La connaissance du troisième genre

Questions et débats touchant à la nature et aux limites de la connaissance (gnoséologie et épistémologie) dans le cadre de la philosophie spinoziste.
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sescho
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Messagepar sescho » 18 oct. 2004, 22:47

bardamu a écrit :Donc, lorsqu'il dit "les choses" il s'agit bien aussi dans E5P25 des choses singulières puisqu'il y a une induction à partir de E5P24.

D'accord ; c'est un détail qui ne change rien, puisque de toute façon j'ai conservé dans mes commentaires E5P24 ; ceci vaut aussi par conséquent pour E5P27.

bardamu a écrit :Si je rajoute la proposition 24, ça nous donne : cette vertu est d'autant plus grande que l'Ame connaît plus les choses par le 3e genre de connaissance étant donné que plus nous connaissons les choses singulières, plus nous connaissons Dieu.

Mais je suis d'accord avec cela. Le seul problème est que cela ne prouve pas pour autant (il suffit de relire ton passage) que nous connaissons adéquatement les choses singulières. "Plus nous connaissons de choses singulières" ne veut pas dire "plus nous connaissons adéquatement de choses singulières". Par exemple, Spinoza dit :

Spinoza, Ethique, traduit par E. Saisset, a écrit : E2P19Dm : En effet, l’âme humaine, c’est l’idée même ou la connaissance du corps humain (par la Propos. 12, partie 2)...

Suivi de :

..., laquelle est en Dieu (par la Propos. 9, partie 2), en tant qu’on le considère comme affecté de l’idée d’une autre chose particulière, ou bien, en tant que le corps humain a besoin de plusieurs autres corps dont il est continuellement comme régénéré ; or, l’ordre et la connexion des idées est le même (par la Propos. 7, partie 2) que l’ordre et la connexion des causes. Cette idée sera donc en Dieu en tant qu’on le considère comme affecté des idées de plusieurs choses particulières. Par conséquent, si Dieu a l’idée du corps humain, ou autrement, si Dieu connaît le corps humain, c’est en tant qu’il est affecté de plusieurs autres idées, et non en tant qu’il constitue la nature de l’âme humaine ; en d’autres termes (par le Corollaire de la Propos. 11, partie 2), l’âme humaine ne connaît pas le corps humain.

(!) Mais ceci est encore suivi de:

Mais, d’un autre côté, les idées des affections du corps sont en Dieu, en tant qu’il constitue la nature de l’âme humaine ; ou autrement, l’âme humaine perçoit ces mêmes affections (par la Propos. 12, partie 2) ; et en conséquence (par la Propos. 16, partie 2) elle perçoit le corps humain lui-même ; et enfin elle le perçoit (par la Propos. 17, partie 2) comme existant en acte. C’est donc de cette façon seulement que l’âme humaine perçoit le corps humain lui-même. C. Q. F. D.


bardamu a écrit :Comment une connaissance non-essentielle des choses singulières aiderait-elle à connaitre adéquatement Dieu ?

Avec Spinoza, je ne dis pas qu'on ne peut rien percevoir adéquatement de l'essence des choses singulières (en tant qu'elles ne sont pas des êtres en soi mais des êtres en Dieu, une partie de l'essence de Dieu - et donc des choses singulières qui en relèvent, comme de leurs Attributs, par exemple - pouvant être connue adéquatement), je dis qu'on ne peut pas avoir une idée adéquate d'une essence singulière dans son entièreté ("noumènale"). Je renvoie aux extraits que j'ai produits.

bardamu a écrit :
sescho a écrit :« Preuve tirée de l’essence » n’est pas pour moi « connaissance totale de l’essence » et la preuve en question est bien celle d’une « dépendance à Dieu dans leur essence et leur existence », laquelle a été antérieurement l’objet d’une proposition (loi) tirée du raisonnement. Qu'en penses-tu ?

