les trois modes de connaissance

Questions et débats touchant à la nature et aux limites de la connaissance (gnoséologie et épistémologie) dans le cadre de la philosophie spinoziste.
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riseohms
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Re: les trois modes de connaissance

Messagepar riseohms » 24 nov. 2007, 00:55

Mea culpa

En fait j'ai moins parlé du bouddhisme véritable (bien plus riche, varié et profond que ce que j'en ai dit) que du bouddhisme tel qu'il peut être appréhendé par certains occidentaux
Ne voit on pas dans certains forums sur la pensée orientale un anti-intellectualisme et même le rejet de la philosophie
J’ai parlé de la méditation comme produisant un silence forcé de la pensée
C’est effectivement un piège réel dans lequel beaucoup tombent: on parle alors de faire le vide mais des que cesse cette méditation (qui est plutôt de la concentration, donc le contraire de l'ouverture ) on se retrouve comme avant.
Cette méditation en tant qu'elle procède d'un acte délibéré de la volonté ne nous fait pas sortir de la pensée, c'est de la concentration donc un acte objectivant
La véritable méditation est la cessation de tous les actes objectivant et nous amène à la subjectivité pure. Elle est abandon, lâcher prise et ouverture amenant à un silence naturel et nous régénérant des que la méditation cesse
C’est bien ce dont parlent les maitres bouddhistes
et quelqu'un comme Krisnamurti décrit les mécanismes de la pensée nous empêchant d'accéder à cette méditation..
il pense que la connaissance et la compréhension du fonctionnement de notre esprit peut nous en libérer et nous ouvrir à l’inconnu, à l’intuition direct du réel
Pour moi, c’est très spinoziste.

Quant à la méditation forcée, elle peut être utile au début car avant de pouvoir s’abandonner et ouvrir notre esprit, il faut déjà le sortir de la dispersion, le rassembler, le concentrer
Mais il y a danger de rester bloqué sur l’objet-vide ou sur des expériences ou effets de cette concentration aussi dangereux qu’une drogue, je veux dire, le risque est de renforcer l’égo et de l’isoler encore plus du monde
C’est pourquoi je crois plus à l’exercice de l’intelligence, à la compréhension, à la philosophie qu’a des pratiques méditatives, à moins d’avoir la chance de tomber sur de véritables maitres.

Mais la pratique discursive a aussi ,comme vous le dites ,ses dangers
Car comprendre une idée par la simple logique est une chose mais la comprendre véritablement et complètement est autre chose, et çà peut prendre des années. Et en attendant, on tourne en rond
Une véritable compréhension est action et nous transforme.
La pensée est vie et si on pense mal, on vit mal

Vous écrivez :
<< je voudrais d'abord dire combien) l'exposé de riseohms sur l'éthique me semble juste et profond. <<

Je vous en remercie,
Puis vous ajoutez :<< à quelques lapsus près comme l'inadéquation de la connaissance du deuxième genre>>
Vous pouvez préciser où ? J’ai cherché et je n’ai pas trouvé

Cordialement
joel

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Faun
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Re: les trois modes de connaissance

Messagepar Faun » 24 nov. 2007, 06:27

sescho a écrit :
Contrairement à ce qu'on lit souvent, le Bouddhisme ne cherche pas l'anéantissement pur - un minimum de bon sens s'agissant d'une tradition aussi ancienne, aussi profonde et aussi répandue et en croissance devrait en alerter -, lui qui parle d'effort joyeux, etc. mais l'anéantissement du Moi dans la perception de l'Eternel, ce qui est très spinozien.


L'anéantissement du Moi dans la perception de l'Eternel n'est pas du tout spinoziste, c'est même tout le contraire du but de la pensée de Spinoza :

"Dans cette vie nous nous efforçons donc avant tout de faire que le Corps de bébé se change en un autre qui soit apte à beaucoup de choses, et qui se rapporte à un Esprit qui ait une grande conscience de soi et de Dieu et des choses ; "
scolie proposition 39 partie 5.

Le corps qui devient apte à de plus en plus de choses, l'esprit qui développe une conscience de plus en plus grande de soi, il faudrait être de bien mauvaise foi pour dire que c'est là la recherche d'un anéantissement du moi...

Le spinozisme, au contraire de toutes les religions, vise à l'augmentation de la puissance d'agir et de penser de chacun, au développement des capacités propres de chaque individu (en passant la Nature elle-même est dite être un Individu dans le scolie du lemme 7 de la partie 2), et c'est en cela que consiste la liberté et la béatitude, non dans je ne sais quelle destruction de l'esprit et du corps, dans l'étouffement de la puissance d'agir et de comprendre individuelle, qui n'a pour but que de servir les intérêts des pouvoirs religieux.

