Spinoza et les 'paresseux'

Lecture pas à pas de l'Ethique de Spinoza. Il est possible d'examiner un passage en particulier de cette oeuvre.
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Messagepar Vagabond » 13 juil. 2007, 03:27

puisque toute essence est toujours déjà entièrement actualisée


Et les maladies, le vieillissement?

On pourrait concevoir la paresse comme une maladie, d'ailleurs la paresse n'est rien, il faudrait plutot s'interroger sur les causes qui font que telle personne ne fait pas ce qu'elle peut (quand c'est indeniable).

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Louisa
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Messagepar Louisa » 13 juil. 2007, 11:48

Vagabond (c'est louisa qui souligne) a écrit :Citation:
puisque toute essence est toujours déjà entièrement actualisée

Et les maladies, le vieillissement?

On pourrait concevoir la paresse comme une maladie, d'ailleurs la paresse n'est rien, il faudrait plutot s'interroger sur les causes qui font que telle personne ne fait pas ce qu'elle peut (quand c'est indeniable).


il y a bien sûr de différentes possibilités de concevoir la maladie, mais SI l'on se demande quelle pourrait être la façon proprement spinoziste, voici, je crois, ce qu'il faudrait se rappeler (la citation complète se trouve dans la discussion sur les phobies sociales):

SPINOZA:
"la nature humaine, considérée en soi seule, pourrait donc s'excéder elle-même, autrement dit, pourrait plus qu'elle ne peut, ce qui est une contradiction manifeste."

Conclusion:
Si c'est absurde de dire qu'une nature humaine, considérée en soi, pourrait plus qu'elle ne peut, il devient INDENIABLE qu'il n'y a JAMAIS des situations où elle ne fait pas ce qu'elle peut.

Dès lors, la maladie, le veillissement (dans des circonstances défavorables; sinon il peut tout aussi bien être un accroissement constant d'idées adéquates) etc ne sont PAS, pour Spinoza, des situations où l'on fait MOINS que ce qui est EN NOTRE POUVOIR. Spinoza propose de les concevoir comme des situations où c'est NOTRE POUVOIR d'agir MÊME qui est devenu MOINS qu'avant. C'est cela même la notion de Tristesse: diminution de la puissance d'agir.

Or rien n'empêche d'utiliser le pouvoir de penser qui nous reste (car il est évident que même dans la maladie, nous vivons toujours, et donc nous sommes toujours définis par un degré de puissance de penser), de former une idée adéquate de cette maladie, et par là même de faire augmenter notre puissance de penser. En tout cas je ne vois que cela, chez Spinoza: des diminutions et des augmentations du pouvoir de penser. Jamais des situations où le pouvoir de pense/agir serait inférieur à ce même pouvoir de penser/agir (donc où l'on fait/pense moins que ce que l'on peut), tout simplement parce que défini ainsi, il s'agit visiblement d'une contradiction dans les termes.

Donc pour Spinoza:


POUVOIR = FAIRE



Bien sûr, dire que jamais on ne peut plus que ce qu'on fait réellement, cela va à l'encontre de ce que nous pensons spontanément quasiment tous. Celui qui est allité à cause d'une grippe et qui voit son voyage foutu en l'air se dira immédiatement que c'est tout de même dommage, qu'il aurait pu faire ce très beau voyage et que voici que cette stupide maladie vient de l'empêcher de le faire.

Spinoza, à mon sens, ne nie pas du tout cela. Seulement, selon lui réagir comme ça face à une maladie, c'est dédoubler la diminution causée par la malade par une deuxième pensée, qui elle aussi va encore une fois diminuer notre puissance de penser. C'est donc être deux fois malheureux.

Il nous montre un autre chemin: utiliser la puissance de penser qui nous reste PENDANT que nous sommes malade (et qui par définition est moins grande que juste avant) pour essayer de comprendre, justement, que cette maladie est une cause extérieure qui nous afflige (un virus pe), et qu'apparemment, de toute éternité il était nécessaire qu'à ce moment-ci une chose extérieure venait nous attaquer de telle sorte que nous perdons un peu de notre pouvoir.

