Espèces

Questions et débats touchant à la conception spinozienne des premiers principes de l'existence. De l'être en tant qu'être à la philosophie de la nature.
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sescho
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Messagepar sescho » 09 nov. 2007, 18:51

Faun a écrit :L'idée de Dieu est bien pour nous une idée singulière, qui se distingue de toutes les autres idées que notre esprit possède. Voir aussi les paragraphes 98 à 104 du traité de l'amendement de l'intellect.

Selon moi l'"idée de Dieu" dont il est question c'est l'entendement infini de Dieu (dans lequel il n'y a qu'une idée ; voir le fil "entendement infini et idée de Dieu") et non pas l'idée que nous en avons. Contrairement à ce que vous dites plus haut, le Mental humain n'intervient pas dans E2P8 ; on y est encore dans le fil de E1 et abordons la chose pensante en Dieu, en préparation. Le Mental humain apparaît avec E2P11 (outre les axiomes tous mis en tête.)

Quant au passage du TRE, déjà venu sur le même sujet, nous y trouvons :

Spinoza, traduit par E. Saisset a écrit :100. Mais il faut remarquer que par la série des causes et des êtres réels je n'entends point ici la série des choses particulières et changeantes, mais seulement la série des choses fixes et éternelles. Car pour la série des choses particulières sujettes au changement, il serait impossible à la faiblesse humaine de l'atteindre, tant à cause de leur multitude innombrable qu'à cause des circonstances infinies qui se rencontrent dans une seule et même chose et peuvent être cause qu'elle existe ou n'existe pas ; puisque l'existence de ces choses n'a aucune connexion avec leur essence, ou, comme nous l'avons déjà dit, puisqu'elle n'est pas une vérité éternelle.

101. Mais, après tout, il n'est pas besoin que nous en comprenions la série, l'essence des choses sujettes au changement ne se tirant pas de leur ordre d'existence, lequel ne nous représente que des dénominations extrinsèques, des relations ou tout au plus des circonstances, toutes choses bien éloignées de l'essence intime. Celle-ci ne peut être demandée qu'aux choses fixes et éternelles, et aux lois qui y sont inscrites comme dans leurs véritables codes et selon lesquelles toutes les choses particulières se produisent et s'ordonnent. Bien plus, les choses particulières et changeantes dépendent de ces choses fixes si intimement, et pour ainsi parler, si essentiellement, qu'elles ne peuvent sans elles ni exister ni être conçues. D'où il résulte que ces choses fixes et éternelles, quoique particulières, seront pour nous, à cause de leur présence en tout l'univers et de l'étendue de leur puissance, comme des universaux, c'est-à-dire comme les genres des définitions des choses particulières et changeantes, et comme les causes immédiates de toutes choses.


Ce qui est identique dans la partie et dans le tout et ne constitue l'essence d'aucune chose singulière : outre Dieu, l'Etendue d'un côté, la Pensée de l'autre, le mouvement dans le premier, l'entendement infini dans la seconde, l'existence de modes dans les deux : les lois, ou axiomes et propositions, ceux généralement admis étant appelés "notions communes."
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Messagepar Enegoid » 09 nov. 2007, 20:16

Je distingue la meute de loups qui comprend n loups, précisément, et l'espèce loup non dénombrable qui comprend tous les loups vivants morts et à venir.

La meute est un corps. L'espèce est un concept.

Idem pour l'homme, évidemment

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Messagepar Enegoid » 09 nov. 2007, 20:19

je crois être d'accord avec Seischo : les lois

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Messagepar Faun » 09 nov. 2007, 21:39

sescho a écrit :Selon moi l'"idée de Dieu" dont il est question c'est l'entendement infini de Dieu (dans lequel il n'y a qu'une idée ; voir le fil "entendement infini et idée de Dieu") et non pas l'idée que nous en avons. Contrairement à ce que vous dites plus haut, le Mental humain n'intervient pas dans E2P8 ; on y est encore dans le fil de E1 et abordons la chose pensante en Dieu, en préparation. Le Mental humain apparaît avec E2P11 (outre les axiomes tous mis en tête.)

Ce qui est identique dans la partie et dans le tout et ne constitue l'essence d'aucune chose singulière : outre Dieu, l'Etendue d'un côté, la Pensée de l'autre, le mouvement dans le premier, l'entendement infini dans la seconde, l'existence de modes dans les deux : les lois, ou axiomes et propositions, ceux généralement admis étant appelés "notions communes."


Je parlais bien sûr de l'idée de Dieu telle que nous la connaissons ou la contemplons par le troisième genre de connaissance, et non par le deuxième, qui correspond à ce que vous dites. L'idée de Dieu est certes intelligible par le deuxième genre de connaissance, comme dans le livre deux de l'Ethique, mais elle est aussi l'idée d'un être réel, et à ce titre l'idée d'un étant au plus haut point singulier. Les notions communes sont des idées du deuxième genre de connaissance, mais les essences réelles appartiennent au troisième.