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Re: les trois modes de connaissance

Messagepar sescho » 24 nov. 2007, 08:52

riseohms a écrit :En fait j'ai moins parlé du bouddhisme véritable (bien plus riche, varié et profond que ce que j'en ai dit) que du bouddhisme tel qu'il peut être appréhendé par certains occidentaux

Ah d'accord. Alors là vous n'êtes pas le seul. De façon plus ou moins directe tous les grands auteurs signalent à foison ce genre de méprise foncière en Occident (et aussi de la superstition en Orient.)

riseohms a écrit :... je crois plus à l’exercice de l’intelligence, à la compréhension, à la philosophie qu’a des pratiques méditatives, à moins d’avoir la chance de tomber sur de véritables maitres.

Je pense qu'il n'y a pas de martingale, et que le danger de l'intellectualisme aveugle sur soi - c'est manifestement courant - n'est pas moindre. Mais moi-aussi je compte plutôt sur le raisonnement, d'autres auteurs, tendant éventuellement à le rejeter comme Krishnamurti, me gardant de leur côté de le prendre pour une vérité factuelle que mon comportement démentirait, comme un nouvel écran faussement brillant et parfaitement nuisible cachant ce mental tourmenté qu'un minimum d'observation immédiate me ferait voir.


riseohms a écrit :Puis vous ajoutez :<< à quelques lapsus près comme l'inadéquation de la connaissance du deuxième genre>>
Vous pouvez préciser où ? J’ai cherché et je n’ai pas trouvé

Désolé, c'est moi... :? J'ai pris des incises tardives pour des appositions : "... nous permet de nous dégager des idées inadéquates ( 2 e mode ) alors le 3em mode connaissance émerge de lui -même." Je fais aussi de ces incises qui prètent à confusion... Désolé pour la relecture de vos propres textes que je vous ai imposée...

Amicalement

Serge
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Re: les trois modes de connaissance

Messagepar sescho » 24 nov. 2007, 09:42

Faun a écrit :L'anéantissement du Moi dans la perception de l'Eternel n'est pas du tout spinoziste, c'est même tout le contraire du but de la pensée de Spinoza...

J'aurais dû mettre "ego" (qui implique de se prendre soi-même pour substantiel) à la place de "moi" (qui serait alors limité à une certaine conscience d'être mode ; quoique celle-ci selon Spinoza pourrait être à ranger dans les idées inadéquates.) Dans ce cadre entre parfaitement aussi "la réalisation du Moi dans l'Eternel" (dans la mesure où l'on veut bien associer l'éternel et le particulier... Je répète que tout cela ne sont que des nuances, artificiellement grossies.)

Pour le reste il me semble que vous avez un problème avec le mot "Religion." Je ne suis personnellement d'aucune religion (en particulier le Bouddhisme, que je connais très imparfaitement, et qui d'ailleurs n'ayant ni Dieu ni prêtres est ce qui s'en éloigne le plus : c'est plutôt "une" (la) Psychologie des profondeurs ou "une" (la) Philosophie morale. Par ailleurs il comprend le soin au corps.) Et je suis en même temps de toutes (toutes celles qui me semblent converger vers la vérité et donc la béatitude, du moins.) Bien sûr ceci suppose d'en avoir écarté les éventuelles superstitions, les rituels (qui cependant peuvent être vus comme des auxiliaires - non fondamentaux, donc - à la méditation,) etc. Toutes les religions (ou assimilées plus ou moins à raison ou à tort) que j'ai citées (et sans doute d'autres que je connais trop mal pour les citer) débouchent dans leurs meilleures productions (voire se résument déjà essentiellement à) sur la Philosophie morale basée sur la science intuitive.

Spinoza, Ethique, traduit par E. Saisset, a écrit :E5P30 : Notre âme, en tant qu’elle connaît son corps et soi-même sous le caractère de l’éternité, possède nécessairement la connaissance de Dieu, et sait qu’elle est en Dieu et est conçue par Dieu.

Démonstration : L’éternité est l’essence même de Dieu, en tant que cette essence enveloppe l’existence nécessaire (par la Déf. 8, part. 1). Par conséquent, concevoir les choses sous le caractère de l’éternité, c’est concevoir les choses en tant qu’elles se rapportent, comme êtres réels, à l’essence de Dieu, en d’autres termes, en tant que par l’essence de Dieu elles enveloppent l’existence. Ainsi donc notre âme, en tant qu’elle connaît son corps et soi-même sous le caractère de l’éternité, possède nécessairement la connaissance de Dieu et sait, etc. C. Q. F. D.

