Determinisme et bonheur

Questions et débats d'ordre théorique sur les principes de l'éthique et de la politique spinozistes. On pourra aborder ici aussi les questions possibles sur une esthétique spinozienne.
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Determinisme et bonheur

Messagepar nepart » 07 déc. 2007, 17:14

Bonjour,

En m'intéressant à la philosophie, j'en suis venu à me poser la question de la liberté.

Ma conclusion est cruelle. Je penche pour le déterministe absolu et je pense donc que tout est prévu, tel un destin.

Cela rompt totalement avec ma mentalité qui était que même si il y a un déterminisme social, nous sommes maitre de notre vie.

Depuis ce jour, je ne suis plus le même, je ne suis plus actif, je suis perturbé et déprimé.

Je viens donc ici pour réfléchir à la possibilité d'être heureux tout en étant déterministe.

Si quelqu'un veut en parler très profondement, je peut lui laisser mon skype.

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Messagepar sescho » 07 déc. 2007, 19:41

Bonjour,

Voilà une question bien intéressante, selon moi, fondamentale même.

Je crois que Spinoza est bien sur la même longueur d'onde (même si l'on est tenté de tempérer devant l'énormité des conséquences.) Il dit bien (de mémoire) dans le Court Traité (et peut-être aussi dans les Pensées Métaphysiques et plus ou moins nettement à quelques endroits ailleurs) que l'enchaînement des choses est fixé de toute éternité, que l'Homme est dans les mains de Dieu comme la glaise dans les mains du potier, etc. Et soyons logiques : dire que tout se fait suivant les lois de la Nature équivaut exactement au même...

Mais personne de pense que pour autant Spinoza était un homme malheureux, bien au contraire...

D'abord suivre les lois de la Nature c'est quelque part être libre comme la Nature l'est elle-même (car elle n'est soumise à rien : elle est en elle-même, par elle-même, cause d'elle-même.) Toutefois en tant que mode de la Nature, notre servitude vient de notre dépendance vis-à-vis des autres modes (E1P28) qui nous sont extérieurs. C'est seulement en se dégageant d'une certaine façon de l'interdépendance des modes, par les idées adéquates qui ne dépendent que de nous, que nous trouvons en plus notre liberté en tant que mode (la Nature étant elle libre en tout.) Et l'idée de la Nature universelle qui nie l'indépendance de l'Homme, est précisément fondamentalement adéquate...

Votre abattement vient à mon avis de ce que vous êtes pour l'instant "le cul entre deux chaises", ce qui est tout-à-fait normal temporairement : vous avez la conscience du vide de l'ego, mais "l'ego veut" (cette personnification n'est qu'une façon de se faire comprendre) naturellement reprendre la place en luttant contre son élimination (la tendance à persister dans son être, ou compulsion de répétition), par l'insatisfaction assez insupportable qu'engendre le vide qu'il laisse.

Je crois pouvoir dire qu'on en sort très bien à terme (même si tout "mon ego" n'a certainement pas disparu...) Car finalement, c'est très bien d'être dans les mains du potier ultime : une fois dépassé le fait d'être imprescriptiblement le fruit de la Nature (et donc pas une substance, même pas un petit peu...) il reste toujours l'unité de la Nature, la générosité, la vigueur de l'esprit, l'amour, la joie, la béatitude, qui eux-aussi relèvent de lois de la Nature. Non content qu'ils restent, mais cette charge lourde inutile, cette fumée sans consistance pourrisseuse de vie, qu'est l'ego, est habituellement un sévère empêchement ; elle est l'Empêchement même. Par conséquent, en aucun cas la conscience vraie du déterminisme ne conduit à l'inaction, à la résignation ; mais au contraire à la béatitude.

Finalement "se reposer en Dieu" est une formule très juste et forte.


Amicalement


Serge
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Messagepar nepart » 07 déc. 2007, 20:57

Je ne comprends comment être libre comme la nature réponds à cette envie de se dire que nous choisissons notre avenir.

Si Spinoza était heureux, je pense que c'était parce qu'il était croyant et qu'il pensait que c'était dieu qui déterminé.

