le Védanta et Spinoza

Questions et débats d'ordre théorique sur les principes de l'éthique et de la politique spinozistes. On pourra aborder ici aussi les questions possibles sur une esthétique spinozienne.
Krishnamurti
participe avec force d'âme et générosité
participe avec force d'âme et générosité
Messages : 403
Enregistré le : 22 juin 2002, 00:00

Messagepar Krishnamurti » 05 nov. 2005, 10:34

Troisième genre de connaissance ?

Succédant à une méditation, la couronnant, la samadhi consiste à remettre ensemble, dans une même perception, tous les éléments qu'elle avait examinés séparément. Elle est la « conscience panoramique » où l'attention se porte sur tout ensemble simultanément. Et elle essaye donc d'embrasser ainsi le plus de choses possibles. Le mot « synthèse » est assez approprié. Mais c'est plutôt une « intuition » particulière, spécialement efficace sur le plan cognitif, que l'on peut obtenir grâce à à la préparation convenable, par la méditation, du terrain de cette connaissance.

Cependant, un point essentiel est que cette synthèse n'est pas seulement celle des éléments connus entre eux, mais aussi, et surtout, celle, avec eux, du connaisseur. Cette dernière opération surprend l'occidental, mais elle est claire et naturelle pour le bouddhisme. Pour celui-ci, en effet, la réalité est que le connaisseur ou connaissant n'est pas autre chose que l'ensemble de « ses » connaissances ; même si on leur ajoute d'autres éléments, cela ne fait pas un être en soi. Croire à son existence autonome, indépendante d'elles, est une illusion.
[...]
Quant au meilleur terme européen pour samadhi, si l'on y tient, il est finalement possible que ce soit simplement « compréhension ». Il peut indiquer l'aspect de connaissance intuitive profonde, celui de synthèse si on l'entend étymologiquement comme prendre ensemble — et ce peut être la synthèse des stades de la méditation comme celle de leurs objets avec « soi » —, et même celui de conquête par « préhension ». Divers sens de la définition lexicale de « comprendre » conviennent bien : « embrasser dans son ensemble », « contenir en soi », « faire entrer dans un tout », « appréhender par la connaissance », « être capable de faire correspondre à (quelque chose) une idée claire », « donner un sens clair », « se faire une idée claire des causes, des motifs », « se rendre compte », « avoir une connaissance intuitive » (dictionnaire Robert) —à condition d'entendre tout cela aux sens forts. Notons enfin qu'il n'est téoriquement pas impossible, dit-on, d'accéder à la samadhi sans la médiation de la méditation, mais que cet exploit nécessite des conditions extrêmement rares et exceptionnelles.

Page 314-315
Le bonheur - liberté, Bouddhisme profond et modernité. Serge-Christophe Kolm (P.U.F. 1982)




Bouddhisme et double langage (question de survie) ?

Si le Bouddha avait en plus nié explicitement le système de la karma, les masses qu'il aurait convaincues auraient perdu toute incitation idéelle à obéir aux règles de la société : ni respect des castes, des richesses et des pouvoirs, ni crainte des dieux, m rétribution karmique en faveur du comportement conforme à son rôle. En particulier, les brahmanes se seraient vu retirer toute légitimité, nié tout pouvoir divin et toute utilité : leur position n'aurait plus été justifiée par leurs mérites passés, ils ne seraient sans doute plus élus de dieux devenus douteux, ni utiles pour servir d'intermédiaires entre les hommes et ces derniers, ni respectables par leur seule naissance sociale. Or tout asservissement répandu et durable a toujours une acceptation idéologique de la part des asservis comme l'une de ses bases. Toute servitude permanente d'une société entière est presque touiours un peu volontaire, par croyance en une légitimité du pouvoir politique, économique ou autre. Le bouddhisme populaire sans karma délitait tout à fait ce ciment de la société indienne. Les puissants de celle-ci auraient donc tout fait pour l'arrêter. Et ils y seraient vite arrivés puisque les bouddhistes ne répondaient pas à la force par la force.
[...]
La métempsycose se réduisait alors, aux yeux d'un bouddhiste cultivé, à une pure métaphore, pour décrire de façon très élaborée notamment des processus psychiques....

Page 572
Le bonheur - liberté, Bouddhisme profond et modernité. Serge-Christophe Kolm (P.U.F. 1982)
Modifié en dernier par Krishnamurti le 05 nov. 2005, 10:39, modifié 1 fois.

