"Dieu miséricordieux"

Questions et débats touchant à la conception spinozienne des premiers principes de l'existence. De l'être en tant qu'être à la philosophie de la nature.
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Cette partie du forum traite d''ontologie c'est-à-dire des questions fondamentales sur la nature de l'être ou tout ce qui existe. Si votre question ou remarque porte sur un autre sujet merci de poster dans le bon forum. Merci aussi de traiter une question à la fois et d'éviter les digressions.
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Re: "Dieu miséricordieux"

Messagepar sescho » 03 mai 2015, 11:27

A Hokousai et Ulis,

Vous avez fait bien progresser le sujet. J'avais déjà écrit pas mal en reprenant les contributions en séquence, sans cependant avoir bouclé en vue de poster, mais avec vos nouvelles contributions c'est plus ou moins devenu caduc... Je laisse donc le tout de côté à toute fin utile, le cas échéant, pour juste placer maintenant quelques remarques :

- La lettre XV de Spinoza à Meyer indique très explicitement que l'introduction de Meyer a été validée préalablement par Spinoza, qui lui a demandé certaines modifications dont la quasi-totalité a été appliquée par Meyer.

- D'après ce que j'ai lu d'un helléniste très confirmé, jamais les Anciens ne mettaient de considération de "création ex-nihilo" dans le terme "libre-arbitre" (qu'on trouve par exemple dans l’Éthique à Nicomaque d'Aristote.)

- Venant des auteurs chrétiens, c'est beaucoup plus douteux (mais pas totalement exclu), car un fondement est "la chute" (l'"illusion" plus haut) : Dieu ne peut pas être la cause de l'écart aux commandements de Dieu ; donc l'Homme a la liberté absolue de ne pas suivre les prescriptions de Dieu, et c'est en cela qu'il dispose d'un libre-arbitre absolu (hors Dieu), et qu'il peut pêcher contre Dieu et donc contre lui-même (ce qui, en passant, est immédiatement contradictoire : eudémonisme.) On retrouve cela dans les attaques contre les stoïciens anciens et moyens, les oppositions de principes faites à Spinoza par Blyenbergh, Oldenburg, etc., etc. Spinoza, évidemment, annihile totalement cela.

- Comme Spinoza met en point d'orgue de l’Éthique, dans sa cinquième et dernière partie, la liberté de l'Homme, on ne peut décemment faire comme s'il ne disait que "l'homme se trompe en ce qu'il se croit libre" (dans des scholies, donc des commentaires libres.) Il faut pour concilier les deux dans un même propos faire des adaptations à la marge. Déjà "croire" n'est pas "connaître" chez Spinoza. On pourrait peut-être admettre qu'il veut dire : l'homme se trompe quand il se croit créateur absolu de ses actes (ce qui nie l'immersion dans la Nature, ou, comme le précise Michel Onfray, d'"être la Nature", ou encore peut-être plus justement d'"être de la Nature" ("du Dieu".) Ce qui suppose la séparation absolue de la Nature "extérieure", etc., bien connu en Spiritualité pour précisément caractériser au plus haut degré "la chute"...
Connais-toi toi-même.

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Re: "Dieu miséricordieux"

Messagepar hokousai » 03 mai 2015, 14:08

à Ulis

Sur le fond de la question nous ne somme pas en désaccord .

( à mon avis )C'est parce qu'on désolidarise la conscience "réflexive " de la conscience/psycho-physique ( que je dirais inconsciente dans un certain sens de "conscience" ) de l'organisme qu 'on voit une autonomie ( illusoire certes ) de la conscience réflexive comme s 'auto-déterminant .

............................
bon ce qui suit explique un peu mon idée ...mais compacté, hélas :( .

Libre au départ de l' idée c’est relatif à des contraintes ( libre de certaines contraintes)
Mais "contraintes" c’est relativement à un désir de ne pas être contraint sous tel ou tel aspect du désir.
Un désir d’acte, une intention d’agir est contrainte ou pas à l’empêchement. Là on est au niveau de la conscience du plus ou moins de liberté .
...................................