Si on comprend cela, on comprend que nous-mêmes, on n'y PEUT rien: c'est bien une chose extérieure qui vient de nous assommer. Du coup, le pouvoir de penser et d'agir qui nous reste, après cette attaque venue du dehors, résume bien tout ce que nous pouvons! S'imaginer que l'on peut ou aurait pu faire PLUS, c'est s'imaginer qu'à ce même moment, il aurait été possible que l'on n'était pas malade, ce qui est une idée totalement inadéquate puisque tout est déterminé de toute éternité, et que la nature n'a pas comme 'fin' ou plan de me rendre heureux moi.

Dès lors, penser que l'on aurait pu faire plus (faire ce voyage pe), c'est avoir une idée inadéquate de soi-même, c'est oublier que l'on n'est qu'une infime partie de la nature, qui de temps en temps ne peut voir sa puissance diminuée par une cause extérieure. Alors au lieu d'avoir cette idée inadéquate, qui comme toute idée inadéquate diminue à elle seule aussi (à part donc l'effet du virus) notre puissance d'agir et de penser, Spinoza propose non pas de faire plus que ce que l'on peut, mais d'essayer de ne pas ENCORE MOINS faire que ce qui nous reste comme pouvoir une fois le virus arrivé.

Alors il conseille d'utiliser le pouvoir ACTUEL de son Esprit pour penser à ceci: bien sûr qu'étant malade, nous désirons néanmoins faire ce voyage. Seulement, on sait bien qu'on peut avoir un désir relatif à une chose extérieure (voyage) non assouvi (ce qui est le cas quand on est malade), et cela précisément parce que tout n'est pas en notre pouvoir. Ainsi nous ne pouvons pas toujours maîtriser la conduite d'un virus. Croire qu'on aurait PU faire tout de même ce voyage, que cela était donc en notre pouvoir, ce n'est rien d'autre que de penser qu'il était en notre pouvoir de faire dévier ce cher virus de son chemin, pour qu'il attaque notre voisin au lieu de s'être dirigé tout droit vers nous. Bref, c'est se tromper, donc avoir une idée inadéquate.

Et dans ce cas on a:
- une première diminution de notre pouvoir d'agir/penser (donc de voyager) par l'attaque du virus
- une deuxième diminution de notre pouvoir d'agir/penser par l'idée que nous nous former de notre état en s'imaginant capable de commander aux virus.

Le remède de Spinoza:
- prendre les médicaments etc qu'il faut pour chasser le virus, ce qui augmentera notre pouvoir de penser/agir, c'est-à-dire ce qu'il fera qu'on peut et donc fait plus
- former une idée adéquate de notre situation, idée qui consiste principalement à se dire qu'elle était inévitable, déterminée de toute éternité. Cela aussi augmentera, une deuxième fois, notre pouvoir de penser/agir.

Ainsi on ne fera pas plus que ce qu'on peut, on pourra réellement plus, car notre pouvoir de penser/agir sera augmenté par deux causes importantes: départ du virus et idée adéquate de sa situation, c'est-à-dire Joie, au lieu d'être ET au lit, ET Triste.

Le même raisonnement vaut pour la paresse: dire à quelqu'un (ou à soi-même) qu'il est paresseux, c'est faire comme s'il peut faire plus que ce qu'il fait, chose absurde, nous dit Spinoza. Donc idée inadéquate. Donc idée qui fait que de facto, nous POUVONS MOINS que lorsque nous n'aurions pas cette idée. C'est bien pourquoi il faut absolument en finir avec la paresse, je crains, sinon on se dira constamment qu'on pourrait faire plus que ce qu'on fait, et on diminuera PAR LÁ MÊME le pouvoir qu'on a pour faire quoi que ce soit.