E5P31 : La connaissance du troisième genre dépend de l’âme comme de sa cause formelle, en tant que l’âme elle-même est éternelle.

Démonstration : L’âme ne conçoit rien sous le caractère de l’éternité qu’en tant qu’elle conçoit l’essence de son corps sous le caractère de l’éternité (par la Propos. 29, part. 5), c’est-à-dire (par les Propos. 21 et 23, part. 5) en tant qu’elle est éternelle ; par conséquent (en vertu de la Propos. précéd.), en tant que l’âme est éternelle, elle possède la connaissance de Dieu, et cette connaissance est nécessairement adéquate (par la Propos. 46, part. 2) ; d’où il suit que l’âme, en tant qu’éternelle, est propre à connaître toutes les choses qui résultent de cette même connaissance (par la Propos. 40, part. 2), c’est-à-dire à connaître les choses d’une connaissance du troisième genre (voyez-en la Déf. au Schol. 2 de la Propos. 40, part. 2), et ainsi (par la Déf. 1, part. 3) c’est l’âme en tant qu’éternelle qui est la cause adéquate ou formelle de cette connaissance. C. Q. F. D.

Scholie : Ainsi donc, à mesure que chacun de nous possède à un plus haut degré ce troisième genre de connaissance, il a de soi-même et de Dieu une conscience plus pure ; en d’autres termes, il est plus parfait et plus heureux, et c’est ce qui deviendra plus évident encore par la suite de ce traité. Mais il faut remarquer ici que, tout certains que nous soyons déjà que l’âme est éternelle, en tant qu’elle conçoit les choses sous le caractère de l’éternité, toutefois, pour expliquer plus aisément les propositions qui vont suivre et pour les mieux faire comprendre, nous considérerons l’âme, ainsi que nous l’avons fait jusqu’à ce moment, comme si elle commençait actuellement d’exister et de concevoir les choses sous le caractère de l’éternité ; et nous n’avons à craindre aucun danger en suivant cette marche, pourvu que nous prenions garde de ne rien conclure qui ne repose sur de claires prémisses.

E5P34 : L’âme n’est sujette que pendant la durée du corps aux affections passives.

Démonstration : Un acte d’imagination, c’est une idée par laquelle l’âme aperçoit un objet comme présent (voyez la Déf. de l’imagination dans le Schol. de la Propos. 17, part. 2) et qui cependant marque plutôt l’état présent du corps humain que la nature de l’objet extérieur (par le Coroll. 2 de la Propos. 16, part. 2). En conséquence, une passion (par la Déf. générale des passions), c’est un acte d’imagination en tant qu’il exprime l’état présent du corps ; d’où il suit (par la Propos. 21, part. 5) que l’âme n’est sujette aux passions que pendant la durée du corps. C. Q. F. D.

Corollaire : Il suit de là qu’il n’y a d’amour éternel que l’amour intellectuel.

Scholie : Si l’on examine l’opinion du commun des hommes, on verra qu’ils ont conscience de l’éternité de leur âme, mais qu’ils confondent cette éternité avec la durée, et la conçoivent par l’imagination ou la mémoire, persuadés que tout cela subsiste après la mort.

E5P41 : Alors même que nous ne saurions pas que notre âme est éternelle, nous ne cesserions pas de considérer comme les premiers objets de la vie humaine la piété, la religion, en un mot, tout ce qui se rapporte, ainsi qu’on l’a montré dans la quatrième partie, à l’intrépidité et à la générosité de l’âme.

Démonstration : Le premier et unique fondement de la vertu ou de la conduite légitime de la vie, c’est (par le Coroll. de la Propos. 22 et la Propos. 24, part. 4) la recherche de ce qui est utile. Or, pour déterminer ce que la raison déclare utile à l’homme, nous n’avons point tenu compte de l’éternité de l’âme, qui ne nous a été connue que dans cette cinquième partie. Ainsi donc, puisque alors même que nous ignorions que l’âme est éternelle, nous considérions comme les premiers objets de la vie les vertus qui se rapportent à l’intrépidité et à la générosité de l’âme, il s’ensuit que si nous l’ignorions encore en ce moment, nous ne cesserions pas de maintenir les mêmes prescriptions de la raison. C. Q. F. D.

