L' essence de l'homme (par exemple )

Questions et débats touchant à la doctrine spinoziste de la nature humaine, de ses limites et de sa puissance.
Avatar du membre
hokousai
participe avec force d'âme et générosité
participe avec force d'âme et générosité
Messages : 4105
Enregistré le : 04 nov. 2003, 00:00
Localisation : Hauts de Seine sud

L' essence de l'homme (par exemple )

Messagepar hokousai » 26 mai 2005, 20:44

(Prop 10 11 12 partie 2)
Spinoza prend bien soin de préciser à Dieu ""n'appartient pas leur l'essence ""

A quoi donc les essences appartiennent-elles ? ¨

Prenons par exemple l’essence de l 'homme elle est constituée par des manières précises des attributs de Dieu .A savoir par des manières de penser ( Spinoza ne parle pas, là ,d’ autres manières dans d’ autres attributs )
Première manière :c’est l’idée ( l’idée est une manière )
Pas l’idée dune chose qui n’existe pas .
c’est l’idée dune chose existant en acte pas d’une chose infinie .

Il ne s’agit pas pour Spinoza de réduire l’essence de l’homme ni à des manières de penser ni dans cet attribut à l’idée .

Mais la raison est nécessaire (il est raisonnable de penser )que les manières précises des attributs de Dieu se rapportent ( soit les manières )à des choses qui existent et pas infinies .
C’est à dire qui durent .

J’en conclus que l’essence d’une chose (mon esprit humain qui pense et pas en général un esprit général lequel est une fiction scolastique ) est constitué de manières précises ( de manières ! Je souligne on reconnaît un perspective de praxis/ d’ acte )qui ne sont pas infinie et qui durent .
Une choe est constituée de manières qui ne sont pas infinies et qui durent

L’essence d’une pomme est constituée de manières précise qui ne sont pas infinie et qui durent et l’essence des pommes est constituée de manières précises qui ne sont pas infinies et qui durent .

Hokousai

Avatar du membre
bardamu
participe à l'administration du forum.
participe à l'administration du forum.
Messages : 1024
Enregistré le : 22 sept. 2002, 00:00

Re: L' essence de l'homme (par exemple )

Messagepar bardamu » 28 mai 2005, 03:31

hokousai a écrit :(...)
J’en conclus que l’essence d’une chose (mon esprit humain qui pense et pas en général un esprit général lequel est une fiction scolastique ) est constitué de manières précises ( de manières ! Je souligne on reconnaît un perspective de praxis/ d’ acte )qui ne sont pas infinie et qui durent .
Une choe est constituée de manières qui ne sont pas infinies et qui durent

L’essence d’une pomme est constituée de manières précise qui ne sont pas infinie et qui durent et l’essence des pommes est constituée de manières précises qui ne sont pas infinies et qui durent .

Hokousai

Des manières finie et qui durent d'un être infini et éternel.
Des manières le temps d'une existence, une existence qui est aussi dans l'éternité, une existence qui a duré lorsqu'on est dans son futur, qui durera lorsqu'on est dans son passé, qui est éternellement "en-durée".

Avatar du membre
hokousai
participe avec force d'âme et générosité
participe avec force d'âme et générosité
Messages : 4105
Enregistré le : 04 nov. 2003, 00:00
Localisation : Hauts de Seine sud

Messagepar hokousai » 28 mai 2005, 17:15

Non là , je ne vous suis pas ( ni Henrique ).

Je ne comprends pas le "qui est éternellement "en-durée"".

Ce n'est pas par esprit de contradiction ,pour moi une chose qui dure ne dure pas éternellement .Elle n'est donc pas éternellement en durée ce serait lui conférer une puissance absolue .Son essence envelopperait l’existence .Ce qui n'est que de la substance me semble t-il .

Henrique cherche a rapprocher analogiquement Spinoza du védantisme (Sankara peut- être ) et moi plutôt du bouddhisme . Bref de l’analogie qui nous entraînerait vraiment très loin .Il se peut que votre compréhension d’un Spinoza "védantiste" soit juste . J’ai quelques doutes non seulement en ce qui concerne les essences mais aussi en ce qui concerne la causalité .Ce qui est certain me semble-t-il est qu’on ne peut faire de Spinoza un bouddhiste .Il y a à divers niveaux chez Spinoza une affirmation de la stabilité (relative ou absolue ) ce qui n’est pas le cas dans le bouddhisme .