Or je ne crois pas en dieu et cela m'a amené à me poser des questions sur ce qu'étais l'homme. Je me retrouve à penser que l'homme n'est rien d'intéressant. Il n'est que de la matière qui peut réfléchir, mais qui subit les lois comme la matière inertes et qui va vivre une vie déjà écrite pour au final mourir et pourrir. L'amour, le sourire d'un enfant, la famille, tout cela n'a plus de valeur pour moi. Cette prise de conscience du déterminisme a totalement changé ma vision de l'homme et donc de moi.

Je suis donc en cherche d'une solution pour retrouver le dynamisme qui n'habiter et les nobles choses que m'inspirer l'Homme.

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Messagepar sescho » 08 déc. 2007, 10:50

Spinoza ne croyait pas en Dieu au sens où on l'entend généralement. Il avait conscience de la Nature universelle qui pour lui était le seul véritable Dieu (ce qui peut être presque l'opposé dans le champ éthique.)

" envie de se dire que nous choisissons notre avenir" me semble un peu compliqué pour être parfaitement sain. La vie n'est pas "déjà écrite" ; il n'y a rien d'écrit : elle se déroule, elle est en l'instant et en tout instant. Par ailleurs, un mode tel qu'il est en l'instant ne pourrit pas vraiment car il est éternellement inscrit dans la nature de la Nature.

Il n'y a pas dans le concrêt de distance entre la loi et le mode : le mode et ses affections (affections sans lesquelles il n'y a pas de vie : d'où le pouvoir d'être affecté qui est puissance vitale) sont les expressions de la Loi, donc de la Nature. La vie que nous avons est libre autant que la Nature l'est, sauf qu'en tant que mode en interaction avec les autres modes nous pouvons être plus ou moins subissant (passifs) ou agissant (actifs.)

En conclusion, je dirais qu'il n'y a rien d'autre encore à accomplir que de se débarrasser de cette idée de loi séparée de soi (qui est encore une facette de l'ego qui divise.) Plus concrètement, il n'y a rien d'autre à faire que de suivre ses impulsions comme avant, et de le faire comme si nous avions le libre-arbitre (car nous sommes conscients de ce qui nous pousse mais pas des causes qui le détermine ; et encore ces causes, comme dit, sont-elles immanentes, c'est-à-dire internes, c'est-à-dire sans distance.) Qu'est-ce qui change alors? pourrait-on demander : rien si l'on s'en tient à la causalité naturelle, qui est en tout quel qu'il soit. Beaucoup sur le plan éthique, car la seule conscience de la Nature universelle et de ses lois agissant en tout anéantit l'ego, qui n'est qu'un complexe de passions directement contraire à la puissance à laquelle il prétend.

Serge
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Messagepar nepart » 08 déc. 2007, 13:44

sescho a écrit :Spinoza ne croyait pas en Dieu au sens où on l'entend généralement. Il avait conscience de la Nature universelle qui pour lui était le seul véritable Dieu (ce qui peut être presque l'opposé dans le champ éthique.)

" envie de se dire que nous choisissons notre avenir" me semble un peu compliqué pour être parfaitement sain. La vie n'est pas "déjà écrite" ; il n'y a rien d'écrit : elle se déroule, elle est en l'instant et en tout instant. Par ailleurs, un mode tel qu'il est en l'instant ne pourrit pas vraiment car il est éternellement inscrit dans la nature de la Nature.

Il n'y a pas dans le concrêt de distance entre la loi et le mode : le mode et ses affections (affections sans lesquelles il n'y a pas de vie : d'où le pouvoir d'être affecté qui est puissance vitale) sont les expressions de la Loi, donc de la Nature. La vie que nous avons est libre autant que la Nature l'est, sauf qu'en tant que mode en interaction avec les autres modes nous pouvons être plus ou moins subissant (passifs) ou agissant (actifs.)



En conclusion, je dirais qu'il n'y a rien d'autre encore à accomplir que de se débarrasser de cette idée de loi séparée de soi (qui est encore une facette de l'ego qui divise.) Plus concrètement, il n'y a rien d'autre à faire que de suivre ses impulsions comme avant, et de le faire comme si nous avions le libre-arbitre (car nous sommes conscients de ce qui nous pousse mais pas des causes qui le détermine ; et encore ces causes, comme dit, sont-elles immanentes, c'est-à-dire internes, c'est-à-dire sans distance.) Qu'est-ce qui change alors? pourrait-on demander : rien si l'on s'en tient à la causalité naturelle, qui est en tout quel qu'il soit. Beaucoup sur le plan éthique, car la seule conscience de la Nature universelle et de ses lois agissant en tout anéantit l'ego, qui n'est qu'un complexe de passions directement contraire à la puissance à laquelle il prétend.

