Teilhard et Spinoza

Ce qui touche de façon indissociable à différents domaines de la philosophie spinozienne comme des comparaisons avec d'autres auteurs, ou à des informations d'ordre purement historiques ou biographiques.
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Teilhard et Spinoza

Messagepar Korto » 17 sept. 2007, 16:20

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Messagepar Korto » 21 sept. 2007, 15:28

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Messagepar Faun » 22 sept. 2007, 08:36

KORTO a écrit :- Ai-je tort de sentir parfois certains messages de ce site comme des paragraphes d'un cathéchisme.


La philosophie de Spinoza vise à établir ou à rétablir quelque chose comme une véritable religion, une religion vraie. Or les notions communes de l'Ethique, toutes les propositions, sont des vérités éternelles, et par suite il n'est pas étonnant qu'elles apparaissent comme des lois ou des dogmes pour tous ceux qui les perçoivent sans en comprendre la démonstration, qui seule permet d'atteindre à la certitude.

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Re: Teilhard et Spinoza

Messagepar Henrique » 22 sept. 2007, 18:42

KORTO a écrit :Bonjour !
Je m'interroge sur les possibles convergences de Teilhard de Chardin et de Spinoza. Je connaissais assez bien le premier naguère et il m'a sans doute un peu aidé à vivre : immanence, présence nécessaire de l'esprit dans la pierre et la matière dès les premières phases de complexification, reconnaissance et acceptation du tout...
Mais, sans doute à la différence de Spinoza, vision d'une convergence, d'une "montée".
Voilà. C'est assez mal formulé, mais je serais très heureux de trouver des spinozistes suffisamment connaisseurs de Teilhard pour m'éclairer.
Et bravo pour ce site que j'ai découvert hier !


Bonjour K.
Je connais encore moins Teilhard qu'Heidegger (cf. ce post) mais il y a bien un hylozoïsme à mon sens chez Spinoza ("tous les individus de la nature sont animés à des degrés divers" E2P13S) et un panpsychisme (E2P9 : à tout corps correspond une idée dans l'attribut pensant de Dieu, constitutif de la représentation de soi) et comme chez Teilhard, d'après ce que j'ai trouvé sur Wikipédia, il n'y a que des différences de degré dans la puissance de pensée d'une pierre, d'une huître, d'un chimpanzé, d'un homme "ignorant", d'un kantien, d'un spinoziste ;-), cf. "les passions des animaux que nous appelons privés de raison (car nous ne pouvons, connaissant l'origine de l'âme, refuser aux bêtes le sentiment) doivent différer des passions des hommes autant que leur nature diffère de la nature humaine" (E3P57S).

Comme tu sembles l'avoir bien vu, il y aurait une divergence importante en ce qui concerne l'idée d'un plan divin dont l'évolution physique et mentale serait la réalisation. Il ne saurait y avoir de plan à réaliser pour Dieu puisqu'il est absolument infini et parfait : seul un être fini et incomplet a besoin de s'étendre au moyen d'un plan. En Dieu, tout est déjà de toute éternité pleinement réalisé, pleinement conscient, unifié et déployé il n'y a pas de temporalité, de non encore réalisé. Ce qui du point de vue d'une conscience limitée à l'existence d'un corps singulier et à une connaissance essentiellement imaginative de ce corps apparaît comme passé ou possible est toujours ou déjà réel. Ainsi les premières molécules qui s'assemblent pour former un corps monocellulaire sont toujours en train de le faire, sub specie aeternitatis ; le soleil qui explose et anéantit toute vie sur terre, si ce n'est déjà arrivé entre temps à maintes occasions, c'est déjà arrivé sub specie aeternitatis.

Quant à chercher à comprendre le phénomène évolutif, au lieu de supposer un pôle d'attraction à venir pour comprendre comment des corps "simples" peuvent s'unir et s'organiser de façon de plus en plus complexe, une approche spinoziste partirait du conatus présent en chaque corps naturel comme principe de complexification. Ces individus ne devraient pas ainsi viser une fin très complexe pour se complexifier mais seulement se développer plus ou moins selon que les conditions qui leur conviennent le mieux seraient présentes ou pas : l'approche de Diderot dans le Rêve de d'Alembert serait à revoir ici.

Quant aux autres questions qui ne concernent pas vraiment Teilhard, j'y répondrai avec désinvolture, de même qu'elles ont été posées :

1- Spinoza n'est-il pas aujourd'hui le meilleur questionneur de la chose philosophique ?