Plus profondément il y a un organisme vivant ( moi et pas toujours conscient de lui même)

La nature de tel organisme oriente vers tels et tels désirs et en ce sens contraint le désir lui même.
Je désire manger et boire, me reproduire, voir, penser ... etc ...parce que plus profondément ma nature est ainsi faite de pulsions ou d'instinctuel ( le désir est plutôt, lui ,conscient )

Je ne peux pas dire que je suis contraint pas le désir de manger, mais plutôt par ce qui s' oppose au désir de manger ( absence de nourriture ou nourriture déplaisante ).
La faculté de manger est libre parce qu'elle est expression de ma Nature. L' organisme est libre s 'il agit selon sa nature.
Comme il n'est pas un empire dans un empire , il est obligé s' orienter dans la Nature vers ceci ou cela. Il se présentent des choix. Il s'oriente mais librement.
...........................

Passons donc à la faculté de choisir . C'est elle l'essentiel de mon propos. L'essentiel c'est qu'un organisme est apte à s 'auto- orienter .

L' activité d’arbitrage des choix est majoritairement inconsciente ( elle l’est depuis l’ embryologie de l’organisme qui se constitue sans conscience réflexive de lui même)

Mais elle est toujours arbitrage de choix
si un organisme est conscient des alternatives du choix.

...................................

En fait on ressent la plus ou moins grande liberté au niveau du désir conscient et c'est là qu'on place le problème
Le désir est objet de possibles[/u]= manger, certes, mais ceci ou cela.

Il y a un choix possible et donc une FACULTE d’ affirmer une option contre une autre .( ou de rester dans l’ incertitude éventuellement).

Or cette faculté n’est pas contrainte puisqu’ elle est de la nature de l’organisme.
Elle est libre de contraintes extérieures ( qui ne serait pas de l’essence de l’organisme en question ).
L’organisme exerce librement certaines facultés ( certains pouvoirs de faire selon sa nature ) dont la faculté d' opter (ou de s'orienter vers ceci ou cela )


Ainsi quand se présente un choix il a le pouvoir d’affirmer (donc de nier). Sans ce pouvoir il n ‘y a pas de choix du tout Pas d' alternatives qui puissent se présenter donc pas d’ arbitrageet pas d' orientation possible.

S' il se présente une possibilité d’arbitrage c’est que la faculté d' affirmer ou de nier existe bel et bien .
La faculté d’ affirmer est libre ( de contraintes extérieures à l’organisme ).
........................

Il faut observer en quoi l’ activité consciente est particulière par rapport à une activité de choix inconsciente/ automatique ( qui est réelle ).
Elle doit être particulière, et dans l’esprit de Spinoza elle l’est certainement parce que Spinoza renvoie à l adéquation ( idée adéquate).
Une idée adéquate est claire et distincte.
Or à l’inconscience il n’apparaît pas d idée claire et distincte .
Spinoza fait très bien la différence.

Il faudrait prouver que chez Spinoza il y a égalité entre les idées que nous n 'avons pas clairement à la conscience et les idées claires et distinctes apparentes à l’esprit. Une égalité quant à l efficience de ces idées comme cause de l’ activité.
Le libre -arbitre conscient est particulier par rapport à l’arbitrage inconscient. Particulier ( différent quelque part ) mais pas illusoire. Il y a arbitrage et liberté mais pas liberté au niveau de la conscience réflexive, la liberté est au niveau de la nature de l'organisme .
................................
C'est parce qu'on désolidarise la conscience "réflexive " de la conscience/psycho-physique ( que je dirais inconsciente dans un certain sens de "conscience" ) de l'organisme qu 'on voit une autonomie ( illusoire certes ) de la conscience réflexive comme s 'auto-déterminant .