Scholie : Nous nous écartons ici, à ce qu’il semble, de la croyance vulgaire. Car la plupart des hommes pensent qu’ils ne sont libres qu’autant qu’il leur est permis d’obéir à leurs passions, et qu’ils cèdent sur leur droit tout ce qu’ils accordent aux commandements de la loi divine. La piété, la religion et toutes les vertus qui se rapportent à la force d’âme sont donc à leurs yeux des fardeaux dont ils espèrent se débarrasser à la mort, en recevant le prix de leur esclavage, c’est-à-dire de leur soumission à la religion et à la piété. Et ce n’est pas cette seule espérance qui les conduit ; la crainte des terribles supplices dont ils sont menacés dans l’autre monde est encore un motif puissant qui les détermine à vivre, autant que leur faiblesse et leur âme impuissante le comportent, selon les commandements de la loi divine. Si l’on ôtait aux hommes cette espérance et cette crainte, s’ils se persuadaient que les âmes périssent avec le corps et qu’il n’y a pas une seconde vie pour les malheureux qui ont porté le poids accablant de la piété, il est certain qu’ils reviendraient à leur naturel primitif, réglant leur vie selon leurs passions et préférant obéir à la fortune qu’à eux-mêmes. Croyance absurde, à mon avis, autant que celle d’un homme qui s’emplirait le corps de poisons et d’aliments mortels, par cette belle raison qu’il n’espère pas jouir toute l’éternité d’une bonne nourriture, ou qui, voyant que l’âme n’est pas éternelle ou immortelle, renoncerait à la raison et désirerait devenir fou ; toutes choses tellement énormes qu’elles méritent à peine qu’on s’en occupe.
Modifié en dernier par sescho le 24 nov. 2007, 10:09, modifié 1 fois.
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Re: les trois modes de connaissance

Messagepar Krishnamurti » 24 nov. 2007, 10:08

sescho a écrit :Mais moi-aussi je compte plutôt sur le raisonnement, d'autres auteurs, tendant éventuellement à le rejeter comme Krishnamurti

Il ne faudrait pas qu'on se retrouve avec un Krishnamurti "véritable" et un Krishnamurti "tel qu'il peut être appréhendé par certaines" personnnes....

Voir mes citations sur K et la raison dans le fil sur Spinoza et K

Para 1: The symbol, the name has extraordinary significance for us, and perhaps if we could break through the significance by understanding the whole content of the mind, which is so filled with words, symbols and names, then perhaps we should be able to understand the whole process of thinking. Because I feel that if we do not know how to think rationally, sanely, with deep insight as well as with reason, our thinking will not lead us very far and further, to go beyond reason, we must first know the whole process of reasoning. One cannot just skip it and say it is not important.
Talk 6, Madras, 09 November 1958
Le symbole , le nom ont une signification extraordinairement importante pour nous, et peut-être si nous pouvions percer, découvrir la signification en comprenant la totalité du contenu de l'esprit, qui est rempli de mots, de symboles et de noms, alors peut-être pourrions nous comprendre tout le processus de la pensée. Parce que je considère que si l'on ne sait pas comment penser rationnellement, sainement, avec un "insight" profond ainsi qu'avec raison, notre pensée ne nous ménera pas très loin, pour aller au-delà de la raison, nous devons d'abord connaître tout le processus du raisonnement. On ne peut pas juste sauter cette étape et dire que ce n'est pas important.


We are using the word `reason', not in a philosophical sense with all its implications; we are giving to that word the simple meaning of great honesty in thought, sanity, a sense of clear insight, perception, where there is no deception or self-delusion. Without reason as a beginning, you cannot go very far. Because, without reason, you are inevitably led to all forms of delusions, misconceptions, fears and all the rest of it. To understand the nature and the meaning of meditation, it is absolutely necessary to reason step by step, so that your mind is sharpened, your brains are clear, without any distortion, without any pressure. It does not demand any belief, any system; but it requires a brain that is sensitive, sharpened, clear, that can go step by step, not illogically, not jumping, but with rationality, with sanity.
Talk 6, 26 February 1964 Bombay
Nous utilisons le mot "raison" non pas en son sens philosophique avec toutes ses implications ; nous donnons à ce mot le simple sens d'une grande honnêteté dans la pensée, dans la raison, le sens d'un "insight" clair, d'une perception où il n'y a pas de tromperie ou d'auto-illusion. Sans la raison au départ on ne peut pas aller très loin. Parce ce que sans la raison vous êtes inévitablement conduit vers toutes formes d'illusions, préconceptions, peur et tout le reste. Pour comprendre la nature et le sens de la méditation, il est absolument nécessaire de raisonner étape par étape, afin que votre esprit soit affûté, que votre cerveau soit clair, sans distorsion, sans pressions. Cela ne demande aucune croyance, aucun système ; mais nécessite un cerveau qui est sensible, affûté, clair, qui puisse procéder étape par étape, pas de manière illogique, en sautant des étapes, mais avec rationalité, avec raison.


