Qu'est ce que la causalité immanente ?

Questions et débats touchant à la conception spinozienne des premiers principes de l'existence. De l'être en tant qu'être à la philosophie de la nature.
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Messagepar alcore » 15 juin 2009, 09:47

PhiPhilo a écrit : Ce dont parle Badiou dans sa Théorie des Catégories, c'est d'une authentique multiplicité atomique (l'Un n'existe pas, etc.). A contrario, on ne peut pas parler de "multiple" dans le cas de Spinoza, tout au plus de "divers", ou de "multiple imaginaire".


Badiou, l'Etre et l'événement :

"spinoza a une conscience aiguë de ce que les multiples présentés, qu'il appelle des choses singulières sont en général des multiples de multiples" (129)

"Pour Spinoza le compte pour un d'un multiple, la structure, c'est la causalité. Une combinaison de multiples est un multiple-un de ce qu'elle est l'un d'une action causale"

Sur le multiple (33)

" "Multiple" se dit comme effet de la présentation, telle que rétroactivement appréhendée comme non-une dès lors que l'être-un est un résultat. Mais "multiple" se dit aussi d ela composition du compte, soit le multiple comme "plusieurs uns" comptés par l'action de la structure. Il y a une multiplicité d'inertie, celle de la présentation, et une multiplicité de composition, qui est celle du nombre et de l'effet de structure."

Badiou distingue donc bien deux types de multiples (tout comme Spinoza), celui qui se définit par rapport à une unité opératoire, la multiplicité consistante ou de structure, qui est une multiplicité "impure" et une multiplicité inconsistante, présentée en deça de toute opération et véritablement infinie.

D'où ces conséquences

a) "l'ontologie ne peut qu'être une théorie des multiplicités inconsistantes en tant que telles " 36
b)"il paraît irrecevable que le multiple en tant que multiple se compose d'Uns, puisque la présentation, qu'il s'agit de présenter, est en soi multiplicité, et que l'un n'y est qu'un résultat" 36

Libre à vous d'y voir un atomisme qui distinguerait le "divers" du "multiple" !

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Messagepar alcore » 15 juin 2009, 12:32

Pour en finir avec l'atomisme supposé de Badiou:

"S'il y a des "atomes", ils ne sont pas, comme le croyaient les matérialistes de l'Antiquité, un deuxième principe de l'être, soit l'un après le vide, mais des compositions du vide lui-même, réglées par les lois idéales du multiple dont l'ontologie dispose l'axiomatique.
L'ontologie ne peut donc compter comme existant que du vide." p71, l'Etre et l'événement

Il serait en tout état de cause que Monsieur le professeur soit un peu plus précis dans le termes qu'il emploie et les références qu'il avance, souvent partielles et vagues, ce qui ne peut que nuire à un échange de vues spinozistes.

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Messagepar bardamu » 15 juin 2009, 13:59

alcore a écrit :
Oui !
A une nuance près c'est que je fais une distinction (reste à voir si Spinoza la fait aussi clairement) entre ce qui est autre et ce qui est extérieur.

Il me semble que l'affirmation : rien n'est hors de la substance, n'est pas équivalente à : rien n'est autre que la substance, puisque précisément la substance est autre que les modes et les modes autres que la substance (c'est la définition même dumode)

Il me semble que ce qui est DANS la substance peut très bien être autre chose que la substance, sans quoi on ne voit pas où s'arrêterait la substance et commenceraient les modes.

L'altérité n'est pas l'extériorité.

Tout à fait, j'aurais dû dire "extérieur".
Spinoza fait une différence entre l'essence de la substance et des modes, les modes sont donc bien autres que la substance.

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Sinusix
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Messagepar Sinusix » 15 juin 2009, 14:36

Bonjour à tous,

Je me permets de regretter, une fois encore, cher Alcore, que vous ne mettiez pas un minimum de rigueur formelle dans votre argumentation, ce qui me (nous) permettrait de rejeter plus aisément certaines des préventions bien senties de PhiPhilo.

