L'existence des essences

Questions et débats touchant à la conception spinozienne des premiers principes de l'existence. De l'être en tant qu'être à la philosophie de la nature.
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bardamu
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Messagepar bardamu » 14 févr. 2006, 20:06

hokousai a écrit :(...)
Un corps étendu cause un corps étendu et une idée cause une idée .
Le mélange des deux attribut est très périlleux .( je ne dis donc pas plus que dans mon message précédent)

Je reprends :

lorsque Deleuze parle d'essences physiques, je pense qu'il oppose cela à "essences métaphysiques". Il se place dans une sorte d'aristotélicisme où il s'agirait d'ordonner la puissance, l'acte, le formel et le substantiel-matériel (pas l'étendu).

Appelons "métaphysique" ce qui parle de l'Etre en tant qu'être par opposition à ce qui parle des étants.
L'Ecole placerait les essences comme des êtres distinct des étants, dans une métaphysique de l'Etre, de la pluralité de substances et de leurs formes, alors que Spinoza, dès lors que toute chose particulière est mode, ne peut que mettre les essences de chose à égalité, toute dans l'immanence de l'unique substance, de l'Etre-étant, dans une seule "physique".

Leibniz conserverait une métaphysique, une transcendance de l'Etre, en la plaçant dans le possible. Si le monde est nécessaire, pour lui, ce serait de par le choix divin dans un possible (= non-nécessaire), le possible serait plus vaste que le nécessaire, que le monde.

Je crois que c'est cela que veut dire Deleuze : monde immanent = il n'y a pas de métaphysique des choses (même si il y a une distinction entre Nature naturante et nature naturée), "Ni réalité métaphysique, ni possibilité logique, l'essence de mode est pure réalité physique", elle fait partie de notre monde.

C'est pour cela qu'il développe ensuite comment les essences font partie du monde, en tant que quoi.

La question n'est donc pas lié à la pluralité des attributs et il n'y a nulle réduction à l'attribut étendu. On serait plutôt dans l'affirmation que les attributs (pensée, étendue ou tout autre) ne sont pas, eux non plus, métaphysiques, ne sont pas dans une séparation des étants mais sont bel et bien physiques, sont la Nature, la "physis", une seule substance.
Mais peut-être que dans le vocabulaire du sens commun du XXIe siècle, au lieu de dire que chez Spinoza toute chose est physique, préfèrerait-on dire que chez Spinoza toute chose est métaphysique, même la physique.
Etrange renversement du vocabulaire qui met avant ce qui vient après, qui met le métaphysique avant le physique.

Je ne sais pas si les autres commentateurs comprennent Deleuze comme moi, mais si c'est le cas, leur divergence sur la nature des essences ne doit pas porter sur leur caractère non-coupées des étants.
Modifié en dernier par bardamu le 15 févr. 2006, 02:32, modifié 1 fois.

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Messagepar hokousai » 15 févr. 2006, 01:34

à Bardamu
Oui , peut-être , je comprends mieux .Disons que je suis moins opposé à ce que vous dîtes là. Savoir si c’est ce que pense Deleuze je suis mal placé . Sur ce que j 'avais lu ( ce que vous présentiez ) j’avais du mal ….


C’est que j’ai un autre problème ,celui de l’intellect de Dieu ( voire ma réponse à Faun )
Et puis tout simplement sur l’usage du nom de Dieu privilégié par Spinoza (et non: substance ou nature )….personne ne relève ..il me semble qu' il y aurait à dire et sans doute contre moi . Le débat ne semble pas pouvoir démarrer là dessus .Sur l’intellect de Dieu c’est silence radio .
J’en reviens toujours à cette profession de foi ( c’est moi qui le dis ainsi ) de la lettre 32 à Oldenburg :« « je crois en effet qu’il y a dans la nature une puissance infinie de penser …. » » »

bien à vous
Hokousai

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Messagepar C162 » 17 févr. 2006, 03:43

..
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Messagepar C162 » 17 févr. 2006, 03:48

..
Modifié en dernier par C162 le 26 août 2010, 12:20, modifié 1 fois.

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Messagepar Pourquoipas » 19 févr. 2006, 12:33

Voir aussi le livre de Nicolas Israël, Spinoza. Le temps de la vigilance, Payot, 2001, dans le chapitre « La correspondance avec Blyenbergh – Le problème du mal » (p. 113-133, où il semble rejoindre la conception (de Moreau, par exemple) où l'essence d'une chose particulière serait un « espace de variation ». Voir par exemple la note 45 de la p. 124, où Israël écrit : « La nature humaine ne peut s'excéder elle-même, au-delà d'elle (Eth IV, 61, dem), ni en deçà (Eth IV, 45, coro 2, sc.) ; de même que les "variations (variationes)" de la matière en mouvement s'inscrivent dans un espace qui comporte des limites inférieures et supérieures (Lettre XII, p. 160, G IV, p. 59). »

Mouais...

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Messagepar hokousai » 19 févr. 2006, 23:16

Moi je vois un problème sur Spinoza et nous ..
Personne ne se risque plus à penser quoi que ce soit .

On a l 'apparition récurrente de sujet de bac et puis les renvois érudits

Moi je veux bien ....en fait , non , moi ça ne m'intéresse guère ....s 'il n’y a plus que cela .