Il l'était déjà avant aujourd'hui ! Enfin je crois, étant donné que je ne suis pas sûr de comprendre que c'est qu'être "questionneur de la chose philosophique".

2- Les farouches contempteurs de N.Sarkozy de ce site sont-ils des spinozystes de l'acceptation ?

Acceptation de quoi ? Des dîners au Fouquets et autres retraites sur yacht de milliardaire pour bien faire comprendre, à qui veut bien comprendre, de qui on est désormais le représentant ? Du torpillage systématique des conquêtes sociales qui avaient permis à ce pays d'être pendant un temps un havre de paix et de libertés civiles ? De l'alignement sur la politique internationale de l'administration Bush ?

Acceptation de l'éternel sophisme du droit du plus fort ou acceptation de l'idée selon laquelle l'Etat doit servir en fait et pas seulement en paroles à la liberté de tous et non de quelques privilégiés ?

Pour soigner une maladie, par exemple, il faut commencer par l'accepter, condition sine qua non pour pouvoir la comprendre et ainsi agir sur ses causes. Ne point railler, ne point s'affliger, mais comprendre.

Si ma vigne ne donne plus de beaux raisins comme les années précédentes, je n'ai pas besoin d'un excité qui vient me dire en agitant ses petits bras musclés, "je ne veux plus de ça, ah je sais bien qu'il y a les partisans du statu quo qui vous diront qu'il ne faut rien faire, mais moi je vais résoudre votre problème : vous allez arroser votre vigne 3 fois par jour !" Non, j'ai besoin de quelqu'un qui sache déjà qu'une vigne n'a pas besoin de trop d'eau et qui se donner les moyens de chercher posément la cause du problème avant de proposer une solution.

3- Les professeurs de philosophie de ce site ne risquent-ils pas d'être emportés par la vague syndicale des "ouvriers de la philosophie" (et encore ?) ?

Je ne sais pas, moi je suis plutôt un paysan de la philosophie, d'origine bretonne qui plus est !

- Spinoza est-il le philosophe franc-maçon, le philosophe de la franc-maçonnerie ?

On a bien fait de Dalida post-mortem l'icône des gays , pourquoi Spinoza ne serait-il pas celle des Francs-macs ?

- Ma professeure de philosophie qui adorait tant Freud et Spinoza à Vernon s'appelait-elle Sophie par hasard ?

Sophie, si tu nous entends...

- Spinoza est-il vraiment plus triste que Nietzsche ?

Qui a dit ça ? Il faudrait déjà montrer que l'un et l'autres sont tristes. Pour ma part, entre la sobriété pince sans rire d'un Spinoza et le lyrisme mélancolique d'un Nietzsche, le choix est fait.

- Ai-je tort de sentir parfois certains messages de ce site comme des paragraphes d'un cathéchisme.

Un catéchisme est à la base une instruction par demandes et réponses relativement brèves. N'importe quelle FAQ est un catéchisme. Par nature, un tel mode d'exposition du savoir ne peut être trop approfondi et ainsi justifié. Après, soit on en reste au catéchisme et cela relève du dogmatisme religieux où on ne peut pas parler de questions qui ne sont pas dans le catéchisme, soit on peut très bien approfondir les questions. Qu'y a-t-il de remarquable à cela ? Sur ce site, toutes les formes d'exposition des connaissances sont acceptées.

- Spinoza est-il de gauche ?

Etre de gauche, c'est privilégier l'universel sur le particulier - et ainsi le collectif sur l'individuel, la démocratie comme élaboration collective du droit sur le culte du chef ou homme providentiel, la justice sur l'efficacité économique, c'est vouloir la liberté pour tous et non pour quelques uns - les autres n'ayant que la liberté d'être exploités ou de tenter d'exploiter leurs semblables etc. Ainsi l'universalisme cartésien donnera-t-il naissance aux idées qui présideront à la Révolution Française, tandis que le particularisme des empiristes anglais donnera avec Locke, Hume et son disciple Adam Smith naissance au socle idéologique de la droite d'aujourd'hui, le libéralisme.
Spinoza écrit un certain nombre de choses signalées ici entre autres qui démontrent son universalisme tant sur le plan gnoséologique que politique.
Spinoza est donc de gauche.