Ce préambule étant assumé, et preuve qu'on peut, sinon penser, du moins faire réfléchir sur et par Internet, je reviens sur quelques une de vos observations que j'ai eu le bonheur de croire pouvoir comprendre.

alcore a écrit :
bardamu a écrit :Je suppose que c'est ce que veut dire alcore : partir de Dieu comme composition absolument infinie dont l'unicité n'est qu'une propriété parce qu'il n'y a pas d'Autre.


Oui !
A une nuance près c'est que je fais une distinction (reste à voir si Spinoza la fait aussi clairement) entre ce qui est autre et ce qui est extérieur.


Il me semble que cette distinction est omniprésente dans l'Ethique et constamment enveloppée dans le commerce causal.

Remarquons deux choses :
1/ La causalité externe, laquelle s'accompagne de la distinction numérique, n'a de sens qu'à l'égard des modes finis.
2/ Sur le plan de l'essence, il n'y a pas de causalité extérieure (les essences étant indépendantes de toute détermination par les causes extérieures).

Analysons ceci à la lumière de :
1/ E1 Axiome V, selon lequel : Les choses qui n'ont rien de commun entre elles ne peuvent pas non plus se comprendre l'une par l'autre, autrement dit, le concept de l'une n'enveloppe pas le concept de l'autre. J'en conclus, compte tenu de E2P7, que la réalité (l'existence) de l'une n'enveloppe pas la réalité (l'existence) de l'autre.
2/ E1P3, selon laquelle : Des choses qui n'ont rien de commun entre elles, l'une ne peut être cause de l'autre.
3/ E1P17 Scolie, selon lequel : Le causé diffère de sa cause précisément par ce qu'il tient d'elle.

Synthétiquement résumé, ceci me semble bien signifier que, dans le commerce des choses, il ne peut jamais y avoir de causalité adéquate de A vers B, dans l'expression A cause B ; par conséquent, s'il y a bien extériorité de A vers B, sur le plan des existences, il n'y a pas, du fait du mode de fonctionnement du monde des essences, depuis la tour de contrôle qu'est la substance, d'altérité au niveau des essences, la plage de recouvrement se situant, selon les cas, à un plus ou moins haute niveau de complexité. C'est d'ailleurs en ce sens que, personnellement, je ne crois pas à l'essence singulière de la chose singulière, mais à l'essence de genre de la chose singulière.

alcore a écrit :Il me semble que l'affirmation : rien n'est hors de la substance, n'est pas équivalente à : rien n'est autre que la substance, puisque précisément la substance est autre que les modes et les modes autres que la substance (c'est la définition même du mode)

Il me semble que ce qui est DANS la substance peut très bien être autre chose que la substance, sans quoi on ne voit pas où s'arrêterait la substance et commenceraient les modes.


On pourrait imaginer ceci de la façon suivante.

Supposons que (étant précisé que les modalités rendant possible l'expérience pourraient contredire le principe "philosophique) je place dans un même récipient ad hoc 2N atomes d'hydrogène pris dans une lointaine galaxie, et N atomes d'oxygène pris sur notre bonne vieille terre, alors même que "les histoires" desdits atomes se sont éloignées depuis plusieurs milliards d'années, nous devrions obtenir N molécules d'eau (c'est ainsi que je comprends la référence à l'eau dans E1P15 Scolie). Quelle que soit la façon dont on "interprète" le phénomène (totalité de l'information universelle présente dans toute chose singulière ou "présence universelle indivisible" des lois), il y a bien mise en jeu d'un principe situé DANS la substance, tout en étant AUTRE que la substance, ou plutôt n'étant qu'une partie de la substance. J'observe qu'on ne peut restreindre ce principe de la Loi à un attribut (par exemple la Pensée au sens de l'intelligibilité de la Loi), mais que "la Loi" en question, porte bien entendu effet sur tous les attributs simultanément.
Quelque simpliste que soit cet exemple (pas plus que la quatrième proportionnelle), il permet "d'imager" ce qu'il faut comprendre par cause immanente, les molécules d'eau n'étant que la forme nouvelle, extérieure à eux, de la collection d'atomes mis en présences, placés sous la férule inévitable des lois indivisibles de la substance indivisible, c'est-à-dire, malgré cette extériorité, constitutifs d'un mode distinctement organisé de la même réalité sous-jacente.