bon c'est un peu vite dit :(

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Re: "Dieu miséricordieux"

Messagepar Vanleers » 03 mai 2015, 14:24

On l’a peut-être oublié, mais le sujet de ce fil s’intitule « Dieu miséricordieux » et j’aimerais y revenir après les récents échanges entre Shub-Niggurath, sescho et moi.
C’est bien joli de discuter de la théorie spinoziste mais si c’est pour l’oublier à la première difficulté concrète, alors on se dit que le forum n’a aucun effet éthique et ne sert à rien en pratique.
Je donnerai d’abord un extrait du chapitre 13 de l’Appendice de la partie IV de l’Ethique :

« Car les hommes sont divers (rares en effet sont ceux qui vivent selon ce que la raison prescrit), et cependant la plupart sont envieux, et plus enclins à la vengeance qu’à la miséricorde. Et donc, supporter chacun d’eux avec son tempérament et se retenir d’imiter leurs affects, demande une singulière puissance d’âme ».

Il est question de miséricorde : rappelons sa définition selon Spinoza (Déf. 24) :

« La miséricorde est l’amour en tant qu’il affecte un homme de telle sorte qu’il est content du bonheur d’autrui, et au contraire qu’il est attristé du malheur d’autrui »

Je laisse à chacun le soin d’évaluer ce qui relève de la vengeance ou de la miséricorde dans ses actions et ses dires.
Quant à moi, j’essaie, dans mes écrits, de me retenir d’imiter les affects des uns et des autres.
Je pense que sur un forum, qui plus est spinoziste, cela devrait être normalement à la portée de chacun.

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Re: "Dieu miséricordieux"

Messagepar hokousai » 03 mai 2015, 14:34

Je pense que, nolens volens, Balise exprime toute la différence qu'il y a entre avoir des idées claires et distinctes et cela en toute conscience de les voir
et puis ne pas en voir du tout

quand il écrit

Balise a écrit :Je crois que la liberté existe, disais-je, qu'elle se situe très exactement dans l'âme, qui est donc à la fois le lieu de notre singularité et de notre liberté, donc de notre joie, car je ne vois guère d'autres joie que de pouvoir exprimer sa singularité en toute liberté.


Certains ici pour des questions de morale ( et moralisatrices à rebours si j' ose dire ) refusent la question.
Balise place dans l'âme ce qu'il ne sait placer ailleurs parce que personne ne peut ni ne sait le placer ailleurs .
Ce serait placer la conscience dans l'inconscience ( incongruité majeure ).

S' il place la pensée consciente en elle- même, c'est qu'on ne peut la placer ailleurs et certainement pas dans l'Etendue laquelle ne pense pas du tout.

Cela dit la critique vitupérante/agressive et violente de la vertu de modération me semble une contradiction dans les termes même de cette vertu.
J 'avoue être estomaqué voire attristé par la teneur de certains propos récents .

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Re: "Dieu miséricordieux"

Messagepar sescho » 03 mai 2015, 17:55

Je lis avec attention de façon répétée, je réfléchis (il y a matière, et si l'on va au bout de l'analyse, on peut en attendre...) et je propose à nouveau quelques réflexions diverses... :


- L’illusion majeure, c’est quand-même bien de « se » croire créateur absolu (et non « créé créateur ») de « ses » actes (les guillemets sont obligés car ces termes supposés admis a priori ne sont en fait pas du tout anodins dans la sémantique de la phrase.) Et ceci s’oppose à l’existence de Dieu-Nature directement.

- Dieu-Nature (-Être) chez Spinoza est une prémisse première. Dans l’absence d’erreur cette prémisse est vue comme seul il convient : intuitivement, directement, clairement et distinctement ; bien différent d’une hypothèse juste admise a priori. Ne pas la voir telle est déjà l’illusion majeure, en fait.

