Le sentiment même de soi II

Questions et débats touchant à la conception spinozienne des premiers principes de l'existence. De l'être en tant qu'être à la philosophie de la nature.
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Messagepar nepart » 31 oct. 2008, 00:35

Effectivement, je me suis mal exprimée car dire "je ne suis pas moi" n'a pas de sens. La question est ce que sera moi dans le futur.

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Messagepar hokousai » 31 oct. 2008, 01:22

cher nepart

ben, oui !
et l'étrange est que changeant du tout au tout à cinq ans et soixante ans on a toujours le même sentiment toujours aussi neuf , du MOI .
..............................................................

Et même plus ( et c'est encore différent) on a bien le sentiment quelque part d’être le même ,c'est à dire de ne pas avoir changé entièrement .
On a le sentiment d'une continuité , d'une évolution certes mais continue du même individu .

On se souvient et la mémoire est un garant de l’identité, comme un livre qu'on porte en soi et qui même si on en réécrit un peu les pages anciennes, raconte des histoires qui sont les nôtres .
Alors on change mais l’histoire , notre histoire personnelle reste .

Cette mémoire nous joue parfois des tours et on dit bien aussi que l’inconscient la reforme et déforme
Mais la perdre ce serait comme mourir vivant .

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Messagepar nepart » 31 oct. 2008, 07:12

L'argument de la mémoire ne me semble pas suffisant, car elle pourrait très bien être garant de l'illusion.

D'autant plus que tu n'as aucune souvenir de ta naissance, or c'est bien la tienne.

Et cette sensation de moi, serait un peu comme le libre arbitre. On était sur d'en avoir, mais en réfléchissant...

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Messagepar 8 » 31 oct. 2008, 09:00

Mon post est passé sans etre remarque, alors je vais faire le contraire de Louisa je vais developper.
Nous ne sommes pas cause de nous meme,comme chacun sait nous sommes la cause papa maman, notre essence n’enveloppe pas notre existence prop 1.
Pas d’existence reel pour le moi, ce qui est reel c’est notre volonté à etre.
La continuité infinie de la nature existe parce que dieu est cause de lui meme.
La permanence a comme essence une nature finie c’est la reproduction dans le temps
De quelque chose de fini et n’a pas d’existence reelle elle nous affecte tout au plus

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Messagepar hokousai » 31 oct. 2008, 10:32

cher nepart L'argument de la mémoire me semble suffisant pour que
je me reconnaisse comme le même individu .

(puisqu'on en est là et non plus à la question de la conscience de soi -même /qui est une autre question )

Vous n 'êtes peut -être plus le même individu mais le livre qui vous le raconte vous semble le même .

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Messagepar bardamu » 31 oct. 2008, 22:54

Louisa a écrit :(...)
C'est l'un des endroits de son message qui me faisait penser que pour Henrique, l'Individu (en tant qu'union des corps, donc en tant que chose corporelle) est le "siège" du changement permanent, et le "sujet" le siège de toute invariabilité (étant universel, il est le "pouvoir de penser" qui caractériserait tout homme).
(...)

Bonjour Louisa,
ce serait sans doute à Henrique de s'en expliquer mais sa pensée me semble assez claire : "si par moi, on entend ce qui dans mon corps ou mon mental demeure identique à soi et fonde tout le reste, alors je suis la Nature et le corps et le mental auxquels la connaissance du premier genre m'identifient habituellement (par utilité sociale essentiellement) n'en sont que les affections ou modifications."
Je traduis cela par : si par moi on entend l'invariable alors je suis un mode déterminé de la Nature, une essence singulière, et ce qu'on appelle "moi" par le 1er genre de connaissance n'est que les affections de cette essence.
Et ce que je développais était que pour appeler "moi" l'invariable, il fallait faire un effort de connaissance pour sortir du "moi" selon le 1er genre. Il y a alors un jeu dans les temporalités puisque un être peut se définir par sa vie organique "commune" (acte de naissance à acte de décès) et son "moi" invariable sera cette vie-là, ou bien il peut "mourir" plusieurs fois dans sa vie organique, c'est-à-dire changer d'essence. A mon sens, Henrique s'en tenait au cas d'une vie "commune", sans changement d'essence.

