De la preuve et de la conviction

Questions et débats touchant à la nature et aux limites de la connaissance (gnoséologie et épistémologie) dans le cadre de la philosophie spinoziste.
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zerioughfe
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Messagepar zerioughfe » 25 nov. 2003, 16:10

Hier soir j'ai réfléchi à tout cela, et je crois pouvoir préciser certains points de mon dernier message :

Je ne sais pas si vous admettrez avec moi la chose suivante, qui me paraît évidente : toute théorie circulaire est incertaine. Autrement dit : une théorie qu'il faut supposer d'abord pour pouvoir fonder ne peut prétendre à la certitude absolue.

En philosophie, on qualifie de dogmatique toute doctrine qui affirme l'existence de certitudes absolues légitimes. Pris en ce sens, le mot "dogmatique" n'a bien sûr rien de péjoratif.

Or il me semble que le dogmatisme contient une contradiction performative, un peu comme la phrase suivante : "J'étais dans un bateau qui a fait naufrage sans laisser de survivant" (cet énoncé ne contient pas de contradiction interne mais le fait de l'énoncer en amène une).

Les dogmatiques disent que toute évidence (ou certitude, par opposition à la conviction) est légitime. Comment le savent-ils ? Pour échapper à la régression à l'infini des démonstrations, ils doivent répondre : "cela est évident, l'évidence est un critère absolu de vérité". De deux choses l'une : ou l'évidence est un critère de vérité, ou elle ne l'est pas. Si elle l'est, alors le dogmatisme paraît tout à fait cohérent, et il semblerait que je ne puisse rien trouver à y redire... Si elle ne l'est pas, alors le dogmatisme est faux, mais ce n'est pas un problème pour les dogmatiques : ils considèrent que cette hypothèse est évidemment fausse. Aucun problème en apparence, donc.
Mais seulement en apparence. Nous venons de montrer que le dogmatisme est circulaire : pour justifier la validité du critère de l'évidence, il faut d'abord le supposer. Bien sûr, cela ne prouve pas qu'il soit faux : une théorie circulaire peut très bien être exacte. Ca prouve seulement qu'il est incertain. "Incertain, mais pas faux", dira-t-on. Oui, mais le dogmatisme prétend justement à la certitude ("il est évident que l'évidence est un critère absolu de vérité"). Par conséquent celui qui croit au dogmatisme "dur comme fer" a peut-être tout à fait raison, mais ce n'est pas sûr : sa position est donc contradictoire. CQFD.

La réponse "c'est évident" à la question "comment sais-tu que l'évidence est un critère absolu de vérité ?" n'est pas satisfaisante pour une autre raison plus faible : les sceptiques ne voient pas cette "évidence"... Cette remarque n'est pas une preuve, mais on ne me fera pas dire qu'elle ne pèse pas son poids...

Bien sûr, Spinoza a démontré que la certitude est un critère absolu de vérité, seulement il le fait a posteriori (après avoir "démontré" l'existence de Dieu et Cie)...

Quand Henrique me dit que l'existence de Dieu est évidente, et que je manque de lucidité, je pense à la phrase d'Epicure : "Les dieux existent : la connaissance que nous en avons est évidente" (Lettre à Ménécée, 123) et je souris doucement... :wink:

Puisque nous avons parlé de Comte-Sponville dans l'autre fil, j'ai ouvert ses livres hier soir. Voici, pour compléter mes propos, ce qu'il écrit à l'article "Certitude" de son Dictionnaire philosophique :

<< CERTITUDE : Une pensée est certaine quand elle ne laisse aucune place au doute.