- Spinoza associe en outre l’illusion à l’imagination, et plus généralement à tout ce qui dérive de la mémoire (ce qui pose interrogation forte à ce sujet, c’est qu’on n’a jamais pu séparer la pensée de la mémoire ; disons qu’il s’agit là de la mémoire à « long » terme) – dont des moyennes, des approximations, des associations, des similitudes, etc. – : la connaissance du premier genre.

- L’imagination (et E3P12-13 augurent pleinement des « problèmes à venir », dans le sein même de la « pulsion de puissance » première...) fait prendre des vessies pour des lanternes, ses désirs pour des réalités, la production mentale faite d’irréalité pour la réalité et la réalité pour ennemie, etc. : transposition imaginative. C’est bien aussi clairement un pilier de l’illusion, aucun doute là-dessus...

- Spinoza explicite-t-il clairement le lien entre les deux ? Comment l’Éthique peut-elle traiter dans son axe (et non par des propositions incluses sans démonstration dans des scholies) de la non-reconnaissance de son propre fondement ? Il me faut revoir le texte...

- Je suis totalement convaincu qu’effectivement l’homme ne peut en aucune façon – et n’a nul bénéfice à forger cela – ressentir que son action a des causes, tout au moins quand celle-ci émane de sa nature propre (reste à bien cerner la « nature propre » de l’homme...) Ce qui vaut liberté parfaite, ainsi que l’indique Spinoza. Dans ce cadre, parler de contrainte est aberrant. En tant qu’expression sans intermédiaire ni contrainte de Dieu-Nature, la liberté de l’homme est celle de Dieu-Nature même, à nouveau, directement, pleinement, etc. Sinon le fatalisme a déjà pointé son nez. Mais l’homme peut-il se concevoir sans son environnement : non ; sauf, dit Spinoza, en tant qu’il suit la Raison... dont le premier fondement est la vision claire et distincte de Dieu-Nature...

- Mais la mémoire (et donc l’imagination) est une « action extérieure à effet différé » selon Spinoza. Difficile dans ces conditions de cantonner la contrainte extérieure à une pression actuelle seulement. Conjointement, la contrainte « externe-interne » exercée par la mémoire à long terme doit être identifiable. Elle l’est effectivement, mais ce n’est pas gagné d’avance...

- Louis Lavelle - parfois classé comme « auteur chrétien » : il l’est sans doute, mais la précision est quand-même plus nuisible qu’autre chose, car sa Philosophie ne montre aucun préjugé de cet ordre - est celui qui à mon sens identifie le plus l’acte (non-objectivable, puisque l’objectivation suppose déjà un sujet) qui caractérise obligatoirement le sujet et son inclusion tout à la fois dans le « Tout » (qui est aussi « Un », mais il y a matière à discussion pour tous les termes employés), sous le terme bien choisi (étant bien entendu qu’elle n’est pas « au choix ») de « participation ». Tout ce qui est de l’ordre de la Matière (au contraire de l’Être sans attribut), du Mécanisme, etc. est orienté « objet », comme la Physique, et ne peut que dénaturer en quelque part le sujet quand on veut le lui transposer (l’abîme d’erreur, qui se découvre dès que l’on quitte l’extrême surface, consistant à prétendre « expliquer » la pensée par la matière – et ceci alors même qu’on ne discute pas que les deux ne font ultimement qu’un, ni par ailleurs que la superstition appartienne à l’erreur.)