Hokousai

Avatar du membre
bardamu
participe à l'administration du forum.
participe à l'administration du forum.
Messages : 1024
Enregistré le : 22 sept. 2002, 00:00

Messagepar bardamu » 28 mai 2005, 18:46

hokousai a écrit :Non là , je ne vous suis pas ( ni Henrique ).

Je ne comprends pas le "qui est éternellement "en-durée"".

Ce n'est pas par esprit de contradiction ,pour moi une chose qui dure ne dure pas éternellement .Elle n'est donc pas éternellement en durée ce serait lui conférer une puissance absolue .Son essence envelopperait l’existence .Ce qui n'est que de la substance me semble t-il .

L'éternité chez Spinoza n'est pas la continuation indéfinie de la durée, ce n'est pas une durée infinie. Une chose qui "dure éternellement" est une contradiction chez Spinoza.
Une chose prise sous le caractère de l'éternité, est une chose prise sans considération pour sa durée.
Si vous parlez de l'essence de telle pomme de son passage de l'état de pépin à celui de l'état de trognon, vous parlez de son essence sans considération pour la durée qu'implique le passage d'un état à l'autre mais tout en sachant qu'il a fallu une durée. La durée ne dépendait pas de la pomme mais des conditions de l'Univers en entier qui ont fait que celle-ci est passé d'un état à un autre. C'est la météo, l'état du pommier, le fait que vous passiez par là en ayant faim etc. qui ont fait que la pomme est passé de l'état de pépin à l'état de trognon.
C'est le Tout, la Substance, qui conditionne la durée d'une chose et donc la durée n'appartient pas à l'essence de la chose bien que la chose ait forcément une durée.
Comme tout est nécessaire, ce qui existe, était, est ou sera destiné à exister. En dehors de tout rapport à la durée, éternellement, le nécessaire enchainement des choses implique la pomme, son essence (ce par quoi elle est conçu) et son existence, comment elle a vécu, vit, vivra.

Avatar du membre
hokousai
participe avec force d'âme et générosité
participe avec force d'âme et générosité
Messages : 4105
Enregistré le : 04 nov. 2003, 00:00
Localisation : Hauts de Seine sud

Messagepar hokousai » 28 mai 2005, 22:58

à bardamu

Si vous vouliez m’expliquer qu il n’y a pas génération spontanée des pommes , d’accord . mais ce n’était pas la question .

Vous me disiez """""""""""""une existence qui a duré lorsqu'on est dans son futur, qui durera lorsqu'on est dans son passé, qui est éternellement "en-durée » """""""""

1)existence qui a duré lorsqu'on est dans son futur,……d’ accord

2)durera lorsqu'on est dans son passé……… d’accord

3)qui est éternellement "en-durée . je le dis pendant le temps de ma mémoire des pommes et de mes prévisions sur les pommes de l’été prochain , pas plus .

"Eternellement en durée '' en ce que mon esprit présent en a la mémoire et la mémoire ce n’est pas une pomme réelle mais la mémoire des pommes .
.......................................................................

La pomme elle a duré ,certes ,et elle n’est plus là .Celle de l’été prochain elle n’est pas là .On ne peut être et avoir été comme le dit la sagesse populaire …..et cette existence éternelle des chose qui ont été ne me paraît pas vraiment pensable en terme d ‘existence tel qu’on conçoit l’existence et qui est d’ abord de différencier l’existence de la non- existence dans une présence . Présence qui exclut l’infinité en elle des autres présences possibles
.Un présent qui ne se distingue en rien des autres présent n’est plus rien de visible pour la pensée et ne peut contenir des existences .Exit des existences dont on peut bien se demander alors d’ où vient l’idée sinon de la présence
IL n’y a rien dans l’idée d éternité qui enveloppe les existence particulières dans tel présent particulier .
....................................................................................

