L'essence et la substance

Questions et débats touchant à la doctrine spinoziste de la nature humaine, de ses limites et de sa puissance.
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boumbastik
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Messagepar boumbastik » 22 mars 2010, 16:18

Bonjour à tous !

J'essaie tant bien que mal de comprendre ce fil, mais rien n'y fait et je crois que rien n'y fera jamais :? Bien malgré les posts de Louisa et d'Henrique...

Autant je trouve très intéressants les questionnements de Spinoza sur l'entendement, l'esprit, les idées, etc. (ça m'a d'ailleurs donné envie de creuser le sujet chez d'autres philosophes notamment Descartes, Hume et Russell), autant je trouve les définitions et l'usage des termes substance, essence, attribut, et de tout ce qui en découle totalement abscons, pour ne pas dire inutile.

Je lis : "une essence contient ce sans quoi la chose (res) ne peut être ni être conçue, et ce qui sans la chose ne peut être (E2 Déf. 2)" ? En ayant lu cette phrase, suis-je censé comprendre ce qu'est une essence ? Si vous me dites oui, j'arrête Spino direct.

En parallèle de Spino, je commence à m'intéresser à d'autres types de philo, notamment la philo analytique. Wittgenstein dit "Ce dont on ne peut parler, il faut le taire". Je suis de plus en plus adepte de ce précepte...

Bien à vous

Robert

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Messagepar Louisa » 25 mars 2010, 04:15

Robert a écrit :J'essaie tant bien que mal de comprendre ce fil, mais rien n'y fait et je crois que rien n'y fera jamais Bien malgré les posts de Louisa et d'Henrique...

Autant je trouve très intéressants les questionnements de Spinoza sur l'entendement, l'esprit, les idées, etc. (ça m'a d'ailleurs donné envie de creuser le sujet chez d'autres philosophes notamment Descartes, Hume et Russell), autant je trouve les définitions et l'usage des termes substance, essence, attribut, et de tout ce qui en découle totalement abscons, pour ne pas dire inutile.


Bonjour Robert,

à mon sens tu y vas un peu trop vite. Tout ce que Spinoza écrit est un commentaire sur la philosophie de son temps, et donc utilise les mêmes concepts. Cela signifie que pour pouvoir simplement comprendre de quoi il s'agit, il faut un peu de patience, et surtout une étude un tant soit peu sérieuse de ce que signifient en fait les notions de substance, essence etc.

Dire que cela est inutile parce que tu n'en comprends pas encore le sens, c'est y aller un peu vite, non ... ?

Robert a écrit :Je lis : "une essence contient ce sans quoi la chose (res) ne peut être ni être conçue, et ce qui sans la chose ne peut être (E2 Déf. 2)" ? En ayant lu cette phrase, suis-je censé comprendre ce qu'est une essence ? Si vous me dites oui, j'arrête Spino direct.


Je dis: non.

Personne ne peut comprendre immédiatement ce qu'est une essence en lisant cette définition, précisément parce qu'elle ne tombe pas du ciel, elle se situe à l'intérieur d'un contexte de pensée tout à fait particulier, si bien qu'elle ne révèle son sens que si l'on étudie ce contexte.

Robert a écrit :En parallèle de Spino, je commence à m'intéresser à d'autres types de philo, notamment la philo analytique. Wittgenstein dit "Ce dont on ne peut parler, il faut le taire". Je suis de plus en plus adepte de ce précepte...


attention de ne pas tomber dans le piège de lire cette phrase de façon 'ordinaire', c'est-à-dire en lui attribuant le sens qu'elle revêtirait dans le langage ordinaire, alors qu'il s'agit d'un énoncé proprement philosophique.

Ce que Wittgenstein a voulu dire par là c'est que certaines choses ne peuvent qu'être 'montrées' par le langage, sans que l'on puisse vraiment saisir de quoi il s'agit, c'est-à-dire sans que l'on puisse l'exprimer de manière 'claire et distincte' par le langage. Ce qui signifie plutôt l'inverse de ce qu'on a tendance à y lire spontanément (l'idée qu'il faudrait ne rien avancer du tout aussi longtemps qu'on n'est pas parfaitement certain et qu'on ne sait pas exprimer de manière parfaitement claire ce qu'on pense).

Autrement dit, n'oublions pas que c'est précisément la dernière proposition du Tractatus logico-philosophicus qui a ouvert le voie empruntée par les Recherches philosophiques.

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Messagepar Louisa » 25 mars 2010, 04:18

Hokousai a écrit :
louisa a écrit :Ce qui différencie l'homme du chien n'a rien de "spécifique" chez Spinoza, puisque l'espèce "Homme" n'est qu'une abstraction, n'existe que dans la tête de tel ou tel homme, et non pas en dehors de tel ou tel Esprit humain.


pas d'accord .
Ce n'est pas ce que je retire de la lecture du scolie 1 prop 40/2


Qu'en retenez-vous alors, et pourquoi ce que j'en dis serait-il faux?

