Réflexion sur l'argument ontologique

Questions et débats touchant à la conception spinozienne des premiers principes de l'existence. De l'être en tant qu'être à la philosophie de la nature.
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Cette partie du forum traite d''ontologie c'est-à-dire des questions fondamentales sur la nature de l'être ou tout ce qui existe. Si votre question ou remarque porte sur un autre sujet merci de poster dans le bon forum. Merci aussi de traiter une question à la fois et d'éviter les digressions.
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hokousai
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Messagepar hokousai » 08 juin 2008, 12:01

Chère Louisa

Je suis sceptique sur l’ universalité de la raison laquelle se donne pratiquement toujours comme universelle mais qui dans les faits ne l’est pas .Et qui ne peut pas l’être parce que les raisons qui sont le carburant de la Raison, ces raisons ,ces bonnes raisons évoluent avec le temps .

Spinoza est très optimiste quand il parle de vérités éternelles , éternelles peut être , mais pas sempiternelles .
Pas sempiternelles au sens où si ces vérités ne s’actualisent plus elles n’ alimentent plus la raison

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Faun
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Messagepar Faun » 08 juin 2008, 12:29

Ulis a écrit :
Moi, je n'irai pas jusqu'à dire que l'amour de la vie de chacun inclu l'amour de la tristesse des autres. Nous aimons Dieu car nous sommes un mode de lui même. La relation entre les modes ne peut être d'amour qu'au second degré (via dieu)
Ce qui nous conduit est simplement notre intérêt bien compris. Notre utilité propre "ne pas faire à autrui ce que l'on ne voudrait pas que l'on nous fasse" il n'y a effectivement pas de morale la dedans mais que de la logique, de l'intelligence, de la connaissance. Bien vivre c'est faire en sorte de ne pas être asservi par le vulgaire. L'amour pour l'homme libre ne se commande pas, il est naturel.
Cher Faun, vous dérapez en idéalisant le spinoziste, il est comme tout le monde, il n'aime pas les cons. Il est même élitiste et vous le savez bien.


Je ne pense pas déraper, car l'amour intellectuel de Dieu dont parle Spinoza consiste bien dans un amour pour les hommes, tous, et non seulement les hommes libres. Dans le corollaire proposition 36 partie 5, et aussi dans le scolie, Spinoza parle de cet amour en termes plus mystiques sous le nom de "Gloire", et il dit emprunter ce terme aux "textes sacrés". Ces textes pour Spinoza sont évidemment la Bible. Or que disent ces textes ?

"Vous avez appris qu'il a été dit: Tu aimeras ton proche, et tu haïras ton ennemi.
Et moi je vous dis: Aimez vos ennemis et priez pour ceux qui vous persécutent,
afin que vous deveniez enfants de votre Père qui est dans les cieux; car il fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et descendre la pluie sur les justes et sur les injustes.
Si en effet vous aimez ceux qui vous aiment, quelle récompense méritez-vous? Les publicains eux-mêmes n'en font-ils pas autant?
Et si vous ne saluez que vos frères, que faites-vous d'extraordinaire? Les païens eux-mêmes n'en font-ils pas autant?
Vous donc, vous serez parfaits comme votre Père céleste est parfait."

Evangile selon Matthieu chapitre 5.

C'est en effet l'idée de perfection, liée à l'idée de Dieu, donc à l'idée de réalité (définition 6 partie 2) qui nous permet d'entrer dans cet amour intellectuel. Car les modes sont également des degrés de perfection, et donc tous les hommes, qui sont des modes de la substance divine, sont parfaits. Cela s'applique évidemment aux affects humains, qui tous sont des expressions de la puissance des hommes, et donc de la puissance de Dieu. Ainsi la haine, la colère, l'envie, l'orgueil, le mépris, etc. sont des perfections humaines, des propriétés de l'essence humaine, donc des vertus, et non des vices qu'il faudrait combattre et détruire, comme la morale religieuse, qui passe son temps à juger les hommes en fonction d'un modèle idéal de l'homme qui n'existe nulle part, le voudrait.

"Et cela, tout le monde l'accordera, car tout le monde voit avec admiration, dans les animaux, des manières d'être et d'agir qu'il réprouve dans les hommes : telles les guerres que se livrent les abeilles, la jalousie des pigeons, etc. ; méprisables dans l'humanité, ce sont là choses qui nous paraissent ajouter à la perfection des animaux."

Lettre 19.

Toute la différence entre le philosophe et l'ignorant consiste dans le seul fait que le philosophe connaît les affects qui l'émeuvent, et donc peut les utiliser et les manier à sa guise, dans une certaine mesure cependant, tandis que l'ignorant les subit, et est manié par eux. Mais les affects sont les mêmes, et tous les éprouvent nécessairement.