- Teilhard, qui considérait que la nature et son infini brassage de forces convergentes vers omega, éventuellement contrarié par la liberté humaine, est-il con ou spinoziste ?
Probablement ni l'un ni l'autre. Bergsonnien peut-être.

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Messagepar Korto » 23 sept. 2007, 13:15

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Messagepar Korto » 23 sept. 2007, 14:52

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Messagepar Henrique » 29 sept. 2007, 18:53

KORTO a écrit : Merci beaucoup pour cette longue réponse à mon double message constitué d'une question sur la possible parenté Spinoza-Teilhard et d'une dizaine de questions sur Spinoza, le spinozisme et les spinozistes, un peu "désinvoltes" certes mais sincères.

Je n'en doute pas.

Je vous réponds pour le reste sur "Comprendre le Sarkozysme", histoire de mettre un peu d'ordre dans les posts.



Je reviens maintenant sur la parenté possible entre Spinoza et le jésuite Teilhard de Chardin, que l'on hésite souvent à ranger parmi les philosophes, et dont j'aimerais traduire la terminologie et les concepts en "langue" philosophique classique, peut-être spinozienne.

On peut effectivement dire sans trop s'aventurer que ces deux penseurs partagent un grand nombre de vues : sur la nature, sur Dieu-nature, sur l'hylozoïsme, sur le corps et l'esprit, sur la nécessité du mal. Remarquablement intelligents, lucides, créatifs, libres "amateurs" philosophes et rebelles par rapport à leurs institutions et à leur temps.
La pierre d'achoppement est évidemment "le mouvement du monde" qui ne semble pas perçu de la même façon par Spinoza et Teilhard.


Ce qui donne effectivement à penser que Teilhard a su être philosophe avant d'être jésuite, c'est sa capacité à admettre que comprendre le réel impliquait la possibilité de remettre en cause certains dogmes religieux sans nécessité philosophique, notamment l'idée que l'esprit humain n'est pas une donnée transcendante à son devenir biologique. S'il y a cependant une conception finaliste du mouvement du monde, on est en droit de supposer qu'il ne s'est pas pour autant totalement libéré de son cadre théologico-politique, mais ne connaissant pas ses raisonnements, je vous laisse préciser cela.

Le conatus spinozien, la volonté de persévérer dans son existence et d'affirmer sa puissance en résistance aux autres individus qui composent la vie n'est-elle pas une donnée universelle, présente dans tous les éléments du cosmos, de l'homme à l'animal, de l'arbre au virus, de la pierre à la galaxie ? Et ce conatus général et collectif, depuis des millions d'années, n'entraîne-t-il pas le cosmos vers des transformations incessantes ? Sans décréter hâtivement que ces évolutions "co-conatives" sont "une" évolution, une progression, un progrès, on peut constater objectivement une complexification constante de la matière. On peut observer également, sur le chemin de cette complexification incessante et une évolution non seulement quantitative (un accroissement régulier d'énergie, de l'algue au cerveau du primate par exemple) mais encore qualitative : il y a des "sautes" et des phénomènes de seuil au cours de "l'échauffement" de la matière, d'abord l'apparition de la vie, puis celle de la conscience.


La complexification de la matière organique peut se comprendre comme un phénomène relevant à la fois de mécanismes physico-chimiques et du conatus , sans que cela ne suppose une intelligence transcendant ces phénomènes et opérant à travers eux.
Quant à la notion de saut qualitatif, ne relève-t-elle pas d'une perception grossière des phénomènes à l'oeuvre ? L'eau passe de l'état liquide à un état gazeux à un certain degré de chaleur, mais ce que nous considérons comme deux qualités différentes, le liquide ou le gazeux, n'empêche pas que l'eau conserve la même structure : l'ébullition conduit à une dilatation du corps liquide, qui correspond à notre échelle à certaines propriétés utilisables dans la cuisine ou les centrales nucléaires, et donc nous fait supposer des différences qualitatives...

Je ne pense pas que Spinoza aurait nié ces constats. Ensuite ça se complique. Teilhard pensait que les seuils suivants de cette complexification de la nature était le phénomène christique du début de notre ère, puis, à venir, "l'arrivée au Christ" (plutôt qu'un retour du christ), convergence et rassemblement de tout et tous au point omega du cône évolutif, à l'issue d'une montée et d'une concentration parfaite de l'esprit (de la connaissance spinozienne ?). Une montée conique et en spirale. Theilhard ajoutant que la réussite finale de cette génèse n'était en rien nécessaire, fatale, assurée.