Je suis donc d'accord pour dire, comme vous ci-dessus, que la paresse n'est rien, qu'il faut chercher les causes. Mais non pas les causes qui font que la personne fait moins que ce qu'elle peut, puisqu'elle fait toujours ce qu'elle peut. Il faut donc chercher tout à fait ailleurs (et c'est bien en cela que consiste à mon sens l'intérêt de la pensée spinoziste): il faut chercher quelles causes pourraient AUGMENTER ce que cette personne peut.
Amicalement,
louisa

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Messagepar Joie Naturelle » 13 juil. 2007, 17:43

Je crois bien désormais que si l'on est du côté de Spinoza (si on pense comme lui), on ne peut admettre plus longtemps l'idée de la réalité de la paresse.

J'ai en effet poursuivi la lecture du livre folio plus philosophie consacré aux lettres sur le mal (correspondance avec Blyenbergh). Voici ce que dit Mériam Korichi, et qui me paraît à la fois clair et convainquant :

Le philosophe fait valoir aux yeux de Blyenbergh une acception exclusivement philosophique (ontologique) de la perfection débarrassée de tout sens évaluatif concernant la "valeur" de cette chose, privilégiant exclusivement une perspective "quantitative" : la quantité d'être qu'exprime l'existence d'une chose. Cette conception réaliste de la perfection se retrouve dans l'Ethique avec le statut d'axiome de la deuxième partie : "Par réalité et perfection, j'entends la même chose." Cette façon de définir la perfection permet à Spinoza d'invalider l'objectivité d'un discours attribuant réellement une imperfection à une chose : "Nous ne pouvons concevoir dans un objet aucune imperfection, sinon quand nous le comparons à quelque autre ayant plus de réalité." Par suite, l'imperfection attribuée à Adam n'a rien de réel, elle n'est que le résultat d'une comparaison et non pas une qualité avérée de sa volonté.
[...] Par où l'on voit comment Spinoza nie que les idées de faute et de mal aient des référents réels en définissant ce qu'il entend par perfection, et en niant que l'idée d'imperfection ait un référent réel.
------------------------

Ces propos me semblent s'appliquer parfaitement au cas de la paresse. Mais il y a mieux. Mériam Korichi continue plus loin :

Spinoza met l'accent sur le caractère orienté, partial -inadéquat est le terme que Spinoza emploie dans l'Ethique - du point de vue qui consiste à mettre en avant l'idée de manquement ou d'imperfection. D'abord, ce point de vue ne se soucie pas d'être rigoureusement fondé puisqu'il méconnaît la contradiction qu'il implique. En effet, reprocher à une chose un manquement dû à une imperfection intrinsèque supposée, c'est considérer que quelque chose puisse arriver contre la volonté de Dieu alors même qu'on conçoit cette volonté à l'origine de toute chose et de tout événement. Spinoza n'aura de cesse de dénoncer ce type de point de vue car, pour lui, rien n'arrive dans la nature qui puisse être considéré comme contraire aux "commandements" de Dieu, puisque ces commandements en tant qu'ils procèdent d'une puissance absolument infinie ont le statut de lois de la nature.

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Messagepar Faun » 13 juil. 2007, 22:01

"Mais, bien qu'il en soit ainsi, ces mots de bien et de mal, nous devons les conserver. Désirant en effet nous former de l'homme une idée qui soit comme un modèle que nous puissions contempler, nous conserverons à ces mots le sens que nous venons de dire. J'entendrai donc par bien, dans la suite de ce traité, tout ce qui est pour nous un moyen certain d'approcher de plus en plus du modèle que nous nous formons de la nature humaine ; par mal, au contraire, ce qui nous empêche de l'atteindre. Et nous dirons que les hommes sont plus ou moins parfaits, plus ou moins imparfaits suivant qu'ils se rapprochent ou s'éloignent plus ou moins de ce même modèle. "

Préface de la quatrième partie de l'Ethique.