Without reason, passion becomes merely lustful, pleasurable. Passion which is aroused, which has a motive, becomes pleasure; and pleasure breeds pain, anxiety, fear. We are talking of a passion that is not aroused, that has no cause. Because such passion implies the fire of complete attention, complete giving oneself over to something logically, sanely, reasonably, in which there is no commitment, no belief, no dogma. Without that passion one cannot go very far.
Talk 6, 26 February 1964 Bombay
Sans la raison, la passion devient un simple appétit sensuel source de plaisir. La passion qui est stimulée, qui a un motif, devient plaisir; et le plaisir entraîne douleur, anxiété, peur. Nous parlons d'une passion qui n'est pas stimulée, qui n'a pas de cause. Parce qu'une telle passion implique le feu d'une attention complète, le don total de soi à quelque chose, avec logique, sainement avec raison, une chose pour laquelle il n’y a pas d'attachements, pas de croyance, pas de dogme. Sans cette passion on ne peut pas aller bien loin.


So space is necessary and space can only come about naturally when you use the mind logically, rationally, sanely and see the limits of reason. After all, rationality means the capacity to think objectively, not personally, not for personal profit, not according to a certain pattern of belief or ideas, conclusions, but to think clearly, objectively, sanely, which means healthily, such capacity gives a great deal of security, not only outwardly but inwardly. Then you have nothing to be afraid of, you can think logically. And when we are... go into this matter of meditation, which is very complex, which needs a great sensitivity to understand, and to understand, to have an insight, the mind must be free and have space to look and not have it crowded. Right?
Talk 4, Madras, 26 Decembre 1973
Donc l'espace est nécessaire et l'espace ne peut venir naturellement que lorsqu'on utilise son esprit de façon logique, rationnelle, sainement, et que l'on voit les limites de la raison. Après tout, la rationalité veut dire la capacité de penser objectivement, sainement, et non de façon personnelle, pour un profit personnel, selon un certain modèle ou croyance, idées ou conclusions, mais avec clarté, objectivité, sainement, ce qui veut dire avec santé et force, une telle capacité donne beaucoup de sécurité, pas extérieurement mais intérieurement. Puis vous n'avez plus rien dont vous pouvez avoir peur, vous pouvez penser logiquement. Et quand nous sommes... quand nous abordons cette question de la méditation, qui est vraiment complexe, qui nécessite une grande sensibilité pour comprendre. Et pour comprendre, pour pouvoir avoir un "insight", l'esprit doit être libre et avoir de l'espace pour observer et ne pas être envahi. C'est juste ?


Quand au bouddhisme "profond"/"véritable". Je recommande le seul livre que je connaisse là-dessus. Le livre de Serge Christophe Kolm http://tinyurl.com/y4ut4c

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Messagepar sescho » 24 nov. 2007, 10:16

Ne vous fatiguez pas à m'interpeller ; je ne vous reconnais nullement comme la voix de Krishnamurti. En passant, vous voyez quelqu'un prendre le pseudo "Spinoza" ici? J'ai déjà dit qu'au jeu des extraits nous pourrions y passer des années; je parle en tendance générale dans les propos de Krishnamurti et les extraits que j'ai donnés ici sont selon moi d'une totale limpidité.
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Messagepar Krishnamurti » 24 nov. 2007, 11:22

Bonjour Serge,

"La voix de Krishnamurti", comme tu y vas.
Pour moi rien n'est limpide à partir du moment où on explique où on argumente pour voir si l'on est d'accord ou pas et si l'on peut dialoguer pour aller plus loin.
Le pseudo de Krishnamurti est un clin d'oeil et un hasard. Serait-il préférable que je me désinscrive et que je choisisse un autre pseudo? Si vous le pensez, je le fais tout de suite. Les personnes et les pseudos n'ont aucun intérêt.