Bon, je me permets de le dire ( vu le nombre de messages à mon compteur ) quelque part "ça craint ". Ou alors ça cogite fort dans l’ombre ..enfin bref ça veut plus sortir .

hokousai

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Messagepar bardamu » 20 févr. 2006, 02:13

C162 a écrit :(...)
Au sujet d'autres commentaires dont vous parlez dans votre premier message, il y a celui de Sévérac - il part de E 1P24C, E 2P8C et E 2P45S pour "concevoir...l'existence en acte d'une chose" : "conçue comme durée", "conçue comme essence de l'existence" (= "force de persévérance dans le fait d'exister") et il passe par E 5P29 pour préciser les deux types d'actualité (cf. P29 les choses sont conçues par nous comme actuelles de 2 manières...) - c'est à ce moment qu'il discute la thèse de Deleuze sur deux plans : celui de "l'existence de l'essence" (avec la désormais classique 'réalité physique' dont il craint qu'elle "ne fasse imaginer chez Spinoza un 'monde' des essences, tout aussi réel...que celui des existences"), celui de l'utilisation "du terme de durée pour qualifier l'essence" (en reprenant donc l'interprétation de E 1P24C, qu'il complète par E 3P7-8 - "il est possible également d'insister sur la présence de l'essence elle-même dans la chose qui dure"); bref, je peux vous envoyer une copie du chapitre intitulé "De l'activité divine à l'actualité modale : essence et existence des choses singulières". Et, si vous le souhaitez, je peux également vous faire parvenir une copie d'un séminaire de Matheron (1991) sur le même thème (opposition entre éternité et existence actuelle (E 2P8 et C); opposition entre 'nature même de l'existence' et durée (E 2P45); opposition entre vie éternelle et 'existence actuelle présente' (E 2P29 et S 1ère approche))

Amicalement,
C162

Salut,
La coutume sur le forum étant plutôt au tutoiement (l'exception justifiant la règle étant donnée par Hokousai san), je me permets d'y passer.

Merci pour les références, et pour les documents je te réponds par mail.

Je ne sais pas si il est très à propos d'en parler sans avoir lu le chapitre en question mais une phrase m'interpelle : "il craint qu'elle "ne fasse imaginer chez Spinoza un 'monde' des essences, tout aussi réel...que celui des existences"".

Je suppose que ce qui l'inquiétait c'était l'idée d'un deuxième monde, un mystérieux monde parallèle pour les essences.

Au demeurant, il dit "il est possible également d'insister sur la présence de l'essence elle-même dans la chose qui dure", ce qui semblerait aller dans le sens d'une réalité de l'essence dans les choses "physiques".

Par contre, il me semble correct de dire que les essences sont aussi réelles que les existences, voire "plus" réelles puisqu'elles définissent la perfection, la réalité-même des choses.

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Messagepar hokousai » 20 févr. 2006, 13:02

A Bardamu ( on va peut- être s’entendre)

)La question des essences est sempiternelle ,pour d’incontournables raisons ..
Il y a des régularité dans les choses particulières ,leur formes maintenues (l ‘ émergence des formes demande explication ) . des formes ayant une ressemblances ( évidemment, sinon pas de question des essences ). Il y a des régularités dans les séries de causes et d’effets donc des lois ( physiques ou autres ) .
On peut filer droit sur les essences ( sur ce concept là toujours remis sur l’ouvrage ).mais pas nécessairement sur des essences éternelles infinies ( en tout cas pas pour les choses particulières ).

………………………………………..

Le problème est obscurci par l’existence ramenée au maintenant (à ce qui s' actualise). Le réel serait réduit ainsi au réel actuel**, celui tombant sous les sens et dans la conscience actuelle du sujet ). On ne sait alors plus justifier d’une perdurance REELLE puisque le passé » n ‘est plus le REEL ni l’avenir non plus .Tout ce qui tient de la permanence semble soit tenir dans le vide soit dans un monde irréel .

L ‘essence ( ou la régularité formatrice ) semble bien perdurer quand les choses elles passent . La réalité de ces « matrices « semble bien HORS du maintenant à tout le moins échapper à la fugacité du maintenant .. Elles semblent bien existantes sur une durée plus élargie que le maintenant .
Mais cette durée ne semble pas avoir existence réelle aussi réelle que l’existence dans le présent de la conscience de l’esprit humain.
Et c’est là le problème .

Il faut donc concevoir une existence étendue (dans le sens d' élargie ) à plus que le présent actuel (mais pas éternelle ).

Le monde des essences n’est plus alors mystérieux .Il est pensé comme ne tombant pas sous les sens certes, mais pensé comme existant . Les essences sont pensées comme existantes dans une temporalité élargie ( mais pas éternelle )

Ce qui forme toujours de la même forme (une rose par exemple) existe dans une durée plus étendue que celle du présent actuel .Ce qui forme est pensable et pensé mais n’est pas visua lisable tel que la chose particulière l’est . Exister dans une durée plus étendue signifie « avoir une puissance d’exister plus grande « .
Il y a bien la pensée d’ existences invisibles réelles dans une durée plus élargie que le maintenant ..


Il ne s’agit pas d’un monde parallèle, il s’agit de mode ( des manière de former des corps ) dans l Etendue ...On est dans la nature naturée et non naturante .il ne s’agit pas d’essences éternelles infinies .Je comprends l’essence comme un mode .
La question est : est ce que la manière de croître d un rosier est réelle bien que non visible ( sauf dans ces effets )et ayant une durée notablement plus élargie que la rose elle même .

Ou bien on nie qu’il y ait ce genre de mode ou bien il faut bien le considérer comme REEL.


bienà vous
hokousai

**ce que j' ai pu faire fut un temps ..
C'est que exister réellement cela n 'est pas évident non plus à penser hors du maintenant .C'est pensable ,certes, mais cela reste beaucoup moins puissant comme pensée qu'exister "réellement maintenant" /hic et nunc .. donc je me réserve encore )

( je n'empêche personne de se tutoyer ..)


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