C'est pourquoi, me semble-t-il (la causalité émanative étant provisoirement mise de côté, qui pourrait être considérée comme dissociation de l'unité indivisible de la substance entre "ses lois" et la partie d'elle même sur laquelle elle ferait porter ces lois, en "l'évacuant" d'elle-même), la notion de cause transitive se limite à une classe particulière d'effets, ou d'affections.
J'aurais en effet inclination à chercher à distinguer, comme je l'ai déjà exprimé et ce qui pose maints problèmes d'analyse, le commerce des choses débouchant sur un être nouveau (hydrogène + oxygène ; fruit humain de la rencontre de Pierre et Marie) et celui débouchant sur une situation nouvelle entre êtres ayant conservé, nonobstant l'affection mutuelle, leur identité (le coup de pied dans le ballon). A partir du moment où, dans le deuxième cas, aucunes essences nouvelles autres que celles du pied et du ballon ne sont appelées à intervenir (sous réserve des attendus contextuels du jeu de ballon), il est facile de parler de cause transitive puisque la tour de contrôle n'intervient pas et que, de mon point de vue, le déterminisme Spinoziste n'intervient qu'au seul niveau du rapport entre la trajectoire du ballon et les caractéristiques du coup de pied donné.

alcore a écrit :L'altérité n'est pas l'extériorité.


Dont acte.

alcore a écrit :En outre, cette distinction n"invalide pas la possibilité plus difficile à évaluer chez Spinoza d'une extériorité INTERNE à la substance, sans laquelle je ne vois pas comment comprendre la divisibilité des modes.


C'est là qu'on peut vous reprocher de tomber dans le galimatias.

alcore a écrit :En effet, quand Spinoza dit que les effets de l'attribut sont DANS l'attribut, que signifie ce "dans" ?


N'est-ce pas tout simplement que la conjugaison de deux pensées est encore une pensée, ou que l'effet dans l'Etendue de la rencontre d'un astéroïde et de la terre va être constaté dans l'Etendue.

alcore a écrit :La lecture spontanée est soit spatialisante soit aristotélicienne. on se représente un espace DANs lequel les modes seraient ou bien un sujet dans lequel les modes seraient.


Avec le minimum de rigueur formelle, que deviendrait cette phrase, s'il vous plaît.

alcore a écrit :Mais précisément les modes ne sont DANS la substance que dans la mesure où ils sont des EFFETS ; or un effet est toujours distinct de sa cause ; la cause pose un effet comme distinct d'elle. La causalité consiste précisément à poser de l'extériorité et en même temps a reprendre l'effet en le rattachant à la substance comme un mode. Etre DANS la substance cela signifie: ETRE DANS LA CAUSALITE, cad être pris dans la force qui pose.


C'est ce que j'ai essayé de développer ci-dessus, si j'ai bien compris cette phrase un peu ésotérique à première lecture.

alcore a écrit :D'où une double distinction à mon sens :
a) altérité-extériorité
b) extériorité absolue-extériorité relative

Les modes sont autres que la substance et extérieurs à la cause tout en étant DANS la substance.


Après analyse, on a l'impression de concevoir/comprendre ce que vous voulez dire. Mais l'impression seulement.
C'est pourquoi je pense, comme PhiPhilo, qu'il faut un minimum de rigueur formelle et/ou explicative, car il me semble illusoire, sauf à tomber dans le "jeu de mots" de vouloir résumer en une ligne ce qui exige, pour être conçu/compris, la manipulation de nombreuses démonstrations.

alcore a écrit :Sans quoi, encore une fois, d'où viendrait la divisibilité des modes ? Où s'arrête la substance ?


La substance ne s'arrête nulle part. Quel que soit le mode qu'un entendement infini puisse concevoir, il est "en puissance" déjà là.
C'est cela l'infini en acte.