Je ne "t'interpelle" pas, je cherche à comprendre le fil de ton raisonnement. Et te relancer sur Krishnamurti que tu aimes bien il me semble.
Mes citations me semblent être en mesure de questionner ce que tu dis être la pensée de K, je te le signale pour relancer le débat. N'est-ce pas l'intérêt de ce forum. D'autre part si tu considères que j'ai une méthode "biaisée " pour parler de K et S, tu peux (aussi) m'envoyer un message privé, car là je ne comprends pas.
La question est pour moi : y a t'il un intérêt à exposer la pensée de K et de tenter d'approfondir sa compréhension, et peut-on le faire en lien avec la même démarche concernant S.

Christophe

Edit : simple correction orthographique.
Modifié en dernier par Krishnamurti le 24 nov. 2007, 16:40, modifié 1 fois.

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Messagepar sescho » 24 nov. 2007, 14:51

Bon d'accord ; il s'agit d'une méprise.

J'ai ressenti (faussement, donc) l'impossibilité de dire ce que je pensais de Krishnamurti sans avoir affaire immédiatement avec la Stasi... D'autant qu'un traducteur absolument fidèle d'un grand auteur ne se trouve pas sous le pied d'un cheval...

J'ai pas mal lu Krishnamurti, et je persiste à dire que dans l'ensemble (mais j'ai bien dit moi-même que j'avais des extraits en sens contraire) il condamne la pensée verbalisée (mécanique, vieille, etc.) Même dans les extraits que tu reproduis il associe l'insight à la raison (dans un sens restreint que Spinoza utilise aussi) : "Nous utilisons le mot "raison" non pas en son sens philosophique avec toutes ses implications ; nous donnons à ce mot le simple sens d'une grande honnêteté dans la pensée, dans la raison, le sens d'un "insight" clair, d'une perception où il n'y a pas de tromperie ou d'auto-illusion." C'est moins net s'agissant du raisonnement proprement dit. Et le fait est qu'on peut raisonner parfaitement d'un point de vue logique (et l'"insight" se fait là sur la logique de la logique même), même sur la base de prémisses potentiellement fructueuses, et ne jamais voir les conclusions en vérité, ne jamais passer au fait, à la connaissance du troisième genre.

Krishnamurti a fait des "causeries", pas comme Spinoza une somme cohérente. Ceci n'en minimise pas le fond et la portée, mais celle des extraits particuliers, oui. Au poids, il n'y a pas photo selon moi : c'est en centaines d'extraits que se pèse la condamnation de la pensée verbalisée. D'un autre côté il utilisait des mots dans ses causeries, et on peut lui faire à lui-aussi le crédit de ne pas être dans une contradiction performative de niveau zéro. Je crois néanmoins qu'il serait pour le moins exagéré dans ce cadre que d'en faire un apologue de la connaissance du deuxième genre comme préparation au troisième.

Pour le reste, je le répète, c'est pour moi un vrai et rare grand auteur (et j'invite les lecteurs intéressés à se reporter sur le fil indiqué plus haut, où ont été donnés plein de liens précieux), un "sauveur" de la connaissance du troisième genre devant celle du premier et, disons, devant les stérilités existentielles rarement évitées auxquelles peut conduire le deuxième.


Serge
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Messagepar Krishnamurti » 24 nov. 2007, 16:36

OK, merci d'avoir rebondi.
Je pense être assez d'accord avec ce que tu dis.
Christophe

Je viens d'écouter en partie l'entretien ENS avec Vittorio Morfino (Université de Milan-Bicocca) http://tinyurl.com/35o38u ou il explique ce qu'il caractérise par "lire entre les lignes"
http://w1.ens-lsh.fr/video/canalU/Moreau_Morfino.ram
(fichier Real 20 minutes)
Écoutez son explication entre 10:02 et 12:18
Si j'osai, je dirai que c'est un peu comme ça que je procède avec Krishnamurti. Je sais qu'il condamne la "pensée verbalisée", mais je ne le crois pas. Il s'agit pour moi d'une simple technique pour éloigner ses interlocuteurs du "verbiage".
Pour moi la logique des 3 genres de connaissance fonctionne chez K.