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Messagepar sescho » 09 nov. 2007, 22:51

Je vous répéterais bien que l'Idée de Dieu dont il est question est celle qu'a Dieu de lui-même, ou plutôt simplement Dieu en tant qu'il est pensant, et non pas l'idée que nous avons de lui. Et aussi que le troisième genre de connaissance porte sur les mêmes choses (lois) que le deuxième mais vues intuitivement directement dans les choses singulières en acte, comme l'illustration de la proportion utilisée par trois fois par Spinoza le dit clairement. Mais nous n'allons pas reprendre ici successivement tous les fils du site...

Amicalement

Serge
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Messagepar hokousai » 10 nov. 2007, 00:31

Et aussi que le troisième genre de connaissance porte sur les mêmes choses (lois) que le deuxième mais vues intuitivement directement dans les choses singulières en acte, comme l'illustration de la proportion utilisée par trois fois par Spinoza le dit clairement.
(sescho)

Il est quand même un peu fâcheux que Spinoza n'ait pas pensé devoir se fendre d'un autre exemple .(que la proportion )

Ni d' ailleurs nous donner des exemples des notions communes hors des lemmes de la partie 2.

Et puis les lois ( de la nature)! Rappelez moi où il en énonce une .

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Messagepar Faun » 10 nov. 2007, 02:32

sescho a écrit :Je vous répéterais bien que l'Idée de Dieu dont il est question est celle qu'a Dieu de lui-même, ou plutôt simplement Dieu en tant qu'il est pensant, et non pas l'idée que nous avons de lui.


Dieu forme une idée de lui-même en tant que nous le comprenons, c'est en nous, qui sommes des parties de son esprit, qu'il se contemple.

Et aussi que le troisième genre de connaissance porte sur les mêmes choses (lois) que le deuxième mais vues intuitivement directement dans les choses singulières en acte, comme l'illustration de la proportion utilisée par trois fois par Spinoza le dit clairement.


Non, les lois ou règles qui constituent le deuxième genre de connaissance ne constituent l'essence d'aucune chose singulière, tandis que les étants réels sont compris par le troisième genre de connaissance en tant qu'essences singulières. Et l'on ne peut pas passer dans le troisième genre de connaissance sans être affecté de l'amour que Dieu éprouve pour lui-même. (proposition 32, 33, 35 et 36 de la cinquième partie). C'est à cela que l'on reconnaît et que l'on distingue les idées du troisième genre de connaissance, à l'affect de joie. D'où l'affinité évidente de cette connaissance avec la poésie. Rien à voir avec les mathématiques.
Modifié en dernier par Faun le 10 nov. 2007, 03:58, modifié 3 fois.

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Messagepar Faun » 10 nov. 2007, 03:51

bardamu a écrit :Si chez beaucoup de gens, "espèce" ne correspond qu'à une image (ours, lions, hyènes... vus à la télé), j'ose espérer que quelques notions d'écologie et d'Evolution réussissent malgré tout à passer et que les espèces soient pensées dans leur réalité vivante.


Justement, le mot d'espèce se prête à tant de définitions différentes qu'il nous plonge dans la plus grande confusion. Ne serait-il pas plus simple de l'abandonner à l'histoire de la philosophie et de créer un mot neuf, qui puisse s'accorder avec le concept clair que nous formons des populations réellement existantes dans la nature ?

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Messagepar Enegoid » 10 nov. 2007, 10:45

hokousai a écrit :Il est quand même un peu fâcheux que Spinoza n'ait pas pensé devoir se fendre d'un autre exemple .(que la proportion


Oui, mais ce n'est pas tout à fait vrai. Voir TRE (15) fin de paragraphe où il donne l'exemple de la connaissance que nous avons de l'union de notre âme avec notre corps, et deux autres exemples tirés des mathématiques.

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Messagepar sescho » 10 nov. 2007, 10:59

Faun a écrit :Dieu forme une idée de lui-même en tant que nous le comprenons, c'est en nous, qui sommes des parties de son esprit, qu'il se contemple.

Je ne vois d'où vous tirez cela. Si vous voulez jetez un coup d'œil au fil suivant :

Entendement infini et Idée de Dieu

Vous y verrez clairement que l'Idée (infinie) de Dieu est l'Entendement infini, et pas l'idée que nous nous en faisons (y compris nos idées adéquates - qui n'en font que partie ; E2P11S, E2P43S -, d'autant qu'il ne convient pas de les assembler si l'on rejette la réalité de la notion d'espèce...)