On distinguera la certitude subjective, qui n'est qu'un état de fait (que je sois incapable, en fait, de douter de telle ou telle proposition, cela ne suffit pas à prouver qu'elle est vraie), de la certitude objective, qui serait une nécessité logique ou de droit (si telle proposition, ou telle démonstration, est en elle-même ou objectivement indubitable). Mais ce second type de certitude, qui seule serait absolument satisfaisante, suppose en vérité le premier, et c'est pourquoi elle ne l'est pas. Marcel Conche, en une phrase et à propos de Montaigne, a dit l'essentiel : "La certitude qu'il y a des certitudes de droit n'est jamais qu'une certitude de fait." A la gloire du pyrrhonisme. >>

Dans la même veinr : "Lorsqu'on croit de la foi la plus ferme que l'on possède la vérité, on doit savoir qu'on le croit et non croire qu'on le sait." (Jules Lequier)


bardamu a écrit :
zerioughfe a écrit :Il m'est impossible, même avec la plus grande vigilance, d'imaginer que l'étendue puisse avoir plus de 3 dimensions. Toute nouvelle dimension devrait nécessairement s'inscrire dans notre espace tridimensionnel, et s'annuler par là en tant que dimension nouvelle (on aurait une famille liée, comme on dit en maths).
C'est pourquoi il est facile de considérer que la tridimensionnalité de notre espace est une certitude (je ne dis pas que Henrique soit dans ce cas). Seulement c'est faux.

Et en quoi c'est faux, stp ?

C'est faux car il se pourrait bien que l'Univers comporte d'autres dimensions. Les physiciens travaillent sur de telles théories et essayent de mesurer ces dimensions. Pour l'instant, ils n'y sont pas parvenus, mais l'existence de nouvelles dimensions spatiales résoudrait de très nombreux problèmes aujourd'hui insolubles. "L'espace ne peut pas avoir plus de 3 dimensions" : voilà typiquement une fausse certitude.

Désolé de m'immiscer dans la conversation, mais je me permets de contester à nouveau la validité du contre-exemple. Comme je l'ai dit ailleurs, le cheval ailé existe mais il faut savoir en tant que quoi. Si tu soutiens que ton cheval ailé existe physiquement je te demanderais de me le montrer et je serais d'accord si tu le montres vu qu'il existe, si tu soutiens qu'il existe sans dire "physiquement" je serais d'accord vu qu'il existe ne serait-ce qu'en tant qu'être imaginaire.
[...]
Ce n'est pas forcément évident mais en y réfléchissant un peu, on voit bien que tout ce qu'on imagine existe au minimum en tant qu'imagination, que le réel est productif et qu'on ne voit pas pourquoi il ne serait pas infiniment productif. Mais en dehors de la Nature, Spinoza ne voit rien et toi, tu vois quoi ?

Si tu veux dire que Dieu existe en tant qu'être imaginaire... alors nous sommes presque d'accord !

Mais nous allons en discuter dans le fil approprié.

Oui, ne mélangeons pas tous les fils.

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Messagepar YvesMichaud » 25 nov. 2003, 20:53

Rendus à ce stade, nous pourrions peut-être douter du principe de contradiction, puisque son évidence ne le justifie pas, et alors nous transformer en souches.

Le vrai sceptique ne serait ainsi qu'une souche, comme dit Aristote. Un homme devient dogmatique en faisant le choix de penser.

Mais ta critique du dogmatisme n'est valable que si elle admet ce qu'elle critique (que sa propre évidence est un signe de sa justesse).
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Messagepar infernus » 25 nov. 2003, 22:58

