la question du corps

Questions et débats touchant à la doctrine spinoziste de la nature humaine, de ses limites et de sa puissance.
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hokousai
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Messagepar hokousai » 21 nov. 2007, 20:49

à Pat

Tout ce que vous dîtes est acceptable mais ne répond pas vraiment à la question de la "conscience" de Dieu .

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Messagepar pat-dx » 25 nov. 2007, 16:29

Sans doute il serait utile de résumer et synthétiser les arguments en présence. En ce qui concerne ceux que vous avancez, j'en discerne trois. Corrigez sans hésiter si je mésinterprète vos propos.

1. vous semblez établir une distinction entre la pensée et la conscience, se demandant s'il "suffit de penser pour être conscience de soi-même". Ce qui impliquerait que la conscience est une valeur ajoutée, mais qui ne lui est pas nécessaire, à la pensée. Je peux certes convenir que la conscience a un caractère modal, c'est à dire qu'il ne suffit pas de penser pour être conscient, autrement dit, la conscience est une pensée déterminée par la perception des affects du corps (résultant des interactions entre le corps et le monde) qui détermine l'idée du corps, c'est à dire la connaissance (peut être du 1er genre, mais pouvant aussi aboutir à un savoir du 2 e genre) que nous sommes existant comme corps présent dans un monde qui lui environne et qui l'affecte.

2. vous semblez douter que de la régression à l'infini (idée de l'idée de l'idée du corps par ex) résulte la conscience de soi... ou en tout cas qu'elle serait déterminée puisque n'apparaissant qu'à un certain point de la régression... ce qui serait contradictoire avec l'indétermination de Dieu.

Pour ma part, je serais tenté de voir la conscience comme une condition, plus que comme un résultat, de la régression à l'infini, autrement dit comme une capacité de se faire une idée de l'idée, ou d'élever la perception immédiate à une connaissance réfléchie du rapport entre le corps et ce qui l'affecte. La conscience est donc un préalable plus qu'un résultat.

3. D'autre part, la conscience étant intentionnelle (au sens phénoménologique du terme, c'est à dire que la conscience n'existe pas sans qu'il y ait un objet - fut-il elle-même - de conscience) elle introduirait une distinction entre le sujet et ses idées. Or vous dites que la "substance est indivisible", ce qui impliquerait que Dieu comme substance unique et indivisible ne peut être "conscient de quelque chose".

Pour ma part, je pense que la conscience n'implique pas une pluralité de substances. C'est en tant que mode que nous sommes conscient. La distinction sujet-objet a dont un caractère modal qui ne présuppose nullement que l'objet soit substantiellement autre de le sujet. Mais dans cette condition, comment Dieu sive natura pourrait être conscient ?

A vrai dire le problème est réel puisque l'idée d'un Univers conscient pourrait nous conduire à l'illusion d'un Dieu - ce concept "pèse lourd" en raison de notre héritage culturel monothéiste - posant intentionnellement, de manière contingente et finalisée, des actes de conscience, comme la création, à l'instar de ceux que nous - êtres humains - avons l'illusion de poser.

D'un autre côté, si nous posons Dieu comme chose pensante doté d'une infinité d'attributs (et donc d'une infinité de modes), nous ne pouvons nier la conscience comme un de ses modes. Mais cette conscience ne se manifesterait comme constitution d'un "sujet" face à un "objet" que dans la natura naturata.

Autrement dit, ce n'est que subjectivement (comme être pensant et conscient du monde) que nous pouvons l'appréhender, comme mode d'être de l'univers. Sur le plan de la natura naturans, l'Univers est "chose pensante" autrement dit, il y a de la pensée dans l'univers lorsqu'on rapporte à l'idée de Dieu, sive natura. Mais sur le plan de la natura naturata, l'Univers produit des êtres conscients de l'Univers. Autrement dit, on pourrait dire que la conscience de l'Univers se manifeste - à nos yeux - comme émergence d'êtres pensants et conscients d'eux-mêmes et du monde.