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Messagepar olfa » 27 nov. 2007, 21:32

riseohms a écrit :bonsoir

Je vais essayer de répondre mais ce n’est pas facile,
je crois que je vais être long donc merci d’avance pour votre patience

Qui a connaissance en nous ?
Pour Spinoza, l’entendement humain est une partie de l’entendement divin
Aussi on peut dire que c’est Dieu qui a connaissance de lui-même ,en nous, à travers nous
Ce n’est pas l’homme qui a connaissance de dieu ou de la vie

Qu’est ce que l’homme ?
Une modalité de la pensée (et de l’étendue)
Pour Spinoza, il n’y a pas de moi ou d’égo, l’âme est une ‘’idée’’ d’un corps
Çà veut dire qu’elle n’est pas une substance mais un mode.

le moi on ne le voit jamais lui-même, on ne voit que ses manifestations (pensées, vouloir affects etc ) et si ces manifestations cessent, il n’y a plus de moi
Et ce qui reste est juste un “éprouver “, un éprouver de la vie, un sentiment d’existence, d’être, qui n’est pas personnel. Ce sentiment de soi même enveloppe en lui le sentiment du monde et Dieu.

À mon avis la connaissance que Dieu a de lui-même relève de cet “éprouver “
C’est une connaissance immanente, sans extériorité ni distance, donc sans écart, sans dualité
On peut dire que cette connaissance, Dieu ne l’a pas mais l’Est.
Ce n’est pas la même chose
C’est une connaissance ou conscience non réflexive cad Dieu ne se prends pas pour objet

La connaissance que peut avoir l’homme cad la pensée est de type réflexive, elle reste
Dans la dualité sujet-objet. Il s’agit toujours d’avoir conscience de quelque chose, et la connaissance est quelque chose que l’on possède
Or soi- même, dieu et la vie relève de la subjectivité pure et non de l’objectivité
La pensée ne peut avoir accès au réel. Seul un sentir, un éprouver, une intuition le peut. ( pas un sentiment ou intuition vague mais un sentir illuminé par la raison, l’intelligence : 3e mode )

Mais dans notre chemin vers le réel, on ne peut pas faire autrement que de commencer par la pensée
Et même si parfois on a des éclairs, des ouvertures, des accès au réel, des moments de vérité
Très vite, on est repris par les pièges de la pensée
Ce piège on peut lui donner un nom : la réification
Cad la tendance à chosifier le vécu, à l’objectiver
Cette tendance introduit dans le vécu de la distance et de la dualité : soi par rapport à soi, soi par rapport au monde et aux autres, soi par rapport à dieu : rapport de sujet à objet.
On peut dire alors que la pensée écrase la vie.
Et si elle le fait c’est qu’elle n’a pas compris, elle est victime d’idées fausses, inadéquates sur la vie, sur elle-même
Elle se prend pour le maitre, un ‘ego’ une substance indépendante, son langage est celui de la chosification, de la possession, de l’avoir, de la conservation (c’est pourquoi, je disais que ‘’vouloir conserver cette unité avec le monde est une idée triste’’ triste car elle fait croire qu’on peut perdre cette unité, la garder et la retrouver
or ce qui arrive et repart, cad ce qui a un commencement et une fin , ce n’est pas la vie mais les choses de la vie, les expériences
La vie elle-même cad la subjectivité pure, Dieu n’a ni commencement ni fin, c’est pourquoi on dit qu’elle est éternelle

tle 3e mode de connaissance est aussi l’accès à l’éternité : Spinoza dit :<< nous sentons et expérimentons que nous somme eternel <<

Expérience pure, absolu et non expérience de quelque chose : << une expérience que l’on est et non une expérience que l’on a ou que l’on fait >> : formule limpide du phénoménologue tchèque Patocka)

Vous écrivez :
<< Une fois qu'on a compris, ne finit on pas par toujours revenir a notre état premier (être individuel) tout en ayant cette connaissance? >>
Je pense que c’est parce qu’on n’a pas complètement compris

D’abord l’être individuel (séparé du tout) n’est pas notre état premier mais notre état second
Notre être originaire est à la fois individuel et universel, uni au tout-
Et cet état, on ne le quitte jamais même quand on croit le contraire
Tout vient d’une idée fausse, celle d’être un individu, un moi, distinct du monde, distinct de dieu, on est pris dans le piège de l’extériorité
Alors on se prend pour un individu sur terre et Dieu on le comprend comme un soleil au dessus de nous, voilé la plupart du temps par des nuages, et parfois ils se dissipent, et on a des moments d’ouvertures, de lumière et d’unité puis les nuages reviennent, on les considère comme des obstacles
On voudrait bien conserver ces états, les stabiliser mais ce n’est pas possible car le problème est mal posé et repose sur une idée fausse de nous-mêmes