Salut a tous =)
Zerioug est d'une rare assurance , mais nous devons l’aider, le rendre plus fertile =)
Le scepticisme est une étape importante si ce n’est nécessaire. Seulement, et Descartes l’a vite éprouvé, l’esprit ne peut se complaire dans cette activité du doute hyperbolique, déconstruire n’a d’efficacité philosophique que dans la mesure où l’on s’efforce de reconstruire. Le Dieu trompeur fait tout s’effondrer, mais la substance pensante de celui qui se trompe volontairement, en acceptant aucune vérité, résiste au doute, puisque l’exerçant sur elle même. Descartes réhabilite l’existence de la substance (pensante) en la révélant par un scepticisme radical, et c’est à partir de là que la pensée philosophique respire et se déploie. Enfin bon le ‘cogito’ de René , c’est encore une autre histoire.
Zerioug, en fait, ce que tu veux, c’est que les sciences humaines, dites sciences molles pour certains, soient plus humble, en particulier la philosophie. Tu reproches a Spino un peu trop de rigueur formelle quant à la forme par laquelle il veut nous communiquer sa pensée. Certes, cela est discutable et d’ailleurs tu es la pour ça =) mais l’on sentirai presque en te lisant de l’agressivité, aussi ne laisses tu que peu de place à la nuance. La philosophie n’est pas réduite aux raisonnements de logique formelle, et ça tu le sais, elle est aussi une science intuitive. Quand le spinoziste lit Spinoza entièrement, son Dieu-Substance-Tout, dont toi et les sceptiques faites parti aussi ( et ui zerioug, tu es une partie du divin !), apparaît comme le juste reflet de la réalité des choses, puisque tout se tient. La philosophie reste cette activité qui se nourrit de raisonnements logiques mais tout en se déployant pour viser un ‘Tout’. On ne peut vouloir penser pour rester dans le doute ; penser c’est construire, et parler c’est communiquer en affirmant ce qu’on construit.
Et puis affirmer que la certitude objective, de droit, n’existe pas c’est affirmer l’inexistence de quelque chose en se servant de cette chose elle même. Dire que « la certitude qu’il y a des certitudes de droit n’est jamais qu’une certitude de fait » revient à énoncer une certitude de droit, et donc le scepticisme s’’auto-réfute ‘ ou de fait, dans quel cas l’on doit douter de la vérité de cette proposition.
Tu déploies peut être trop d’énergie pour dénoncer la dite conclusion d’un raisonnement logique, cela en est presque amusant, quel plaisir que de suivre ce forum ! Espérons qu’il t’en reste assez pour fonder ton éthique !
8)

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Messagepar zerioughfe » 26 nov. 2003, 13:50

YvesMichaud a écrit :Rendus à ce stade, nous pourrions peut-être douter du principe de contradiction, puisque son évidence ne le justifie pas, et alors nous transformer en souches.

Le vrai sceptique ne serait ainsi qu'une souche, comme dit Aristote. Un homme devient dogmatique en faisant le choix de penser.

Tu ne comprends pas ce que je dis :cry:

D'un point de vue métaphysique, tout est douteux, mais dans la pratique il y a des "certitudes" (ce sont les propositions dont il est tellement difficile de douter qu'elles deviennent des quasi-certitudes).

Mais ta critique du dogmatisme n'est valable que si elle admet ce qu'elle critique (que sa propre évidence est un signe de sa justesse).

Non, absolument pas. Il est vrai que d'un point de vue métaphysique, tout est incertain, même cela même : que tout est incertain. Mais loin de contredire le scepticisme, cela le conforte ! Cela ne fait qu'une incertitude de plus. Le scepticisme est une croyance, pas une certitude. Si je disais le contraire, je me contredirais en effet. Mais là encore, il convient de distinguer ce qui est incertain dans la vie de tous les jours ("Y a-t-il de la vie sur Io ?") et ce qui est incertain d'un point de vue plus "métaphysique" ("Est-ce que je suis ce que je crois-être, ou suis-je trompé par un malin génie ?").

infernus a écrit :Salut a tous =)
Zerioug est d'une rare assurance , mais nous devons l’aider, le rendre plus fertile =)

:?:

Le scepticisme est une étape importante si ce n’est nécessaire. Seulement, et Descartes l’a vite éprouvé, l’esprit ne peut se complaire dans cette activité du doute hyperbolique, déconstruire n’a d’efficacité philosophique que dans la mesure où l’on s’efforce de reconstruire.

Oui, mais je reconstruis sans être jamais certain que ce que je crois est la vérité absolue, même si cette vérité existe. Je peux être cependant quasi-certain de certaines choses (à tel point qu'en pratique cela vaut presque comme une certitude).

Le Dieu trompeur fait tout s’effondrer, mais la substance pensante de celui qui se trompe volontairement, en acceptant aucune vérité, résiste au doute, puisque l’exerçant sur elle même.

Cette existence de la pensée est en effet à peu près indubitable, mais pour admettre ce raisonnement, il faut d'abord supposer la validité de la raison.

