les vitesses de la pensée et le mode de troisieme genre

Questions et débats touchant à la nature et aux limites de la connaissance (gnoséologie et épistémologie) dans le cadre de la philosophie spinoziste.
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les vitesses de la pensée et le mode de troisieme genre

Messagepar riseohms » 11 déc. 2005, 13:13

bonjour

Toujours dans le cadre d'une réflexion sur le troisième genre de connaissance :

Je viens de lire le nouveau cours de Deleuze sur WebDeleuze, intitulé: ‘’des vitesses de la pensée''

le 3em mode de connaissance,celui de l'intuition, serait une pensée à vitesse absolue et amplitude maximum et qui procède comme un éclair
et le 2em mode serait la pensée à des vitesses relatives, c-ad plus ou moins vite

Cela me fait penser à l'improvisation chez le pianiste de jazz:
Avant d'en arriver à improviser de cette façon si libre et spontanée et avec le sentiment de ne pas penser du tout et à tel point que la moindre pensée consciente ou intention pourrait casser ou bloquer son jeu, il a du travailler et réfléchir énormément :
Sur l’harmonie, les rapports entre les intervalles, les enchaînements d’accords, les rapports entre l’harmonie et la mélodie, la façon d’être libre par rapport à l’harmonie, le rythme etc. bref tout un apprentissage extrêmement fastidieux sous un mode linéaire et discursif

Mais vient un moment où à force d’entraînement, tout ce langage ( pensée musicale) a été compris et intégré, intériorisé et il peut alors tout oublier, jouer et improviser.
Mais est-ce à dire qu’il ne pense plus ?
Il a peut-être cette impression .
Deleuze dit : » » Et peut-être qu’une vitesse absolue et une immobilité absolue ça se rejoint absolument.<<

Mais en fait, dans son jeu, les pensées et les intentions n’ont pas disparues, le pianiste sait ce qu’il fait et va exactement où il veut aller mais à une telle vitesse que tout semble simultané et immédiat, son jeu, ses pensées, ses intentions

Pensée et silence, intentions et intensités, réflexions et vécu, théorie et pratique, pensée et vie se rejoignent mais sont indiscernables
C’est une question de vitesse, d’intensité de la pensée

Le mode du troisième genre, celui de la pensée intuitive est donc le mode du second genre en tant que celui-ci a été intégré, intériorisé c-ad vraiment compris. Quand la compréhension devient complète, elle est intégrée et devient intuitive (vitesse absolue)

Joël

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Messagepar hokousai » 11 déc. 2005, 15:15

cher Joël

Qu’entendez vous( ou Deleuze ) par vitesse de la pensée .?

A mes yeux on est dans l’imaginaire pur .
On peut parler de vitesse relative référée à une échelle de mesure . Si elle n’est pas nombrée à tout le moins faut- il quelque critère d’ appréciation. Quel sont les critères d’ appréciation qui différencie une pensée rapide d'une pensée moins rapide ? Ce serait déjà un premier pas avant que de parler de vitesse absolue à supposée qu’une vitesse puisse être comprise comme absolue .
Voilà quelques interrogations sur une métaphore assez obscure .

Dire que ce serait comme(comme un éclair ), certes ,mais encore faut-il au moins avoir compris le premier élément de la comparaison .
Ce serait comme quoi ? Comme une vitesse dans l’étendue ? Mais alors ce qui se comprend comme une vitesse dans l’étendue n’a pas d’ analogie dans la pensée .On ne voit pas dans la pensée se déplacer des mobiles individués ( des objets en mouvements).repérés en tel lieu en tel moment .Non puisque dans la pensée il n’y a pas de lieu .

Manque un élément essentiel à la compréhension de la vitesse et c’est le lieu .Le temps n’a jamais suffit à penser la vitesse .La vitesse peut se passer du temps mais pas de l’étendue (la vitesse peut se passer du temps si le temps est lui même compris comme une modification de l’étendue : mouvement d’ aiguilles ou passage du sable dans un sablier que sais je ...on a alors la comparaison de deux étendues ).

La "vitesse de la pensée" joue sur les mots , transporte un concept de l’étendue dans la pensée et ce indûment . Le concept à l’air de fonctionner mais seulement l' air, en fait il ne fonctionne pas ou à vide .