Serge


Par nous choisissons notre avenir j'entends, c'est toi qui peut faire en sorte que ta vie va être bonne ou pas.
Determinisme c'est toujours vrai, mais l'idée que tout est prévu et ne saurait être autrement, me gène beaucoup et ne me donne plus envie de me bouger et fait baisser mon estime de l'homme.

Sinon je n'ai pas vraiment compris ce que tu voulais dire, c'est trop complexe pour moi.

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Messagepar Krishnamurti » 08 déc. 2007, 15:50

A mon avis le Spinozisme est une école d'intégrité. Il part de l'idée que la réalité peut toujours être pire si on n’en prend pas soin et si on ne la comprend pas.

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Messagepar Henrique » 08 déc. 2007, 15:51

D'où vient votre idée que tout est déterminé, Nepart ? Je pense que d'une façon ou d'une autre, vous savez que rien ne peut venir de rien et donc que ce qui sera ne peut laisser place à la contingence, la possibilité d'être ainsi aussi bien qu'autrement, parce que l'effet est déjà contenu dans ce qui est à présent. Voilà le déterminisme proprement dit.

Mais vous en tirez la formule "l'avenir est déjà écrit". Et comme vous le fait remarquer Serge, dire que l'avenir est écrit suppose qu'il existerait quelque part un document dans lequel tout ce qui doit arriver est déjà écrit. Il y aurait alors un plan prévu de toute éternité et quoiqu'on fasse, il se déroulerait implacablement dans l'ordre des choses. Comme si ce plan était la cause réelle de toutes choses. Là on sort du déterminisme proprement dit, on entre dans le fatalisme qui est très différent. On suppose une volonté extérieure à celle des hommes dont la puissance serait infiniment supérieure à celle de l'homme. On rentre dans le mythe : autant le déterminisme relève de la rationalité la plus pure, autant le fatalisme relève de l'irrationnalité, c'est-à-dire de l'imagination. Comme il est facile de comprendre que tout ce qui existe a des effets nécessaires mais qu'il est difficile de se libérer de l'imagination d'une volonté mentale qui serait cause de nos actes physiques, le préjugé fataliste se forme.

Et comme cela revient à maintenir la croyance en une volonté cause des actions, cela me conduit sur ce point à apporter une nuance par rapport à ce que dit Serge : en fait, la croyance au libre arbitre et celle au fatalisme sont très proches, la seule différence est que le fataliste croit que sa volonté est trop faible pour résister à la volonté transcendante qui serait inscrite dans le grand livre du Destin.

Mais en dehors de la Nature, il n'existe rien, car elle est absolument infinie. Elle ne peut donc se déterminer à exister et à produire que par elle-même, hors de toute transcendance. Il ne saurait donc exister de "plan" extérieur aux choses. Si la pierre qu'on lance avec une main humaine sur notre planète ne peut que retomber, c'est seulement en raison des causes en présence, non parce qu'il existerait une volonté transcendante aux phénomènes qui l'aurait commandé : la chute de la pierre est contenue dans les conditions initiales de son mouvement et cela suffit pour en comprendre la nécessité. Ainsi, la nécessité est immanente à la totalité infinie des causes en présence dans l'univers, elle n'est pas le résultat d'une causalité extérieure, contrairement à la croyance fataliste qui croit que la nécessité de toutes choses est le résultat d'une puissance transcendant la nature et qui en tire comme vous l'idée d'une impuissance absolue de l'homme et donc une tristesse qui serait absolue s'il était possible de céder totalement à ce préjugé.

Ce que change de fondamental la différence entre déterminisme et fatalisme, c'est que d'un point de vue déterministe, autrement dit rationnel, un homme, comme toute chose singulière, fait partie de la nature et participe à ce titre de sa puissance de production, ce qui le conduit à la joie. Il est une cause réelle et non une quantité négligeable par rapport à une supposée puissance transcendante qui se moquerait de nos désirs.