Voyez par exemple l'usage que fait Nietzsche des affects de haine dans la plupart de ses textes, y compris à l'égard de Spinoza.

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Messagepar Ulis » 08 juin 2008, 15:48

Cher Faun,
Oui mais ces réalités humaines(haines colères...) qui donc sont des perfections puisque parce que par réalité et par perfection on entend la même chose, le but de tout spinoziste est bien de s'en guérir par la connaissance (vrai mode de guérison) comme on guérit toute névrose. Et comme il n'est pas thérapeute, il se tient à l'écart de la contagion. Il préfère la compagnie de l'homme libéré. Si par amour vous entendez pacte de non agression + compassion = ok.
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Messagepar Faun » 08 juin 2008, 17:21

Ulis a écrit :Si par amour vous entendez pacte de non agression + compassion = ok.
Ulis


Vous vous moquez ? N'avez vous pas lu nos échanges mouvementés avec Sescho au sujet de la compassion ?

En tous cas personnellement je préfère la compagnie des gens passionnés et sensibles aux huitres bouddhistes indifférentes à tout sous prétexte de "sagesse".

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Messagepar hokousai » 08 juin 2008, 18:27

à Faun


En tous cas personnellement je préfère la compagnie des gens passionnés et sensibles aux huitres bouddhistes indifférentes à tout sous prétexte de "sagesse


Vous semblez de parti pris .
Il apparaît que vous connaissez le bouddhisme superficiellement et que vous l’ avez en aversion .
Voila une passion qui circonscrivant mal son objet ne se connait pas .

Je ne dis pas que bien connaître le bouddhisme conduit à y adhérer mais au moins à savoir si l’objet de la passion mérite de s’investir aussi négativement (comme diraient tels spinozistes )

Car enfin vos propos sont excessifs .

. Hitler aimait bien les chiens donc la société protectrice des animaux est une officine nazis .

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Messagepar bardamu » 08 juin 2008, 18:51

Faun a écrit :(...) Cela s'applique évidemment aux affects humains, qui tous sont des expressions de la puissance des hommes, et donc de la puissance de Dieu. Ainsi la haine, la colère, l'envie, l'orgueil, le mépris, etc. sont des perfections humaines, des propriétés de l'essence humaine, donc des vertus, et non des vices qu'il faudrait combattre et détruire, comme la morale religieuse, qui passe son temps à juger les hommes en fonction d'un modèle idéal de l'homme qui n'existe nulle part, le voudrait.
(...)

Penses-tu dire ce que dit Spinoza ?
Il ne faut pas confondre les vertus de la nature qui ne connaît ni bon ni mauvais et les vertus de l'homme. La haine est une impuissance chez Spinoza, manque de force d'âme.
Spinoza propose aussi un modèle d'homme, le sage.

DE L'ESCLAVAGE DE L'HOMME

Ethique IV, prop 45 a écrit :La haine ne peut jamais être bonne.

Démonstration : Quand nous haïssons une personne, nous nous efforçons de la détruire (par la Propos. 39, part. 3), c'est-à-dire (par la Propos. 37, part. 4) de faire une chose qui est mauvaise. Donc, etc. C. Q. F. D.

Scholie : On remarquera que, dans cette Proposition comme dans les précédentes, j'entends par haine une passion qui a les hommes pour objet.

Corollaire I : L'envie, la dérision, le mépris, la haine, la vengeance, toutes les passions qui se rapportent à la haine ou qui en proviennent sont mauvaises, conséquence qui résulte aussi des Propos. 37, part. 4, et 39, part. 3.

Corollaire II : Tout ce que nous désirons par l'effet de la haine est honteux et, dans l'Etat, contraire à la justice. C'est ce qui résulte également de la Propos. 39, part. 3, et de la Défin. des choses honteuses et injustes (voyez le Schol. de la Propos. 37, part. 4).