""""son essence (ce par quoi elle est conçu) """""" généralement l’ essence des pommes n’est pas conçu (puisque vous parler de concevoir ) comme la suite des causes mais comme le fait d’en être une (une pomme )Jamais une pomme n’est intelligée comme une suite de causes .Et comment Dieu conçoit les pommes je n’en sais rien ,mais s’il veut concevoir une pomme il faudra bien s’ arrêter une fois dans l’analyse des causes ,sur une pomme

Car de la suite toujours nécessairement infinie des causes on ne conclut à rien de particulier et pas particulièrement à une pomme .
C'est de l'observation d'une pomme qu’ on conclut à l'existence d'une pomme .De celle là on est certain qu'elle existe ,qu 'elle dure et qu'elle se désintègre .On peut être certain de cela de la nécessité de cela et pas d' autre chose . Le reste est de l’ordre l’imagination métaphysique .

hokusai


PS Il se pourrait bien qu’il soit de l’essence des roses de durer moins longtemps que les tulipes .

Avatar du membre
bardamu
participe à l'administration du forum.
participe à l'administration du forum.
Messages : 1024
Enregistré le : 22 sept. 2002, 00:00

Messagepar bardamu » 29 mai 2005, 01:07

hokousai a écrit :(...)
"Eternellement en durée '' en ce que mon esprit présent en a la mémoire et la mémoire ce n’est pas une pomme réelle mais la mémoire des pommes .

Non : en ce que votre Entendement vous a permis de saisir l'essence éternelle de la pomme.
Voir avec l'esprit, comprendre, pas voir avec des images, pas imaginer.
Hokousai a écrit :(...)Jamais une pomme n’est intelligée comme une suite de causes .Et comment Dieu conçoit les pommes je n’en sais rien ,mais s’il veut concevoir une pomme il faudra bien s’ arrêter une fois dans l’analyse des causes ,sur une pomme

On peut intelliger la pomme comme une suite de causes nécessaires, même sans connaitre exactement cette suite.
En tout cas, vous ne pouvez pas dire que vous ne savez pas comment Dieu conçoit les pommes (Dieu c'est aussi bien vous que moi, d'ailleurs) et dire ensuite comment il faut faire pour bien penser les pommes.
Le troisième genre de connaissance est une Science Intuitive : pensez-vous que l'adjectif "Intuitive" corresponde à une analyse ?
Hokousai a écrit : Car de la suite toujours nécessairement infinie des causes on ne conclut à rien de particulier et pas particulièrement à une pomme .
C'est de l'observation d'une pomme qu’ on conclut à l'existence d'une pomme .De celle là on est certain qu'elle existe ,qu 'elle dure et qu'elle se désintègre .On peut être certain de cela de la nécessité de cela et pas d' autre chose . Le reste est de l’ordre l’imagination métaphysique .

Puisqu'il y a une Nécessité et qu'il y a une présence, ne doit-on pas conclure qu'éternellement une présence nommé "pomme" était destiné à être telle qu'elle était, que son essence est, est simplement, éternellement, sans relation à la durée ?
Vous ne voyez pas combien cette conclusion est nécessaire ?
En tout cas, je ne vois pas où il y a ici de l'imagination...

Avatar du membre
hokousai
participe avec force d'âme et générosité
participe avec force d'âme et générosité
Messages : 4105
Enregistré le : 04 nov. 2003, 00:00
Localisation : Hauts de Seine sud

Messagepar hokousai » 29 mai 2005, 12:18

Vous posez ( voire supposez ) une essence éternelle de la pomme laquelle vous sert d’ explication .Les pommes que je mange n’ont pas besoin de ce genre d ‘explication .Je ne demande pas ce genre d’ explication .
Vous voudriez encore me démonter l’existence d 'essences éternelles je veux bien mais ne partez pas d’une justification qui utilise cette essence . C’est un cercle logique .
Moi je nie l’existence d’essences éternelles je n'ai donc pas à en démonter l’existence .

Maintenant en démonter l’inexistence ….
L' essence en métaphysique !
C ‘est une idée assez confuse d’ ailleurs car très abstraite. Les aristotéliciens invoquent la nécessité d’en passer par les essences éternelles pour penser les choses et espère toujours tels les alchimistes à La recherche de la quintessence trouver par exemple l’essence de l’or ,du mercure ou de l’eau .
Admettons même que nous renoncions à définir l’essence particulière de telle ou telle chose particulière et quelle reste principielle nul n’oblige à la penser justement comme principe et encore moins comme principe éternel .

