Qu'en est-il de l'âme des enfants morts ?

Questions et débats touchant à la conception spinozienne des premiers principes de l'existence. De l'être en tant qu'être à la philosophie de la nature.
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Faun
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Messagepar Faun » 27 nov. 2007, 18:05

A vrai dire le corps de l'homme n'est pas plus mortel que le corps de Dieu, puisque celui-ci est une partie de celui-là, et que le corps de Dieu, qui se confond avec l'attribut étendu, est éternel.

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Ulis
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Messagepar Ulis » 27 nov. 2007, 18:06

à Flumigel
Il n'y a rien d'immatériel dans la nature, et l'âme est un corps. Les corps sont éternels encore qu'éternellement affectés par les causes extérieures
ulis

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hokousai
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Messagepar hokousai » 27 nov. 2007, 20:34

mon cher Faun

Pour une fois où vous aviez l'occasion de parler d 'un cas unique ! Vous auriez pu parler de votre corps et non du corps de l'homme en général .

hokousai

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Messagepar Faun » 28 nov. 2007, 07:59

hokousai a écrit :
Pour une fois où vous aviez l'occasion de parler d 'un cas unique ! Vous auriez pu parler de votre corps et non du corps de l'homme en général .


Je ne vois pas ce que cela change au raisonnement.

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Messagepar Joie Naturelle » 28 nov. 2007, 09:28

Faun a écrit :A vrai dire le corps de l'homme n'est pas plus mortel que le corps de Dieu, puisque celui-ci est une partie de celui-là, et que le corps de Dieu, qui se confond avec l'attribut étendu, est éternel.


Ce n'est pas parce que l'homme est une partie de Dieu qu'il ne peut mourir. Si on se coupe un doigt, notre doigt va mourir, mais nous non.

Lorsque notre corps se décompose et finit par partir en poussière, il est bien difficile de concevoir qu'il n'est pas mortel, puisqu'il n'existe plus en tant que tel, et ne signifie plus rien dès lors que la dernière mémoire vivante qui avait souvenir de ce corps meurt à son tour.

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Messagepar Joie Naturelle » 28 nov. 2007, 13:20

Finalement, après plus ample réflexion, je peux concevoir les propos de Faun de la manière suivante :

Si l'on cesse de considérer chaque homme comme un être individualisé (avec son identité propre qui fait qu'il peut parler de lui en disant "je"), et qu'au-delà de cette conception, on essaie de le comprendre avant tout comme une simple manifestation de la vie (au sens large), alors peut-être peut-on affirmer que la mort n'existe pas, ou qu'elle ne constitue qu'une étape provisoire d'un processus nous faisant passer de la vie au "néant", puis à nouveau du "néant" à la vie.

Je mets ici le mot "néant" entre guillemets car je veux l'extraire de son sens habituel de vide, de rien. Le néant dont je parle, et que personne ne connaît véritablement puisqu'il reste un mystère, ne désignerait qu'un état de non vie (humaine, animale, végétale) permettant toujours un "retour" ultérieur à la vie, ou une re-création de la vie.

En effet, d'où venons-nous ? Il faut bien que nous provenions de quelque chose, que nous soyons la conséquence d'une cause précise, même si celle-ci demeure pour nous obscure. Nous étions tous déjà morts avant de naître, c'est à dire que nous étions tous quelque part comme en germe potentiel dans ce faux néant dont je viens de parler. La mort, nous connaissons déjà, et pourtant, nous sommes là. Faut-il dès lors parier sur la permanence de la vie ?

Par ailleurs, l'âme et la mort de l'âme ont-t-elle seulement la moindre importance ? On peut très bien vivre sans âme, c'est par exemple le cas des plantes. C'est toujours le corps qui meurt (et peut-être donc seulement de façon provisoire) : corps de l'homme, de l'animal, du végétal. Lorsqu'un corps abrite une âme, celle-ci disparaît logiquement avec lui. Car l'âme et le corps ne sont qu'une seule et même chose (cf Spinoza). Mais le corps du végétal meurt de la même manière, qu'il possède ou non une âme.

Avec la mort d'un corps, c'est une manifestation de la vie qui disparaît. Avec la naissance d'un nouveau corps, c'est une manifestation de la vie qui réapparaît. La vie se manifeste de diverses manières, et revient sans cesse, sous une forme ou une autre. La vie au sens large est peut-être donc éternelle.

L'homme doit apprendre à s'oublier en tant qu'individu-centre de l'univers, à sortir de ses schémas trompeurs sur sa relation au monde. Et si l'homme s'était complètement mépris, depuis des milliers d'années, sur son importance réelle ? Et si il n'était qu'une manifestation de la vie, et rien de plus ?

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Messagepar hokousai » 28 nov. 2007, 18:53

cher Faun

Cela ne change peut- être rien à ce que vous en pensez mais vous m( avez tanné pendant 15 jours avec l 'exceptionnalité de l' unique et maintenant dans un cas précis là ou il y a exceptionnalité , c'est à dire ma mort ,pas la votre ,vous me parlez de la mort en général .

hokousai

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Messagepar philonomad » 29 nov. 2007, 18:34

Chère Milena,

voici une lettre de Spinoza qui vous éclairera peut-être sur l'un ou l'autre aspect de la question que vous vous posez. En cas de difficulté, j'essaierai de répondre à vos questions. Patrick K.

LETTRE XVII

Au très savant et très avisé Pierre Balling,
B. De Spinoza.