Je pense qu'il est de l'essence des choses singulières d'être dépendantes de Dieu dans leur essence et leur existence. Ce que dit le scolie, c'est que par les choses singulières et leur essence on atteint aussi la connaissance de Dieu et on l'atteint avec une force affective que n'a pas le 2nd genre de connaissance.

Tout à fait d'accord, mais je maintiens qu'elles portent toutes deux sur les mêmes choses. Le second objet était ici d'illustrer que Spinoza passe de la connaissance du second genre à celle du troisième sur le même sujet, et ce tout-à-fait clairement. Non ?

La suite plus tard, et je retiens les profondes reflexions de Hokousai pour la suite (si cela continue sur ce rythme, il est clair que ne saurais tout suivre... :-) )

Amicalement

Serge
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Messagepar Miam » 19 oct. 2004, 14:48

Sescho a éctit : "le second objet était ici d'illustrer que Spinoza passe de la connaissance du second genre à celle du troisième sur le même sujet, et ce tout-à-fait clairement. Non ?". Si. Et c'est précisément pour cela que l'on trouve des idées adéquates dans le second et dans le troisième genre de connaissance.

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Messagepar Miam » 19 oct. 2004, 18:07

Question de traduction :

Bardamu écrit :

« Pour qu'il n'y ait pas de doute par rapport à l'original de E5P36Corollaire scolie : (...) quod hic notare operæ pretium duxi ut hoc exemplo ostenderem quantum rerum singularium cognitio quam intuitivam sive tertii generis appellavi (vide II scholium propositionis 40 partis II) polleat potiorque sit cognitione universali quam secundi generis esse dixi.

Autre traduction que celle de Saisset, celle de Appuhn :
J'ai cru qu'il valait la peine de le noter ici pour montrer par cet exemple combien vaut la connaissance des choses singulières que j'ai appelée intuitive ou connaissance du troisième genre (scolie de la proposition 40, p II) et combien elle l'emporte sur la connaissance par les notions communes que j'ai dit être celle du deuxième genre.

Il semblerait que "universali" soit un substantif et que donc on pourrait le traduire par "choses universelles" comme Saisset, "notions communes" comme Appuhn ou peut-être plus simplement par "universaux". » »



Pour ma part, je pense qu’ « Universali » ne saurait être traduit par « universaux » pour la bonne raison que le nom est de la troisième déclinaison et non de la deuxième comme on le voit dans les nombreuses « notiones universales », (II 40 s1 et 2, 48sn), « ideas universales » (IV intro) sans compter les « universale » et les « universalem » de, par ex. II 49s.

D’autre part II 40s2 et 4 intro, par exemple et parmes d’autres, situent explicitement les « idées » et « notions universelles » dans le premier genre de connaissance et non le second.

« Universali » ne peut être que le datif singulier soit du nom soit de l’adjectif « universalis ». Par suite « cogitione universali » doit à mon avis se traduire littéralement par « sur la connaissance par l’universel ». Bref : je vois mal comment Sasset peut traduire par « sur la connaissance des choses universelles » équivalent à « connaissance des universaux ». C’est un contre-sens pour Spinoza. La connaissance par notions communes peut être qualifiée de connaissance par l’universel, puisque ces notions sont communes dans le tout et la partie (en ce sens elles sont véritablement universelles). Elles doivent être distinguées des « notions universelles », « idées universelles » et notions générales « que l’on appelle « universaux » »(II 40s).

Il convient de distinguer ces deux (notions communes et notions universelles), des "propriétés universelles" qui sont objets des idées claires et distinctes. Et il faudra par suite distinguer celles-ci des idées adéquates. Les premières connaissent par les effets (méthode analytique cartésienne), les secondes par la cause. S'il y a des idées adéquates de choses singulières, il ne saurait y avoir, me semble-t-il, d'idées claires et distinctes de choses singulières. Par contre je peut avoir les idées claires et distinctes de mes affects comme on le lmit dans la partie V. J'y reviendrai si vous le voulez bien parce qsue bon...

