Mort de Spinoza

Ce qui touche de façon indissociable à différents domaines de la philosophie spinozienne comme des comparaisons avec d'autres auteurs, ou à des informations d'ordre purement historiques ou biographiques.
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bardamu
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Re: Spinoza = "eco-compatible?"

Messagepar bardamu » 23 nov. 2007, 13:31

KORTO a écrit :(...)
Y'a quand même une odeur d'encens ici, une "bonne parole" spinosiste, une admiration totale et inconditionnelle, une certaine religiosité face à Spinoza sur ce forum et ailleurs qui me gonfle pas mal, j'avoue.

Si tu vas sur un site dédié au bridge tu trouveras que ces gens ont une étrange passion et que ça ressemble parfois à du religieux. Si en plus tu es un joueur de poker et que tu leur dis que le bridge c'est un truc de bouffons embaumés et que d'ailleurs t'y comprends rien à ces calculs à la noix, l'échange sera difficile...
KORTO a écrit : "Immortel", il paraît même, le p'tit Baruch (cf supra).

Eternel plutôt 8-)
KORTO a écrit :(...) Par exemple le "toute chose s'efforce de persévérer dans son être", c'est quand même une grosse connerie ! C'est quoi une chose (res) ? C'est quoi s'efforcer ? C'est quoi persévérer ? C'est quoi "être" ? ÇA VEUT RIEN DIRE !!! Et pourtant c'est le slogan de la maison !

Personnellement, quand je lis un classique et que je pense "ça veut rien dire", je me dis que ça veut dire "je comprends rien" et j'essaie de voir pourquoi c'est un classique, qu'est-ce que ça dit pour que ça ait duré malgré les siècles.

Un peu de physique simple : un corps se caractérise par son mouvement, un corps poursuit son mouvement si aucune rencontre ne l'en détourne.
C'est de la mécanique XVIIe siècle : perséverer dans son être, c'est aller tout droit. L'"inertie" d'un corps, c'est en fait sa force d'être, sa persévérance, et toute chose a cela, sinon rien ne durerait ne serait-ce qu'un instant, aucune chose ne serait.
KORTO a écrit :(...)
Si on n'a pas les yeux chassieux comme d'aucuns, on voit bien autour de nous que les choses ont pas envie de durer, ni les plantes, ni les bêtes. Tout barre, tout pourrit, tout se dissout, tout se désagrège. Et même on dirait que tout a envie de se déliter, qu'il faut que tout se délite, car "si le grain ne meurt...". Faut être sacrément myope pour voir le contraire (lunettes Baruch !).

Change d'échelle, fait varier tes lunettes, passe du microscope au télescope, de la nanoseconde au milliard d'années, "cueille le jour" comme dit l'autre.
Tout se délite pour un dépressif, tout ne cesse de naître pour le béat, explosion printanière d'une "infinité de choses infiniment modifiées". Question de lunettes : tu portes des lunettes noires ou roses ?

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Henrique
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Re: Spinoza = "eco-compatible?"

Messagepar Henrique » 23 nov. 2007, 13:55

ChiaroscurO a écrit :le taoïsme de Lao-Tseu a donné lieu à certains cultes de la nature et qui dit culte, dit obéissance. La philosophie de Spinoza reste une philosophie moderne affirmant la liberté de l'homme par la raison

C est vrai mais je ne crois pas que la pensee spinoziste est reduisible a la seule desobeissance

Bien sûr, car ce qui s'oppose à l'obéissance vis-à-vis d'une volonté extérieure, conçue comme plus forte, ce n'est pas seulement la désobéissance mais l'obéissance à la seule autorité intérieure de la raison, que Spinoza appelle liberté, qu'on peut appeler aussi autonomie. Ainsi, alors que le vulgaire obéit aux lois de l'Etat essentiellement par crainte de la punition ou espoir d'une récompense, l'homme libre peut très bien y obéir aussi mais pour une toute autre motivation : l'amour qu'il a de la raison, qui s'augmente beaucoup plus en nous au contact d'autrui, ce qui suppose des lois organisant la vie commune, que dans la solitude, de sorte que son obéissance demeure au fond obéissance à soi-même. Mais, dans un Etat assurant la sécurité et la liberté de tous, l'homme libre se réserve le droit de critiquer les lois qui seraient contraires à la raison. Et si cet Etat, par l'irrationalité de ses choix, notamment en montant une partie de la population contre une autre, cet Etat en vient à perdre sa puissance à assurer la cohésion de la société, il n'a dès lors plus le Droit de réclamer obéissance, puisque la seule chose qui fonde ce droit est l'établissement de la sécurité et de la liberté pour tous (TP V, §2) .