- L’action la plus libre est celle qui s’impose sans choix ; ou plutôt « sans effort de choix », car il faut admettre que la « capacité à l’erreur » est présente en permanence : c’est une loi de la Nature aussi, sans laquelle il n’y aurait tout simplement pas d’erreur (d’illusion) du tout. Il se pourrait d’ailleurs que la « joie sans objet » (Jean Klein) ait quand-même pour cause une victoire renouvelée en permanence sur cette capacité à l’erreur. « L’esclavage total est la liberté parfaite » : c’est bien cela dans cette acception. (Je précise en passant que Prajnanpad a en outre été pris en référence par André Comte-Sponville, spinoziste qui professe un athéisme tel que je le qualifierais même de « sourcilleux. »)
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Re: "Dieu miséricordieux"

Messagepar hokousai » 03 mai 2015, 19:06

- L’illusion majeure, c’est quand-même bien de « se » croire créateur absolu (et non « créé créateur ») de « ses » actes (les guillemets sont obligés car ces termes supposés admis a priori ne sont en fait pas du tout anodins dans la sémantique de la phrase.) Et ceci s’oppose à l’existence de Dieu-Nature directement.


Ça Sescho je l 'admets très bien . Mais qui croit encore cela? Après un siècle de psychanalyse, de sociologie et des progrès des diverses sciences biologiques voire de la physique. Enfin bref on sait bien que l' homme ne nait pas de rien et qu'il est conditionné, par des forces extérieures mais autant qu'intérieures.

Ce qui persiste et en fait renait comme question après un oublie scientiste physicaliste c'est la question de la conscience.
Lui est sous- jacent la question de l'individualité et ce parce que la conscience est singulière et que ses choix sont singuliers . ( singulier = propre à chaque individu ).
Il n'est plus question d' absolue autonomie mais de relative autonomie.
D 'une relative liberté d'arbitrage.

Je dirais de l'organisme vivant qu'il est un autonome spirituel.
S il y a de l' inorganique, je ne ramène pas le vivant à l'inorganique ( ce que fait peu ou prou le mécanisme ).

J 'aurais plutôt tendance à exhausser l'inorganique et a en voir un état du vivant plutôt que l'inverse .( mais là dessus je ne m'avance pas trop )- C'est à dire que je fais du pan psychisme ( comme Spinoza met la pensée partout :D :D )

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Re: "Dieu miséricordieux"

Messagepar sescho » 03 mai 2015, 20:20

hokousai a écrit :Mais qui croit encore cela? Après un siècle de psychanalyse, de sociologie et des progrès des diverses sciences biologiques voire de la physique. Enfin bref on sait bien que l' homme ne nait pas de rien et qu'il est conditionné, par des forces extérieures mais autant qu'intérieures.

Mais tout le monde, à peu près, croit encore cela, au contraire : il n'y a qu'à regarder autour de soi, et en soi aussi... L'erreur de fait est très très loin d'être éradiquée (c'est déjà impossible, d'accord), c'est le moins que l'on puisse dire. De la différence entre la théorie et la pratique...

Mais si c'est intuitivement parfaitement intégré pour vous, pourquoi voulez-vous personnifier quoi que ce soit au-delà de l'évidence de votre point d'action local, lequel n'implique, au sein de la conscience, aucune vision en miroir ?

hokousai a écrit :Ce qui persiste et en fait renait comme question après un oublie scientiste physicaliste c'est la question de la conscience.
Lui est sous- jacent la question de l'individualité et ce parce que la conscience est singulière et que ses choix sont singuliers . ( singulier = propre à chaque individu ).
Il n'est plus question d' absolue autonomie mais de relative autonomie.
D 'une relative liberté d'arbitrage.

Jusqu'où le relatif ? A part la relativité du mode dans la substance, je ne vois pas de réponse convaincante à cette question. Si rien ne vient de rien, rien ne vient de rien... Tout est déjà là de toute éternité. La liberté parfaite est l'"esclavage" (l'acceptation pleine et entière du fatum en toute circonstance, impulsions internes comprises) total : il n'y a pas d'alternative défendable dans ce cadre. Ceci n'empêche nullement, bien au contraire, aux modes de participer plein pot et sans arrières-pensées à l'énergie cosmique, qui n'est pas avare d'elle-même.