Descartes réhabilite l’existence de la substance (pensante) en la révélant par un scepticisme radical, et c’est à partir de là que la pensée philosophique respire et se déploie. Enfin bon le ‘cogito’ de René , c’est encore une autre histoire.

Même s'il est certain que l'on pense (c'est la seule chose que je considère comme certain, enfin presque certain), cela ne prouve qu'une chose : il y a de la pensée. Cela ne prouve pas que nous sommes ce que nous croyons être.

Zerioug, en fait, ce que tu veux, c’est que les sciences humaines, dites sciences molles pour certains, soient plus humble, en particulier la philosophie.

:?: :!:
Tu classes la philo parmi les sciences ??!

Tu reproches a Spino un peu trop de rigueur formelle quant à la forme par laquelle il veut nous communiquer sa pensée

Pas du tout, au contraire : c'est un plaisir de le lire, tant il s'exprime avec clarté et rigueur.

Certes, cela est discutable et d’ailleurs tu es la pour ça =) mais l’on sentirai presque en te lisant de l’agressivité, aussi ne laisses tu que peu de place à la nuance.

C'est pourtant le sens de mon scepticisme :D Mais le scepticisme n'est pas une sophistique : il ne s'agit pas de nier la raison et la vérité.

La philosophie n’est pas réduite aux raisonnements de logique formelle, et ça tu le sais, elle est aussi une science intuitive. Quand le spinoziste lit Spinoza entièrement, son Dieu-Substance-Tout, dont toi et les sceptiques faites parti aussi ( et ui zerioug, tu es une partie du divin !), apparaît comme le juste reflet de la réalité des choses, puisque tout se tient. La philosophie reste cette activité qui se nourrit de raisonnements logiques mais tout en se déployant pour viser un ‘Tout’. On ne peut vouloir penser pour rester dans le doute ; penser c’est construire, et parler c’est communiquer en affirmant ce qu’on construit.

Mais je suis bien d'accord. Tu crois que je m'amuse à tout déconstruire ? Tu confonds le scepticisme et le nihilisme...

Et puis affirmer que la certitude objective, de droit, n’existe pas c’est affirmer l’inexistence de quelque chose en se servant de cette chose elle même. Dire que « la certitude qu’il y a des certitudes de droit n’est jamais qu’une certitude de fait » revient à énoncer une certitude de droit

Non, car ce n'est pas une certitude.

et donc le scepticisme s’’auto-réfute ‘ ou de fait, dans quel cas l’on doit douter de la vérité de cette proposition.

Il ne s'auto-réfute pas (au contraire) mais il se limite lui-même : il est incertain.

Tu déploies peut être trop d’énergie pour dénoncer la dite conclusion d’un raisonnement logique, cela en est presque amusant, quel plaisir que de suivre ce forum ! Espérons qu’il t’en reste assez pour fonder ton éthique !

:cry: Je regrette que tu le prennes comme cela. Confondre le scepticisme avec la misologie, le nihilisme et la sophistique, c'est ton droit, mais ne viens pas me reprocher des choses absurdes, comme "dénoncer la logique". :cry: Si tu veux t'amuser, comme tu dis, lis donc Montaigne. :wink:

---
En fait je crois que c'est mon "CQFD" qui n'est pas passé :D :D . Ce n'était pourtant qu'un petit clin d'oeil à Spinoza. Il est évident que si l'évidence est un critère de vérité, alors le dogmatisme est vrai. Mais comme c'est une théorie circulaire d'une part, et que les sceptiques (moi, en l'occurence) ne reconnaissent pas la vérité du dogmatisme (une évidence n'est qu'un état de mon cerveau, ou pourrait très bien l'être), alors le dogmatisme devient contradictoire. Mais un vrai dogmatique ne l'admettra pas.
Cependant, le seul fait qu'il existe des sceptiques leur donne tort : s'il était évident que l'évidence est un critère de vérité, il n'y aurait pas de sceptiques.

