Miam a écrit :(...)
La nature d’une chose n’est pas constituée infinitairement. C’est une série finie d’idées claires et distinctes comme la définition est une série finie de mots La nature d’une chose n’est pas un rapport infiniment composé de mouvement mais l’idée claire et distincte qui découle d’une notion commune qui elle, est constituée infinitairement.
(...)
Comme l’appréhension d’une similitude n’a rien à voir avec l’essence de la chose mais seulement avec sa nature, je ne vois pas pourquoi il faut reprendre l’exemple des pendules. Celui-ci illustre l’essence comme rapport infiniment composé de mouvement et non la nature comme composition finie d’idées claires et distinctes.
Je t'ai peut-être mal lu, mais ça m'a l'air nouveau cette distinction entre nature et essence. Où as-tu vu que la nature d'une chose était une série finie d'idées ?
A la limite, je trouverais ça plus adapté à l'essence qui semble liée aux définitions. Essence d'un triangle définit comme figure à 3 côtés.
A l'opposé, le mini traité de physique de E2P13 parle de la nature des corps : "Tous les corps sont ou en mouvement ou en repos." Cela me semble plus l'essai d'expression d'une réalité pleine et donc de sa composition infinie, qu'une simple idée claire.
Mais je suppose que ta problématique est de conserver une hétérogénéité totale des notions communes tout comme des essences mais en restant en accord avec III 27 et ses "natures semblables".
Mais je réitère la question : comment se lient les choses si elles sont totalement hétérogènes aussi bien en essence que par les notions communes ? Elles ne sont liées que par une nature imaginaire ?
Miam a écrit : Et pourquoi devrait-on passer par la Raison et les notions communes si l’enveloppement imaginaire appréhendait immédiatement ce qu’il y a d’infini dans l’essence ?
L'affection enveloppe les natures mais celles-ci s'expriment ou pas dans une connaissance adéquate. Dans la rencontre de A et B, les natures de A et B sont enveloppées. L'affection de A est vraie, l'imagination représentative de l'affection est vraie en tant qu'imagination, mais l'idée que pourrait se faire A de B à partir de cette affection contiendra de la fausseté parce que dans l'affection il n'y a pas que la nature de B qui soit enveloppée et c'est même surtout A qu'on retrouve.
Miam a écrit :Mais évidemment je ne conçois pas des pendules lorsque je conçois les choses. Je n’imagine pas des pendules, mais des images et des formes diverses, à moins d’être un obsessionnel des pendules un peu fou. Enfin l’orientation des pendules n’entre pas en ligne de compte dans cet exemple et encore moins le fait qu’ils soient pendus, mais bien leur seule composition infinie en rapports de mouvement. C’est pour cela, et pour cela seul qu’on a pris cet exemple.
L'essence même d'un pendule est d'être pendu...
L'essence d'une chose est d'avoir des modes d'être spécifiques, sinon elle n'est rien, et ces modes gagnent à être désignés.
On peut parler de "composition infinie en rapport de mouvement" mais ça ne définit aucune chose en particulier et cela ne parle donc de rien si ce n'est du principe le plus général. Or le particulier vaut mieux que le général.
Miam a écrit :Bardamu écrit :
« Dans les fractales, tu as des rapports de similarité entre tel et tel motif, et c'est même obligé du fait d'une génération par un facteur simple.
Sur la première figure ici , tu as 3 cubes similaires par leur nombre de faces (ce sont des cubes...), par leur taille, par leur horizontalité etc. du simple fait qu'ils sont créés par un générateur simple. »
Donc la fractale serait pour toi la nature naturante et chaque « motif » un mode ? Mais je ne vois pas les choses ainsi. Pour moi c’est chaque essence de mode qui est une fractale.