Pour moi, la Conscience mère (qui fait figure de "substance pensante", effectivement : elle est immuable quels que soient ses modes d'expression, qui varient, eux, en fonction des individus) n'est pas singulière, quand bien même elle devrait être dite localement manifestée. Elle est "révélation" de ce qui est, de EST, dans quelque mode qu'il se manifeste ("révélation" de l'énergie cosmique à elle-même, nécessairement, mais aussi nécessairement imparfaitement, car sinon il n'y aurait aucune différence entre le voyant et le vu, et donc ni voyant ni vu, ce qui reste néanmoins pleinement suffisant pour révéler EST, Dieu même, ou l'énergie cosmique.) Pas facile à exprimer...

hokousai a écrit :J 'aurais plutôt tendance à exhausser l'inorganique et a en voir un état du vivant plutôt que l'inverse .( mais là dessus je ne m'avance pas trop )- C'est à dire que je fais du pan psychisme ( comme Spinoza met la pensée partout :D :D )

Tout est de l'énergie cosmique. Par ailleurs, s'il y a quelque chose mais (de fait) rien ni personne pour le voir, y a-t-il encore vraiment "quelque chose" ?
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Re: "Dieu miséricordieux"

Messagepar hokousai » 03 mai 2015, 23:05

Sescho a écrit :Mais tout le monde, à peu près, croit encore cela, au contraire : il n'y a qu'à regarder autour de soi, et en soi aussi... L'erreur de fait est très très loin d'être éradiquée (c'est déjà impossible, d'accord), c'est le moins que l'on puisse dire. De la différence entre la théorie et la pratique...


Vous parliez de se croire créateur absolu , je pense que personne ne se croit plus créateur absolu.
Reste que l'expérience consciente du dit" libre arbitre " fait que l'on se pense toujours créateur ... mais relatif. Relatif à notre nature laquelle s 'est expansée à plus que l' âme. Elle s'est expansée signifie que l'on se comprend comme une union corps -esprit ... conscience- inconscience et aussi une union individu- société et même à une union individu Nature.

Certes mais la question du libre- arbitre nous ramène à moins.... à moins que l' union avec la nature

La question ne se situe pas au niveau de l'énergie cosmique. Là pour moi c'est renvoyer une ignorance à une ignorance plus vaste encore.
J' affronte la question de la conscience et des choix, et de la faculté d'affirmer et de nier là où je la trouve. C'est à dire là où comme le dit Spinoza Dieu agit en tant qu' il produit l'esprit humain.

Passer de ma situation à la relation mystique avec Dieu sive natura me fait oublier ma situation et oublier la question .Or la question persiste et participer à l'énergie cosmique ne donne pas de réponse intelligible ( conceptuellement intelligible ).
A part la relativité du mode dans la substance, je ne vois pas de réponse convaincante à cette question.
Certes, mais c'est une abstraite et très théorique. On pose la substance et ses modes, on dit qu'il y a relation et relativité, mais on n'a rien expliqué. Il est évident que pour moi cette affirmation théorique ne suffit pas.
S'il y a relation quel genre de relation la substance entretient- elle avec les modes ?
.............................................

J' ose penser qu'il n' y a pas illusion complète à se sentir relativement libre au niveau des décisions conscientes .
Sinon je soutiendrais que le libre- arbitre est une illusion, sans discussion .

Comme je ne suis pas satisfait du tout de ce par quoi on remplace la dite illusion, je discute la thèse de l' illusion.
..........
Depuis le début de ma présence sur ce forum je discute cette thèse .

amicalement

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Re: "Dieu miséricordieux"

Messagepar sescho » 04 mai 2015, 10:25

hokousai a écrit :Vous parliez de se croire créateur absolu , je pense que personne ne se croit plus créateur absolu.