Hokousai

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Messagepar bardamu » 11 déc. 2005, 16:46

hokousai a écrit :(...)
Manque un élément essentiel à la compréhension de la vitesse et c’est le lieu .Le temps n’a jamais suffit à penser la vitesse .La vitesse peut se passer du temps mais pas de l’étendue (la vitesse peut se passer du temps si le temps est lui même compris comme une modification de l’étendue : mouvement d’ aiguilles ou passage du sable dans un sablier que sais je ...on a alors la comparaison de deux étendues ).

La "vitesse de la pensée" joue sur les mots , transporte un concept de l’étendue dans la pensée et ce indûment . Le concept à l’air de fonctionner mais seulement l' air, en fait il ne fonctionne pas ou à vide .

Hokousai

La vitesse peut se passer de l'espace mais pas du temps.
La vitesse est un enchainement de phénomènes en un temps donné. L'unité est d'ailleurs x par seconde, x pouvant être un espace, une concentration chimique, ou un nombre d'idées. En physique, la vitesse est reliée à l'intensité des phénomènes.
En musique, on parle de lento, presto etc., rythme immanent qui détermine des variations affectives.

Dans le 2nd genre, la pensée procède de proche en proche, de notions communes en notions communes, qu'elle parcourt lentement, procéduralement, tandis que dans le 3e genre la synthèse est immédiate ou à vitesse infinie, absolue, un tout se constituant d'emblée, intensément. Eureka !

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Messagepar riseohms » 11 déc. 2005, 19:41

hokousai a écrit :cher Joël

Qu’entendez vous( ou Deleuze ) par vitesse de la pensée .?

Hokousai


bonsoir Hokousai

je crois qu'il faudrait d'abord lire Deleuze sur ce qu il entend par vitesse de la pensée
voici le lien:
http://www.webdeleuze.com/php/texte.php ... a&langue=1

J'ai vite fait le lien avec l'improvisation au piano que je pratique et je constate que cette idée de vitesse absolue de la pensée correspond bien à mon vécu du piano..

Chez Deleuze la notion de vitesse est liée à la notion d'intensité.

Et dans mon texte sur l'intensité chez Deleuze, j'avais parlé de la barre de la pensée disjonctive qui tourne:
Je me cite:<< la pensée fonctionne à l'aide de disjonctions ou les termes binaires ( ceci et cela ) sont séparés par une barre que Lyotard nomme barre libidinale " imaginons que cette barre se mette à tourner à toute vitesse alors la pensée définie par les 2 termes de la disjonction disparaît.
Reste la barre qui remplit tout le cercle: on est dans l'intensité, on est passé sur un autre plan et pourtant rien n'a vraiment disparu, les termes de la disjonction sont toujours là mais indiscernables '' en fusion '' en quelque sorte. >>

on peut imaginer des variations de vitesse jusqu'au moment de la vitesse maximum et c'est là que se trouve l'intuition ou pensée silencieuse ou vie intensive totale ou 3em degré de connaissance , là ou l'affect atteint son sommet, béatitude, mais j'imagine que cette puissance de joie n'a pas de sommet

En tout cas , quand dans la musique, on atteint cet état où on est parfaitement synchrone et avec son instrument et avec d'autres musiciens, c-ad où on est arrivé au point de devenir musique, devenir ce qu'on joue, donc sans aucune extériorité, on peut parler de félicité. il suffit de regarder les musiciens en concert. : ils sont beaux.
Là on est dans un monde parfait : tout ce qu’ils jouent se fait dans une parfaite nécessité. C’est le paradis et çà se voit.


<<Quel sont les critères d’appréciation qui différencie une pensée rapide d'une pensée moins rapide ?>>

la pensée devient de plus en plus claire, le discours de plus en plus précis , aisé, fluide .
les connexions, les liens, les correspondances s’élargissent.
tout cela va dans le sens d’une rapidité et d’une intensification progressive de la pensée.
Deleuze parlait de vitesse intensive et de vitesse quantitative, extensive qui relève de l’étendue.. donc je pense qu’on peut utiliser le terme de vitesse pour la pensée et l’étendue
Mais je pense que notre ami Bardamu est plus qualifié que moi pour en parler .

