Mon deuxième texte préféré (TTP, 20)

Questions et débats d'ordre théorique sur les principes de l'éthique et de la politique spinozistes. On pourra aborder ici aussi les questions possibles sur une esthétique spinozienne.
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itvero
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Mon deuxième texte préféré (TTP, 20)

Messagepar itvero » 29 déc. 2003, 10:12

Où l’on montre que dans un Etat libre il est loisible à chacun
de penser ce qu’il veut et de dire ce qu’il pense.


S’il était aussi facile de commander aux âmes qu’aux langues, il n’y aurait aucun souverain qui ne régnât en sécurité et il n’y aurait pas de gouvernement violent, car chacun vivrait selon la complexion des détenteurs du pouvoir et ne jugerait que d’après leurs décrets du vrai ou du faux, du bien ou du mal, du juste ou de l’inique.

Mais, […] cela ne peut être ; il ne peut se faire que l’âme d’un homme appartienne entièrement à un autre ; personne en effet ne peut transférer à un autre, ni être contraint d’abandonner son droit naturel ou sa faculté de faire de sa raison un libre usage et de juger de toutes choses. Ce gouvernement par suite est tenu pour violent, qui prétend dominer sur les âmes et une majesté souveraine paraît agir injustement contre ses sujets et usurper leur droit, quand elle veut prescrire à chacun ce qu’il doit admettre comme vrai ou rejeter comme faux, et aussi quelles opinions doivent émouvoir son âme de dévotion envers Dieu : car ces choses sont du droit propre de chacun, un droit dont personne, le voulût-il, ne peut se dessaisir.

[…]

Si grand donc que soit le droit attribué au souverain sur toute choses et tout interprète du droit et de la piété qu’on le croit, encore ne pourra-t-il se dérober à la nécessité de souffrir que les hommes jugent de toutes choses suivant leur complexion propre et soient affectés aussi de tel sentiment ou de tel autre. Il est bien vrai qu’il peut en droit tenir pour ennemis tous ceux qui, en toutes matières, ne pensent pas entièrement comme lui ; mais la discussion ne porte plus sur son droit, elle porte sur ce qui lui est utile.


Spinoza,
Traité théologico-politique, chapitre XX.
Je n'ai rien à ajouter
BàV

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