Amicalement

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Messagepar alcore » 15 juin 2009, 15:06

Sinusix a écrit :
Supposons que (étant précisé que les modalités rendant possible l'expérience pourraient contredire le principe "philosophique) je place dans un même récipient ad hoc 2N atomes d'hydrogène pris dans une lointaine galaxie, et N atomes d'oxygène pris sur notre bonne vieille terre, alors même que "les histoires" desdits atomes se sont éloignées depuis plusieurs milliards d'années, nous devrions obtenir N molécules d'eau (c'est ainsi que je comprends la référence à l'eau dans E1P15 Scolie). Quelle que soit la façon dont on "interprète" le phénomène (totalité de l'information universelle présente dans toute chose singulière ou "présence universelle indivisible" des lois), il y a bien mise en jeu d'un principe situé DANS la substance, tout en étant AUTRE que la substance, ou plutôt n'étant qu'une partie de la substance. J'observe qu'on ne peut restreindre ce principe de la Loi à un attribut (par exemple la Pensée au sens de l'intelligibilité de la Loi), mais que "la Loi" en question, porte bien entendu effet sur tous les attributs simultanément.


Cher Sinusix

MErci pour ces développements. Il y aurait beaucoup à dire sur la causalité extérieure ou transitive, et sur l'origine ou les conditions de possibilité d'une telle "extériorité", fût-elle celle du fini.

a) vous faites référence à l'exemple de l'eau. Pouvez vous préciser la lecture que vous faites de E1,15 ? Je ne suis pas certain d'en avoir saisi le sens.

b) A votre corps défendant vous introduisez une expression équivoque, celle de "parties de la substance". En elle même la substance, toute substance est indivisible et n'est jamais composée de parties. La multiplicié infinie qu'elle enveloppe échappe à une analyse en termes de rapport tout-parties. Si la substance est le Tout, ce sera en un autre sens.
Mais, par ailleurs, SPinoza n'hésite pas à dire que l'homme n'est qu'une partie de la nature, et que la nature, au moins dans la préface à Eth 4, est identifiée à Dieu.
Toutefois, le plus souvent, me semble t il, quand Spinoza emploie le terme "partie" ce n'est pas directement en référence à la substance, mais à un de ses modes infinis. Par ex, l'entendement est une partie de l'entendement infini de Dieu, lequel est une idée, un mode infini. L'univers lui même étant un mode, une production immédiate de l'attribut Etendue, il est concevable que les modes en soient des parties.
Tout ceci pose le problème que j'ai déjà évoqué de l'introduction de rapports d'extériorité (cause transitive-effet, tout-parties, divisibilité) dans les modes qui sont répugnent à la nature de la substance et donc de Dieu.

Mais cela pose aussi la question du sens à donner à des mots tels que "être EN Dieu". De quelle façon toute chose est elle DANS la substance, dès lors qu'on s'est libéré de l'image spatialisante et de l'ontologie aristotélicienne ?

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Messagepar hokousai » 15 juin 2009, 15:12

C'est donc que Spinoza vous fait cet effet !


Dîtes moi Alcore il faudrait tempérer votre ardeur de porte parole exclusif de spinoza .

que Spinoza distingue une multiplicité finie, divisible et numérique de de quelque chose qui serait autre et autrement pensable certes .
de quoi distingue- il les modes
réponse sur l'eternité au contraire et sur la subsatnce puisqu'elles ne peuvent être conçue autrement que comme infinies , aucune de ces opérations (par ex:division en parties) ne saurait s exécuter sans le que le concept même que nous avons d elles fut détruit.(lettre 12)

Or pour moi la multiplicité (fit ele infinie ) est une opération sur des d' individués .
Par où que vous la preniez la multiplicité est le fruit d'une opération de multiplication d'élements individués.
Dîtes démultiplication ou répétition ou itération , c'est comme vous voulez ce sont des individus qui soient se multiplient, se divisent, se répètent ou sont son itérés.

Faites des bijections ce sera d' éléments à éléments
Visez à penser des nombres transfinis ce ne sera que parce que vous pensez des nombres sinon finis du moins individués .(identifié comme individu au sein des divers ensembles de nombres .il est hors de question que les nombres se valent tous (ordinalement ni cardinalement )

La multiplicité(fut elle infinie ), comme objet, est le fruit d' une opération feriez vous une itération de la même opération vous auriez encore itération d' un élément individué ( l'acte lui même).
Dieu ferai toujours la même chose ie une chose précise mais une seule ce qui n'est pas dans l'esprit de Spinoza .