je pense que la philosophie de Spinoza est d une tres grande honnetete par rapport au reel
Peut etre meme qu il anticipe en quelque sorte la formule de Lavoisier Rien ne se perd rien ne se cree tout se transforme


Il l'anticipe d'autant plus facilement qu'Anaxagore avait déjà formulé ce principe depuis bien longtemps déjà. Et la nécessité a priori de ce principe se comprend à partir de l'incompatibilité absolue de l'être et du non-être : l'idée de création ex-nihilo n'a aucune signification possible pour la raison, car alors, le non-être qui n'est rien pourrait donner lieu à l'existence de quelque chose, ce qui reviendrait à dire que le non-être qui n'est rien est quelque chose ; de même l'idée de destruction absolue suppose que ce qui est pourrait devenir pur néant, ce qui reviendrait à faire de ce qui est, quelque chose qui porte le néant en soi, comme si encore le néant était quelque chose (qui puisse être porté, comme on porte un microbe ou un organe vital.

Un autre exemple lorsqu'il dit que l homme se croit etre un empire dans un empire quand il prend des decisions, il anticipe par la meme l'opposition sterile et dangeureuse que vont connaitre de nombreux domaines comme la sociologie ; opposition entre la nature et la culture dans lequel est encore empetre de nombreux chercheurs


Il est vrai que bien des sciences humaines sont encore marquées par la croyance au principe d'une subjectivité par laquelle l'homme échapperait aux lois universelles de la nature, de sorte de proche en proche, qu'on en vient à croire en une indépendance physique vis-à-vis du reste de la nature. La force de la conception spinoziste de la liberté, par opposition à celle d'un Kant notamment, c'est de concevoir la liberté comme accord avec la totalité de la nature sans que cela signifie soumission aux essences extérieures à l'humanité d'un côté, tout en faisant de l'autre côté l'économie d'une rupture avec le reste de la nature par laquelle nous existons. C'est contre la nature que les idéalistes comme Descartes ou Kant affirment l'identité humaine (mais aussi la nient tant que les hommes n'existent que par la nature) ; c'est avec la nature que le panthéisme spinoziste affirme l'homme, justement puisqu'il en procède totalement.

Amicalement,
Henrique

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...

Messagepar Korto » 24 nov. 2007, 11:28

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Messagepar DGsu » 24 nov. 2007, 12:48

On peut aimer le bridge sans devenir un addict taré !!!

Montrez-nous donc ces "addicts tarés". Ils ne faut pas confondre ces derniers, objets de l'imagination et d'une pathologisation des rapports, avec ceux qui ici tentent de réfléchir, pas seulement à Spinoza d'ailleurs. Votre jugement relève surtout de l'imprécation tristounette... :D
"Ceux qui ne bougent pas ne sentent pas leurs chaînes." Rosa Luxemburg

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Messagepar Korto » 24 nov. 2007, 13:16

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Messagepar DGsu » 24 nov. 2007, 14:00

Tristounette... :D :D :D

"La tristesse résulte habituellement de l'une de ces deux choses: soit lorsqu'un homme ne rencontre pas le succès, soit lorsqu'il en a honte." Sénèque
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Re: Spinoza = "eco-compatible?"

Messagepar bardamu » 24 nov. 2007, 16:25

KORTO a écrit :On peut aimer le bridge sans devenir un addict taré !!!
Pas la peine non plus d'être dépressif pour voir la désagrégation constante du monde.
Pas la peine d'être hyper teilhardien pour voir qu'à travers la "pluie" des atomes la vie "remonte" des trucs !