Parler de ‘ vitesses de la pensée est peut être une image.
Mais images et analogies nous permettent parfois de comprendre bien plus ‘’rapidement ‘’ qu’avec un discours trop démonstratif.
Pourquoi s’en priver ?
C’est aussi le don et le charme de Deleuze
Amicalement
joel
Modifié en dernier par riseohms le 11 déc. 2005, 22:58, modifié 1 fois.

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Messagepar riseohms » 11 déc. 2005, 20:18

bardamu a écrit :La vitesse peut se passer de l'espace mais pas du temps.
La vitesse est un enchainement de phénomènes en un temps donné. L'unité est d'ailleurs x par seconde, x pouvant être un espace, une concentration chimique, ou un nombre d'idées. En physique, la vitesse est reliée à l'intensité des phénomènes.
En musique, on parle de lento, presto etc., rythme immanent qui détermine des variations affectives.

Dans le 2nd genre, la pensée procède de proche en proche, de notions communes en notions communes, qu'elle parcourt lentement, procéduralement, tandis que dans le 3e genre la synthèse est immédiate ou à vitesse infinie, absolue, un tout se constituant d'emblée, intensément. Eureka !


bonsoir Bardamu

Oui, c'est tout à fait çà
On dit la même chose, en écrivant à Hokousai, j'avais pas encore lu votre post, on est synchrone comme des musiciens. les réactions , les critiques apparemment dissonantes font partie de la musique et de l’harmonie., les consonances en ressortent plus et en augmentent la puissance et l’intensité.
sans dissonances, il n’y aurait pas de musique du tout

Amicalement
joel

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Messagepar hokousai » 11 déc. 2005, 22:47

A Bardamu

Pour qu’il y ait vitesse il faut que l’événement (objet mobile ) perdure dans une identité et se déplace dans l’espace en une certain temps . Je n’employais vitesse que dans ce sens là . Le sens que vous donnez est vu par le Robert comme par extension ,c’est le fait de s ‘accomplir en un temps donné pour un phénomène quelconque .
Je comprends ce sens là je l’admets (voire s’il a du sens pour la pensée )..

Voyons si en musique il s’agit de vitesse ,de vitesse ou de rythme ? Et le rythme peut-il être assimilé à la vitesse ?
Je veux bien qu ‘un morceau soit exécuté plus rapidement avec donc à une vitesse plus grande si étant prévu pour une minute il est exécuté en trente seconde . L’ensemble de la gestuelle aura été plus rapide (gestuelle dans l’étendue ) cela comptée dans le temps .
Un morceau composé de piano, presto que sais- je d’indication de rythme sera exécuté plus ou moins rapidement quel que soient les rythmes .Voilà un sens ordinaire de vitesse .
.
Vous entendez par vitesse l’évolution organique de métamorphose d’un événement . Le changement de forme est de l’ordre de la seconde ou moins ou de la minute ou plus ,alors il y aurait vitesse de changement d’un élément organique .
Cet élément perdurerait dans le changement il n’y aurait donc pas de mouvement d’un mobile dans le temps . Il ne s’agirait pas de la vitesse d’un mobile . Il s agirait du rythme du changement et ce rythme serait plus ou moins rapide .
.
Mais dans ce cas un phénomène est parcellarisé en autant de phénomènes que de secondes où il apparaît métamorphosé .L 'événement n’est pas le même puisque changé . Quel est alors l’objet de la vitesse . ? Quel est l’ événement qui a une vitesse puisque nous avons une succession d’événement et non un seul nous n’avons pas de vitesse du tout .. L’ événement est ponctuel nous avons une suite d’événement mais pas d’événement ayant une vitesse .
C’est le rythme d’ apparition d’évènements différents qui est observable selon le découpage en moment différenciés .La vitesse n’est pas dans l’événement mais dans le découpage lequel peut se faire à volonté de l’observateur selon le milliardième de seconde ou la seconde ou la minute .Il n’y a pas de vitesse objective .
Dans le cas d'événements discontinus nous n'avons qu'une succession d'instantanés, pas de vitesse d événement, mais vitesse de succession .Ce que vous dîtes (La vitesse est un enchainement de phénomènes en un temps donné)

