Cher Hokousai,
Je m'appuie sur votre message en tenant compte de ceux de Louisa et de la réponse que m'a faite Sescho, dont je partage une fois encore globalement l'avis (en regrettant que ma puissance personnelle ne me permette pas de m'exprimer comme lui....).
hokousai a écrit :
Il ne me semble pas que Spinoza laisse penser que toutes les existences correspondant à toutes les essences en Dieu auront existé.
Je crains au contraire que son déterminisme soit implacable, comme le montre Sescho, mais la question se pose de savoir s'il l'est jusqu'au niveau où tend à vouloir l'entraîner Louisa.
J'image par un exemple simplifié ce que j'ai voulu signifier plus haut, au cas où, ce que je n'ai pas ressenti, j'aurais été mal compris, parce qu'imprécis dans ma forme.
En Dieu, avec la correspondance adéquate à chaque attribut,
existe l'essence des corps suivants : hydrogène, oxygène et eau (essences formelle et objective). L'essence de l'hydrogène et de l'oxygène ne sont pas cause de l'essence de l'eau ; en revanche, les rapports de mouvement et de repos caractéristiques de l'hydrogène et de l'oxygène conviennent entre eux, à savoir que, pour autant que deux atomes d'hydrogène, inscrits dans la durée
rencontrent fortuitement un atome d'oxygène lui-même inscrit dans la durée, ils vont faire s'exprimer le rapport caractéristique de l'eau.
La question que je me posais, et à laquelle Sescho répond conformément à ce que j'ai lu chez Spinoza, c'est que, nonobstant le fait que l'ordre de cette rencontre soit fortuit (comme le dit Spinoza en E2P29S), sur la durée de temps infini, il arrivera nécessairement, autrement dit l'essence eau passera un jour à l'existence dans la durée.
Dans ces conditions, il y a bien possibilité d'une connaissance du 3ème genre.
hokousai a écrit :Aussi longtemps que les choses singulières n'existent pas, leur idée n’existe pas.
Et cela sinon en tant qu’il existe une idée infinie de Dieu
or l’idée de Dieu est unique.
Nous sommes d'accord, mais.............
hokousai a écrit :Spinoza illustre par l’idée de cercle (voir scolie prop 8/2). De la nature du cercle, il est possible que des rectangles existent, mais leur idée n’existe pas tant qu’ils n’existent pas (sinon en tant qu’elle est comprise dans l’idée de cercle).
Ce qui n’implique pas un passage nécessaire et obligé de tous les rectangles possibles à l’existence.
Là vous m'intéressez bougrement parce que, effectivement, selon le statut que l'on donne aux essences singulières de choses singulières (personnellement je récuse ; Louisa, me semble-t-il les défend) la suite du déterminisme ci-dessus n'est pas la même.
A savoir, selon mon exemple, s'agit-il de l'essence de l'eau qui, inéluctablement, correspondra un jour à l'essence de l'eau existant dans la durée, ou s'agit-il de l'essence de cette goutte-ci plutôt que celle-là. Sur ce plan, j'ai tendance à penser comme vous que Spinoza ne dit pas que l'infinité des rectangles inscrits passeront à l'existence.
Si tel est le cas, on devrait conclure à un déterminisme strict des essences
de genre (et personnellement, je continue à penser que Spinoza ne s'adresse pas à d'autres), mais à un ordre des possibles dans le domaine des choses singulières de même essence commune. Autrement dit encore, s'il est nécessaire que l'essence de l'homme, en Dieu de toute éternité, ait correspondu un jour à l'essence du genre bipède de même nom existant dans la durée, il n'est pas dit que l'essence de Sinusix soit présente en Dieu de toute éternité et qu'il fallait bien qu'un jour il s'inscrive dans la durée, mais qu'au contraire, à supposer que son père soit mort à la guerre avant de l'avoir créé, ce possible singulier n'aurait jamais existé.
En ce cas, et compte tenu de l'objet de ce fil, il est impossible d'avoir une connaissance du 3ème genre de ces essences singulières de choses singulières (ce que pense). Seule la connaissance du 2ème genre, par ailleurs adéquate, nous permet de démêler ce qu'il en est de la communauté des hommes. C'est, je l'avoue, un peu plus pratique.
hokousai a écrit :Il me semble que chez Spinoza s’il y a une infinité de monde possible mais qu’ il n’y a pas en acte une infinité de monde réels . d ‘où la non incongruité des idées de 1) possible
et 2) celle de flèche du temps .
Je ne suis pas sûr qu'on puisse tirer cette conclusion, s'il faut la comprendre, chez Spinoza, comme abandonnant des "essences de genre" à leur triste sort dans l'éternité attributive, mais j'opinerais pour la défendre, dans la mesure du degré de liberté attaché aux essences singulières de choses singulières.
Et finalement, quelle que soit l'écume des soubresauts humains, crise ou pas crise, G20 ou pas G20, les acteurs tous remplaçables les uns par les autres devront bien répondre au défi que leur lancent les essences de genre qui les dominent, faute de quoi l'essence homme, sur terre, repassera à son statut attributif et contemplatif.
Amicalement