Je suppose que dans ta conception la vie correspond à un certain niveau d'organisation. Les atomes seraient morts et nous nous serions vivants.
Avec Spinoza, toute la Nature est vivante.
Elle est bien sûr éternelle (existence sans rapport au temps), immortelle (durée infinie, existence avec rapport au temps) et ne connaît ni montée ni descente étant tout ce qui est. De ce point de vue, la moindre particule y a autant sa place que le plus sophistiqué des hommes.
La "désagrégation" du point de vue spatio-temporel est une nécessité de la vie, une infinité de choses infiniment modifiées ne pouvant être simultanément au même lieu au même instant.
Si on s'attache à cette Nature-là, on ne s'attriste guère du passage des choses même si spontanément chacun ressent sa propre limitation, sa propre disparition comme douloureuse.

La chose du monde a laquelle un homme libre pense le moins, c'est la mort, et sa sagesse n'est point la méditation de la mort, mais de la vie.
KORTO a écrit :Mais pourquoi "Bardamu" ?!

Inspiration du moment de l'inscription ?
Mais pourquoi "Zarathoustra" chez Nietzsche ? Cf Ecce Homo.

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Messagepar ChiaroscurO » 25 nov. 2007, 16:02

Voila ce qu a dit bardamu

La chose du monde a laquelle un homme libre pense le moins, c'est la mort, et sa sagesse n'est point la méditation de la mort, mais de la vie

Citation avec laquelle je ne suis pas du tout d accord...Je dirais meme le contraire ou comme COELHO "La conscience de la mort fait que l'on devient généralement attetif à la vie"

Voila qui m amene sur une question que j adresse aux nombreux laiques de ce forum Quelles est la conception laique ou meme spinoziste que l on peut avoir de la mort???

Une chose m interroge un denie de la mort et du deuil entraine souvent de nombreuses pathologies dans notre monde occidentale (a mon avis...)
Ce denie de la mort s'acomode tres bien avec la societe de consommation technicise et rationnelle
Je repose ici ma question Comment penser rationnellement la mort ???

La mort est tres perturbante et peut etre en particulier pour de nombreux spinozistes car elle renvoit directement à la question du sens et donc des religions

Je reformule encore une fois ma question pour essayer de trouver vos reponses...

Sommes nous condamnés a vivre dans une société laique a vivre avec un denie permanent de la mort???

Si je pose la question c est que bien evidement j ai mon idee la dessus mais je vous laisse comme les anglais tirer les premiers...

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Messagepar bardamu » 25 nov. 2007, 16:54

ChiaroscurO a écrit :(...)
Voila qui m amene sur une question que j adresse aux nombreux laiques de ce forum Quelles est la conception laique ou meme spinoziste que l on peut avoir de la mort???

La continuation de la vie de la Nature par d'autre moyen que soi-même ?
Je crois qu'en général ceux qui pensent à la mort pensent surtout à leur mort, se refusent à être ce qu'ils sont, des êtres finis plutôt qu'infini.
Perséverer dans son effort de vie individuelle est une condition pour que l'on dure, mais passer son temps à regretter d'être ce que l'on est (mortel) est sans doute un bon moyen de se gacher la vie.
Ne pas penser à la mort chez Spinoza, ce n'est pas son déni, c'est au contraire son acceptation sereine, c'est éviter de courir après les chimères de l'immortalité, de l'éternelle jeunesse etc.

Au demeurant, j'ai toujours senti dans les conceptions naïves de l'Au-Delà un déni de la mort personnelle. S'imaginer se retrouver en bienheureux dans l'Ile aux Enfants, c'est refuser de réellement mourir et cela peut même avoir pour effet secondaire de pousser à l'Apocalypse, à l'auto-destruction.

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Messagepar Faun » 25 nov. 2007, 19:17

Si le philosophe, ou l'homme libre, ne pense pas à la mort, c'est parce qu'elle n'est plus un problème pour lui. Sachant qu'il est éternel, la dissociation de son corps et de la partie éternelle de son esprit ne lui cause aucun état d'âme, aucune émotion triste, et n'entraîne chez lui aucune crainte ni aucun espoir, puisqu'il sait qu'il est une partie éternellement vivante d'un univers éternel, d'un Dieu qui est la Vie.


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