Je dis que les causes c’est bien utile mais qu’il faut bien arrêter la série sur une chose particulière(une pomme ) et pire en fait que c’est bien d’une chose particulière qu’il faut partir et non des causes. De quoi chercherions nous les causes ?

De la nécessité d’une chose on ne conclut rien sur l’éternité de la nécessité d’une chose . Justement bien parce que la nécessité d’une chose est dans la temporalité (la durée ). Ce qui serait encore dans l’éternité c’est la nécessité de la nécessité .La nécessité toucherait toutes les choses, l’infinité des choses et ce ne serait pas un principe extérieur aux choses . Ce qui n’est pas un principe c’est à dire ce qui n agit pas hors de soi ce qui est cause immanente et efficiente en une seule est la substance .
Je ne vois pas comment intégrer un plan d’ apparition nécessaire dont la chose apparaissant serait la fin particulière d’ autant plus difficilement que l’ordre du plan ( l’essence au sens de commandement ou de principe formateur ) serait sans relation( sic ) avec la chose(comme durée ) .

J’admets très bien que toute chose qui apparaît est nécessaire, c’est à dire que ce qui est ne peut pas ne pas être on est dans une tautologie .Une tautologie c’est parfait , c’est toujours vrai .


il ne s'agit peut-être pas dans le cas des grecs d'imagination ,mais assez souvent d'un excès d'imagination .

Hokousai
Modifié en dernier par hokousai le 29 mai 2005, 17:30, modifié 2 fois.

Avatar du membre
bardamu
participe à l'administration du forum.
participe à l'administration du forum.
Messages : 1024
Enregistré le : 22 sept. 2002, 00:00

Messagepar bardamu » 29 mai 2005, 14:00

hokousai a écrit :(...)
Moi je nie l’existence d’essence éternelle je n'ai donc pas à en démonter l’existence .

Niez, niez... chacun sa voie.

Avatar du membre
hokousai
participe avec force d'âme et générosité
participe avec force d'âme et générosité
Messages : 4105
Enregistré le : 04 nov. 2003, 00:00
Localisation : Hauts de Seine sud

Messagepar hokousai » 29 mai 2005, 18:02

à Bardamu

Pensez- vous que je crois avoir réponse à tout, certainement pas .Cette question des essences court toute la philosophie occidentale , cent réponses .
Chacun sa voie de méditation sur les choses particulières .

L'idée d 'essence provient dune stabilité dans les choses et d'une stabilité dans le langage .A cet effet Aristote insiste fort sur la définition des choses. Il met l' accent sur une médiation par le langage .Les catégories d’ Aristote exposent la manière de nommer les choses .
Une pomme après tout est aussi un état nommé de la nature .

Relativisons l' idée de nomination, l'objet perd quelque peu de sa consistance en tant qu' individué par le mot et en conséquence en tant qu ‘élément d'une espèce puis d'un genre. Ce qui n’est pas nommé ,tel cm2 du tableau de la Joconde ,par exemple ,reste dans la non-individuation. Il est connu, à contrario ,que les esquimaux nomment la neige etc…

Il y a aussi une façon d’intellliger une pomme qui l'individualise comme phénomène unique à l'intérieur d'un présent unique .
La pomme de ce présent actuel est aussi différente de la précédente( qui est de mémoire) que tout ce que le cosmos en mouvement peut avoir de différent du cosmos de l'instant d' avant .


Et de pomme en son essence il y a apparition ,quand je me ressaisis dans le langage à vouloir parler des pommes distinguables de la branche .
Là sous-jacente il y a l’activité du corps qui sait cueillir les pommes, et je ne dis pas qu' une pomme soit une branche mais que le point de vue qui prévaut quand nous intelligeons et surtout en philosophie s' écarte du mouvement des choses .
C'est à débattre

hokousai

(j 'ai corrigé quelques fautes d' orthographe dans le précédent message ).