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Messagepar Louisa » 13 juil. 2007, 23:03

A Faun

si selon vous le passage que vous venez de citer rend l'usage d'une notion telle que la paresse chez Spinoza concevable voire nécessaire, serait-il possible d'expliciter un peu comment passer de l'un (ce texte) à l'autre (la paresse)?
Merci déjà,
louisa

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Messagepar Faun » 14 juil. 2007, 11:15

proposition 27 partie 4 :
"Rien ne nous est connu comme certainement bon ou mauvais que ce qui nous conduit à comprendre véritablement les choses, ou ce qui peut nous en éloigner."

L'homme libre (le modèle) fait effort pour comprendre les choses, c'est à dire (par la proposition 28 partie 4) Dieu. Or la paresse est le désir de s'abstenir de tout effort, donc elle s'oppose à ce que nous devenions le modèle. On peut donc la dire, non en soi, mais selon que nous la rapportons au modèle que nous visons, mauvaise, vicieuse.

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Messagepar Joie Naturelle » 14 juil. 2007, 13:50

Faun a écrit :"Mais, bien qu'il en soit ainsi, ces mots de bien et de mal, nous devons les conserver. Désirant en effet nous former de l'homme une idée qui soit comme un modèle que nous puissions contempler, nous conserverons à ces mots le sens que nous venons de dire. J'entendrai donc par bien, dans la suite de ce traité, tout ce qui est pour nous un moyen certain d'approcher de plus en plus du modèle que nous nous formons de la nature humaine ; par mal, au contraire, ce qui nous empêche de l'atteindre. Et nous dirons que les hommes sont plus ou moins parfaits, plus ou moins imparfaits suivant qu'ils se rapprochent ou s'éloignent plus ou moins de ce même modèle. "

Préface de la quatrième partie de l'Ethique.


Il ne faut pas omettre de citer ce qui précède, et qui valide bien le principe de non existence du mal (et par extension de la paresse).

Spinoza dit :

"La perfection et l'imperfection ne sont, en réalité, que des modes de penser, je veux dire des notions que nous avons accoutumé de forger parce que nous comparons entre eux les individus de même espèce ou de même genre; à cause de quoi j'ai dit plus haut que par perfection et réalité j'entendais la même chose."

"Rien en effet n'appartient à la nature d'une chose, sinon ce qui suit de la nécessité de la nature d'une cause efficiente, et tout ce qui suit de la nécessité de la nature d'une cause efficiente arrive nécessairement."

"Quant au bon et au mauvais, ils n'indiquent également rien de positif dans les choses, considérées du moins en elles-mêmes, et ne sont autre chose que des modes de penser ou des notions que nous formons parce que nous comparons les choses entre elles."

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Messagepar Joie Naturelle » 14 juil. 2007, 14:31

Faun a écrit :
L'homme libre (le modèle) fait effort pour comprendre les choses, c'est à dire (par la proposition 28 partie 4) Dieu. Or la paresse est le désir de s'abstenir de tout effort, donc elle s'oppose à ce que nous devenions le modèle. On peut donc la dire, non en soi, mais selon que nous la rapportons au modèle que nous visons, mauvaise, vicieuse.


Du point de vue anthropomorphique, oui. Mais il n'est pas la réalité, ce point de vue. Il provient d'une comparaison entre les individus d'un même genre, et méconnaît la réalité des choses.

La paresse n'est pas un désir, ni une manifestation de libre-arbitre. C'est une essence qui nous constitue, une réalité. Dès lors, on ne peut parler de manquement (introduisant un jugement de valeur) lorsqu'on évoque la paresse de quelqu'un, mais d'une négation : négation (c'est à dire absence) des qualités de volonté , qui n'existent pas à un moment précis chez cet individu.