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Messagepar hokousai » 20 oct. 2004, 00:36

Rep à miam

Votre dernier paragraphe me pose problème .

Vous distinguez idées adéquates d'idées claires et distinctes ce que ne fait pas Spinoza dans lEthique
prop 36(partie 2)
« « ""les idées adéquates .autrement dit claires et distinctes "" » »"
...............................................................................................
.Vous dîtes """".Il convient de distinguer ces deux (notions communes et notions universelles), des "propriétés universelles" qui sont objets des idées claires et distinctes. ."""""

que voulez-vous dire par là .?

Si c'est que les notions communes ne sont pas claires et distinctes ( donc idée adéquates )ce n'est pas ce que dit Spinoza
prp 38(partie 2) « « ""les chose qui sont communes à tout ,et sont autant dans la partie que dans le tout ne peuvent se concevoir qu 'adéquatement """" » »"

Plus grave , les transcendentaux ET des Notions universelles (formées à partir des singuliers ) sont considérées par Spinoza comme des connaissances par expérience vagues ( et donc du premier genre ) .
tout cela est clairement exprimé dans le scolie 2 de la pro 40 partie 2 .


………………………………………………………………………………
quant au question de traduction , c'est pour moi incompréhensible .
Relisez -vous ce n’est pas clair .

Mais j'aimerais bien avant toute chose qu’on se penche sur les notions communes "communes vocantur ""

Notions qui ne me paraissent pas si faciles à cerner depuis le texte de l'Ethique .Je me souviens que Deleuze en parle assez abondamment mais je n’ai pas le courage maintenant d' aller le relire .. je ne vous dis pas là ce que j'en pense mais j'en pense quelque chose . J 'aimerais juste avoir votre avis sur ces notions communes (un exemple ou plusieurs de notions communes )

Holousai

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Messagepar Miam » 20 oct. 2004, 19:50

Si, Spinoza distingue idées adéquates et idées claires et distinctes. Je veux bien le montrer mais cela risque d'être assez long.

Dans la traduction, je pense qu'il est clair que "universali", au datif singulier, ne peut être traduit par "des choses universelles" au génitif pluriel, ni même "par les choses universelles" au datif pluriel. Il ne s'agit donc pas de la "connaissance des choses universelles" mais de la "connaissance par l'universel". Ce que vous comprendrez aisément pourvu que vous sachiez ce qu'est un singulier, un pluriel et (éventuellement pour avoir une idée claire de ce que je veux dire) un datif.

Ensuite:je parle de distinguer les transcendentaux et notions générales ou universelles (universales) des propriétés universelles (et aussi d'ailleurs communes). Et ces deux des notions communes qui sont des "propriétés communes pareillement dans le tout et la partie".
Ce faisant je distingue la méthode scolastique par genre et différence de la méthode analytique cartésienne par idées simples (notions simples et idées claires et distinctes). Et ces deux de la méthode génétique spinozienne relative aux idées adéquates.

Si les notions communes sont des propriétés communes "pareillement dans le tout et la partie", c'est que tout individu est constitué d'un nombre indéfini d'éléments. La constitution du mode est infinitaire bien que ce mode demeure fini car il est aussi infini par sa cause. Cette constitution infinitaire par la cause n'est appréhendée que par les notions communes, parce qu'elles sont des propriétés communes "pareillement dans le tout et la partie" dans un univers où tout est en tout comme les fractales dont parlait Bardamu. Telle n'est pas le cas des "propriétés communes ou universelles" et moins encore des "notions générales ou universelles". Et c'est bien cela qui distingue les essences, notions communes et idées spinoziennes de leur acception platonicienne (quand-bien même celle-ci serait augustino-cartésienne) ou scolastique. Il en résultera que les idées claires et distinctes découlent des idées adéquates; qu'une notion commune est une idée adéquate et pas seulement claire et distincte ni une notion simple au sens cartésien; qu'une propriété commune (ou universelle) est une idée claire et distincte mais pas encore une idée adéquate dans la mesure où elle n'est pas "pareillement dans la partie et le tout" et ne réfère pas à sa cause comme puissance productive.