Je ne sais pas ce que Teilhard appelait "christ" mais on peut émettre des hypothèses sur le devenir humain à partir des conditions présentes, comme Jules Vernes pouvait supposer au XIXème siècle, souvent avec perspicacité, que les techniques allaient beaucoup se développer au siècle suivant. Si on considère que ces évolutions ne sont que des hypothèses élaborées à partir d'un état donné de l'humanité et non des fins voulues par une intelligence transcendant la nature, et donc garanties comme nécessaires par cette intelligence, on ne peut plus parler de finalisme à mon sens. Si Teilhard considère que le développement qu'il suppose pour l'humanité n'est pas incertain, non pas seulement parce qu'il peut humainement se tromper dans ses analyses mais surtout parce qu'aucune intelligence supérieure ne garantit une telle évolution, alors on reste au niveau d'un simple mécanisme complexe.

Plusieurs questions quelques doivent être posées aux deux auteurs à ce stade, qui pourraient sans doute faire converger ces deux esprits et faire converger l'homme. :
- Quel définition, quel contenu donner au "persévérer dans son être" spinozien ? A-t-il un sens, une direction ?


Je me dirige lorsque je peux hésiter entre au moins deux options différentes de mouvement et que je choisis la meilleure : aller à Paris depuis Limoges, c'est éviter de prendre la route de Toulouse. Or persévérer dans l'être est la seule possibilité : le non-être n'est rien et ne peut donc constituer une option, une erreur possible de parcours. Seule l'imagination peut supposer une volonté de néant ; d'un point de vue ontologique, le suicidaire ne fait que vouloir exister autrement, il ne cherche à se détruire que pour détruire sa souffrance, ce qui revient encore à s'efforcer de persévérer dans son être. Aussi je pense que comprendre le contenu du conatus, c'est simplement constater qu'aucun étant ne cesse par lui-même d'être soi : une pierre ne se décompose que sous l'action d'autres forces. Et encore, une décomposition n'est bien sûr pas une néantisation.

- Quel sens donner à "l'agir" de l'accroissement joyeux de la force d'agir spinozien ? Quels actions sont gratifiantes ? Ne sont-ce pas celles qui correspondraient au "conatus général" de la nature ?


Il y a action lorsque je suis, c'est-à-dire en tant que mental, lorsque ce que je pense, suffit à expliquer ce que je fais. Si je philosophe au sens propre du terme, c'est une action au sens où ce geste mental ne dépend que de mon pouvoir de raisonner, plus ou moins grand selon les périodes de ma vie (ce qui fait que je peux être plus ou moins libre). Peu importe ici le geste (qu'on prend à tort pour l'action) : que je sois dans une file d'attente à la poste, en train d'embrasser une personne ou lire l'Ethique, ce qui compte c'est l'état mental de dépendance à l'extérieur ou à soi. Si j'agis en dépendant essentiellement de ce que je suis plutôt que de causes extérieures, je suis forcément joyeux puisque l'état naturel de l'homme est la servitude et qu'alors j'augmente donc forcément ma puissance d'exister.

- Que le Dieu de Teilhard soit totalement immanent, nature en convergence, perfection en génèse ou Centre Universel d'unification conçu comme préexistant et transcendant par rapport à la convergence de la création vers lui, qu'en est-il de sa perfection, du succès de l'entreprise-nature, qu'en est-il de la liberté et de la responsabilité de l'homme ?


Je ne pense pas pouvoir répondre en ce qui concerne Teilhard. D'un point de vue spinoziste parler de la nature comme de l'entreprise d'un Dieu transcendant, qui devrait nécessairement réussir à moins de concevoir Dieu comme un être limité, ne peut guère avoir de sens : si Dieu transcende la nature, il est ipso-facto limité, borné par sa présence et perd de ce fait son essence d'étant absolument infini !

Henrique

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Messagepar hokousai » 30 sept. 2007, 00:48

Cher Henrique

Une definition de la noosphère

Noosphère, aussi du grec noos = psyché (âme, esprit, pensée, conscience) et sphère (corps limité par une surface ronde), c'est un mot qui représente la nappe psychique née de la Noogénèse qui croît et enveloppe notre planète au-dessus de la Biosphère (masse d'êtres vivants qui couvre la surface du globe).
…………………………………………………………………….