Dans mon exemple, il faudrait aller au bout de la fractalisation et chaque "cube" serait aussi fractal. Ce serait donc une branche fractale similaire à une autre branche du simple fait qu'elles ont la même cause. Ca se voit mieux au premier niveau de fractalisation, lorsqu'il n'y a que 3 cubes.
Miam a écrit : Des notions communes entre les hommes, il résulte donc une identité de nature.
1° Je dis bien une identité de nature et non d’essence.
(...)
2° Je dis bien une identité de nature et non une nature semblable.
IV35 où la nature de l'Humain se définit par rapport à la Raison est en effet dans l'idée de critère de similitude dont je parlais. Mais ce critère n'est pas dépendant de l'imaginaire sauf à croire que la Raison n'est pas un concept de Raison. C'est donc rationnellement que la nature de l'Humain est définie par une de ses puissances : raisonner.
Cette puissance n'est rien d'autre que l'expression de l'essence d'un sur-individu, l'Humain, comme ensemble de tous les modes de la Substance similaires par leur Raison. Et selon ce critère, on pourra peut-être mettre un jour des ordinateurs ou des extra-terrestres sous le terme d'Humain, de même qu'un banc de sardine forme un sur-individu selon un critère "sardinologique".
Pour employer ton langage et sans être persuadé que "nature" et "essence" dussent être si nettement distingués : l'identité de nature se fonde sur une similitude d'essence à l'origine du critère d'identité sauf à tomber dans des idées abstraites.
Pour employer mon langage, les essences (ou natures) générales, se fondent sur une notion commune exprimant des similitudes d'essence (ou nature) entre choses particulières.
Miam a écrit :Avoir l’idée d’une nature similaire, c’est concevoir une nature par ses seuls effets mécaniques sur moi, c’est-à-dire immédiatement au moyen des auxiliaires de l’imagination (temps, nombre, figure).
Le temps et le nombre (je suis plus réservé pour la figure) ne me semblent pas apparaîtrent immédiatement. Ils sont le résultat d'un découpage de la durée ou de la quantité par la pensée, d'une opération d'abstraction. Cf Lettre XII.
Mécaniquement, on ne reçoit que durées ("un certain temps") et quantités indénombrées.
Miam a écrit :(...)
A « Mais tu ne peux par faire sans III 16, ni III 17 (« Par cela seul que nous imaginons quelque trait de ressemblance etc… ») ni surtout sans le scolie de III 22 : « mais aussi pour une chose à l’égard de laquelle nous n’avons eu d’affect d’aucune sorte, pourvu que nous la jugions semblables à nous (comme je le ferai voir plus bas) », qui anticipe III 27. » Bardamu me répond :
« Si, si, je peux.
J'estime justement que III 27 définit une autre forme de rapport : l'imitation. »
Certainement pas avec le scolie de III 22 qui anticipe III 27.
Bardamu écrit :
« Il y a donc pour moi, une coupure entre la transmission d'affect parce qu'on imagine que la chose est ceci ou cela et une transmission où l'affect d'une chose qui est similaire se transmet "mécaniquement". »
Peux-tu préciser cette différence entre les deux « transmissions » ? J’avoue ne pas comprendre.
Le mouvement "mécaniste" d'imitation, je le retrouve dans III 32 scolie (réaction de l'enfant) et III 33.
Mais, comme je l'ai dit plus haut, il n'est pas exclusif d'une réaction similaire dûe au fait qu'on a imaginé que la chose était semblable plutôt qu'elle ne l'ait été naturellement.
La Commissération naitra aussi bien d'une rencontre réelle avec un semblable triste, que l'imagination d'une rencontre avec un semblable triste. C'est ce qu'il se passe avec les campagnes pour les victimes de catastrophes : une affection qui n'est pas une souffrance ici et maintenant (signe, croix rouge...) provoque l'image d'un être semblable souffrant et l'affect correspondant.