En d'autres termes : la subjectivité qui par le 1er genre nous conditionne à nous identifier à des choses inessentielle, se dépasse par la compréhension de son identité comme mode déterminé de la Substance.
Il n'y a pas d'opposition entre le sujet et l'individu, il y a seulement une plus ou moins grande adéquation entre le sujet et l'individu, une plus ou moins grande adéquation entre ce qu'on pense être et ce que l'on est.
Rien de bien original en définitive, une version d'un "Connais toi toi-même", d'un "Deviens ce que tu es", d'un "Je est un Autre".

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Messagepar bardamu » 31 oct. 2008, 23:19

nepart a écrit :Effectivement, je me suis mal exprimée car dire "je ne suis pas moi" n'a pas de sens. La question est ce que sera moi dans le futur.

Si le "moi" est l'invariable, l'identité essentielle, et le "je" la subjectivité, le sentiment de ce qu'on est, alors "je ne suis pas moi" a tout son sens : le sentiment de ce que je suis ne correspond pas forcément à ce que je suis réellement et c'est pour cela qu'on en vient à se demander "que serais-je dans le futur ?".
Lorsque le sentiment de ce que l'on est correspond à ce que l'on est, alors on se contente de vivre ce que l'on est, le "je" est accordé au "soi" et tout cela fait effort pour persister dans son être.

La question de ce que sera "moi" dans le futur, ce n'est à mon sens, que le "je" qui cherche un "vrai moi", qui fluctue entre diverses images tant qu'il n'a pas trouvé une réalité stable de son être. L'aboutissement de cette recherche n'est pas garanti puisqu'il dépend de rencontres favorables (tomber sur l'Ethique par exemple) et d'une puissance de penser de manière juste mais je crois que quand on y arrive, on vit pleinement le présent et on évite les angoisses du "que serai-je demain ?" ou du "que serais-je si...".

Béatitude : Amor fati, amour du destin, de l'être tel qu'il est, de soi tel qu'on est, des choses telles qu'elles sont, finies les questions sur "qui suis-je, où vais-je, dans quel état j'erre", carpe diem, cueillir le jour, vivre au présent.

"Il est donc utile au suprême degré, dans la vie, de perfectionner autant que possible l'entendement, la raison, et c'est en cela seul que consiste le souverain bonheur, la béatitude. La béatitude, en effet, n'est pas autre chose que cette tranquillité de l'âme qui naît de la connaissance intuitive de Dieu, et la perfection de l'entendement consiste à comprendre Dieu, les attributs de Dieu et les actions qui résultent de la nécessité de la nature divine. La fin suprême de l'homme que la raison conduit, son désir suprême, ce désir par lequel il s'efforce de régler tous les autres, c'est donc le désir qui le porte à connaître d'une manière adéquate et soi-même, et toutes les choses qui tombent sous son intelligence."

"et certes, si la joie consiste dans le passage à une perfection plus grande, la béatitude doit consister pour l'âme dans la possession de la perfection elle-même."

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Messagepar Louisa » 01 nov. 2008, 02:50

Bardamu a écrit :
louisa a écrit :(...)
C'est l'un des endroits de son message qui me faisait penser que pour Henrique, l'Individu (en tant qu'union des corps, donc en tant que chose corporelle) est le "siège" du changement permanent, et le "sujet" le siège de toute invariabilité (étant universel, il est le "pouvoir de penser" qui caractériserait tout homme).
(...)


Bonjour Louisa,
ce serait sans doute à Henrique de s'en expliquer mais sa pensée me semble assez claire : "si par moi, on entend ce qui dans mon corps ou mon mental demeure identique à soi et fonde tout le reste, alors je suis la Nature et le corps et le mental auxquels la connaissance du premier genre m'identifient habituellement (par utilité sociale essentiellement) n'en sont que les affections ou modifications."
Je traduis cela par : si par moi on entend l'invariable alors je suis un mode déterminé de la Nature, une essence singulière, et ce qu'on appelle "moi" par le 1er genre de connaissance n'est que les affections de cette essence.