Mériam Korichi : Tout le problème de compréhension auquel les hommes sont confrontés vient de ce qu'ils confondent leur nature et celle de Dieu. Ils se prennent comme modèle pour penser Dieu et ignorent que par là ils montrent plus les limites de leur entendement qu'ils ne font valoir leur puissance de penser et de comprendre. Ce qui est donc en cause c'est le caractère anthropomorphique de ce point de vue qui méconnaît absolument la nature de Dieu.
Il s'avère en outre que ce type de point de vue méconnaît aussi complètement la nature de l'homme, comme le fait valoir Spinoza dans la lettre 2 (à Blyenbergh), et dans la préface à la troisième partie de l'Ethique : la plupart de ceux qui considèrent la façon de vivre des hommes (leurs passions, leurs actions) semblent concevoir "l'homme dans la nature comme un empire dans un empire. Car ils croient que l'homme perturbe l'ordre de la nature plutôt qu'il ne le suit, qu'il a sur ses actions une absolue puissance, et n'est déterminé par ailleurs que par soi-même. Ensuite, ils attribuent la cause de l'impuissance et de l'inconstance de l'homme, non pas à la puissance commune de la nature, mais à je ne sais quel vice de la nature humaine, et pour cela, ils la déplorent."

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Messagepar Louisa » 14 juil. 2007, 15:21

A Flumigel: oui, tout à fait d'accord.

Faun a écrit :proposition 27 partie 4 :
"Rien ne nous est connu comme certainement bon ou mauvais que ce qui nous conduit à comprendre véritablement les choses, ou ce qui peut nous en éloigner."

L'homme libre (le modèle) fait effort pour comprendre les choses, c'est à dire (par la proposition 28 partie 4) Dieu. Or la paresse est le désir de s'abstenir de tout effort, donc elle s'oppose à ce que nous devenions le modèle. On peut donc la dire, non en soi, mais selon que nous la rapportons au modèle que nous visons, mauvaise, vicieuse.


merci pour l'explication.

Mais où trouvez-vous chez Spinoza un 'désir de s'abstenir de tout effort'? Le désir, n'est-ce pas par essence tendance, donc effort, seul ce qui est immobile étant sans effort?

Puis Spinoza écrit partout, pe dans la démo de 4.24 que "l'effort pour se conserver soi-même est l'essence même d'une chose'. Comment concevoir CHEZ SPINOZA une chose qui est essentiellement effort, et qui pourtant désirerait ne faire aucun effort? N'est pas une contradiction?

Je ne veux pas contester que la paresse soit un vice, et même pas qu'en effet du point de vue du 'modèle', Spinoza accepte de parler de vices (or comme le dit Flumigel, il s'agit bien d'une imagination, pas de la réalité, car il n'y a pas de vice dans la nature et nous ne sommes rien d'autre qu'une partie de la nature). Mon problème, c'est que je ne vois pas comment définir la paresse de telle sorte qu'elle puisse s'intégrer dans une pensée proprement spinoziste.
D'ailleurs Spinoza traite littéralement de pas mal de vices ou de mauvais désirs, en montrant comment les surmonter. Alors comment pourrait-il avoir 'oublié' de traiter d'un péché si 'capital' que la paresse?
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Messagepar Faun » 14 juil. 2007, 22:50

Flumigel a écrit :
La paresse n'est pas un désir, ni une manifestation de libre-arbitre. C'est une essence qui nous constitue, une réalité. Dès lors, on ne peut parler de manquement (introduisant un jugement de valeur) lorsqu'on évoque la paresse de quelqu'un, mais d'une négation : négation (c'est à dire absence) des qualités de volonté , qui n'existent pas à un moment précis chez cet individu.


Précisément si je définis la paresse comme le désir de s'abstenir de tout effort (intellectuel), ce n'est pas une simple négation, mais une passion, et cela possède donc une essence, qui nous permet de la comprendre.

Le désir de ne pas faire quelque chose est présent dans l'Ethique, j'en citerais un exemple :

"Cet effort pour faire certaines choses ou pour ne les point faire, par le seul motif de plaire aux hommes, se nomme ambition, surtout quand on s'efforce de plaire au vulgaire avec un tel excès d'ardeur qu'on fait certaines choses, ou qu'on s'en abstient à son détriment ou à celui d'autrui." (prop. 29 partie 3, dém.)


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