Voyons ce que cela donne avec un exemple concret. Vous devez vous présenter à un entretien d'embauche pour obtenir un emploi. Si vous croyez au libre arbitre, vous vous dites que "rien n'est écrit" qu'il dépend de vous seul que vous obteniez au final cet emploi, vous risquez alors finir par croire qu'il suffit que vous vouliez très fort cet emploi pour l'obtenir, quelles que soient alors les conditions dans lesquelles vous vous présentez à l'entretien. Vous allez alors évidemment au devant de graves déceptions car s'il suffisait de vouloir quelque chose sans s'en donner les moyens, comme si la volonté était en soi une puissance de produire des effets, personne jamais ne serait malheureux.

Si maintenant vous êtes fataliste. Vous vous dites que "tout est écrit", alors à quoi bon faire quoi que ce soit pour vous mettre dans les meilleures conditions pour vous rendre à cet entretien ? Vous vous dites que si le Destin a déjà décidé que vous auriez cet emploi, vous pouvez venir habillé en tutu en disant que vous êtes pour qu'on pende tous les patrons avec les boyaux de tous les curés, vous serez pris quand même - un peu comme on le voit dans le film "Un jour sans fin" dont on a parlé il y a quelques temps. Et que si vous ne devez pas être pris, quoique vous fassiez là encore, vous ne le serez pas, même si vous apportez la preuve irréfutable que vous pourriez faire doubler le chiffre d'affaire de toute l'entreprise en 6 mois en étant engagé. Du coup, vous risquez même en venir à vous dire que ce n'est même pas la peine d'aller à l'entretien, ce qui vous maintiendra d'autant plus dans l'image de votre impuissance et la tristesse qui s'en suit.

Si enfin vous êtes déterministe, vous savez certes que l'issue de l'entretien est déjà contenue dans les causes en présence : les attentes de l'employeur, les forces sur lesquelles vous pouvez compter et les faiblesses avec lesquelles vous devez composer, la qualité des autres candidats, des accidents éventuels etc. Mais vous faites partie de ces causes, avec votre effort de persévérer dans l'être, vous êtes une puissance effective : certes pas toute puissante comme tend à le croire le libre arbitre mais pas non plus totalement impuissante comme le croit le fatalisme. Ainsi vous pourrez chercher à renforcer tout ce qui peut vous seconder et à résoudre vos difficultés. Un déterministe cherchera à comprendre les causes en présence pour s'en servir à son avantage. Il évitera ainsi de perdre son temps à se rendre à un entretien où on attendrait des compétences qu'il ne possède pas du tout mais se rendra à un entretien correspondant à ce qu'il peut apporter de positif à l'entreprise susceptible de l'embaucher en préparant un discours mettant en évidence l'adéquation entre ses possibilités et ce que peut attendre de lui l'entreprise.

Et s'il est finalement pris, il en tirera une joie modérée : il saura que beaucoup de choses ne dépendaient pas de lui dans cette réussite, mais tout de même qu'une chose en dépendait : ce qu'il pourrait dire pour convaincre ses employeurs. Et comme cela ne dépend pas de l'extérieur mais de soi-même, la joie tirée de l'idée de sa puissance ne dépendra pas du résultat final. L'homme qui croit en une providence ou en une fatalité est perpétuellement en quête de signes qu'il est bien vu par le destin, sa joie ou sa tristesse sont ainsi très instables. Celui qui sait que toute chose est déterminée, lui y compris, mais qu'alors il peut aussi participer à la puissance de production de la Nature, est capable de jouir de sa puissance avant même d'en voir les effets. Sa joie demeure la même, que ses projets aboutissent ou qu'ils échouent, parce qu'elle dépend de son entendement seul et non des conditions extérieures.