Bonjour Bardamu,
merci de tes explicitations. Comme déjà dit, je n'avais pas très bien compris la phrase de Henrique que tu viens de citer. La façon dont tu le traduis me semble être tout à fait plausible (même si ce serait intéressant si Henrique voulait bien confirmer cela), et je n'y avais pas pensé moi-même. Je reprends ci-dessous ce qui pour moi pose problème dans cette interprétation du spinozisme, mais en tout cas, j'aimerais bien savoir ce que Henrique entendait plus précisément par "sujet" et par "Individu", puisqu'il a dit qu'il est important de bien distinguer les deux. L'Individu est-ce pour Henrique ce qui demeure invariable, comme tu l'avais dit, ou plutôt ce qui change sans cesse, comme je l'avais compris moi-même? Si je l'ai mal compris sur ce point, alors que c'était précisément ce qui selon lui était très important, il faut vraiment que je relise tout son message en présupposant l'inverse de ce que j'avais compris jusqu'à présent.

Henrique, pourrais-tu dire si ce que tu voulais désigner par "Individu" et par "sujet" était ce que Bardamu a compris ou ce que j'avais compris moi-même? Merci!!

Bardamu a écrit :Et ce que je développais était que pour appeler "moi" l'invariable, il fallait faire un effort de connaissance pour sortir du "moi" selon le 1er genre. Il y a alors un jeu dans les temporalités puisque un être peut se définir par sa vie organique "commune" (acte de naissance à acte de décès) et son "moi" invariable sera cette vie-là, ou bien il peut "mourir" plusieurs fois dans sa vie organique, c'est-à-dire changer d'essence. A mon sens, Henrique s'en tenait au cas d'une vie "commune", sans changement d'essence.


je crains que je ne comprenne pas vraiment ce que tu dis ici .. . Ce que j'ai compris, je crois, c'est qu'aussi bien toi-même que Henrique voulez appeler "moi" ce qui est l'invariable. Je ne vois pas très bien ce qui justifierais cette décision, mais supposons qu'elle soit légitime, dans le spinozisme. Dans ce cas vous dites que seul ce qui relève du deuxième et troisième genre de connaissance relève du "moi". En effet, dans l'E5 Spinoza dit bel et bien que seule la partie de mon Esprit qui est composée d'idées adéquates est éternelle, et subsiste après la mort du Corps. Donc si l'on veut appeler "moi" ce qui est éternel, il faut nécessairement dire que tout ce qui appartient au premier genre de connaissance n'est PAS "moi".

Or ce qui rend à mon sens cette décision peut "spinoziste", c'est le fait qu'en l'E3P3 et P9 Spinoza dit explicitement que ce qui constitue l'essence singulière d'une chose, ce sont autant les idées inadéquates que les idées adéquates, autrement dit autant le premier genre de connaissance que le deuxième et troisième. Si donc on veut appeler "moi" ce qui sans moi ne peut être (voir la définition de l'essence d'une chose singulière, au début de l'E2), il me semble qu'on est obligé de prendre le premier genre de connaissance avec. En effet, PERSONNE d'autre n'a mes idées inadéquates à moi que moi. Personne d'autre se trompe lorsque dans mon Esprit il y a une idée inadéquate, sauf moi. Tandis que l'on sait que toute chose singulière s'efforce à persévérer dans son être non seulement en tant que celui-ci contient des idées adéquates, mais AUSSI en tant qu'il a des idées inadéquates.

Bardamu a écrit :En d'autres termes : la subjectivité qui par le 1er genre nous conditionne à nous identifier à des choses inessentielle


ce serait quoi, ces "choses inessentielles", à partir du moment où Spinoza dit explicitement que les idées inadéquates constituent elles aussi notre essence singulière à nous?

Bardamu a écrit : se dépasse par la ompréhension de son identité comme mode déterminé de la Substance.


à mon avis, il faut plutôt dire que lorsque l'Esprit comprend quelque chose, il CHANGE d'idées, il acquiert une puissance supérieure, et donc il change d'essence (mais cela n'est qu'une hypothèse, bien sûr; tout argument contre cette idée m'intéresse).