Cher ami, votre dernière lettre, écrite sauf erreur le 26 du mois dernier, m'est parvenue régulièrement. Elle me remplit de tristesse et d'inquiétude. Je trouve bien quelque allègement à considérer la sagesse et la force d'âme qui vous font mépriser les attaques de la fortune ou plutôt de l'opinion, alors qu'elles sont le plus pressantes. Mon inquiétude cependant ne laisse pas de croître de jour en jour et, pour cette raison, je vous prie et vous adjure par notre amitié de ne pas vous lasser de m'écrire abondamment. Pour ce qui est des présages dont vous faites mention, à savoir qu'en un temps où votre enfant était encore en parfaite santé, vous avez entendu des gémissements, pareils à ceux qu'il a poussés quand il fut malade, et qui furent bientôt suivis de son décès, je suis porté à croire que ce ne furent pas de vrais gémissements mais seulement quelque chose que vous avez imaginé. Vous dites, en effet, que vous étant levé et ayant prêté l'oreille pour les entendre, vous ne les entendiez plus aussi nettement que vous le faisiez auparavant et que vous le fîtes plus tard vous étant rendormi. Cela montre que ces gémissements n'étaient rien qu'imagination : votre imagination affranchie, se donnant carrière, a pu se représenter des gémissements bien définis de façon plus effective et plus vive qu'au moment où vous étiez debout et dirigiez votre ouïe vers un lieu bien déterminé. Je puis confirmer et en même temps expliquer ce que je vous dis là par ce qui m'est arrivé à moi-même, l'hiver dernier, à Rijnsburg. Un matin, alors que le ciel déjà s'éclairait, m'éveillant à la suite d'un rêve très pénible, les images qui s'étaient présentées à moi dans le rêve, se sont offertes à mes yeux avec autant de vivacité que si c'eussent été des objets réels, en particulier celle d'un certain Brésilien noir et crasseux que je n'avais jamais vu auparavant. Cette image disparaissait en très grande partie quand, pour me soulager, je fixais mon regard sur un livre ou quelque autre objet, mais sitôt que j'en détournais les yeux et que je cessais de regarder attentivement quoi que ce fût, la même image du même nègre reparaissait avec la même vivacité à diverses reprises jusqu'à ce que, peu à peu, elle disparût du champ visuel. Je considère comme étant certainement de même nature ce qui s'est présenté comme une vision à mon sens interne et ce qui s'est offert à votre sens auditif. Mais la cause étant très différente dans les deux cas, ce qui vous est arrivé à vous fut un présage, tandis qu'il n'en a pas été ainsi pour moi ; cela se comprend bien par la raison que je vais dire. Les effets de l'imagination naissent de la constitution soit du corps, soit de l'âme. Pour éviter toute prolixité, je me contenterai ici de le prouver par la seule expérience. Nous savons par expérience que les fièvres et les autres maladies du corps sont des causes de délire, que ceux qui ont un sang épais n'imaginent que des rixes, des sévices, des meurtres et autres choses semblables. Nous voyons aussi que l'imagination peut être sous la dépendance de la seule constitution de l'âme, quand, ainsi que nous en faisons souvent l'expérience, elle suit en tout les traces de l'entendement, enchaîne et ordonne ses images, comme l'entendement ses démonstrations ; de sorte que nous ne pouvons presque rien connaître par l'entendement dont l'imagination ne forme à sa suite une image. Cela étant, les effets de l'imagination qui proviennent de causes corporelles ne pourront jamais être des présages de choses futures parce que leurs causes n'enveloppent aucune chose à venir. En revanche les effets de l'imagination ou images qui tirent leur origine de la constitution de l'âme peuvent être des présages de quelque chose future, parce que l'âme peut toujours pressentir confusément ce qui sera. Elle peut donc l'imaginer aussi nettement et vivement que si un objet de même sorte était présent. Un père, dirai-je (pour prendre un exemple tel que vous-même), aime son fils de telle façon que lui-même et le fils qu'il chérit font un seul et même être. Et comme il doit y avoir nécessairement dans la pensée (ainsi que je l'ai démontré ailleurs) une idée de l'essence des affections propres au fils et de leurs conséquences, que d'autre part, en raison de son union avec son fils, le père est une partie du fils, il est nécessaire aussi que l'âme du père participe de l'essence idéale du fils, de ses affections et de leurs conséquences ; cela aussi je l'ai plus complètement démontré ailleurs. Puisque maintenant l'âme du père participe idéalement de tout ce qui découle de l'essence du fils, le père peut, ainsi que je l'ai dit, imaginer parfois quelqu'une des choses qui en découlent aussi vivement que si elle se présentait à lui, pourvu que les conditions suivantes soient remplies : 1° Il faut que l'événement qui se produira au cours de la vie du fils soit notable ; 2° qu'il soit tel qu'on puisse l'imaginer facilement ; 3° que le moment où cet événement se produira ne soit pas trop éloigné ; 4° enfin que le corps soit bien constitué. Il ne s'agit pas de la santé, mais il doit être libre, affranchi de tout souci, de toute affaire pouvant du dehors troubler les sens. Il peut être utile aussi que les objets auxquels nous pensons aient évoqué fréquemment des images semblables à celles qui auront une certaine signification. Par exemple, si pendant que nous parlons avec tel ou tel homme, il arrive que nous entendions plusieurs fois des gémissements, en cas que nous pensions à cet homme, ces gémissements qui frappaient nos oreilles quand nous parlions avec lui, nous reviennent à la mémoire. Telle est, cher ami, mon opinion sur la question que vous posez. J'ai été très bref, je le reconnais, mais j'ai fait en sorte que vous eussiez un sujet de m'écrire à la première occasion.

Voorburg, le 20 juillet 1664.


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