Autre exemple rapide : un tenant du libre arbitre croira qu'il suffit de vouloir guérir pour guérir effectivement d'une maladie, et s'il ne guérit pas, il en tirera une culpabilité profonde : si je n'ai pas guéri, c'est parce que je ne l'ai pas voulu assez fort... Le fataliste se dira que quoiqu'il fasse, s'il doit guérir, il guérira, s'il doit ne pas guérir, il ne guérira pas, et ainsi il ne fait rien. S'il ne guérit pas, il se dira que le Destin ne l'aime pas, ce qui l'attristera et le déterminera encore plus fortement, sur la base de ses préjugés seuls, à s'affaiblir moralement et physiquement. Le déterministe essayera de comprendre pourquoi il est tombé malade, tout en sachant que cette maladie était nécessaire, et cherchera ainsi à agir sur les causes de cette maladie pour en guérir au mieux, pour diminuer ce qui l'affaiblit et augmenter ce qui le renforce. Ce qui est cause de joie pour lui, c'est l'idée de la puissance de son propre entendement. S'il ne guérit pas au final, il ne s'affligera pas car la puissance de son entendement restera ce qu'elle est. Et il ne s'affligera pas comme peut s'affliger celui qui vit dans l'illusion d'une toute puissance de sa volonté comme s'il suffisait de vouloir très fort guérir pour guérir effectivement, ce qui conduit immanquablement à devoir se rendre à l'évidence de l'impuissance de sa volonté. Et il ne s'attristera pas non plus plus que de raison comme ne peut manquer de le faire le fataliste qui se persuade que la vie, le destin, la nature et/ou Dieu se sont ligués contre lui et qu'il est condamné à subir son malheur tant qu'il vivra. Et d'ailleurs, même s'il guérit, cela ne l'empêchera pas de maintenir l'idée de son impuissance absolue et ainsi sa tristesse.

Voyez aussi ceci.
Modifié en dernier par Henrique le 08 déc. 2007, 16:24, modifié 1 fois.

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Messagepar sescho » 08 déc. 2007, 16:10

nepart a écrit :Par nous choisissons notre avenir j'entends, c'est toi qui peut faire en sorte que ta vie va être bonne ou pas.
Determinisme c'est toujours vrai, mais l'idée que tout est prévu et ne saurait être autrement, me gène beaucoup et ne me donne plus envie de me bouger et fait baisser mon estime de l'homme.

Que tu aies envie de bouger ou non, c'était "prévu" comme cela (puisque tout est "prévu"), non? Il y a donc une certaine erreur de logique à dire : "puisque tout est déterminé, je m'arrête", puisque tout étant de toute façon déterminé, l'arrêt comme le non-arrêt se valent de ce point de vue.

Par ailleurs, si l'on avait un choix libre et éclairé de la bonne vie possible, il n'y aurait immédiatement tout simplement qu'elle (qui choisirait la mauvaise en voyant clairement la bonne ? Par "clairement" j'entends là plus que le raisonnement : la vue intuitive claire, immédiate.) Donc ce fameux "choix" est plus un parcours de combattant, plus ou moins erratique, qu'autre chose...

Ce que je voulais signifier, c'est que la Nature n'est pas un marionnettiste et nous ses pantins, ou un pilote de télécommande et nous des robots. Ceci c'est une vue partielle, dualiste, artificiellement distanciée, de la chose. Nous sommes la Nature elle-même (en partie), et donc quelque part absolument libres comme elle. Pas libres d'être soumis à d'autre lois que nos semblables (qui alors ne seraient pas nos semblables...) ni en tant qu'être particulier absolument indépendant des autres êtres particuliers, c'est vrai, mais néanmoins émanation de cette Nature absolument libre. C'est ce que signifie : la détermination en question est interne, pas externe.

Il y a un raisonnement que je trouve parlant : à quoi servirait le choix s'il n'y avait pas d'enjeu fixé par ailleurs ? Si je peux choisir l'enjeu et qu'il en découle pour moi la bonne vie, alors quoi que je choisisse elle en découlera. Par exemple (dans une infinité, donc) je décide en mon libre arbitre que l'enjeu de la bonne vie est de lancer des petits cailloux en l'air, et je le fais à longueur de journée. Et la bonne vie suit automatiquement... Finalement, quoi que je fasse, il suffit que je dise que c'est l'enjeu, et la vie bonne en découle... Comme finalement c'est assez débile d'avoir à dire avant de faire, je peux m'en passer : tout ce que je fais est donc la vie bonne... Comme il est manifeste que ce n'est pas le cas, c'est que l'enjeu, l'enjeu éthique, est déterminé par ailleurs ; il est déterminé par la Nature. Donc le bonheur implique la détermination. Est-il meilleure raison de se réjouir de cette détermination ?