Teilhard est fortement impressionné par l’ évolution ( c’est son métier ) et puis c’est l’époque ;
Un autre penseur lecteur de Spinoza ,Bergson , ne peut non plus ne pas être fortement influencé par l’évolution .. L’idée d’un arrêt de l’évolution n’est pas courante et c’est plutôt la perspective teilhardienne qui prévaut de nos jours sans pour cela coïncider avec son optimisme spirituel.

Teilhard ne pense pas l’évolution cesse .
Il dit « Il se peut que, dans ses capacités et sa pénétration individuelles notre cerveau ait atteint ses limites organiques. Mais le mouvement ne s'arrête pas pour autant. De l'Occident à l'Orient, l'Évolution est désormais occupée ailleurs, dans un domaine plus riche et plus complexe, à construire, avec tous les esprits mis ensemble, ---l'Esprit--- au-delà des nations et des races, la prise en bloc, inévitable et déjà en cours, de l'Humanité. »

..................................................

Spinoza n’avait qu’une faible idée de l’évolution .
Spinoza refuse la finalité on le sait mais il aurait sans doute admis l’évolution (la réalité du phénomène ) .
Spinoza aurait sans doute admis qu' il n’y avait pas de raison (de cause finale ) impliquant un arrêt .


Spinoza d’autre part estimait que l’esprit humain peut s affranchir des illusions , atteindre une béatitude intellectuelle , à tout le moins par l’intellect ( amour intellectuel de Dieu )
Peut on voir chez Spinoza comme la montée vers la noosphère (concept teilhardien et non spinoziste ) verticalement dans le temps d’une vie et non horizontalement sur la longue durée ?

Cela fait une différence, ( nonobstant la différence ,que je gomme volontairement , sur le dualisme de Teilhard ..mais je cherche à rapprocher )

Mais il n’est pas dis que Teilhard n’ ai pas aussi pensé à cette montée verticale de l’esprit .

Il dit ceci : Par contre, ce qui importe extrêmement, c'est de savoir comment, dans ce tourbillon, nous orienter et nous comporter spirituellement de telle sorte que l'étreinte totalisante à laquelle nous sommes soumis ait pour conséquence, non point de nous déshumaniser par mécanisation, mais (comme il semble possible) de nous sur-humaniser par intensification de nos puissances de comprendre et d'aimer .

hokousai

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Messagepar Korto » 30 sept. 2007, 09:37

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Messagepar Henrique » 30 sept. 2007, 13:07

Hokousai,
On peut envisager une finalité interne dans tout organisme, étant entendu que "si plusieurs individus concourent à une certaine action de telle façon qu'ils soient tous ensemble la cause d'un même effet, je les considère, sous ce point de vue, comme une seule chose singulière" (E2D7), ce n'est pas une finalité externe, fixée par une intelligence transcendante.

Mais pour poursuivre ce que je disais hier, persévérer dans l'être peut paraître une direction, en l'occurrence opposée à persévérer dans le non-être, mais une véritable opposition ne s'effectue qu'entre réalités positives. En ce sens, chercher la sagesse ou la béatitude, se fixer "un modèle que nous puissions contempler", est la seule façon d'exister quand on a des idées adéquates, de même que chercher exclusivement les honneurs, le plaisir sensuel et les richesses quand on a les idées inadéquates.

En ce sens, le terme d'arrêt que vous avez indiqué est le bon pour distinguer le dynamisme du conatus d'un finalisme des êtres vivants : dans le finalisme, il y a un arrêt fixé dans l'essence même de l'objet, un terme précis à atteindre, ramenant l'être censé atteindre cette fin à un simple moyen au service de cette finalité, ce qui en fait une finalité finie ; dans le dynamisme, il n'y a pas d'arrêt, c'est à la limite une finalité sans fin.

KORTO a écrit :J'en suis là :

Si Dieu est, Dieu, tout puissant, peut aussi ne pas être.