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Messagepar Louisa » 25 mars 2010, 04:34

Miam a écrit :Franchement, Louisa, je ne comprends rien à ce que vous écrivez.


idem... :-)

Ce qui me semble être un bon point de départ (même si éventuellement Henrique ne semble pas partager cette opinion, puisque depuis quelques jours il ne continue pas la réflexion ...?).

Miam a écrit :J'ajouterai seulement que l'usage de la notion de "forme" en II 10 et l'interprétation que j'en donne se trouvent confirmés par sa signification dans la philosophie juive néoplatonicienne.
Par exemple chez Ibn Gabirol qui, selon tous les commentateurs, a une influence certaine sur Spinoza.
Ibn Gabirol distingue la matière et la forme. Cette distinction, Wolfson la compare à la distinction des deux attributs pensée et étendue chez Spinoza.


je pense qu'en faisant cela, Wolfson se trompe. Spinoza se distingue nettement de l'aristotélisme lorsqu'il dit que ce qui constitue la "forme" d'un Individu c'est une union entre corps (E2 lemme IV). La forme chez Spinoza, c'est l'union entre corps qui effectue le rapport de mouvement et de repos qui caractérise telle ou telle chose singulière. Je ne vois pas en quoi on pourrait encore opposer forme et matière, une fois qu'on le définit ainsi. Dans le spinozisme on oppose forme et objet, comme l'a bien vu Rousset, et non plus forme et matière.

Miam a écrit :Mais outre la matière et la forme, Ibn Gabirol distingue aussi le spirituel et le corporel.
Et si on lit bien Ibn Gabirol, on s'aperçoit bien vite que les deux attributs spinoziens correspondent à cette dernière distinction entre le corporel et le spirituel.


tu es certain de ne pas y aller un peu trop vite ... ?

Miam a écrit :En effet il y a chez Ibn Gabirol une forme corporelle et une forme spirituelle. Il y a ausi une matière corporelle et une matière spirituelle.
Les deux attributs pensée et étendue correspndent au spirituel et au corporel.


justement, telle que Spinoza définit la notion de forme, l'idée de "forme spirituelle" perd tout sens, il me semble, non ... ?

Miam a écrit :La forme et la matière de Gabirol correspondent quant à elles à la puissance de penser (les "êtres objectifs" composant l'idée de Dieu) et à la puissance d'agir (c'est à dire à tous les attributs).
Matière corporelle = mode étendu (corps)
Matière spirituelle = mode du penser (mental)
Forme corporele = idée d'un corps.
Forme spirituelle = idée d'un mental


ça, c'est de l'aristotélisme. Pas du spinozisme. Chez Spinoza la forme ne désigne qu'une union corporelle, et donc ne se situe qu'au niveau de l'étendue.

Miam a écrit :Chez Ibn Gabirol comme chez Spinoza, la forme, c'est l'idée d'un objet (forme d'une matière). Chez Spinoza, cette forme c'est l'application de la puissance de penser de Dieu (réflexivité de Dieu se connaissant lui-même). Mais chez Spinoza cette puissance de penser est appliquée à une infinité d'attributs. La "forme" de Spinoza a donc la même signification que mon "cordeau" : ce qui fait qu'il y ait ou non un "être" : la configuration dans une infinité d'attributs des objets de l'idée d'une chose. Soit ces objets correspondent dans l'ordre causal. Alors la forme est parfaitement "horizontale" et il s'agit d'un "être". Soit ces objets ne correspondent pas dans l'ordre causal : la forme est dès lors différente et il s'agit seulement d'essences qui ne passent jamais à l'être, c'est à dire des choses qui sont "dites ne pas exister".


je pense qu'ici tu rejoins Henrique, alors qu'à mon sens vous n'admettez ainsi qu'un seul sens du terme 'exister' là où Spinoza en admet explicitement deux (par exemple E5P29 scolie), et en faisant cela renverse la notion aristotélicienne de la forme (et en même temps abolit la notion de puissance au sens d'un 'potentiel', d'un non-encore-actualisé).

A voir ... .

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Messagepar hokousai » 25 mars 2010, 13:37

à Louisa

je cite Spinoza

"""car c'est cela qui se trouvant dans chaque singulier, a le plus affecté le corps ;et c'est cela* qu'ils expriment par le nom d'homme ."""""

*( qui se trouvant dans chaque singulier)

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Messagepar Louisa » 26 mars 2010, 17:29

Cher Hokousai,

louisa a écrit :Qu'en retenez-vous alors, et pourquoi ce que j'en dis serait-il faux?

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Messagepar hokousai » 26 mars 2010, 23:07

à Louisa
vous écriviez
Ce qui différencie l'homme du chien n'a rien de "spécifique" chez Spinoza, puisque l'espèce "Homme" n'est qu'une abstraction, n'existe que dans la tête de tel ou tel homme, et non pas en dehors de tel ou tel Esprit humain.


Spinoza écrit

""c'est cela qui se trouvant dans chaque singulier,"""

ce qui ne signifie pas se trouvant dans la tête de chaque homme singulier mais dans chaque chose singulière affectant le corps .


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