Sarkosy,ou le triomphe des passions tristes

Ce qui touche de façon indissociable à différents domaines de la philosophie spinozienne comme des comparaisons avec d'autres auteurs, ou à des informations d'ordre purement historiques ou biographiques.
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did
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Sarkosy,ou le triomphe des passions tristes

Messagepar did » 14 mai 2007, 11:26

Bonjour à tous,

Si je me suis inscrite sur ce forum,c'est pour avoir une explication simple sur une phrase,tirée d'un article que l'on m'a fait parvenir par courrier électonique.

Comme je ne connais aucun prof. de philo., je m'adresse à vous ,spécialistes.

Je n'ai aucunes références historiques et culturelles a propos de ce philosophe, a part une petite fiche que j'ai lu sur le net et j'ai parcouru le forum rapidement.

voici donc la phrase:

La tristesse c'est l'affect en tant qu'il enveloppe la diminution de la puissance d'agir.

le paragraphe:

Spinoza n'aurait pas voté Sarkozy

Nicolas Sarkozy a usé de la méthode la plus efficace qui soit pour accéder au pouvoir (et pour l'exercer ensuite). Il a joué sur nos "passions tristes" : "Inspirer des passions tristes est nécessaire à l'exercice du pouvoir", enseignait Gilles Deleuze dans un cours sur Spinoza prononcé à Vincennes le 24 janvier 1978. "Et Spinoza dit, dans le Traité théologico-politique, que c'est cela le lien profond entre le despote et le prêtre, ils ont besoin de la tristesse de leurs sujets. Là, vous comprenez bien qu'il ne prend pas tristesse dans un sens vague, il prend tristesse au sens rigoureux qu'il a su lui donner : la tristesse c'est l'affect en tant qu'il enveloppe la diminution de la puissance d'agir".

l'article:
http://www.agoravox.fr/article.php3?id_article=24164

J'espère que c'est un bon sujet de réflexion

Je vous remercie d'avance

Enegoid
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Messagepar Enegoid » 15 mai 2007, 19:14

La désignation d’un pouvoir quelconque est forcément liée aux passions tristes. La nécessité du pouvoir et des lois (cad de la contrainte) est due au fait que la plupart des hommes ne se conduisent pas suivant la raison. Voir le TTP : « nulle société ne peut subsister sans un pouvoir de commandement et une force… ». Il faut faire attention : le problème est exactement le même avec Ségolène qu’avec Sarkozy. C’est l’existence même du pouvoir qui est visée, non pas le nom de son occupant.

Je trouve aussi qu’il faut faire attention au fait suivant : tout le monde n’était pas triste à l’annonce des résultats. Beaucoup étaient joyeux. Si le résultat avait été différent, d’autres auraient été joyeux et d’autres tristes.

(NB Je n’ai pas voté pour Sarkozy).

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Messagepar Pej » 25 mai 2007, 09:34

C'est toujours avec jubilation qu'on relit Spinoza. La plupart du temps, on a l'impression qu'il a écrit hier. Preuve en est ce passage du Traité politique (chapitre VII, § 14) :
"La loyauté des conseillers a souvent causé leur perte et, s'ils veulent se garder eux-mêmes, ce n'est pas fidèles, mais rusés qu'ils doivent être."

passage qui renvoie ironiquement aux paroles de notre nouveau président :

"La fidélité c'est pour les sentiments, la compétence, c'est pour le gouvernement."

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Messagepar sescho » 03 juin 2007, 16:30

Je ne résiste pas à un petit exercice : comme j'ai un exemple similaire sous les yeux régulièrement, j'aimerais faire une description rapide du profil psychologique correspondant (sous réserve que l'analyse soit juste, évidemment) :

- L'homme se voit comme César : veni, vidi, vici, ceci sur tout sujet ; l'entrepreneur poly-compétent universel qui ne connaît pas l'échec, celui donc qui réussit tout ce qu'il entreprend, le "winner."

- Comme il pense surclasser tout le monde pourvu qu'il s'en mêle, il n'a donc pas de réticence à se mêler péremptoirement de tout (y compris là où il ne vaut pas le centième d'un stagiaire lambda.) Ceci ne l'empêche pas de parler avec hauteur de "délégation..."

- Hyperactif, il se voit rompant les conformismes multiples par son volontarisme, et tout délai ne peut être pour lui que frein à vaincre. Il n'a aucun respect au fond pour les us, coutumes et conventions, mais fait ce qu'il faut en apparence (ce qui se voit) pour s'y conformer, car il est "professionnel." Mais il les méprise et les contourne dès que possible. Il n'hésite pas à l'occasion à se trouver en marge de la loi. Commando-parachutiste. Rambo !