La pensée de Spinoza est une pensée de l’immanence, de la non- dualité,.
L’extériorité n’existe pas – Dieu n’est pas extérieur à nous, on n’est pas que cet individu sur terre et le soleil n’est pas au dessus de nous
On est le soleil qui brille toujours de lui-même.
Et les nuages sont au dessous de nous et donc ne sont pas des obstacles, il n’ ya pas d’obstacles réels, juste des façons erronées de penser -
Et c’est cette présence permanente du soleil, de la vie, de soi même qu’il faut comprendre et percevoir (sentir )
Cette présence nous accompagne en permanence et n’est jamais voilée, elle n’a pas besoin d’être objet de connaissance ( de la part de qui ?) et donc pas besoin d’être conservé car on ne peut jamais la perdre
Par contre elle peut être sentie, éprouvée
Et cet éprouver, c’est aussi sentir et comprendre que ce sentiment de soi- même est toujours donnée naturellement, sans effort et n’a pas besoin d’être saisi, objectivé.
il faut juste cesser de vouloir s’en emparer, d’en faire une chose que l’on expérimente.

C’est avoir confiance en cette présence ( cad en soi ), on peut parler de foi
c’est comprendre aussi que même dans les moments où l’on pensait être éloigné de cette présence (qui est la vie même), dans nos moments de souffrances, de tristesses, elle était avec nous, elle est nous, joyeux ou triste .

Cette présence ne s’oublie jamais sinon elle serait imparfaite or le réel dit Spinoza est parfait.
C’est toujours la pensée qui croit l’oublier et s’en rappeler. Il faut sortir de cette logique
On n’éprouve pas cette présence, c’est la présence qui s’éprouve elle-même
On est cette présence- on n’est nous- même, toujours
A nous de transformer nos affects tristes en affects de joie
Grace à la lumière de l’intelligence et de la raison qui nous permet de nous dégager des idées inadéquates ( 2 e mode ) alors le 3em mode connaissance émerge de lui -même

C’est ainsi que je comprends la phrase de Spinoza :<< tous les hommes connaissent Dieu mais la plupart s’en font une idée fausse >>
Cad tous les hommes s’éprouvent eux-mêmes mais la plupart ne se comprennent pas , se trompent sur la nature de ce sentiment qui des lors est rattaché à des idées fausses qui limitent leur vie
Et notre travail est de décoller ce sentiment de ce qui n’est pas lui (les idées ou images de soi) mais sans en faire un objet de connaissance (même si dans un 1er temps, on ne peut pas faire autrement)
Ce sentiment est de l’ordre de la reconnaissance, de la révélation, on ne va pas à lui, on ne le vise pas, il n’est pas là face à nous,
il advient comme toujours déjà advenu.

Bon voilà , j’arrête
J’espère n’avoir pas été trop laborieux

Amicalement
Joel


Ps vous écrivez : Comment vivre avec les hommes qui n'ont pas cette connaissance?
Peut on savoir qui a ou n’a pas cette connaissance ?
D’une certaine façon comme je viens d’en parler tout le monde a cette connaissance
J’imagine que pour le sage tout est parfait et un.
il voit la lumière de la vie dans tous les regards qu’il croise, même s’il est conscient qu’à la surface tout n’est pas limpide
A vrai dire je ne sais pas trop quoi répondre à cette question.

-je vous signale une étude très intéressante de jean-michel longneaux qui accompagne le livre de Michel Henry : le bonheur de Spinoza ( puf )
La philosophie de michel henry est aussi une philosophie de l’immanence. Son premier livre est ce mémoire sur Spinoza. Ensuite il a développé une phénoménologie de la vie dans laquelle il critique notamment Husserl en montrant que la réification de la conscience est encore présente dans sa phénoménologie et donc passe à coté de la vie. L’étude de de jean-michel longneaux porte sur le spinozisme présent dans la philosophie de michel henry , même si celui-ci ,après son premier livre n’a plus cité Spinoza

Bonsoir Joel, je vous remercie infiniment pour votre exposez et le temps que vous me consacrer, plus je lis vos commentaires plus je me dis mais tu sais cela donc pourquoi te crées tu de fauses idées qui t'empeche d'avancer alors que je sais très bien comme vous l'avez très joliment dit: "On est le soleil qui brille toujours de lui-même." Peut etre que mon problème vient du fait que je ne peux partager cette vérité avec mon entourage. Vous arrive t-il parfois d'etre perdu dans de telles pensées qui comme vous le dites : "On peut dire alors que la pensée écrase la vie."
Une deuxième question s'il vous plait que voulez vous dire par "tous les hommes s’éprouvent eux-mêmes mais la plupart ne se comprennent pas". Voila merci énormément pour votre aide qui m'es très précieuse bien à vous Olfa
Without LOVE I'm nothing!!!


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