Bardamu a écrit :Il n'y a pas d'opposition entre le sujet et l'individu, il y a seulement une plus ou moins grande adéquation entre le sujet et l'individu, une plus ou moins grande adéquation entre ce qu'on pense être et ce que l'on est.
Rien de bien original en définitive, une version d'un "Connais toi toi-même", d'un "Deviens ce que tu es", d'un "Je est un Autre".


en effet, dans ce cas il n'y a rien d'original. Ce n'est pas que je crois que Spinoza est original en tout, mais tel que je le comprends pour l'instant, il apporte à ce sujet réellement quelque chose de nouveau, quelque chose de non encore pensé avant lui (voire aujourd'hui). Pourquoi? Parce que JAMAIS il ne parle d'une "adéquation" entre "sujet" et "individu". L'adéquation, dans le spinozisme, ne concerne QUE la NATURE de l'idée, pas le rapport entre l'idée et son objet, comme c'est le cas dans le thomisme et dans l'opinion commune actuelle. Enfin, cela se discute, bien sûr, mais disons que pour l'instant je crois qu'il faut supposer une "potentialité" et donc une "aliénation" possible pour pouvoir soutenir la thèse que toi-même et Henrique proposez, là où Spinoza recuse tout potentialité (tout est toujours déjà en acte; voir P. Sévérac) et que le terme d'aliénation est trop hégélien pour pouvoir être spinoziste (voir, de nouveau, P. Sévérac ... or comme c'est moi qui défends ici la thèse de Sévérac, je veux bien essayez de l'expliciter si quelqu'un trouve qu'elle est fausse).
L.

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Messagepar bardamu » 02 nov. 2008, 11:14

Bonjour Louisa,

Reprenons.

Je crois que c'est Kant qui dans sa critique du Cogito cartésien faisait remarquer que si le fait de penser était indubitable, la nature de ce qui pense n'était pas déterminé. Le "Je" est à construire, construction typique de l'homme occidental moderne. J'ai notamment souvenir du témoignage d'un Kanak rapporté par M. Leenhardt disant que les missionnaires lui avait fait découvrir une identité personnelle, indépendante.
Extrait de "Do kamo, la personne et le mythe dans le monde mélanésien :
M. Leenhardt a écrit :Ainsi un individu n'est et n'existe que par rapport à quelqu'un d'autre : "lui et son père, lui et son oncle, lui et sa femme, lui et sa cousine croisée, lui et son clan etc.." (...) Le canaque n'est pas une personne, il est un personnage jouant un rôle par rapport à un autre : personnage, il est interchangeable avec tous ceux qui occupent la même position et jouent le même rôle social. Si il meurt, il prend une autre position sociale et assume d'autres rapports avec les vivants ; mais la gamme des rapports qu'il entretenait auparavant reste identique à ce qu'elle était puisque d'autres sont là qui assurent la continuité.
Le principe vital renferme des variations dont les notions de "kamo" et de "bao"


Bref, retour à notre homme occidental et à son "Je suis moi".

Si j'ai bien suivi le raisonnement de Henrique, il proposait la construction suivante :
- à partir de propriétés communes (S., philosophe, né le... mort le...), pouvait être déterminé une identité : " il y a identité de ce qui constitue le corps de la naissance à la mort, à savoir l'étendue comme affirmation d'une existence en plusieurs dimensions (impliquant l'effort de persévérer autant que possible dans son être : E3P6)"
- ce serait un "moi" du 2nd genre de connaissance correspondant en fait à ce qu'on retient de commun dans la vie d'un corps
- les aléas de cet être aurait été pour lui des affections/modification correspondant notamment aux idées du 1er genre de ce "Je" : "si par moi, on entend ce qui dans mon corps ou mon mental demeure identique à soi et fonde tout le reste, alors je suis la Nature et le corps et le mental auxquels la connaissance du premier genre m'identifient habituellement (par utilité sociale essentiellement) n'en sont que les affections ou modifications".
- bien que cette construction soit basée sur la durée, on peut éventuellement la rapporter à quelque lois éternelles générales
- mais il n'y a pas là d'essence singulière (il peut y avoir plusieurs personnes dites philosophes nés le... et morts le... ) : "si donc ce pouvoir de la pensée de se poser elle-même est le même pour tous, il ne constitue l'essence d'aucun individu, d'aucune chose singulière, c'est-à-dire qu'individualité et subjectivité sont deux choses à distinguer (mais pas pour autant à opposer)."
- l'individu avec son essence singulière sera aussi soumis à des affections diverses (d'où le 1er genre de connaissance) mais cela ne correspondra pas forcément à ce "Je" qui a été construit sur un raisonnement légitime (2nd genre) ou qui n'est qu'impressions vagues du premier genre (mémoire, fantasmes, faux souvenirs..., Dostoïevski est fort pour ces personnages qui se construisent des vies passées fantasmatiques).