J'avoue ne pas encore saisir parfaitement ce que peut être la "pensée" d'un univers que j'incline à ne considérer que comme "chose étendue", comme réalité physique (au sens moderne du terme). Peut être on pourrait considérer l'univers comme la résultante d'une structuration informante d'un champ uniformément, et infiniment étendu, structuration que - modalement, à partir des interactions corporelles entre l'homme et son milieu - l'homme perçoit comme matière différenciée (pour le physicien ce sera les particules élementaires descriptibles mathématiquement comme fonction d'onde par ex) ayant une signification corrélative aux déterminations (affections diverses) qu'elle impose au corps.

cordialement,

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Messagepar hokousai » 25 nov. 2007, 23:05

à Pat dx
(Je ne souhaite répondre qu’ à une partie de votre texte )

c'est à dire qu'il ne suffit pas de penser pour être conscient

Je dirais qu’il ne suffit pas d être conscient pour penser .

autrement dit, la conscience est une pensée déterminée par la perception des affects du corps (résultant des interactions entre le corps et le monde) qui détermine l'idée du corps,

Déterminée par quoi ? ça je ne sais pas .
Le corps peut vivre affecté d’ une foule de modifications sans que j’en ai conscience .
La conscience se réfère tout autant à un lieu décorporalisé et que j appelle ma pensée ( cogito ) mon esprit, mon âme… que sais-je de ce genre .
Dans Tous les cas elle se réfère à une propriété ( possession je suis propriétaire de ) un centre du monde un territoire particulier dans le monde fut il seulement un monde pensé .( Ego )

Pour ma part, je serais tenté de voir la conscience comme une condition, plus que comme un résultat, de la régression à l'infini,

La conscience na rien à voir avec l’ itération . N’importe quelle machine peut réitérer à l’infini dans un temps infini sans en avoir conscience et le cerveau peu le faire sans conscience . Il s’agit d’une opération et des opérations nous en faisons sans conscience .

La conscience est un préalable à la conscience, mais pas au calcul .

La distinction sujet-objet a dont un caractère modal qui ne présuppose nullement que l'objet soit substantiellement autre de le sujet.

Je suis d’accord avec ça .
Mais l’idée de soi comme cause suppose que je n’en soi pas la cause .C’est à dire que je n‘ai pas encore une idée de derrière qui cause cette idée de cause de soi ( qui est fondamentale chez Spinoza ) L’idée de soi comme ayant l’idée de cause de soi et qui serait la consciece de Dieu serait antérieure ontologiquement
Spinoza dit que Dieu à l’idée de soi c’est à dire de l’idée de sa cause (prop 35 part 5) c’est à dire .Dieu ne peut se concevoir qu existant (il renvoie à la def 1part 1)

Est- il nécessaire à Dieu de savoir qu’il ne se conçoit qu’existant ? Ce serait cela la conscience .Une science accompagnant l’idée de cause de soi .
Spinoza ne dit pas » par cause de soi j’entends ce dont la nature ne peut se concevoir que sachant qu’elle existe «
Voila pourquoi j’ hésite à attribuer la conscience à Dieu .

bien à vous
hokousai

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Messagepar Enegoid » 26 nov. 2007, 21:33

Le concept de Dieu est la seule façon pour notre entendement humain de domestiquer le vertige de la régression à l'infini.

Bien sûr que Dieu a conscience de tout !

Dieu n'est pas un canard sans tête.

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Messagepar hokousai » 26 nov. 2007, 23:30

Bien sûr que Dieu a conscience de tout !


c'est bien la question que je me pose et votre dénégation explosive confirme qu'il y a là un incontournable .( une de ces certitudes peut être non vue donc difficilement débatable )

La conscience est placée au plus haut niveau elle surplombe même l'existence .( je dirais traditionnellement placée , à un point tel qu 'il apparait comme sacrilège de douter de cette propriété suprême de Dieu ).

Je dis qu 'à l'existence de Dieu la conscience n'est pas nécessaire pas plus quelle ne m'est nécessaire pour une bonne part de ma vie active .

Mais la conscience n'est pas si clairement explicable à soi même .Nous ne pouvons prendre que peu de recul sur la conscience . Elle ne s'objective pas en un objet de savoir et sur cette idée assez confuse bien que prégnante ( extrêmement ) nous voudrions attribuer une qualité suprême à Dieu .

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Messagepar Enegoid » 28 nov. 2007, 17:35

hokousai a écrit :Je dis qu 'à l'existence de Dieu la conscience n'est pas nécessaire pas plus quelle ne m'est nécessaire pour une bonne part de ma vie active .


Vous m'ouvrez des horizons! C'est vrai, Dieu pourrait dormir de temps en temps, être somnambule, se mettre en "pilotage automatique"...pourquoi non. Au fonds, Dieu est un super corps, associé à la pensée de son super cerveau (seule différence avec nous : son cerveau n'est pas localisable)

En passant, je me rends compte, qu'il est à notre époque impossible de ne pas associer la pensée au cerveau. Ce qui crée un rapport de localisation dont le statut me parait tout d'un coup très étrange...