Vous savez, les mots qu'utilise Spinoza ont leur importance. Une notion universelle n'est pas une propriété universelle, ni une notion commune une propriété commune.

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Messagepar hokousai » 20 oct. 2004, 20:26

"rep à miam


""mais cela risque d'être assez long. "" je vous en prie nous sommes habitué . Cela dit il faudra vous mettre en contradiction avec la citation que j ai faîtes .
................................
sur la traduction c'est votre présentation qui était incompréhensible ,pas les références grammaticales .
Bien ,ça ne m'intéressait pas ,en fait .( et toujours pas .)Il ya des problèmes de traduction certes mais pas sur notions communes, ni sur transendentaux, ni sur universaux ..

............................................................................
en revanche il a des problèmes de compréhension sur les notions communes ( peut -être pas pour vous mais pour moi, alors éclairez moi )

ce qui m'intéresse c'est ce que vous pensez de notions communes, mais de cela vous n'en parlez pas (pas ici en tout cas ).

Si vous voulez je veux bien avancer sur les "propriétés universelles "mais il faudrait me citer des passages comportant cette mention , je n'en ai pas là sous les yeux ni en mémoire .. donc j' attends .

hokousai

PS

Et expliquez moi votre méthode" génétique "spinozienne relative aux idées adéquates. Cessez de faire l'arlésienne .Essayez de sortir de l'allusif ,même profus l'allusif c'est l' allusif .... on dit :noyer le poisson .. et pour moi vous noyez le poisson dans l 'allusif .

Je sais ce que c'est qu'un datif ,merci. N' y revenez pas sur ce ton s' il vous plait .Vous perdriez le dernier lecteur qui vous reste .

..

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Messagepar bardamu » 20 oct. 2004, 21:15

sescho a écrit :
bardamu a écrit :Si je rajoute la proposition 24, ça nous donne : cette vertu est d'autant plus grande que l'Ame connaît plus les choses par le 3e genre de connaissance étant donné que plus nous connaissons les choses singulières, plus nous connaissons Dieu.

Mais je suis d'accord avec cela. Le seul problème est que cela ne prouve pas pour autant (il suffit de relire ton passage) que nous connaissons adéquatement les choses singulières. "Plus nous connaissons de choses singulières" ne veut pas dire "plus nous connaissons adéquatement de choses singulières".

Je vais limiter mes interventions et aller directement aux points que je juge essentiels.

Sommes-nous d'accord que ce que j'ai développé ci-dessus dit qu'on a une connaissance des choses singulières par le 3e genre de connaissance ?
Sommes-nous d'accord que la connaissance du 3e genre est une connaissance adéquate ?
Dans ce cas n'y a-t-il pas connaissane adéquate des choses singulières et donc connaissance de l'essence des choses singulières ?

Je crois comprendre que tu admets une connaissance partielle des choses singulières mais une connaissance partielle implique une connaissance inadéquate. Or, le 3e genre est une connaissance adéquate.
Et donc, je pense que c'est ta notion "d'essence dans son entièreté ("nouménale")" qui est inadéquate aux modes.
Le 3e genre n'est pas une épuration à l'infini du phénomène pour parvenir au noumène, parce qu'il n'y a pas de noumène (et donc pas de phénomène...). Le seul moyen de connaître les essences est d'établir un rapport adéquat entre la chose singulière, moi et le cosmos, et non pas d'avoir une idée analytique de celle-ci.
Dans l'exemple de la proportionnalité des nombres, il s'agit justement de montrer que ce n'est ni la mécanique de répétition d'une leçon (1er genre) ni la connaissance par "une propriété générale" (2nd genre) qui correspond à la science intuitive mais une connaissance "participative", limitée à ce à quoi on participe, ici, les petits chiffres. Spinoza ne dit pas qu'on connaît l'essence de la proportionnalité, il dit que pour les petits chiffres, on a une science intuitive de leur rapport singulier. Pour les grands chiffres on n'aura pas cette connaissance du 3e genre, à moins d'être un vrai calculateur.