En résumé, nous ne pouvons ni fixer les conditions du bonheur ni fixer le chemin qui y conduit sûrement (auquel cas le bonheur n'existerait pas, en fait, car il serait tellement automatique qu'il n'aurait aucun sens d'en parler.) Autrement dit, à nouveau : notre détermination est une condition sine qua non de notre bonheur.

Ce que nous appelons la liberté, ce n'est pas du tout l'absence de détermination, c'est dans un sens éthique que nous le comprenons : c'est l'esprit à la fois actif, clair et calme. Et cette loi du bonheur est aussi fixée dans la Nature, c'est le miel de la détermination, qui n'existerait pas sans cette détermination.

Note en passant : j'espère que tu ne sous-entends pas que nous ne sommes que ce que la Physique-Chimie pourrait en dire. Car s'il est admissible que nous ne nous distinguions pas fondamentalement de la Matière il me semble inadmissible (ou c'est de l'ordre de la croyance aussi) de prétendre que nous savons absolument ce que la Matière est.

La désorientation vient de cette fausse idée de Moi substantiel, qui peine à s'évanouir. Il ne s'agit en réalité que d'un Moi déterminé, mais qui n'en est pas moins une expression de la puissance naturelle (soumis partiellement à la puissance des autres expressions.) En se dégageant complètement de cette idée, on ne perd rien : on gagne. La puissance naturelle investie en nous ne cesse pas d'exister pour autant, bien au contraire.

Finalement, comme je l'ai dit, nous continuons à agir comme si nous n'étions pas déterminés tout en sachant que nous le sommes et donc sans alimenter d'ego ; là alors la loi du bonheur donne ses meilleurs fruits.

Du moins c'est comme cela que je le perçois...


Serge
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Messagepar Joie Naturelle » 08 déc. 2007, 17:17

sescho a écrit :la seule conscience de la Nature universelle et de ses lois agissant en tout anéantit l'ego, qui n'est qu'un complexe de passions directement contraire à la puissance à laquelle il prétend.

Serge


Oui, l'ego me paraît être la source de bien des malentendus chez les hommes et dans la confusion qui s'opère en eux lorsqu'ils réfléchissent sur leur rapport à la Nature (le Dieu Nature). Je suis d'ailleurs le premier à tomber dans la confusion, au quotidien, lorsque je me laisse aller à mes défauts de pensée.

L'ego, le fait de pouvoir dire "je" et de se reconnaître comme une entité spécifique différente des autres, semble n'avoir aucune importance pour la nature, laquelle nous fait et nous défait, nous crée et nous anéantit sans le moindre discernement. La nature semble nier notre identité propre. Pour elle, nous ne sommes que des manifestations de vie, qui naissent, puis cessent d'exister, puis reviennent à la vie au sein d'un mécanisme naturel perpétuel qui demeure pour nous un complet mystère.

La Nature nous considère comme elle se considère elle-même, puisque nous faisons partie d'elle, en quelque sorte nous lui appartenons. La Nature est libre, elle agit selon sa propre nécessité, sans buts précis mais sans contraintes non plus. Elle se détermine elle-même. Elle est toute puissante. Et nous sommes aussi la Nature, ne pas l'oublier. Sauf que nous avons coutume de penser que nous avons une importance, que nous constituons une exception dans l'univers. Nous voulons faire de nous le centre du monde, un empire dans un empire. Pourquoi pensons-nous naturellement ainsi ? C'est là le paradoxe, l'ultime mystère peut-être, et quelque part la pierre d'achoppement de cette explication.
Modifié en dernier par Joie Naturelle le 08 déc. 2007, 18:11, modifié 1 fois.

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Messagepar nepart » 08 déc. 2007, 17:58

Je ne vois pas comment on peut distinguer determinisme et fatalisme.

Si le déterminisme dit que tout est l'effet d'une cause et que l'on pense que l'homme n'est que matière, alors l'homme ne choisit rien, et ne peut rien changer et donc tout est fait, sauf que l'homme ne pourrais jamais connaitre cette prévision.

Toute l'histoire actuelle est l'effet d'effet d'effet ... et ce sera pareil pour le futur.

Donc tout est déja fait.

Enfin certe sans déterminisme on ne pourrais pas être heureux, mais le déterminisme, je pense qu'il ne vaudrait mieux ne pas en être conscient.


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