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Messagepar YvesMichaud » 26 nov. 2003, 18:09

Salut,

Je ne connais pas Montaigne, sinon de réputation, mais j'ai été amusé par la lecture de David Hume.

Dorénavant, tu devras te garder de prononcer simplement des assertions (dans le style: ««« Le libre arbitre, le finalisme, la providence, l'immortalité de l'âme, le caractère absolu de la morale et de la beauté, toutes ces choses restent des illusions»»»), mais tu devras les faire précéder de «je pense que».

Mais puisque tu n'es pas sûr de qui tu es, de même tu ne pourras être sûr de ce que tu penses. Il faudra donc dire: je pense que je pense que...

Mais puisque ton individualité est également douteuse, il faudra plutôt dire:

Quelque chose pense que je pense que...

Et on pourrait continuer...

:P
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Messagepar infernus » 26 nov. 2003, 21:41

Oui, mais je reconstruis sans être jamais certain que ce que je crois est la vérité absolue, même si cette vérité existe

Et bien non, cette vérité n'existe pas, puisque une vérité n'existe qu'en tant qu'elle est validée par la raison, or tu lui refuses ce pouvoir.

Je peux être cependant quasi-certain de certaines choses (à tel point qu'en pratique cela vaut presque comme une certitude). ---
Cette existence de la pensée est en effet à peu près indubitable, mais pour admettre ce raisonnement---
c'est la seule chose que je considère comme certain, enfin presque certain

"quasi-certaint"? la certitude est ou n'est pas, qu'est ce que cela veut vraiment dire "presque vrai" ? La vérité tu y crois absolument, et c'est en son nom que tu viens sur ce site écrire =).

cela ne prouve qu'une chose : il y a de la pensée. Cela ne prouve pas que nous sommes ce que nous croyons être.

Non, tu ne doutes pas encore assez, ton scepticisme s'arrête trop tôt. Qu'est ce qui te prouve que tu penses vraiment quand tu es certain de penser? Comment prouver que tu ne rêves pas? Il faut meme douter du cogito!

Tu classes la philo parmi les sciences ??!

L'on dit parfois de la philosophie qu'elle est la reine mère des sciences physique et humaines. Tu sais, l'arbre de Descartes etc... mais tu as raison, soyons rigoureux, la science n'est science qu'en son sens positiviste, les critères de scientificité ne sont absolument plus discutés aujourd'hui...

Je regrette que tu le prennes comme cela. Confondre le scepticisme avec la misologie, le nihilisme et la sophistique, c'est ton droit, mais ne viens pas me reprocher des choses absurdes, comme "dénoncer la logique". Si tu veux t'amuser, comme tu dis, lis donc Montaigne.

gneuh ! tu n'éprouves surment pas de haine envers la raison, vu la virulence avec laquelle tu t'en sers pour détruire ses productions. Et je n'ai pas dit que tu dénonçais la logique, mais une conclusion d'un raisonnement logique, prise pour telle par Spinoza. =)
Quant à Montaigne, j'admire en effet comment sa littérature réussit là où il ne croit plus. Mais là on s'éloigne vraiment :)

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Messagepar bardamu » 26 nov. 2003, 22:14

Salut à tous,
le sujet semble donc être la vérité et son rapport à la certitude et la conviction.
Je suis d'avis que Spinoza définit la vérité par rapport à un événement premier qui est la certitude, c'est-à-dire un état de l'âme. Le corporel n'a pas de rapport au vrai ou au faux et la notion de vérité n'a de sens que pour un esprit qui cherche a accorder tout ce qu'il pense et perçoit.
Lorsqu'on dit qu'il n'y a pas de vérité absolue, on dit qu'il n'y a pas d'accord possible de toutes les choses entres-elles. Pourtant, le Réel ne peut se contredire et il a une vérité absolue.
Le Sujet, le Moi, étant des notions très affaiblies chez Spinoza, la vérité est moins un "je crois" qu'un "je participe de". Je participe de la vérité divine lorsque j'entre en accord avec les choses à commencer par moi-même. La certitude est l'expression de cet accord avec soi, un soi d'autant plus étendue qu'on est "savant" et qui participe donc de plus en plus à la vérité du Réel. On ne devient pas savant en étant certain de plus de choses mais on devient certain de plus de chose lorsqu'on progresse en science (ou sagesse pour ceux qui considèrent que la philosophie n'est pas de la science...).