Je renverrais à ce que dit Hokousai avec lequel je suis d'accord :
"Cette essence n’est pas l’essence de la chose qui prédomine dans le second genre .
Sous une espèce d éternité on conçoit le corps ou d'autres chose comme éternel ( hors du temps ) hic et nunc ( existant réel )
L.' essence de la chose c'est d' être réelle
la connaissance du troisième genre n'apporte pas un surcroît de connaissances quant à l'universel ,c'est à dire qu'elle ne nous dit rien de plus sur ce qui se rapportent aux genres et aux espèces et toutes connaissances liées à la science ."

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Messagepar sescho » 20 oct. 2004, 22:17

Une contribution en passant sur les différentes "notions" :

Spinoza, traduit par E. Saisset, a écrit :E1P8S2 : … Si les hommes étaient attentifs à la nature de la substance, ils ne douteraient en aucune façon de la vérité de la Propos. 7 ; bien plus, elle serait pour tous un axiome, et on la compterait parmi les notions communes de la raison. …

E2D4 : Par idée adéquate j’entends une idée qui, considérée en soi et sans regard à son objet, a toutes les propriétés, toutes les dénominations intrinsèques d’une idée vraie.
Explication : Je dis intrinsèques, afin de mettre à part la propriété ou dénomination extrinsèque d’une idée, savoir, sa convenance avec son objet.

E2P34 : Toute idée, qui est complète en nous, c’est-à-dire adéquate et parfaite, est une idée vraie.
Démonstration : Quand nous disons qu’il y a en nous une idée adéquate et parfaite, c’est comme si nous disions (par le Corollaire de la Propos. 11) qu’elle est en Dieu adéquate et parfaite, en tant qu’il constitue l’essence de notre âme ; par conséquent, c’est comme si nous disions (par la Propos. 32, partie 2) qu’une telle idée est vraie.

E2P36 : Les idées inadéquates et confuses découlent de la pensée avec la même nécessité que les idées adéquates, c’est-à-dire claires et distinctes.

E2P38C : ... Il suit de là qu’il y a un certain nombre d’idées ou notions communes à tous les hommes. Car (par le Lemme 2) tous les corps se ressemblent en certaines choses, lesquelles (par la Propos. précéd.) doivent être aperçues par tous d’une façon adéquate, c’est-à-dire claire et distincte.

E2P40 : Toutes les idées qui dans l’âme résultent d’idées adéquates sont adéquates elles-mêmes.
Démonstration : Cela est évident ; car dire que dans l’âme humaine une idée découle d’autres idées, ce n’est pas dire autre chose (par le Corollaire de la Propos. 11, partie 2) sinon que dans l’entendement divin lui-même il y idée dont Dieu est la cause, non pas en tant qu’infini, ni en tant qu’il est affecté de l’idée de plusieurs choses particulières, mais en tant seulement qu’il constitue l’essence de l’âme humaine.
Scholie I : Je viens d’expliquer la cause de ces notions qu’on nomme communes, et qui sont les bases du raisonnement. Mais il y a d’autres causes de certains axiomes ou notions qu’il serait dans notre sujet d’expliquer ici par la méthode que nous suivons ; car on verrait par là quelles sont parmi toutes ces notions celles qui ont vraiment une utilité supérieure, et celles qui ne sont presque d’aucun usage. On verrait aussi quelles sont celles qui sont communes à tous, et celles qui ne sont claires et distinctes que pour les esprits dégagés de la maladie des préjugés, celles enfin qui sont mal fondées.