Donc, si tes objections sont basées sur l'idée d'un "moi" qui aurait été identifié à un être singulier éternel, elles n'ont pas lieu d'être. Au contraire, ce "moi" est construit par rapport à la durée d'un corps (et donc pas à l'éternité) et ne correspond pas à une essence singulière.

D'autre part, au moins pour moi, il ne s'agit pas d'affirmer un "moi" qui serait évoqué dans Spinoza mais plutôt de faire une analyse "anthropologique" de ce que l'homme occidental appelle son "moi". Pour la plupart des gens de notre culture, ce "moi" est une évidence, il s'agit donc de savoir ce qu'on peut entendre par là, et d'expliquer la prégnance de cette expérience/conception.

Pourquoi en voyant une photo d'un enfant, a-t-on effectivement le sentiment d'être face à une image de soi, comment construit-on cette reconnaissance identitaire et dans quelle mesure est-elle légitime ?
Si ces thèmes sont marginaux chez Spinoza vu qu'il ne semble guère avoir le souci du "moi", de la construction d'une identité subjective, cela reste un questionnement existentiel pour nombre de gens comme en témoigne la question de Nepart.

Il serait d'ailleurs peut-être louable de s'efforcer de conserver l'esprit "naïf" de sa question et ne pas partir dans des réflexions trop techniques qui le dépassent (cf ce qu'est devenu l'autre discussion).

Louisa a écrit :Or ce qui rend à mon sens cette décision peut "spinoziste", c'est le fait qu'en l'E3P3 et P9 Spinoza dit explicitement que ce qui constitue l'essence singulière d'une chose, ce sont autant les idées inadéquates que les idées adéquates, (...)
Bardamu a écrit :En d'autres termes : la subjectivité qui par le 1er genre nous conditionne à nous identifier à des choses inessentielle

ce serait quoi, ces "choses inessentielles", à partir du moment où Spinoza dit explicitement que les idées inadéquates constituent elles aussi notre essence singulière à nous?

Juste un mot là-dessus :
pour rester accessible à Nepart, je prendrais un exemple :
L'idée inadéquate est un peu comme un trou dans le gruyère : nécessaire pour distinguer le gruyère sur l'étal du fromager, sans objet lorsqu'on mange le fromage.
L'essentiel pour qui tend à la sagesse n'est pas de s'attacher aux trous mais à la partie active, à ce qui a de la matière, du goût.
Certes l'essence de l'esprit est l'idée du corps avec ses trous, ses faiblesses, mais celles-ci ne sont rien par elles-mêmes et lorsqu'on passe à l'essence dans sa singularité il ne reste que le plein, le goût.

Dernière chose : "adéquation" peut être utilisé dans son sens commun, il ne faut pas toujours y voir un "parler spinozien" et si "JAMAIS il ne parle d'une "adéquation" entre "sujet" et "individu"", Spinoza dit qu'au départ l'homme ne se connaît pas lui-même et qu'à la fin "possédant par une sorte de nécessité éternelle la conscience de soi-même et de Dieu et des choses, jamais il ne cesse d'être ; et la véritable paix de l'âme, il la possède pour toujours".
Traduire ça en "sujet" et "individu" a peut-être un intérêt pédagogique dès lors qu'on part de l'opinion commune actuelle.

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Messagepar hokousai » 02 nov. 2008, 12:09

je cite

""""""""""On peut être incertain et dubitatif à
propos de tout, sauf de sa propre identité. A preuve, le sceptique le plus radical ne se prend
jamais pour quelqu’un d’autre, sauf dans les cas graves - et rares- de certains troubles de la
personnalité. Mais derrière cette apparence de facilité se cache cependant l’une des questions
les plus aporétiques que la philosophie ait jamais posée""""""""""

(Bado Ndoye,)


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