Je maintiens pourtant. C'est aberrant, cela ne tient pas l'examen une seconde, c'est tellement bête qu'on n'arrive même pas à définir ce prétendu "libre-arbitre créateur ex-nihilo" d'une "entité" qu'on ne sait pas définir, qui change (contradictoire), qui est inséparable de son environnement (contradictoire bis), mais c'est universellement répandu... La vanité règne manifestement. Avec arrive le souci de la valeur de cette prétendue création ex-nihilo. Car là, bizarrement, plus de libre-arbitre créateur ex-nihilo : la valeur est fixée par la Nature (il faut dire que si l'on fixe la valeur à son gré, ça n'a rien d'une valeur...) Donc il faut montrer que la création ex-nihilo est valeureuse, en particulier par comparaison - imaginaire - avec les autres, comme si l'on pouvait dans son libre-arbitre voir clairement ce qu'est la valeur, et donc la joie, et choisir tout aussi "librement" d'aller à rebours... Je le répète : c'est idiot par où qu'on le prenne ET c'est universellement répandu quand-même. C'est ce que veut dire Spinoza quand il dit que l'homme se trompe en ce qu'il se croit libre. C'est : l'homme se trompe en ce qu'il se croit créateur (et pas seulement cause intermédiaire prochaine.) Et la seule valeur c'est la vision intuitive de Dieu-Nature, dont le brouillage coïncide donc avec tous ces dysfonctionnements, qui cherchent la valeur là où elle ne se trouve pas, la perte de valeur étant en fait la base de la recherche...

Par ailleurs, côté aberrations assez évidentes, nous avons une colossale propension à traiter comme des choses parfaitement identifiées, de nature sûre et certaine, ce qui apparaît n'avoir rien de tel à l'examen, et dont nous ne pouvons donner de définition précise. Et on introduit cela partout dans de petits mots qui passent sans bruit. Tant qu'on se contentera de cela on n'en finira jamais. C'est pourquoi Spinoza commence par traiter des choses conçues en soi (celle-là sont claires par elles-mêmes) et des choses conçues en autre chose. Il n'y a par exemple pas l'ombre d'une sortie si l'on place, de fait sinon en théorie, le moi avant Dieu-Nature, comme déjà dit plusieurs fois.

hokousai a écrit :La question ne se situe pas au niveau de l'énergie cosmique. Là pour moi c'est renvoyer une ignorance à une ignorance plus vaste encore.

Pas du tout. "Energie cosmique" est un autre nom pour "Être", "Dieu", "Nature", etc., mais qui appuie plus sur l'idée de mouvement, et donc plus sur le sujet actif et changeant que sur l'objet passif et de nature (prétendue) fixe. Il suffirait, si du mental théorique n'occultait pas la vision intuitive directe au lieu de la libérer, de vraiment voir que "ce qui ne change pas, c'est le changement" pour résoudre tout problème. Quand on n'a pas l'idée intuitive directe, vivante, de Dieu-Nature (Spinoza), on a déjà tout raté : il n'y a rien qui soit de plus d'ignorance.

hokousai a écrit :
A part la relativité du mode dans la substance, je ne vois pas de réponse convaincante à cette question.
Certes, mais c'est une abstraite et très théorique. On pose la substance et ses modes, on dit qu'il y a relation et relativité, mais on n'a rien expliqué. Il est évident que pour moi cette affirmation théorique ne suffit pas.
S'il y a relation quel genre de relation la substance entretient- elle avec les modes ?

Encore une fois, cela n'a rien d'abstrait et de théorique quand on sort des définitions pour voir ce qu'elles représentent d'intuitif : la substance est ce qui se conçoit comme une "entité" au sens fort : elle est en elle-même et ne change donc en rien, rien ne venant de rien. Seul cela peut être absolument connu, dont la nature ne change pas et qui est perçu sans faire référence à une quelconque autre chose. Tout le reste n'est pas concevable par soi, mais seulement par autre chose. Dans ce cas vouloir le considérer par soi est aberrant.