E2P44C2Dm : … les fondements de la raison, ce sont (par la Propos. 38, partie 2) ces notions qui contiennent ce qui est commun à toutes choses, et n’expliquent l’essence d’aucune chose particulière (par la Propos. 37, partie 2), notions qui, par conséquent, doivent être conçues hors de toute relation de temps et sous la forme de l’éternité.

E2P43S : … il est nécessaire que les idées claires et distinctes de notre âme soient vraies comme celles de Dieu même.

E4P27 : Or l’âme (par les propos 41 et 43, part. 2, et le Schol. de la Propos. 43) ne connaît les choses avec certitude qu’en tant qu’elle a des idées adéquates, c’est-à-dire en tant qu’elle use de la raison (ce qui est la même chose par le Schol. de la Propos. 40).

E4P52 : La paix intérieure peut provenir de la raison, et cette paix née de la raison est la plus haute où il nous soit donné d’atteindre.
Démonstration : La paix intérieure, c’est la joie qui naît pour l’homme de la contemplation de soi-même et de sa puissance d’agir (par la Déf. 25 des pass.). Or, la véritable puissance d’agir de l’homme ou sa vertu, c’est la raison elle-même (par la Propos. 3, part. 3) que l’homme contemple clairement et distinctement (par les Propos. 40 et 43, part. 2) ; d’où il suit que la paix intérieure naît de la raison. De plus, l’homme, quand il se contemple soi-même, ne perçoit d’une façon claire et distincte, c’est-à-dire adéquate, rien autre chose que ce qui suit de sa puissance d’agir (par la Déf. 2, part. 3), en d’autres termes (par la Propos. 3, part. 3), de sa puissance de comprendre : et par conséquent, le plus haut degré de la paix intérieure ne peut naître que de cette seule contemplation. C. Q. F. D.

E5P4S : tout ce qui résulte d’une idée qui est adéquate dans notre âme est toujours compris d’une façon claire et distincte (par la Propos. 40, part. 2),… toute la puissance de l’âme se réduit à penser et à former des idées adéquates, comme on l’a fait voir ci-dessus (voyez la Propos. 3, part. 3).

E5P10Dm : ... l’âme a la puissance de former des idées claires et distinctes, et de les déduire les unes des autres (voyez le Schol. 2 de la Propos. 40 et le Schol. de la Propos. 47, part. 2) ; d’où il résulte (par la Propos. 1, part. 5) qu’elle a la puissance d’ordonner et d’enchaîner les affections du corps suivant l’ordre de l’entendement.

E5P12 : Nous unissons plus facilement les images des choses avec les images qui se rapportent aux objets que nous concevons clairement et distinctement qu’avec toute autre sorte d’images.
Démonstration : Les objets que nous concevons clairement et distinctement, ce sont les propriétés générales des choses, ou ce qui se déduit de ces propriétés (voyez la Défin. de la raison dans le Schol. 2 de la Propos. 40, part. 2) ; et conséquemment, ces objets se représentent à notre esprit plus souvent que les autres (par la Propos. précéd.) ; d’où il suit que la perception simultanée de ces objets et du reste des choses devra s’opérer avec une facilité particulière, et par suite que les images des choses se joindront à ces objets plus aisément qu’à tous les autres (par la Propos. 18, part. 2). C. Q. F. D.