Avatar du membre
bardamu
participe à l'administration du forum.
participe à l'administration du forum.
Messages : 1024
Enregistré le : 22 sept. 2002, 00:00

Messagepar bardamu » 10 juin 2005, 22:43

hokousai a écrit :Vous posez ( voire supposez ) une essence éternelle de la pomme laquelle vous sert d’ explication .Les pommes que je mange n’ont pas besoin de ce genre d ‘explication .Je ne demande pas ce genre d’ explication .
Vous voudriez encore me démonter l’existence d 'essences éternelles je veux bien mais ne partez pas d’une justification qui utilise cette essence . C’est un cercle logique .
Moi je nie l’existence d’essences éternelles je n'ai donc pas à en démonter l’existence .

En dépit de votre conviction qu'on ne pense qu'avec nos idées, je vais tenter le périlleux exercice de penser avec vos idées qui en fait se retrouvent chez beaucoup de gens.

Sauf en ultime conclusion, je n'emploierais ni le mot "essence" ni le mot "éternité parce que vous associez ces mots à d'autres idées que celles de Spinoza.

Donc, partons d'une chose qu'on appellera "pomme".
Mais d'abord, pourquoi est-ce que j'appelle cette chose, ce truc, une pomme et pas autre chose ?
Il n'y a pas de raison, alors j'appellerais ça un schmilblik.
Je continue à lui donner un nom mais est-ce nécessaire ?
Sans doute pas.
Disons que je ne sois pas capable de nommer, mais seulement capable de manger. Disons que je sois un simple animal, un chien.
Il y a des schmilblik que je digère et d'autres qui me rendent malades.
Le schmilblik existe d'abord par son odeur. Il n'existe qu'autant qu'il est présent, là, devant moi, me faisant un effet.
Il existe d'une certaine manière qui n'a, au niveau de l'image, pas grand chose à voir avec celle de l'humain puisque celui-ci voyait un fruit savoureux là où je ne sens qu'un truc fade. Néanmoins, bien que chien, je le "conçois", ce schmilblik, il est là, provoquant quelque chose qu'un autre schmilblik ne provoquerait pas, il a une certaine spécificité qui se traduit par mon comportement, bien différent de celui que j'aurais face à ces schmilblik fantastiques que les humains nomment "croquettes".

Comme je suis un animal, que je suis idiot, dès que le schmilblik sort de mon existence, sort de ma présence, il disparait totalement.
Néanmoins, il y a une spécificité de ma réaction face à un même schmilblik : chaque fois que je tombe sur des croquettes, je salive, sans même savoir que les humains appellent ça "croquettes" ou sans savoir qu'à chaque fois je salive. Il y a quelque chose qui dure en dépit de l'oubli, c'est la spécificité de mon rapport à cet être.

Si l'humain était aussi bête que moi, dès lors qu'il mettrait le schmilblik au frigo, il oublierait complètement qu'il a quelque chose à manger au frigo.
Heureusement pour lui, il est capable d'établir des rapports entre les choses, et il sait qu'il y a un lien entre ce schmilblik qu'il appelle "frigo" et ces schmilbliks qu'il appelle "nourriture", il sait que les rapports durent.
Par sa raison, il est capable d'isoler les rapports spécifiques qu'il entretient avec les choses, il est capable d'en construire un langage qui y correspond, et de créer des outils favorisant sa vie, des outils qu'on appelle idées adéquates ou des outils tel que l'os en plastique qui couine pour amuser son chien.

Redevenons donc humain.
Nous sommes là, à osciller entre la bêtise de la répétition des mots reçus d'autrui, des images surgissant au fil de nos sensations, de la salivation face à la pomme, et l'intelligence des idées adéquates, des idées correspondant à ce qu'on a correctement expérimenté et qui nous donne un plus dans la vie. Nous avons donc ces idées issues de rencontres bien comprises, mais comment pourrions-nous croire qu'il y a quelque chose derrière la "pomme" si ce n'est un rapport entre soi et la pomme ?
La "pomme" pour l'odorat du chien a-t-elle quoi que ce soit à voir avec la "pomme" pour l'homme ?
Il n'y a rien de fixe dans tout ça, pas d'essence, aucune éternité qui vaille.
Il y a spécificité des rapports mais pas des êtres eux-mêmes.
Ainsi parle l'homme de Raison.