Distinguez l'opération de formation qui est une opération ie une activité mentale particulière ,cela surajoute de l'individuation à celle déjà pressente dans l'idée de nombre .
Toute opération met en realtion des éléments .

La multiplicité(fut elle infinie ), comme objet, est le fruit d' une opération feriez vous une itération de la même opération vous auriez encore itération d' un élément individué .

La question de l'individué est contournée et oubliée dans cette multiplicité infinie et votre multiplicité infinie l'est de rien du tout .

Non vraiment! laissez les mathématiques aux mathématiciens .

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Messagepar alcore » 15 juin 2009, 15:27

Sinusix a écrit :
La substance ne s'arrête nulle part. Quel que soit le mode qu'un entendement infini puisse concevoir, il est "en puissance" déjà là.
C'est cela l'infini en acte.

Amicalement


Admettons. Mais alors qu'est ce qui est divisé, fini, composé de parties, qui meurt, etc. ?
Vous accordiez que les modes sont autres que la substance puisque le type d'existence de la substance est radicalement différent de celui des modes. La substance est en soi et concevable par soi, les modes en autre chose et concevables par cet autre.
Je vois une rupture qualitative entre "être en soi" et "être en autre chose".
Je comprends bien que la substance n'est pas seulement "en soi", elle est aussi CAUSE, et cause de quoi ? Cause de tout ce qui se trouve EN elle sans ETRE elle-même, cad les modes. Or c'est seulement au niveau des effets que la divisibilité apparaît (reste à savoir si elle apparaît au niveau des modes finis et infinis ou seulement des modes finis).
Je serais tenté de dire que cette divisibilité ne peut apparaître qu'avec l'altérité signalée plus haut, et aussi bien avec la rupture qualitative de la substance et des modes qui, si vous voulez, ne concerne que l'existence et non l'essence (de la substance et des modes).
Or ce qui est difficile à comprendre c'est la possibilité du fini, de l'extériorité, de la divisibilité, de la mort (qui n'est autre que l'extrême de la finitude), etc.

Alors, soit on dit que la substance enveloppe et produit le fini comme tel, parce qu'elle contient en elle même le principe de toute finitude; c'est la position de Hegel. Le fini, la mort font partie de la substance: L'Esprit, même Dieu doivent mourir. L'Esprit divin pose alors sa propre existence sous la forme d'une extériorité offerte à la contingence des événements; tel est le sens de la mort du Christ selon Hegel: la mort est en Dieu, Dieu meurt.

soit, on dit que la divisibilité, le fini, la mort, etc. sont d'une façon ou d'une autre sinon "hors" du moins "autres" que la substance; et dans ce cas, il faut bien que la substance s'arrête quelque part, je veux dire: s'arrête d'être substantielle, ce qui ne veut pas dire qu'elle s'arrête d'agir, de produire des effets.

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Messagepar alcore » 15 juin 2009, 15:36

hokousai a écrit :
La multiplicité(fut elle infinie ), comme objet, est le fruit d' une opération feriez vous une itération de la même opération vous auriez encore itération d' un élément individué ( l'acte lui même).
Toute opération met en realtion des éléments .

.


Cher Hokusai

Le problème est que vous introduisez en permanence votre point de vue sur des questions où il s'agit de déterminer ce que dit SPinoza.

Par ex, vous dites que POUR VOUS une multiplicité est TOUJOURS le produit d'une opération. Soit. Personne ne vous empêche de le penser. Mais pour discuter vos exemples il faudrait faire un détour, que vous le vouliez ou non, par l'examen de ce qu'est une multiplicité inconsistante (laquelle n'est précisément pas le produit d'une opération) et cela nous ferait sortir du cadre de ce forum (et en plus vous ne voulez pas de mathématiques)

Concevoir une multiplicité infinie comme produit d'une opération "mentale" ce n'est ni la position de Spinoza, ni celle de la théorie des ensembles, et ce n'est pas revendiquer un statut d'interprète exclusif que de le rappeler !

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Messagepar PhiPhilo » 15 juin 2009, 16:22

...
Modifié en dernier par PhiPhilo le 13 oct. 2009, 07:33, modifié 1 fois.