Vous me semblez faire une extrapolation hasardeuse de E2P11C, E2P43S et surtout de E5P50S (qui se réfère à E1P21, mais où transparaît E1P28, E2P9, E2P20Dm, ...) Les propositions suivantes je pense (dans un ensemble de propositions fondamental pour la compréhension de la chose) devraient vous alerter :

Spinoza a écrit :E2P29S : Je dis expressément que l’âme humaine n’a point une connaissance adéquate d’elle-même, ni de son corps, ni des corps extérieurs, mais seulement une connaissance confuse, toutes les fois qu’elle perçoit les choses dans l’ordre commun de la nature ; par où j’entends, toutes les fois qu’elle est déterminée extérieurement par le cours fortuit des choses à apercevoir ceci ou cela, et non pas toutes les fois qu’elle est déterminée intérieurement, c’est-à-dire par l’intuition simultanée de plusieurs choses, à comprendre leurs convenances, leurs différences et leurs oppositions ; car chaque fois qu’elle est ainsi disposée intérieurement de telle et telle façon, elle aperçoit les choses clairement et distinctement, comme je le montrerai tout à l’heure.

E2P30 : Nous n’avons de la durée de notre corps qu’une connaissance fort inadéquate.

Démonstration : La durée de notre corps ne dépend pas de son essence (par l’Axiome 1, partie 2), ni de la nature absolue de Dieu (par la Propos. 21, partie 1), notre corps étant déterminé à exister et à agir d’une certaine façon par des causes qui sont elles-mêmes déterminées par d’autres causes à exister et à agir d’une certaine manière particulière, et celles-ci par d’autres encore, et ainsi à l’infini. La durée de notre corps dépend donc de l’ordre commun de la nature, et de la constitution des choses. Or l’idée ou connaissance de la manière dont les choses sont constituées est en Dieu, en tant qu’il a les idées de toutes ces choses, et non pas en tant qu’il a seulement l’idée du corps humain (par le Corollaire de la Propos. 9, partie 2) ; c’est pourquoi la connaissance de la durée de notre corps est en Dieu fort inadéquate, en tant qu’il constitue la nature de l’âme humaine ; en d’autres termes (par le Corollaire De la Propos. 11, partie 2) cette connaissance est fort inadéquate dans notre âme. C. Q. F. D.

Et encore :

Spinoza a écrit :E2P45 : Toute idée d’un corps ou d’une chose particulière quelconque existant en acte enveloppe nécessairement l’essence éternelle et infinie de Dieu.

Démonstration : L’idée d’une chose particulière et qui existe en acte enveloppe nécessairement tant l’essence que l’existence de cette chose (par le Corollaire de la Propos. 8, partie 2). Or ; les choses particulières (par la Propos. 15, partie 1) ne peuvent être conçues sans Dieu ; et comme elles ont Dieu pour cause (par la Propos. 6, partie 2), en tant que Dieu est considéré sous le point de vue de l’attribut dont elles sont les modes, l’idée de ces mêmes choses (par l’Axiome 4, partie 1) doit envelopper le concept de l’attribut auquel elles se rapportent, et par conséquent (en vertu de la Déf. 6, partie 1) l’essence infinie et éternelle de Dieu. C. Q. F. D.

E2P46 : La connaissance de l’essence éternelle et infinie de Dieu que toute idée enveloppe est adéquate et parfaite.

Démonstration : La démonstration de la précédente proposition est générale ; et soit que l’on considère une chose comme partie ou comme tout, l’idée de cette chose, idée d’une partie ou d’un tout, peu importe, enveloppera l’essence éternelle et infinie de Dieu. Par conséquent, ce qui donne la connaissance de l’infinie et éternelle essence de Dieu est commun à toutes choses, et se trouve également dans la partie et dans le tout : d’où il suit (par la Propos. 38, partie 2) que cette connaissance est adéquate. C. Q. F. D.

E2P47 : L’âme humaine a une connaissance adéquate de l’infinie et éternelle essence de Dieu.

Démonstration : L’âme humaine a des idées (par la Propos. 22, partie 2) par lesquelles (en vertu de la Propos. 23, partie 2) elle se connaît elle-même ainsi que son corps (par la Propos. 19, partie 2), et les corps extérieurs (par le Corollaire de la Propos. 16 et par la Propos. 17, partie 2), le tout comme existant en acte. Donc (par les Propos. 45 et 46, partie 2), elle a une connaissance adéquate de l’infinie et éternelle essence de Dieu.


Faun a écrit :... les lois ou règles qui constituent le deuxième genre de connaissance ne constituent l'essence d'aucune chose singulière, tandis que les étants réels sont compris par le troisième genre de connaissance en tant qu'essences singulières.

Non. Les lois sont perçues suivant le troisième genre de connaissance en action au sein des étants particuliers (et nous ne pouvons pas avoir de connaissance adéquate des essences singulières dans leur entièreté.)

Faun a écrit :... Rien à voir avec les mathématiques.

Il va falloir en parler à Spinoza, pour qu'il modifie son exemple de la proportion pour décrire les 3(/4) genres de connaissance... ;-)

Mais j'admets que si l'on voit une loi à l'œuvre dans un étant particulier, ce n'est pas en référence à la notion d'espèce, quoique la loi ait été perçue par un raisonnement qui y fait appel (l'essence ou la nature humaine, par exemple.)
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