Avatar du membre
Peu_Importe
passe par là...
passe par là...
Messages : 7
Enregistré le : 03 nov. 2005, 00:00

Messagepar Peu_Importe » 05 nov. 2005, 10:38

hokusai:
"Ce que me dit le sage de ce qu’ il pense ou vit en son for intérieur ne m'est pas directement accessible.
Mon interprétation est sans garanties .La transmission directe d ‘esprit à esprit est tout à fait aléatoire. Je veux dire que le nirvana ne se transmet pas par télépathie, ça se saurait."

---> le sage ne parle pas au nom de son identité, son individualité est morte, il ne parle pas d'opinions personnelles.
Le sage n'a pas de for interieur, ni d'opinion personnel, il n'est qu'un miroir qui repond la vérité et la vision juste suivant la question qui lui est posé.
De par ce fait son dicours est toujours accessible a la personne.
Un sage n'a pas de statut a defendre, ni de hauteur a défendre, il ne défend pas un ego en façe de quelqu'un qui lui est disciple. Il est a disposition entière pour aider son disciple a s'éveiller et a se liberer.



"Il y a vacuité chez Spinoza en ce que les choses ne sont pas substantielles .
Il y a interdépendance :Causes et effets .D’ une manière linéaire à un certain niveau de compréhension mais holiste à un autre niveau . "

---> tant que tu es identifié il y a interdependance. Le but de l'éveil est d'être dans un bonheur permanent et non dependant, car tu t'es éveillé a ta propre essence.

----------------------------------------------

Faun:
La vacuité c'est le fait que toutes choses est impermanente dans le temps et dans sa forme. Donc qu'elle n'a pas de réalités propres.
La matière a une réalité dans le relatif (si je te donne un coup, tu le sens), mais au niveau absolu, ce qui est dans l'instant n'est deja plus ds l'instant d'après, et de même pour les formes.
La matière n'est qu'une forme de l'essence, c'est l'unité qui se manifeste sous une multiplicité de formes et d'instants.
Ces substances sont l'unité, mais constamment changeantes.
Il n'y a pas de séparations entre la substance et l'essence, le vide est la forme, et la frme est le vide.
Ils ne partagent donc pas cette essence mais ils le sont car c'est ce qui est permanent en eux, elle ne change jamais.
Premièrement, tant que tu es identifié, tu n'es pas libre. On est esclaves de mécanismes qui nous maintiennent dans la souffrance, la libération consiste a s'affranchir de ces mécanismes pour nêtre plus que soumis a celle de la necessité de respirer, de manger, de digerer, de vieillir et de mourrir. Mais cela ne se fera que si vous choisissez deliberement un autre esclavage, l'esclavage a la vérité, l'esclavage a la necessité des situations (actions justes), l'esclavage a la réalité totale lucidement perçu. Seul cet esclavage librement consentie nous libère de l'esclavage interieur. Esclavage a la vérité = acquiescement aux choses tels qu'elles sont, adhésion parfaite a la réalité d'instants en instants. C'est a dire ici et maintenant qu'est-ce qui doit être accompli ? qu'est-ce qui m'est demandé ?
Alors vous agirait consciemment au lieu d'agir mécaniquement et vous serez souvereinement libre.


krishanmurti:
"akash) veut dire ether ou espace ou " the all pervading substance " http://en.wikipedia.org/wiki/Akash
Mais j'ai beau maintenant savoir ça, à chaque fois que je relis cette citation je suis sur que (akash) veut dire (rires)."

---> j'ai fait des études de sanskrits, et plus précisement akasha signifie "tissus d'espace temps".
Si vous concevez l'espace temps comme une abstraction mathématique, comme un ether statique comme au début du siècle alors oui cela me fait rire autant qu'a vous. Mais si vous lisez les écrits d'orient l'akasha est consideré comme dynamique, ce qui fait deja moins rire et qui nous donne une vision assez juste de ce que nous pouvons traduire dans nos équations. (voir a ce sujet les derniers resultats experimentaux d'aout 2005 de la sonde probe B qui confirment le principe d'equivalence et qui mettent en evidence l'existence d'un "vent d'ether" (mots de l'article référé))



-------------------------

bardamu:
"Par contre, l'orientation éthique me semble différente : là où les pensées orientales parlent de réincarnation et de recherche de la non-incarnation, Spinoza parlerait d'une vie unique et de recherche de l'intensification de cette vie, là où le bouddhiste ou l'hindouiste considère qu'il sort du monde lorsqu'il atteint la sagesse, le spinozisme considère que la sagesse est incarnée dans le monde. "