Prenons maintenant les choses très concrètes qui sont autour de nous (ce qui n'est qu'un aspect du Tout) : se sont d'abord des étants, et donc une affirmation d'existence, d'être : ce n'est pas rien (dans tous les sens de la formule.) Les corps apparaissent donc seulement secondairement dans l'ordre d'affirmation, comme des manières ou mode d'être (affirmé tel.) Ce qui se conçoit par soi est simplement vu clairement et distinctement tel qu'il est, et ajouter un pourquoi est parfaitement inutile, et même nuisible. C'est aussi infini, éternel. Cela c'est l'être (ou Dieu, ou l'énergie cosmique lorsqu'on reconnaît le mouvement comme consubstantiel à l'être, etc.) Et comme ce qui s'affirme être comme ceci ne s'affirme pas comme autre chose, autrement dit s'affirme absolument, l'être (très concret des choses visibles, ici, encore une fois, pas du tout un truc fumeux) ne peut pas changer : rien ne vient de rien. En revanche, ce qui entre dans la catégorie des modes ou manières d'être peut très bien "changer" (glisser continument d'un mode à un autre) sans que l'être total change. C'est la "relativité du mode".
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Re: "Dieu miséricordieux"

Messagepar hokousai » 04 mai 2015, 13:25

Sescho a écrit :Ce qui se conçoit par soi est simplement vu clairement et distinctement tel qu'il est, et ajouter un pourquoi est parfaitement inutile, et même nuisible
.
Je ne m'intéresse pas au pourquoi mais plutôt au comment.
Le comment ça marche peut ( peut- être ) donner le sens suffisant.
Je dis peut- être parce qu'en matière de sens il y a ce qui suffit et ce qui ne suffit pas.
On s'arrête et ça suffit
ou bien non car ça ne suffit pas
mais je ne peux savoir à l'avance si cela va suffire . Je cherche donc le comment.
Comment la substance produit des modes.
Spinoza déconseile fort de partir des modes ( ça je le sais bien )...il reste que partant de la substance je ne comprends pas les modes. Peut -être faut-il partir des deux . Mais comment ?
Comment conceptualiser ?
Car il s'agit pour un philosophe lequel n'est pas un mystique a priori, de conceptualiser.


Et Spinoza n est pas très explicite sur cette question.
Dans la lettre sur l'infini à L Meyer il parle d 'une manière correcte de comprendre les modes versus une manière incorecte ... mais sur la manière correcte il est assez silencieux .

je le cite
Les modes mêmes de la Substance ne pourront jamais être connus droitement, si on les confond avec ces Êtres de raison que sont les auxiliaires de l’imagination. Quand nous faisons cette confusion, en effet, nous les séparons de la Substance et faisons abstraction de la manière en laquelle ils découlent de l’Éternité, c’est-à-dire que nous perdons de vue les conditions sans lesquelles ces modes ne peuvent être droitement connus.

http://spinoza.fr/lettre-xii-a-louis-meyer-ou-lettre-sur-linfini/

Je ne vois justement pas bien ce que j' ai perdu de vue. Les conditions?
Le passage de nature naturante à nature naturée par exemple.
Tout simplment l'irruption dans l Ethique des choses singulières.
C'est ça la question de l'individuation.

Donc je cherche avec d'autres philosophes. Que ce soit des phénoménologues ( par ex Michel Henry ) ou d 'autres plutôt dans un plan d' immanence ( concept de Deleuze ) tel que Raymond Ruyer ou Gilbert Simondon voir Hans Jonas )...et plus anciennement Duns Scot et son idée d' éccéité .
Entre parenthèses Deleuze ( qui n'est pas mon préféré ) est spinoziste sous bien des aspects ... les autres ne le sont pas ( bien que Michel Henry ait écrit son premier livre sur Spinoza )
............................

Cela dit je prends très au sérieux ce que vous écrivez.
Je ne vois pas là ce qu'il y aurait d' anti spinoziste. Chacun a son approche et toutes sont respectables. :)

amlicalement


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