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Messagepar alcore » 15 juin 2009, 16:33

Sinusix a écrit :
alcore a écrit :En effet, quand Spinoza dit que les effets de l'attribut sont DANS l'attribut, que signifie ce "dans" ?


N'est-ce pas tout simplement que la conjugaison de deux pensées est encore une pensée, ou que l'effet dans l'Etendue de la rencontre d'un astéroïde et de la terre va être constaté dans l'Etendue.

alcore a écrit :La lecture spontanée est soit spatialisante soit aristotélicienne. on se représente un espace DANs lequel les modes seraient ou bien un sujet dans lequel les modes seraient.


Avec le minimum de rigueur formelle, que deviendrait cette phrase, s'il vous plaît.



Nous nous représentons l'être-dans habituellement de 2 façons: soit à la façon dont des billes sont dans une boîte, soit à la façon dont les accidents, pour Aristote, sont dans un sujet. Aristote distingue deux types de prédicat, celui qui affirme quelque chose DE quelque chose (comme raisonnable de "animal") et dans ce cas le prédicat ne se trouve pas dans le sujet, et celui qui se trouve dans un sujet comme le blanc dans Socrate. Dans ce dernier cas, l'attribution n'est jamais essentielle, toujours accidentelle: c'est par accident que le blanc est dans Socrate mais c'est de façon essentielle que Socrate est raisonnable.

Quand Spinoza dit que l'effet est DANS la cause et que les modes sont EN Dieu, veut il dire que les modes se trouvent par hasard dans un sujet ? Justement non puisque la substance est la condition de l'intelligibilité de ses modes tout en étant la cause productrice de leur existence.

En fait, l'attribut a une double forme: une forme mathématique et une forme dynamique. En tant que propriété commune des corps, l'Etendue peut être dite contenir toutes les choses singulières. C'est aussi en ce sens que l'univers est un tout et que les choses en sont des parties.

MAis l'attribut est aussi bien cause des corps et dans ce cas les corps n'en sont plus les parties, mais les effets et l'effet est incommensurable avec sa cause.

Si l'on se contente de présumer que les modes sont dans l'attribut comme les propriétés du cercle sont dans la figure, tota simul, on privilégie la définition statique de l'attribut. Concevoir les propriétés du cercle, c'est concevoir ce qu'il est, et non pas concevoir le cercle comme cause de ses propriétés. Les propriétés ne sont pas dans le cercle comme l'effet dans sa cause.

Or, il n'est pas équivalent de dire que toutes les propriétés sont total simul dans un sujet, et de dire que les propriétés suivent nécessairement de leur cause. Le sens de l'inclusion n'est pas identique. L'effet n'est pas dans sa cause comme la propriété est dans son sujet, ni comme la boule est dans une boîte.

En ce sens, dire que toutes choses sont en Dieu ce n'est pas dire qu'elles sont intériorisées dans un sujet, mais plutôt qu'elles sont extériorisées, posées DANS l'action qui les produit.(Cf l'article de Laerke dans la revue philosophique, Immanence et extériorité absolue) La causalité de la substance s'exprime et propage sa propre puissance aux modes. Etre un mode ce n'est pas seulement être un effet, c'est aussi être cause productrice d'effets.

L'action qui pose l'effet, pose aussi en lui l'aptitude à produire des effets extérieurs. C'est par là, par l'actualisation de cette puissance que l'effet est véritablement DANS sa cause. Immanence ne signifie plus inhérence et n'est pas opposée à une certaine forme d'extériorité. Ou encore: le mouvement par lequel un mode en produit d'autres en extériorité n'est rien d'autre que l'actualisation au plan du fini de l'immanence de la substance, son intégration dynamique dans la substance.

L'idée d'extériorité relative n'a pas d'autre sens. La substance pose en elle les modes auxquels elle communique sa propre puissance de production d'effets extérieurs; tout ce que les modes produisent se trouve ainsi de facto DANS la substance, puisque cette puissance qu'ils actualisent, cette puissance par laquelle ils s'extériorisent et produisent n'est autre que celle de leur cause.


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