Je veux bien admettre cette façon de penser la vitesse , mais pour la pensée ? Supposons que les évènements de la pensée soit discontinus.
Distinguer les objets successifs est possible( je pense ceci et puis cela )mais le rythme ? J ‘ai trente idées déférentes à la minute ou seulement deux ..certes mais quel est l'intérêt ?Spinoza demande t- il jamais de penser précipitamment .
.""""" Dans le 2nd genre, la pensée procède de proche en proche, de notions communes en notions communes, qu'elle parcourt lentement, procéduralement"""""""""""
En apprécier la vitesse n’a aucun intérêt .Il va au rythme qui convient . Encore a t-il l’avantage d’aller à un rythme observable ce qui n’est pas du tout le cas dans ce que vous donnez comme connaissance du troisième genre et s'il n’y a plus de rythme alors il n’y plus de vitesse non plus ni dans mon sens(ordinaire ) ni dans le votre (par extension ).

Maintenant dans le cas de la pensée comme continue alors l'appréciation du rythme est selon la différenciation très subjective que l'’on y fait .La vitesse de métamorphose est subjective rapide ou lente mais en aucun cas absolue . Dans le cas de la vitesse supposée absolue il n'y a pas de métamorphose .

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Messagepar hokousai » 11 déc. 2005, 22:51

Cher Joël
Je ne suis pas musicien mais plasticien . L'intérêt est de confronter les idées .
Votre apport est roboratif .

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Messagepar bardamu » 12 déc. 2005, 12:54

hokousai a écrit :(...)
.""""" Dans le 2nd genre, la pensée procède de proche en proche, de notions communes en notions communes, qu'elle parcourt lentement, procéduralement"""""""""""
En apprécier la vitesse n’a aucun intérêt .Il va au rythme qui convient . Encore a t-il l’avantage d’aller à un rythme observable ce qui n’est pas du tout le cas dans ce que vous donnez comme connaissance du troisième genre et s'il n’y a plus de rythme alors il n’y plus de vitesse non plus ni dans mon sens(ordinaire ) ni dans le votre (par extension ).

Peut-être n'êtes vous pas sensible aux variations de vitesse des mouvements symphoniques, des montages au cinéma, dans la composition d'un roman, ou dans les démonstrations de Spinoza et comme vous ne connaissez pas Deleuze, vous allez avoir du mal à développer une critique qui tombe juste.
Deleuze a tendance à remplacer la permanence par la répétition, et l'immédiat par la vitesse infinie. Cela donne une conception du monde toujours en mouvement, en devenir, dans lequel le "statique" est un mouvement dépassant l'analyse, est un tout insécable parce que liant les choses à vitesse infinie.
Intéressante idée pour éviter de figer l'éternel dans une figure, pour que l'être soit un devenir, numériquement Un mais formellement multiple.

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Messagepar hokousai » 12 déc. 2005, 19:31

à bardamu

"""""""""Deleuze a tendance à remplacer la permanence par la répétition, et l'immédiat par la vitesse infinie. Cela donne une conception du monde toujours en mouvement, en devenir, dans lequel le "statique" est un mouvement dépassant l'analyse, est un tout insécable parce que liant les choses à vitesse infinie. """""""""""""""

Je ne développerai pas de critique du tout .Pas de ce que vous dîtes là .Pas sans explication .Je trouve ça plutôt confus .

Que le statique soit un mouvement je comprends que cela dépasse l’analyse . Cet insécable qui lie des chose à vitesse infinie est poétique et sur le poétique je suis assez désarmé.
Disons que je n’ai jamais éprouvé le besoin de forger des armes contre le poétique. Celui ci se donne comme tel , il a ses manières de dire et je ne le lui ai jamais reproché .
Que pouvez vous dire contre un poème et surtout comment le dire ? Le dire en le réécrivant ?Mais réécrire le poème n’est pas une manière de faire dans ce domaine . Repeindre un tableau de Vermeer parce qu’on ne le trouve pas assez bien peint ne sera jamais une critique de Vermeer ce sera un nouveau tableau .

Ce que je sais aussi c’est que Spinoza ne donne pas l’impression d ‘ avoir du goût pour la précipitation ,la vitesse et la fulgurance de l'éclair , l'ondoyance des concepts .

