».

Spinoza ne dit pas autre chose.

Bien à vous

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Re: "Dieu miséricordieux"

Messagepar Shub-Niggurath » 23 avr. 2015, 18:30

balise75 a écrit :
Tous les péchés sont alors pardonnés, à chaque instant, et je ne vois guère même pourquoi on devrait limiter, dans ce raisonnement, le pardon à "ceux qui se repentent". Si l'univers persiste, d'une certaine manière, cela signifie qu'il pardonne. Tout au plus peut-on l'imaginer, disant comme Jésus à la femme adultère "va et ne pèche plus".


Quel anthropomorphisme, c'est totalement contraire à la pensée de Spinoza, pour qui Dieu n'est pas un être en dehors de la Nature, mais la Nature elle-même. Et cet être éternel et infini, dans lequel nous sommes, ne voit rien, n'entend rien, ne comprend rien, n'a ni volonté ni passion, il est une pure puissance d'exister et n'est absolument pas semblable à l'homme. La phrase : "Dieu créa l'homme à son image" est l'idée la plus fausse de toute l'histoire de la pensée.

Ce sont les hommes qui voient, entendent, comprennent, aiment, etc.. Quant au "péché" cela n'a aucun sens, puisque les seules lois qui puissent être transgressées sont les lois humaines. Il est impossible de transgresser les lois de la Nature, car la Nature ne peut pas se contredire elle-même. De même il est impossible de désobéir à la Nature, car elle ne commande rien.

Comme disent les philosophes taoïstes : "Il y a le Tao du ciel, il y a le Tao de l'homme. Il faut bien distinguer entre les deux", sous peine de tomber dans ce genre de confusions typiques des esprits religieux.
Modifié en dernier par Shub-Niggurath le 24 avr. 2015, 13:18, modifié 1 fois.

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Re: "Dieu miséricordieux"

Messagepar Vanleers » 23 avr. 2015, 20:23

A Shub-Niggurath

Que le Dieu de Spinoza ne soit pas le Dieu des religions monothéistes, c’est entendu.
Pourtant, et malgré le corollaire d’E V 17, Spinoza parle dans le scolie d’E V 36 de l’amour de Dieu envers les hommes.
Mais revenons à votre critique de balise75.
Au chapitre XIV du TTP, Spinoza définit les sept articles de la foi universelle et je cite le dernier :

« 7° enfin, que Dieu remet leurs péchés à ceux qui se repentent, car il n’est point d’homme qui ne pèche ; car si cette réserve n’était établie, chacun désespérerait de son salut, et il n’y aurait pas de raison de croire à la miséricorde de Dieu ; mais celui qui croit cela fermement, savoir, que Dieu, en vertu de sa grâce et de la miséricorde avec laquelle il dirige toutes choses, pardonne les péchés des hommes, celui, dis-je, qui pour cette raison s’enflamme de plus en plus dans son amour pour Dieu, celui-là connaît réellement le Christ selon l’esprit, et le Christ est en lui. »

Alexandre Matheron a essayé de mettre chacun des sept articles en regard avec des propositions de l’Ethique. Voir :

viewtopic.php?f=11&t=1306

En ce qui concerne l’article 7, il donne :
E IV 7, 17 sc. ainsi que E V 3, 6, 7 9, 10, 11-13, 14,15.
A chacun de voir si cet essai de transcription non anthropomorphique de l’article 7 est satisfaisant ou non.
Mais, reprenant ce qu’écrit balise75 : « Si l'univers persiste, d'une certaine manière, cela signifie qu'il pardonne », je dirais que cela ne me paraît pas relever nécessairement d’un anthropomorphisme car on peut le comprendre comme se situant au-delà du pardon et du jugement, comme j’ai essayé de le dire dans mon post précédent.

Bien à vous

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Re: "Dieu miséricordieux"

Messagepar hokousai » 23 avr. 2015, 23:52

Balise a écrit :Séparation de ce qui n'est pas soi. Si l'homme est complètement obéissant, confondu avec la nature et Dieu (ou quand il l'est) alors sans doute éprouve-t-il la joie, mais, en dernier ressort, est-ce qu'il existe encore ?
et bien je ne suis pas du tout persuadé qu'il existe encore ... conséquemment que la question du pardon le fait exister.
La question du pardon est une question obligée...parce que la mémoire est une obligation de nature.

Balise a écrit :« Si l'univers persiste, d'une certaine manière, cela signifie qu'il pardonne »
Je crains bien que la Nature ne pardonne pas au sens où la Nature n' oublie pas.
Estimez- vous que la Nature oublie et perde le fil de ce qu'elle fait ?
Ainsi soumise au Hasard ?
..............................................

shub N a écrit :ne voit rien, n'entend rien, ne comprend rien, n'a ni volonté ni passion,
...une mécanique en somme
( et les machines n'imposent même pas l' analogie avec une Nature qui tout compte fait apparait chez toi comme l' entéléchie de l' ABSURDITE ) .
Modifié en dernier par hokousai le 24 avr. 2015, 22:52, modifié 1 fois.


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