Mais alors, est-ce à dire que moi-même je n'ai pas d'essence, que je ne suis rien par moi-même, que je ne suis que des rapports par rapport à un tel ou un tel ? N'aurais-je pas au minimum un "Moi" ? Descartes aurait-il tout faux avec son "Cogito ergo sum" ?
C'est un peu ce que lui disait Kant : ça pense mais quel est ce "Je" dont tu te targues, pourquoi conclus-tu d'une pensée que c'est un être particulier qui pense, qu'il y a un "Je" ?
Soit.
Admettons juste, quand même, que "ça pense".
Et ça pense, ici et maintenant, ça pense d'une manière certaine et déterminée. Il y a donc bien un quelque-chose qui peut être lié à cette pensée, il y a bien une détermination qu'on peut dire "être un quelque chose". Ce que je sais, c'est que je suis une détermination d'un "ça pense", d'une Pensée, même si cette détermination n'est pas vraiment ce "Je" auquel je croyais.
Mais ai-je quelque chose de particulier par rapport à cette Pensée, suis-je différent de ce que je nommais la "pomme" et le "chien" par rapport à cette Pensée ? Eux aussi ce sont des déterminations, des déterminations qui ne sont pas celle que je suis.
Ce sont des déterminations, ce sont des êtres.
"Etre ou ne pas être ?" ne signifie pas "exister ou ne pas exister ?" mais être ceci ou être cela. Ce que je suis est-il un chien, est-il une pomme ?

J'ai su connaitre la pomme par la Raison mais je ne suis tombé que sur des rapports sans fin, sans fond. J'ai su aussi par la Raison que j'étais un être déterminé et pas seulement un rapport pour d'autres.
Quand j'ai voulu saisir cette détermination comme un être à part entière, quand j'ai voulu me saisir, c'est à la question "Etre ceci ou être cela ?" que j'ai répondu et pas "exister ou ne pas exister". Que signifie "être ceci" ? C'est être pour soi, c'est être autonome.
Savoir ce qu'est un être, c'est percevoir l'important en lui, le point singulier, la détermination de ce que j'ai appelé un "ça pense", son pour-soi. C'est notamment voir en chaque humain un être autonome et non pas une marionnette faite de rapports biologiques ou une image, une étiquette (le scolastique, le spinoziste...).
Cela demande de saisir le monde comme un "ça pense" où chaque être à droit à son autonomie plutôt que comme un "je pense" où tout est image pour soi, cela demande d'avoir la sagesse de mettre le monde avant soi-même, de se mettre dans le monde et pas comme créateur solipsiste du monde.

Le chien percevra-t-il la singularité de la pomme ?
Non, parce que sa connaissance ne dépasse pas la bêtise de l'immédiat. Il ne sait même pas qu'il y a des êtres.
Le savant expert en rapports percevra-t-il la singularité de la pomme ?
Non plus. Il saura comment la "pomme" se comporte selon qu'on fait ceci ou cela, il saura en quoi elle est bonne pour l'homme, et mauvaise pour le crâne de Newton mais c'est tout. A l'occasion, il prendra son voisin, le pendra lentement pour voir comment il meurt et le dissèquera pour mieux le comprendre. Il doutera quand même de pouvoir dire qu'il y a un être véritable qu'on puisse nommer "pomme" ou "voisin" puisque plus il cherche et moins il trouve d'unité dans tout "ça". L'objet en soi n'existe pas proclamera-t-il avec justesse.

Il reste le sage.
Le sage sait qu'il y a des déterminations, il sait qu'elles le concernent lui et l'univers entier ("ça pense") et il sait que sous la permanence des affects, sous la science des rapports, il y a un être déterminé qui exprime un mode particulier de l'infini créativité du monde. Le nom importe peu, la précision "objectale" (savoir si ça correspond exactement à ce que nous dit la science des rapports) importe peu, l'important est que dans son rapport réel à cette chose, le sage voit tout l'univers s'exprimant d'une manière déterminée, qu'il voit cette expression sans aucune négativité, sans lien aux idées d'existence qui sont pleines de mort, il voit une pure positivité, une essence éternelle.


Retourner vers « Anthropologie »

Qui est en ligne

Utilisateurs parcourant ce forum : Aucun utilisateur enregistré et 29 invités