J’ aurai pu lire Deleuze , j’ai bien passé du temps à lire d’autres philosophes, mais le peu qu’il m’a été donné de lire ne m’a jamais vraiment accroché .Ce que je lis des textes des aficionados ne m’incite pas vraiment non plus .
Il y a comme un flou dans les concepts qui ne me correspond pas .

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Messagepar bardamu » 12 déc. 2005, 21:07

hokousai a écrit :(...)
Que le statique soit un mouvement je comprends que cela dépasse l’analyse . Cet insécable qui lie des chose à vitesse infinie est poétique et sur le poétique je suis assez désarmé.

Ce n'est pas compliqué le mouvement donnant du statique : si une roue de voiture tourne à 25 images par secondes, vous aurez l'impression qu'elle ne tourne pas ou si un cercle avec les couleurs de l'arc-en-ciel tourne suffisament vite, vous voyez du blanc.
Un texte de Bergson sur le "vrai" mouvement, celui qui donne des qualités :
Matière et mémoire, Bergson a écrit :Mais la question est justement de savoir si les mouvements réels ne
présentent entre eux que des différences de quantité, ou s'ils ne seraient pas la qualité même, vibrant pour ainsi dire intérieurement et scandant sa propre existence en un nombre souvent incalculable de moments. Le mouvement que la mécanique étudie n'est qu'une abstraction ou un symbole, une commune mesure, un dénominateur commun permettant de comparer entre eux tous les mouvements réels; mais ces mouvements, envisagés en eux-mêmes, sont des indivisibles qui occupent de la durée, supposent un avant et un après, et relient les moments successifs du temps par un fil de qualité variable qui ne doit pas être sans quelque analogie avec la continuité de notre propre conscience. Ne pouvons-nous pas concevoir, par exemple, que l'irréductibilité de deux couleurs aperçues tienne surtout à l'étroite durée où se contractent les trillions de vibrations qu'elles exécutent en un de nos instants ? Si nous pouvions étirer cette durée, c'est-à-dire la vivre dans un rythme plus lent, ne verrions-nous pas, à mesure que ce rythme se ralentirait, les couleurs pâlir et s'allonger en impressions successives, encore colorées sans doute, mais de plus en plus près de se confondre avec des ébranlements purs ? Là où le rythme du mouvement est assez lent pour cadrer avec les habitudes de notre conscience, -comme il arrive pour les notes graves de la gamme par exemple, - ne sentons-nous pas la qualité perçue se décomposer d'elle-même en ébranlements répétés et successifs, reliés entre eux par une continuité intérieure ?
Ce qui nuit d'ordinaire au rapprochement, c'est l'habitude prise d'attacher le mouvement à des éléments, - atomes ou autres, - qui interposeraient leur solidité entre le mouvement lui-même et la qualité en laquelle il se contracte. (...) En définitive nous n'avons pas le choix : si notre croyance à un substrat plus ou moins homogène des qualités sensibles est fondée, ce ne peut être que par un acte qui nous ferait saisir ou deviner, dans la qualité même, quelque chose qui dépasse notre sensation, comme si cette sensation était grosse de détails soupçonnés et inaperçus. Son objectivité, c'est-à-dire ce qu'elle a de plus qu'elle ne donne, consistera précisément alors, comme nous le faisions pressentir, dans l'immense multiplicité des mouvements qu'elle exécute, en quelque sorte, à l'intérieur de sa chrysalide. Elle s'étale, immobile, en surface ; mais elle vit et vibre en profondeur.


Entre ceux qui font du monde un Etre figé dans l'éternité et ceux qui en font un chaos en devenir insaisissable, Deleuze se met en équilibre, fait une diagonale où l'Etre se déduit du devenir sans jamais en sortir par transcendance.
Le problème se pose aussi chez Spinoza : comment se conçoivent les essences spinoziennes qui sont immanentes aux choses, en contact avec la contingence du devenir sans pourtant se réduire à cette contingence et exprimant une nécessité ?
Qu'est-ce qu'une chose qui s'exprime dans le devenir (l'insaississable mouvant) en tant que perséverance dans son être, en tant que saisissable ? Qu'est-ce qu'on saisit des choses, qu'est-ce qu'on comprend ?


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