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Messagepar hokousai » 28 nov. 2007, 18:49

à Enegoid

En passant, je me rends compte, qu'il est à notre époque impossible de ne pas associer la pensée au cerveau.


Spinoza n'associe pas la pensée au cerveau .Il associe l’esprit humain au corps .
Disons qu ' "associer " est un peu imprécis .

Nous sommes très généralement dans l’incapacité de penser hors de la présence du corps , il faudrait que nous puissions vivre désincarné et puis peut être retrouver notre corps .( les expérience de NDE en parlent .Cas rares mais quand même à considérer )

Le cerveau étant là toujours présent et signalant une activité électrique ou biochimique quand nous pensons évidemment nous établissons un lien .
Un lien qui n'est pas élucidé mais simplement posé comme hypothèse de travail. Mais un lien qui a quelques fondements.

Je parlais de la conscience et non de la pensée .Il reste que la pensée est encore plus difficile à cerner non que la proximité de la pensée à la pensée soit si intime(ce qui est déjà un handicap ) mais que quand nous pensons nous n’en sommes souvent pas savant (ou pas conscient si vous voulez ).
.
Modifié en dernier par hokousai le 28 nov. 2007, 22:54, modifié 1 fois.

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Messagepar sescho » 28 nov. 2007, 21:27

Enegoid a écrit :En passant, je me rends compte, qu'il est à notre époque impossible de ne pas associer la pensée au cerveau. Ce qui crée un rapport de localisation dont le statut me parait tout d'un coup très étrange...

D'un point de vue "troisième genre" c'est même totalement artificiel, et cela donne une idée à quel point nous pouvons prendre des choses rabâchées qui appartiennent au ouï-dire, et donc au premier genre, comme des vérités incontournables, au point ici d'associer automatiquement pensée et tête sans qu'il en existe la moindre intuition (ce qui se voit dans le fait que des traditions anciennes la placent dans le cœur, dans des "centres d'énergie" répartis dans le corps, etc.) Il n'y a aucune idée adéquate qui indique que la pensée a son siège dans le cerveau et qui s'opposerait donc d'emblée au point de vue de Spinoza.
Connais-toi toi-même.

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Messagepar Enegoid » 29 nov. 2007, 17:12

A propos du "lien?" pensée/cerveau (sans entrer ici dans la question conscience/pensée):

Je suis sûr que, comme la plupart des participants ici, vous avez entendu parlé de, et/ou lu Damasio auteur de "Spinoza avait raison", après "l'erreur de Descartes"

Voici un extrait d'un interview de cet auteur : "Ce que nous appelons «relations sociales» ou «culture» ne vient que de nos cerveaux. Ce sont les cerveaux qui produisent et véhiculent des comportements, des romans, des poèmes, ou des lois. D'une certaine manière, on peut voir les règles sociales et éthiques, les institutions comme des ..."

Mon propos est simplement ici de montrer que le lien pensée/cerveau ne fait pas seulement partie du 1er genre (ouï-dire ou expérience vague) mais aussi du deuxième. Ce qui n'en fait pas une vérité, forcément, mais quand même...

Spinoza lui-même se laisse aller à écrire "Et certes tout celà laisse assez voir que chacun a jugé des choses d'après les dispositions de son cerveau..." avant de se reprendre et d'ajouter "...ou plutôt a mis les affections de son imagination à la place des choses".

A Seischo :
Dire qu'aucune intuition ne met la pensée dans le cerveau me parait un tantinet vite dit.

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Messagepar hokousai » 29 nov. 2007, 21:04

Dire qu'aucune intuition ne met la pensée dans le cerveau me parait un tantinet vite dit.


Non justement pas si vite dit . C 'est issu d'un savoir non immédiat de ce que pouvaient en penser les anciens grecs ou les orientaux .

Je ne pense pas que ça soit par intuition (ou pas entièrement ) que nous plaçions la pensée dans le cerveau ( exactement au niveau de la tête )

Par intuition nous plaçons les ouvertures sensorielles ( évidemment ) au niveau de la tête (sauf le toucher )

La pensée plus que d' être localisée dans le cerveau semble avoir pour centre notre tête . Et puis s'étendre autour plus qu'en la tête .

Disons qu 'ayant un centre elle n' a pas vraiment de limites précises et précisées par les contours de notre tête (laquelle d' ailleurs nous ne voyons pas ).

( donc la question est plus difficile qu'il ne parait )


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