E5P28 : Le désir de connaître les choses d’une connaissance du troisième genre ou l’effort que nous faisons pour cela ne peuvent naître de la connaissance du premier genre, mais ils peuvent naître de celle du second.
Démonstration : Cette proposition est évidente d’elle-même ; car tout ce que nous concevons clairement et distinctement, nous le concevons ou par soi ou par autre chose qui est conçu par soi : en d’autres termes, les idées qui sont en nous claires et distinctes ou qui se rapportent à la connaissance du troisième genre (voy. le Schol. 2 de la propos. 40, part. 2) ne peuvent résulter des idées mutilées et confuses, lesquelles (par le même Schol.) se rapportent à la connaissance du premier genre, mais bien des idées adéquates, c’est-à-dire (par le même Schol.) de la connaissance du second et du troisième genre. Ainsi donc (par la Déf. 1 des passions) le désir de connaître les choses d’une connaissance du troisième genre ne peut naître de la connaissance du premier genre, mais il peut naître de celle du second. C. Q. F. D.

Lettre 4 à Oldenburg : … Je suppose, en effet, qu’on n’ignore pas la différence qui existe entre une fiction de l’esprit et un concept clair et distinct, non plus que la vérité de cet axiome : que toute définition ou toute idée claire et distincte est vraie… Votre troisième objection est que mes axiomes ne doivent pas être mis au nombre des notions communes…

Lettre 12 à L. Meyer : … je m’en rapporte aux mathématiciens qui, sachant se former des idées claires et distinctes des choses, …

Lettre 37 à Bouwmeester : … il doit nécessairement y avoir une méthode par laquelle nous pouvons conduire et enchaîner nos perceptions claires et distinctes, et que l’entendement n’est pas, comme le corps, sujet aux chances du hasard. Or c’est ce qui résulte de ce seul point, savoir : qu’une perception claire et distincte ou plusieurs ensemble peuvent être cause par elles seules d’une autre perception claire et distincte. Je dis plus : toutes nos perceptions claires et distinctes ne peuvent naître que de perceptions de même espèce, lesquelles sont primitivement en nous et n’ont aucune cause extérieure. D’où il suit que toutes ces perceptions ne dépendent que de notre seule nature et de ses lois invariables et déterminées ; en d’autres termes, c’est de notre seule puissance qu’elles dépendent et non point de la fortune, je veux dire des causes extérieures, qui sans doute agissent suivant des lois déterminées et invariables, mais nous demeurent inconnues, étrangères qu’elles sont à notre nature et à notre puissance propre. Quant aux autres perceptions, j’avoue qu’elles dépendent le plus souvent de la fortune. On peut voir par là quelle doit être la vraie méthode et en quoi elle consiste principalement, savoir, dans la seule connaissance de l’entendement pur, de sa nature et de ses lois ; et pour acquérir cette connaissance, il faut sur toutes choses distinguer entre l’entendement et l’imagination, en d’autres termes, entre les idées vraies et les autres idées, fictives, fausses, douteuses, toutes celles, en un mot, qui ne dépendent que de la mémoire.

TTP6 : … les preuves tirées de la révélation, ne se fondent pas sur les notions universelles et communes à tous les hommes, …

Note 7 : … pour concevoir la nature de Dieu d’une manière claire et distincte, il est nécessaire de se rendre attentif à un certain nombre de notions très-simples qu’on appelle notions communes, et d’enchaîner par leur secours les conceptions que nous nous formons des attributs de la nature divine.

TTP7 : … dans l’étude de la nature on commence par les choses les plus générales et qui sont communes à tous les objets de l’univers, c’est à savoir, le mouvement et le repos, leurs lois et leurs règles universelles que la nature observe toujours et par qui se manifeste sa perpétuelle action, descendant ensuite par degrés aux choses moins générales ; …

TTP14 : … les fondements de la philosophie sont des notions communes, et elle-même ne doit être puisée que dans la nature, …


J'en tire, de façon me semble-t-il logique, que : idées claires et distinctes = idées adéquates = idées vraies (à la détermination extrinsèque près) = connaissance du deuxième genre (Raison) + connaissance de troisième genre (idem mais direct : science intuitive).

Notions communes de la Raison = axiomes = évidences de base universellement reconnues. Les axiomes sont l'expression de lois de base. Les propositions sont aussi l'expression de lois, mais selon l'auteur et étant moins généralement admises. Les notions communes sont claires et distinctes, et relèvent de la Raison ; elles sont donc des idées adéquates.