- Les autres ne sont que des forces d'appoint. Se piquant comme tous les égocentriques (qui en sont par conséquents les plus ignorants) d'être plus clairvoyant en matière de Psychologie que les autres, y compris sur eux-mêmes, il agit toujours dans le sens de la critique et de la manipulation, jamais par la sincérité propre à ceux que conduit la raison, sauf en de très rares cas. Il est donc donneur d'ordres et de leçons, mais très mauvais meneur d'hommes au-delà de cela.

- Dans les trois conditions d'une action positive : Vouloir-Pouvoir-Savoir, le "Vouloir" est hypertrophié. "A coeur vaillant rien d'impossible", "impossible n'est pas français", "qui ne tente rien n'a rien," etc. D'autres appellent cela "prendre ses désirs pour des réalités." Le Vouloir fortement mâtiné d'arrivisme permet d'acquérir le Pouvoir, mais le parent pauvre de la trilogie restera cependant le "Savoir", autrement dit la Connaissance. L'orgueil est la pire des passion, qui marque la plus grande impuissance, dit Spinoza, la puissance étant essentiellement la Connaissance. Tout se tient bien là.

- Il ne voit pas la différence entre "vitesse" et "précipitation." Tout temps passé, ou presque, est temps de perdu. Le généralissime des légions rejoint le conducteur de mule. Sont leitmotiv est "hue !"

- S'il a l'intelligence de s'associer avec des gens compétents et réfléchis, il approche-là son plus grand potentiel. Toutefois si sa propension à toujours faire "vite" et "neuf" se heurte aux faits, il en vient à s'exciter comme une guêpe contre une vitre (vitre qui est sa propre constitution malade - et les faits eux-mêmes -, qu'il ne voit évidemment pas.) Comme il n'arrive pas à se mettre véritablement en cause (il le croît, mais ce n'est en fait que sur des éléments de surface) il commence à accuser ses collaborateurs - pour lesquels il n'avait au fond aucun respect, car il ne "reconnaît" que ceux qui produisent, où donnent l'apparence de produire, selon ses désirs - d'incompétence, change fréquemment l'organisation - qu'il est le premier à ne pas respecter -, dégoûte les travailleurs compétents en laissant en vivre les arrivistes, etc.

- L'anéantissement de son ego serait pour lui la mort totale. Mais il aime vivre avec quelques dangers et ne manque pas d'imagination pour trouver des confirmations de sa haute valeur et des opportunités. Qui donc sait où et comment il finira (mais n'est-il pas déjà "fini" et ce depuis longtemps par sa configuration... ?)
Connais-toi toi-même.

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D2ro
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Sarko et l'usage politique de la peur

Messagepar D2ro » 05 juin 2007, 17:53

Spinoza distingue, dans l'action politique, deux principes différents: l'usage de la crainte, et celui de l'espoir. Tous deux sont des passions, donc des impuissances, et en ce qu'ils permettent au souverain de s'approprier la puissance des concitoyens, ils font parti du dispositif antidémocratique. Cependant, quoique crainte et espoir soient tout deux des passions, témoignant d'une puissance d'agir diminuée ou aliénée, ils n'en sont pas pour autant équivalant: la crainte est un sentiment qui se caractérise uniquement par la tristesse, il est entièrement inhibiteur, l'espoir au contraire est une passion joyeuse (ce n'est pas antinomique); s'il n'apporte aucune augmentation de puissance, il permet, dans une certaine mesure, de continuer d'exister.
Or, si l'on observe les mécanismes des discours de Ségolène Royal et de Nicolas Sarkozy, si le premier use énormément de l'espoir (du type "on va organiser une vraie démocratie" "je crois au cercle vertueux de la croissance", etc, etc...), le deuxième se caractérise principalement par la division du peuple, la haine et la peur: "la France va mal", "les fainéants d'assistés qui se lèvent tard le matin / le prolo honnête qui travaille plus pour faire plus de croissance aux actionnaires de sa boïte" "le déclin de la France issu de l'idéologie 68arde dans l'hyper concurrence mondiale" "le déclin de la France et de ses valeurs", etc, etc". Le discours du parti socialiste n'est pas moin démagogique que celui de l'Ump; cependant, là ou ce dernier utilise principalement les passions tristes, le discours du P.S utilise préférentiellement les passions joyeuses (hormis peut être dans la diabolisation de Sarko)
A bon entendeur...


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