P.S. : j'emploie Réel en lieu et place de Dieu pour ne pas choquer les chastes oreilles athées. Il faudra quand même qu'on parle, ailleurs, de l'amour de Dieu.

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Messagepar zerioughfe » 27 nov. 2003, 16:54

Infernus, calmons-nous. Tu dis que je suis "virulent"... Je n'ai pourtant jamais eu l'intention de blesser qui que ce soit, mais seulement de répondre aux objections contre le scepticisme (objections tout à fait légitimes). Je suis d'ailleurs pleinement conscient des limites du scepticisme : si, d'un point de vue métaphysique, tout est incertain, alors il est incertain aussi que tout soit incertain... J'utilise pourtant la raison, comme tu l'as remarqué, et je ne vois pas où est la contradiction ! Notre raison est la chose la plus utile chose que nous ayons ; lui reconnaître des limites, ce n'est pas refuser de s'en servir. J'ai relu mes derniers messages et n'ai rien trouvé qui te donne des motifs de te croire blessé ou offensé. Ta "virulence" est, me semble-t-il, plus grande que la mienne, puisque tu m'attaques presque personnellement. Je n'aime beaucoup pas le ton de tes messages. Comme je pense que ce dialogue devient inutile et ne profite à personne, j'écris ici ma dernière réponse.

Tu confonds la connaissance et la vérité. Je n'ai jamais dit (bien au contraire !) qu'il n'y avait pas de vérité. Je suis convaincu que toute vérité est éternelle et universelle. Si tout était faux, il n'y aurait plus qu'à accepter le négationnisme, la superstition, et d'ailleurs toute morale disparaîtrait (puisqu'il serait faux que l'assassin a tué sa victime).

Ce sont nos connaissances qui sont par nature relatives et incertaines. Mais là encore, il faut se garder de croire qu'elles se valent toutes, et qu'elles sont aussi incertaines les unes que les autres. Certaines valent pour moi comme de vraies certitudes, d'autres sont franchement douteuses. Voici par exemple quelques propositions, classées dans l'ordre décroissant de la confiance que je leur porte :

- "Les trois angles d'un triangle sont égaux à deux droits dans la géométrie euclidienne"
- "La Terre est plus proche du Soleil que Mars"
- "La Terre a plus de 10000 ans"
- "Louis XVI a été guillotiné"
- "Napoléon n'a pas été assassiné"
- "Ben Laden est mort"
- "Il n'y a pas d'eau en dehors du système solaire"

Il n'y a pas de connaissance absolue, pas de connaissance infinie. Mais cela ne veut pas dire qu'on ne connaisse rien. Si c'était le cas, à quoi bon réfléchir, expérimenter, raisonner, philosopher ?

Prenons l'exemple des sciences. Leur progrès confirme qu'elles sont relatives (si elles étaient absolues, tout progrès serait impossible) mais confirme également qu'elles contiennent de la vérité (si elles étaient fausses, elles n'auraient pas pu progresser).

Et bien non, cette vérité n'existe pas, puisque une vérité n'existe qu'en tant qu'elle est validée par la raison

:!: Alors pour toi, si les hommes disparaissaient il deviendrait faux que la Terre tourne autour du Soleil ? Soyons sérieux : la vérité est éternelle, et ne dépend pas de nos connaissances. Ce sont au contraire nos connaissances qui dépendent de la vérité.

"quasi-certaint"? la certitude est ou n'est pas, qu'est ce que cela veut vraiment dire "presque vrai" ?