J'ajouterai que les notions communes et toutes les lois qui peuvent en découler (comme, selon Spinoza, ses propres propositions) sont les seules idées claires et distinctes possibles, au-delà de la réalité de la Substance, de ses Attributs, des modes éternels et de la perception d'être en acte des choses singulières (en tant que modes mais aussi en tant que singulières). Il faut cependant effectivement ajouter à ceci les idées des idées adéquates, qui sont aussi adéquates, et le ressenti pur des mouvements de l'âme. Tout ceci restant à discuter...

Amicalement

Serge
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Messagepar hokousai » 21 oct. 2004, 13:04

cher Sescho

Vous dîtes """Avec Spinoza, je ne dis pas qu'on ne peut rien percevoir adéquatement de l'essence des choses singulières (en tant qu'elles ne sont pas des êtres en soi mais des êtres en Dieu, une partie de l'essence de Dieu - et donc des choses singulières qui en relèvent, comme de leurs Attributs, par exemple - pouvant être connue adéquatement), je dis qu'on ne peut pas avoir une idée adéquate d'une essence singulière dans son entièreté ("noumènale"). """""""""""

D 'accord mais quelle philosophie le peut ? je me demande si le projet ou l'espoir d' atteindre le "nouménal" n"est pas vain .
Et d' abord parce que le nouménal est peut- être un fantasme de la chose .
..............................
vos références sur les notions comunes sont iinstructives , je les attendais de miam .c'est en tout cas ce que j'attendais qu'on rappelle .
.... vos égalités sont périleuses . l'idée adéquate n'est pas égale à l'idée vraie ,elle est vraie .et ceci légitimé par un discours sur le vrai .( (demonstration et scolie de la prop 43 partie 2)
........................................
j'y reviendrai je n'ai hélas pas de temps disponible dans l'instant . .excusez le laconisme de ma réponse .

Hokousai

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Miam
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Messagepar Miam » 21 oct. 2004, 14:16

Rép. A Hokusaï :
Dans mon précédent message, je viens de définir la notion commune en relation avec la définition génétique (c’est-à-dire par la cause, je le redis une xième fois, pour « repêcher le poisson »), la constitution infinitaire du mode, et l’idée adéquate qui exprime la cause. Vous semblez être passé à côté puisque vous faites comme si je n’avais rien écrit à ce sujet. Si vous l’aviez lu, vous demanderiez au moins des précisions à partir de ce que vous auriez compris. Mais ce n’est pas le cas. Donc vous ne l’avez pas lu, ou du moins d’une façon si superficielle que vous n’en avez rien retenu parce que vous ne voulez rien comprendre. Même chose pour ce qui concerne la traduction. Evidemment, c’est de ma faute, c’est de la faute de mon style. Voulez vous que je vous entretienne de votre style avec la même politesse que vous, qui prétendez écrire plus clairement que moi ? Je ne vous perdrai pas comme lecteur : de fait, vous ne me lisez déjà pas ou plus. Vous croyez sans doute que je vais me fatiguer à produire des explications à la demande d’une personne qui ne les lira pas, alors que j’ai déjà écrit maintes fois et clairement sur le même sujet (i.e. les notions communes) ? N’y a-t-il, en outre, une définition des notions communes dans le « vocabulaire » ou les « textes » que l’on trouve sur ce forum ? Il vous manque une sérieuse dose de respect pour votre activité de lecture, c’est-à-dire pour vous-même, à moins que ce ne soit que de la mauvaise foi…ou pire ?…:lol: :lol: :lol: :lol: :lol: :lol:

Essayeriez-vous de me dégoûter de ce site? :lol: :lol: J'attend seulement des réponses rationelles à mes énoncés. Dans le même ordre d'idée, je souhaite bonne chance à Bardamu avec Sescho...
8)


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