---> le sage dit: le monde est en moi
---> le non-sage dit: je suis dans le monde

Avatar du membre
bardamu
participe à l'administration du forum.
participe à l'administration du forum.
Messages : 1024
Enregistré le : 22 sept. 2002, 00:00

Messagepar bardamu » 05 nov. 2005, 14:44

Peu_Importe a écrit :(...)
---> le sage dit: le monde est en moi
---> le non-sage dit: je suis dans le monde

Et le super-sage dit : je suis le monde :)

Avatar du membre
hokousai
participe avec force d'âme et générosité
participe avec force d'âme et générosité
Messages : 4105
Enregistré le : 04 nov. 2003, 00:00
Localisation : Hauts de Seine sud

Messagepar hokousai » 05 nov. 2005, 18:01

difficile pour moi de poursuivre avec peu importe .

Il me semble que le "" ""sage "" ""Spinoziste avec tous les guillemets continue de vivre je dirais normalement .

Peu importe fait référence à un mystique indien (Ramana Maharshi me semble t -il ) Ce sage est très particulier . il apparait de par le monde régulièrement des individus très particuliers .

Quant aux vents d éther vérifiés par les équations cela dépasse le cadre de ma réflexion philosophique .

hokousai

Avatar du membre
Avinash
a déjà pris quelques habitudes ici
a déjà pris quelques habitudes ici
Messages : 47
Enregistré le : 09 juin 2004, 00:00
Localisation : Vendée

Re: le Védanta et Spinoza

Messagepar Avinash » 10 janv. 2014, 23:31

Bon, je viens de lire ces quelques pages. Il se trouve que je suis maintenant à la retraite et que vais régulièrement en Inde. J'ai suis allé plusieurs fois à l'ashram de Ramana Maharshi. J'ai passé du temps à lire la littérature autour du maître . Il écrivait peu. Par contre il était disponible pour répondre aux questions.
Son visage exprimait la béatitude. Une fillette de 8 ans m'a fait la réflexion suivante alors que je lui montrais une photo de Ramana: ´Comme il est jeune ce vieux! ´
Ramana n'était pas un être ordinaire. Pas de trace d'ego en lui. L'ego avait été absorbé . Les indiens parlent de samadhi.
Il se trouve que la philosophie de Sankara exprimait son état de conscience...mais sa modalité d'être était un fait pas une philosophie.
Quelles conséquences pour la vie quotidienne à l'Ashram: les petits brahmanes reçoivent une éducation très limitée et psalmodient des Vegas . Ils répètent , répètent, répètent. C'est significatif.
J'ai fini par comprendre qu'un sage pouvait être sans ego mais que cela ne le libérait pas de son background culturel. Être sans ego ne vous donne pas accès à la vérité . Mais votre énergie n'est plus dilapidée dans des problèmes d'image, de blessures narcissiques. Donc de la tristesse, de la peur...
Je veux également souligné qu' à seulement 150 kms à l'ashram d'Aurobindo la philosophie de l'éducation est à l'opposé . Les élèves reçoivent une excellente éducation . On comprend quand on lit la ´Synthese des yoga que la philosophie de l'aspect dynamique du Brahman , notion aurobindienne, ouvre la voie à une excellente éducation , au yoga des œuvres...
En conclusion il me paraît évident qu'un sage à ses propres idiosyncrasies liées au contexte culturel de l'époque.
Quant à l'Inde je ne l'appelle plus l'Inde mais les Indes tant elle est diverse. Je ne me suis pas fait d'amis de dialogue en Inde car ils sont enkystés dans leur culture qui pour eux est la meilleure. Une exception cependant: j'ai pu avoir des discussions très ouvertes avec des indiens des centres Krishnamurti mais ils sont en rupture avec le brahmanisme et Sankara.
Mes voyages en Inde m'ont permis de constater sur place que la vie en Ashram n'est pas rose: on y rencontre beaucoup de frustrés qui attentent la libération , laquelle ne vient jamais , de grandes solitudes . Je parle surtout des occidentaux. Les indiens se déplacent en famille et sont tout à leur dévotion donc plutôt d'un naturel heureux et équilibré.
Enfin il y aurait beaucoup à dire et ces quelques lignes ne me permettent ni de nuancer ni d'approfondir mon propos.
Merci de votre accueil.


Retourner vers « Ethique, esthétique et Politique »

Qui est en ligne

Utilisateurs parcourant ce forum : Aucun utilisateur enregistré et 1 invité