Tu t'obstines à confondre connaissance et vérité. Même en admettant que le dogmatisme soit vrai, si tu me dis : "Je n'ai qu'une chance sur 1000000000 de gagner la prochaine cagnotte de la lotterie, mais je vais gagner quand même" je serai quasi certain que tu énonces une contre-vérité (la probabilité, faiblissime, n'est pas nulle, et tu as même bien plus de chances de gagner que de ne pas exister !). La connaissance que j'aurai sera trop limitée pour que je puisse être parfaitement certain de ton échec. Mais si tu perds, ton échec ne sera pas une quasi vérité !

La vérité tu y crois absolument, et c'est en son nom que tu viens sur ce site écrire =).

Ce que j'écris, c'est ce qui me semble vrai. Certaines choses me semblent évidentes, d'autres non. Tout n'est pas sur un pied d'égalité.

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Messagepar infernus » 27 nov. 2003, 18:13

Salut,
je ne me suis pas senti attaqué et voudrais m'excuser si mon ton t'a été déplaisant, là n'était pas mon but. :D En relisant les post je m'aperçoit que c'est moi qui n'ai pas été très 'nuancé', je suis d'accord: la raison peut et doit avouer ses limites. Et il est indéniable que c'est la recherche de la vérité elle même qui pousse à une certaine prudence de la pensée, à un certain scepticisme modéré.
Et le dieu de Spinoza, tu le mets où dans ta série décroissante de vérité? :wink:

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Messagepar zerioughfe » 27 nov. 2003, 19:16

infernus a écrit :Salut,
je ne me suis pas senti attaqué et voudrais m'excuser si mon ton t'a été déplaisant, là n'était pas mon but. :D En relisant les post je m'aperçoit que c'est moi qui n'ai pas été très 'nuancé', je suis d'accord: la raison peut et doit avouer ses limites. Et il est indéniable que c'est la recherche de la vérité elle même qui pousse à une certaine prudence de la pensée, à un certain scepticisme modéré.

Je découvre avec plaisir que notre désaccord n'est donc pas si grand. C'est le problème de l'écrit : on se trompe parfois sur les intentions de son interlocuteur. Tu as sans doute cru que je doutais de tout uniformément et sans aucune distinction. La vérité est que certaines choses sont tellement évidentes que je les considère, en pratique, comme des certitudes. Cependant, il me reste toujours une petite place pour le doute. C'est un bon remède contre les fausses certitudes qui sont un obstacle au progrès des connaissances. Douter, comme Descartes l'avait bien vu, est une attitude saine, car les choses qui résistent au doute en sortent renforcées (mais pas définitivement blanchies :wink: ). Le maçon qui doute de la solidité de chaque pierre qu'il pose a de très bonnes chances de construire une maison solide. Une fois la maison construite, il sait bien, au fond de lui même, qu'il ne peut pas garantir absolument qu'elle ne s'écroulera pas sur sa tête, mais cela ne l'empêchera pas de l'habiter avec confiance jusqu'à sa mort. La maison parfaite n'est pas réalisable par l'homme, mais toutes les maisons ne se valent pas : c'est la vigilance qui compte, et la lucidité. De même, le sceptique doute de tout en théorie, mais cela ne l'empêche pas, en pratique, de considérer certaines choses comme des certitudes, car il croit avec une grande conviction que la vérité existe, et qu'elle est universelle.

Et le dieu de Spinoza, tu le mets où dans ta série décroissante de vérité? :wink:

Ca dépend si tu parles des démonstrations de son existence (que je conteste, non pour des raisons idéologiques, mais parce qu'elles me paraissent tout à fait erronées), ou du Dieu de Spinoza lui-même (magnifique théorie qui a inspiré de très nombreux poètes, et qui m'impressionnera toujours). Le Dieu de Spinoza est une possibilité, mais je ne peux pas raisonnablement évaluer la probabilité de son existence. Autant essayer de calculer la probabilité de gagner à une roulette dont j'ignorerais complètement le nombre de cases... Je peux seulement dire que je n'y crois pas. On peut imaginer des tas d'explications très belles à l'Univers, à la vie, à la conscience, mais tant qu'on n'aura pas de raison de penser que ces explications sont réelles, j'appliquerai le rasoir d'Occam... :wink: La balle est dans le camp des physiciens.


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