Ethique IV, prop. 73, scolie a écrit :Toutes ces qualités de l'homme libre que nous venons d'exposer se rapportent au courage, c'est-à-dire (par le Schol. de la Propos. 59, part. 3) à la bravoure et à la force d'âme. Et je ne crois pas nécessaire d'expliquer l'une après l'autre toutes les propriétés du courage, bien moins encore de faire voir que l'homme courageux n'a pour personne ni haine, ni colère, ni envie, ni indignation, ni mépris, et qu'il ne se laisse point exalter par l'orgueil. Car tout cela se déduit facilement des Propos. 37 et 46, part. 4, ainsi que tout ce qui concerne la vie véritable et la religion. Je veux dire que la haine doit être vaincue par l'amour, et que tout homme que la raison conduit désire pour les autres ce qu'il désire pour soi-même. Ajoutez que l'homme courageux, ainsi que nous l'avons remarque ; déjà dans le Schol. de la Propos. 50, part. 4, et dans plusieurs autres endroits, médite sans cesse ce principe, que toutes choses résultent de la nécessité de la nature divine, et en conséquence, que tout ce qu'il juge mauvais et désagréable, tout ce qui lui pareil impie, horrible, injuste et honteux, tout cela vient de ce qu'il conçoit les choses avec trouble et confusion, et par des idées mutilées ; et dans cette conviction, il s'efforce par-dessus tout de comprendre les choses telles qu'elles sont en elles-mêmes, et d'écarter les obstacles qui nuisent à la vraie connaissance, comme la haine, la colère, l'envie, la moquerie, l'orgueil, et autres mauvaises passions que nous avons expliqués plus haut. L'homme courageux s'efforce donc, par cela même, autant qu'il est en lui, de bien agir et de vivre heureux.
Mais jusqu'à quel point l'humaine vertu peut-elle atteindre ces avantages, et quelle est sa puissance ? c'est ce que j'expliquerai dans la partie suivante.

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Messagepar hokousai » 08 juin 2008, 19:05

à Bardamu

j'avais bien lu

effectivement c'est assez mal dit

'''''' Ainsi la haine, la colère, l'envie, l'orgueil, le mépris, etc. sont des perfections humaines, des propriétés de l'essence humaine, donc des vertus, et non des vices qu'il faudrait combattre et détruire, comme la morale religieuse, qui passe son temps à juger les hommes en fonction d'un modèle idéal de l'homme qui n'existe nulle part, le voudrait.''(Faun)

je pense pas que Faun devrait revoir sa phrase .

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Messagepar Ulis » 08 juin 2008, 19:37

à Faun,
Désolé, je n'ai pas lu vos échanges mouvementés avec secho, je suis un intermitent du forum.
ulis

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Messagepar Faun » 08 juin 2008, 20:37

Oui mon cher Bardamu, je sais tout cela, j'essaie d'aller plus loin.

Ma raison est que les livres des Spinoza sont pleins d'une sorte de colère joyeuse, de fureur drôle, d'ironie féroce.

Même le Christ se mit en colère, par exemple lorsqu'il chassa les marchands du temple de Jérusalem, à coups de fouet.

Il existe donc des haines rationnelles, comme la proposition 59 partie 4 le suggère. Nuançons. Car ce ne sont plus des haines-passions, qui sont tout autant, me semble-t-il, à redouter que les amours-passions. Ce sont de véritables actions, mais qui ne perdent rien de leur puissance affective, et qui sont infiniment plus efficaces que les froides démonstrations du second genre de connaissance. Il existe donc des affects qui conviennent au troisième genre de connaissance, et ces affects sont les mêmes que ceux du premier genre, à la différence près qu'ils sont connus, compris et vécus comme des expressions de la nature de Dieu.

Ce que je veux dire, c'est que l'amour des hommes est impossible sans aimer les affects des hommes, tous leurs affects. Sinon on aime un modèle idéal, une chimère qui n'existe que dans notre imagination. Cela me paraît être cela, "l'amour de Dieu pour les hommes".

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Messagepar hokousai » 08 juin 2008, 23:41

Cher Faun

IL me semble que Spinoza ne parle pas de haines rationnelles

( dans la prop 59/4)
Il explique que certaines actions peuvent être déterminées par des images confuses ou par ce que nous concevons clairement et distinctement .
( exemple lever le bras )
Et qu à toutes les actions déterminées par une passion nous pouvons être conduit par la raison.
Ce qui signifie que les actions déterminé par la Haine peuvent être conduites par la raison .
IL est bien évident qu’alors ce ne sont plus des actions de haines et que lever le bras sous l emprise de la colère n’a plus lieu d’être sou la conduite de la raison
Ou alors ce n’est plus lever le bras pour frapper
( car si tout désir qui naît d’un affect qui est une passion ne serait d’aucun usage …..on ne lèverait plus le bras !)

Vous me semblez introduire un révisionnisme funeste qui consisterait à suggérer que l’assassin jubilatoire qui comprend clairement et distinctement son action agit pas la nécessité de sa nature et raisonnablement .

Il y a là une transfiguration et une absolution voire dissolution des affects mauvais , mais c’est un tour de passe passe difficilement crédible .


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