Faut-il "tuer" Spinoza ?

Ce qui touche de façon indissociable à différents domaines de la philosophie spinozienne comme des comparaisons avec d'autres auteurs, ou à des informations d'ordre purement historiques ou biographiques.
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Ulis
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Re: Faut-il "tuer" Spinoza ?

Messagepar Ulis » 19 janv. 2015, 16:01

@ Cher Henrique
Info,
Un nouveau prof de philo à l'université de Lille (le cartésien Edouard Mehl ) commence son enseignement des masters par un séminaire sur Spinoza intitulé "le spinozisme est-il l'opium du peuple ?"
Pas banal dans le contexte, non !
Cordialement

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hokousai
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Re: Faut-il "tuer" Spinoza ?

Messagepar hokousai » 20 janv. 2015, 12:43

On pourrait aussi se demander si :le peuple n'est pas l' opium des spinozistes ? Question plus actuelle à mes yeux dans la mesure ou le peuple se fiche du spinozisme, alors que pas l'inverse.

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Vanleers
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Re: Faut-il "tuer" Spinoza ?

Messagepar Vanleers » 22 févr. 2015, 17:40

Nous écrivions précédemment que la suspension du jugement restait sans doute la seule chose possible pour le malade, au moins à certains moments, et nous suggérions un rapprochement entre l’Ethique et l’épochè sceptique.

Spinoza critique la notion de « suspension du jugement » dans le scolie d’E II 49 que Pierre-François Moreau commente dans Problèmes du spinozisme – Vrin 2006. Il écrit :

« Il faut remarquer que Spinoza ne dit pas « je réponds que nous ne suspendons pas notre jugement » ; il dit : je réponds en niant que nous ayons un libre pouvoir de suspendre le jugement » ». (p.171)

P.-F. Moreau distingue alors trois situations :

« Face à une perception d’une chose, il peut donc y avoir trois situations :
1) Je la perçois adéquatement, et dans ce cas-là, j’en ai évidemment la certitude (puisque l’adéquation emporte la certitude), donc le jugement n’est pas suspendu.
2) Je ne la perçois pas adéquatement et je ne m’en rends pas compte, donc mon jugement n’est pas non plus suspendu : je dis allègrement le faux.
3) Enfin la situation qui est la suspension du jugement ou plutôt ce que les autres appellent la suspension du jugement : je ne vois pas adéquatement la chose et je me rends compte que je ne la vois pas adéquatement, c’est-à-dire qu’un certain nombre de faits théoriques me font rendre compte de la confusion de ma perception, et à ce moment-là, je suis contraint et non pas libre de suspendre mon jugement. Il y a donc bien un fait de la suspension du jugement, qui n’est pas du tout de ma part une preuve de domination à l’égard de la chose, une preuve d’activité, mais qui est simplement un redoublement de passivité ; non seulement ma perception est confuse, mais je suis conscient du fait qu’elle est confuse, ce qui n’est pas en soi une clarté ou une distinction. » (pp. 171-172)

On voit donc qu’au point de vue de la vérité, la suspension du jugement est un pis-aller : nous ne disons pas le faux, certes, mais c’est, d’une part, parce que nous y sommes contraints et, d’autre part, parce que nous sommes incapables de dire le vrai.
Mais, d’un autre côté, au plan affectif, nous pouvons quand même espérer que, comme pour les Sceptiques grecs, en suspendant notre assentiment « la tranquillité s’ensuivra comme l’ombre suit le corps ».


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