C'est beaucoup moins efficace chez les sardines qui pourtant réagissent spontanément au moindre affect de leur semblable. Les mouvements d'ensemble sont dûes à une similitude de nature médiatisée par l'imagination directe, le banc de sardine formant un seul sur-individu.
Et attention : quand je parle de similitude de nature, je ne parle pas de corps, de biologie ou autre. La similitude est d'acte, de comportement, de conatus. Une sardine qui ne vivrait pas en banc, ne serait pas semblable aux autres.
Miam a écrit :« J'essaie une dernière fois : tu as 2 choses proches dans l'infinité des choses, et donc on les appelle "similaires" ou "semblable" ou "presque pareilles", et du simple fait de cette proximité, elles déterminent une notion commune, celle à quoi correspond leur proximité. »
Du simple fait de la proximité entre ma main et de mon bureau, ma main ressemble à mon bureau ? J’avoue que je ne comprend pas. Que veut dire « proche dans l’infinité des choses » ? Cela paraît contradictoire…
Oui, ta main ressemble à ton bureau selon, par exemple, le critère de la position géographique (différence de temps de parcours pour un photon ou toute autre expérience réelle). Selon ce critère, la sonde Huygens qui est à des milliards de kilomètre, lui ressemble beaucoup moins. La notion commune sera quelque chose qu'on appellera "distance géométrique" ou en terme plus einsteinien, temps de parcours de la lumière dans le vide.
De manière plus générale, soit 2 choses A et B, il y une certaine distance conceptuelle entre elles sinon A = B. Plus la distance est faible, plus les choses sont proches et plus les notions communes qu'on en tire ont un sens spécifique.
Miam a écrit :« Alors que sont toutes ces définitions données par Spinoza ? Des abstractions ? Des images qu'il se fait ? Tu leurs reconnais quel genre de vérité ? »
Tu confonds de nouveau le sujet de l’énoncé et le sujet de l’énonciation. Spinoza lui-même a les idées claires et distinctes des affects parce qu’il part rationnellement des notions communes.
Si je comprends bien, pour toi les notions communes sont uniquement les expériences réelles connues par un homme en particulier. Et quand Spinoza parle de Chatouillement, il ne veut pas désigner une notion que tous les hommes ont en commun mais l'idée claire qu'il a tiré d'une notion que tous les hommes ont en commun.
Mais dans ce cas, à quoi nous sert d'avoir un terme désignant l'idée de Spinoza si elle n'est pas la notion qu'on peut retrouver en nous ?
Pourquoi distinguer le Chatouillement dont parle Spinoza de la notion commune de Chatouillement que nous pouvons tous connaitre ?
Il me semble que si Spinoza en parle c'est pour évoquer la notion commune et pas pour qu'on s'occupe d'une idée qu'il se serait faite à partir de perceptions personnelles.
Miam a écrit :Qu'est-ce que tu veux dire par "c'est quoi un banc de sardine"? Ce n'est pas moi qui parle de sardines.
C'est quoi un troupeau, c'est quoi un banc de sardine ? Est-ce une idée fausse ou bien n'y a-t-il pas union réelle de modes similaires de la Substance ?
Miam a écrit : Ce que je voulais dire par "Ca, c’est confondre l’appréhension cognitive des notions communes avec leur présence que recèle toute perception.", c'est simplement ceci : que pour toute perception, y compris de similitude, il doit y avoir quelque chose de commun entre mon Corps et le corps extérieur. Ca, c'est la présence du "commun". Mais l'appréhention cognitive de la notion commune est tout autre chose. C'est la connaissance de ce commun. Voilà c'est tout.
A +
Ce que je ne comprends pas, c'est pourquoi de ce commun dont tu affirmes la présence, tu ne déduis pas une similitude réelle en dehors de toute question d'appréhension cognitive supplémentaire.
Si les choses ont quelque chose de commun, c'est qu'elles se ressemblent par ce commun, non ?
Sinon, elles n'auraient rien de commun et ne se ressembleraient aucunement.