"Pouvoir ne pas exister", dit Spinoza, "c'est évidemment une impuissance" (E1P11D2). On peut trouver cependant une explication claire de cette évidence chez Anselme, Proslogion VII :
Mais comment êtes-vous tout-puissant, si vous ne pouvez pas toutes choses ? Ou comment pouvez-vous toutes choses, si vous ne pouvez souffrir, ni mentir, ni changer la vérité en erreur, ni empêcher que ce qui est fait ne soit fait ? J'essaierai de répondre à cette objection. Quand on veut que Dieu change la vérité en erreur, qu'il empêche que ce qui est fait ne soit fait, on exige de lui une chose absurde et contraire à la raison ; or, Dieu étant la raison suprême, l'absurdité est incompatible avec sa nature, et sa puissance ne doit point se déployer aux dépens de sa sagesse. Demander que Dieu puisse souffrir, qu'il puisse mentir, c'est lui demander, non pas un acte de puissance, mais un témoignage de faiblesse. L'homme peut souffrir et mentir, et en cela il peut ce qui est funeste ou criminel ; et plus il le peut, plus l'adversité et le mal ont d'empire sur lui, moins il en a lui-même contre le mal et l'adversité. Un pareil pouvoir n’est donc au fond qu'impuissance et faiblesse. Quand l'homme souffre et pèche, il ne fait pas acte de puissance, il cède au contraire à une puis-sance étrangère qui le domine.
Ce n'est donc que par un abus de langage que nous exprimons une idée de pouvoir là où nous devrions exprimer une idée de faiblesse. Cet emploi abusif des mots n'est pas rare dans notre langue : souvent pour nous, existence veut dire néant, action veut dire inaction. Par exemple, qu'une personne nie l'existence d'une chose, nous exprimons notre assentiment en ces termes : « La chose est comme vous le dites. » Il serait plus logique, il me semble, d'employer les termes suivants : « La chose n'est pas comme vous la niez. » Nous disons encore : « Il reste assis comme fait son voisin ; » ou bien : « Il se repose comme fait son voisin. » C'est encore abuser des expressions que de parler ainsi ; celui qui reste assis n'est pas dans un état actif, mais dans un état passif ; et celui qui se repose ne fait absolument rien.
De même, quand on dit d'un homme qu'il a le pouvoir de commettre ce qui est un crime, ou d'éprouver un malheur, le mot pouvoir est impropre, et c'est impuissance qu'on devrait dire; car, plus il a ce prétendu pouvoir, plus il est soumis à l'empire du mal et aux coups de l'adversité ; par conséquent plus il se montre faible et sans force. Ainsi, mon Seigneur et Dieu, vous êtes donc véritablement tout-puissant, puisque vous ne pouvez rien par faiblesse et que rien n'a de pouvoir contre vous.


Dire de Dieu qu'il est un étant absolument infini, c'est aussitôt affirmer de lui tout ce qui enveloppe une positivité, aussi bien que nier tout ce qui implique une négativité ; en aucun cas nier le positif ou affirmer le négatif. La puissance, c'est pouvoir être, un point c'est tout. Pouvoir ne pas être revient à ne pas pouvoir être ou (par abus de langage) à pouvoir être : pouvoir ne pas être sage dans certaines circonstances, c'est seulement manquer des moyens qui m'auraient permis de l'être à chaque fois, c'est donc bien une impuissance ; pouvoir ne pas être stupide, ce n'est rien d'autre en vérité que pouvoir être intelligent, donc une puissance qui n'enveloppe pas en tant que telle de négativité. Ainsi Dieu est-il l'être qui en Exode III peut affirmer "je suis ce que je suis" et non "je ne suis pas ce que je suis" ou "je suis ce que je ne suis pas".

Korto a écrit :Donc, Dieu est et n'est pas.


Une telle contradiction dans les termes ne peut en effet que découler d'une prémisse absurde comme celle que vous avez posée. Comme nous l'avons vu, elle repose essentiellement sur une équivoque verbale : en ce sens, on pourrait aussi bien dire avec les sophistes des choses comme "Korto existe comme ami de la vérité, or Korto n'existe pas comme ennemi de la vérité, donc Korto existe et n'existe pas" ou encore "Socrate est un homme, Korto n'est pas Socrate, donc Korto n'est pas un homme"...


Donc, Dieu, deus sive nature, est un infini passage du néant à l'être, un devenir éternel.


Si le devenir est passage du non-être à l'être, puis de l'être au néant, il est clair qu'il n'y a en Dieu aucun devenir puisqu'il est affirmation absolue de l'être. Dieu est éternel : en lui, tout ce qui pour nous "a existé" ou "n'existe pas encore" est toujours ou déjà, de toute éternité. Tant que nous ne nous élevons pas assez attentivement à l'idée de la totalité infinie que constitue Dieu, nous objectivons notre impression de devenir, un peu comme le soleil paraît objectivement tourner autour de la terre pour un observateur terrestre tant qu'il ne s'est pas élevé à la pensée globale du système solaire.


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