Spinoza et la philosophie analytique

Ce qui touche de façon indissociable à différents domaines de la philosophie spinozienne comme des comparaisons avec d'autres auteurs, ou à des informations d'ordre purement historiques ou biographiques.
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mlefevre
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Messagepar mlefevre » 06 juin 2009, 20:20

pensez-vous me parler du sens sans une THEORIE du sens ?

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Messagepar alcore » 06 juin 2009, 20:37

mlefevre a écrit :pensez-vous me parler du sens sans une THEORIE du sens ?


Je ne vois pas à quoi votre question fait référence.

Toutefois, je dirais que si vous prenez le mot "parler" en un sens vague et général, il est clair que, par exemple les poetes, peuvent parler de la NAture sans faire la théorie de la nature, et que de même il est possible de parler du sens sans en faire la théorie.
D'une façon générale il n'est guère possible de faire la théorie de quoi que ce soit sans avoir préalablement une idée, ne serait ce que vague, de la chose dont on parle.

Si vous prenez le mot "parler" au sens fort de: parler en un sens scientifique, avec pour objectif la vérité, alors je dirais qu'il n'est guere possible parler du sens sans faire la théorie du sens.

Toutefois, il me semble encore possible de parler (au sens 2) du sens avoir à faire la théorie du sens, dans le cas où l'accès à la vérité de ce qui est dit se fait poétiquement, cad de telle sorte que le sens de ce que l'on dit ne précède pas mais procède d'un acte. Dans ce cas, l'acte d'élocution, sans préalable théorique, ni d'ailleurs empirique, donc créateur peut porter au jour une vérité de ce qu'il dit indépendamment de ce que le grammairien pourrait en dire après coup, dans une sorte de discours réitératif, second.

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Messagepar mlefevre » 06 juin 2009, 21:43

j'ai conscience (mauvaise) qu'on monopolise l'espace du forum.
Cela nous emmène très loin, excessivement loin.
Je vois mal comment ne pas entrer ici dans des considérations qui possèdent des ramifications quasi-infinies et dont ,sans doute, parce que l'on est probablement toujours plus con qu'on ne l'imagine, je finirai par trahir la grande exigence de construction. Il y a aussi cette lâcheté qui me détourne de toute tâche difficile. La théorie du sens me fait irrémédiablement défaut, je n'en ressens pas l'urgence. je tiens pour improbable qu'on en fasse un jour une théorie au titre de quelque chose de scientifique. Je vais finir donc.
En tout premier, je n'ai semble-t-il nullement défendu le positivisme logique, il me paraît que je vous suggérais plutôt d'aller regarder du côté de l'argument du langage privé, dans la suite de la thèse de l'inexprimabilité du contenu, quelque chose comme l'articulation de la critique wittgensteinienne de l'aperception pure et de l'aperception empirique.
En second, je me demande par quelle(s) raison(s) perspicace(s) vous parvenez à tenir ces révélations du discours poétique pour non-contingentes.
J'ai sincèrement apprécié vos aptitudes de débatteur.

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Messagepar alcore » 06 juin 2009, 21:58

MErci.

Parler du sens est très délicat puisqu'à mes yeux, le sens est toujours la variable d'une interprétation. Il n'y a pas de sens préalablement à ou indépendamment d'une interprétation qui produit le sens dont ensuite il peut y avoir, derechef, interprétation. L'interprétation s'exerce toujours sur le fond d'une interprétation préalable, et l'on serait pris dans une régression infinie si n'étaient les essences par delà les signes.
Constituer une théorie scientifique du sens qui ferait l'économie des essences risque de conduire au scpeticisme décidé d'un Wittgenstein.

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Messagepar hokousai » 06 juin 2009, 23:29

à Alcore

excusez- moi mais j' assume ce que je dis

Je vous rappelle que pour Spinoza la substance est indivisible, il n 'y a donc pas de multiples au niveau de la compréhension de la substance donc pas de question de l'origine du multiple à ce niveau là ..

or c'est à ce niveau là que vous placez l' ensemble vide .

Le niveau du multiple est celui des modes"" nous concevons l' existence des modes comme entièrement différentes de de celle de là substance"" .
ce en quoi nous avons tort
Il faut concevoir les modes ( qui ne sont pas des êtres de raison ) comme nous concevons la substance

( la lettre 12 explique cela )

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Messagepar hokousai » 06 juin 2009, 23:36

à mlefevre

j'ai conscience (mauvaise) qu'on monopolise l'espace du forum.


humm ...... Hokousai comme Alcore aimeraient parfois qu' il y en ait quelques autres à venir se mêler de la conversation .

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Messagepar alcore » 06 juin 2009, 23:47

hokousai a écrit :à Alcore

excusez- moi mais j' assume ce que je dis

Je vous rappelle que pour Spinoza la substance est indivisible, il n 'y a donc pas de multiples au niveau de la compréhension de la substance donc pas de question de l'origine du multiple à ce niveau là ..

or c'est à ce niveau là que vous placez l' ensemble vide .



Non, ce serait plutôt au niveau des modes.

Mais, par ailleurs, la question de savoir si la substance supporte la mort et le néant est une question que Spinoza pose dans le CT, c'est la question de la possibilité de la mort.

Son raisonnement est le suivant: si la substance est cause de tout, et si la substance est éternelle, alors comment peut elle être cause IMMANENTE de modes qui périssent, bref du fait même de la mort ?
Ou bien Dieu est impuissant et la mort est la marque de cette impuissance; il ne peut pas tout, son essence enveloppe un néant qui se manifeste tôt ou tard dans la mort;
ou bien, Dieu est cause immédiate de notre mort, auquel cas, il veut notre mort, ce qui n'est compréhensible que dans une théologie créationniste qui fait surgir et reposer le monde sur le néant et par conséquent peut faire apparaître, en dernier ressort, la vérité du fini qui est le néant;
ou bien Dieu la mort est un effet de la causalité extérieure; on met alors l'accent sur la différence des effets immédiatement produits par Dieu et ceux qui ne sont produits que médiatement;mais ce n'est pas résoudre la difficulté puisque cette causalité est elle aussi immanente, la preuve c'est qu'un mode, l'entendement humain, est lui aussi éternel en tant que fini. Si la puissance de Dieu pénètre jusqu au tréfonds du mode fini, on voit mal comment Dieu ne serait pas la cause de la mort. CT,2eme dial, 10,11
Il apparaît donc que le seul moyen de conjurer le néant de la mort, c'est de nier la mort: à vrai dire personne ne meurt vraiment, la mort n'est qu'une apparence. Telle est la réponse spinoziste.

Un Hegel irait plus loin et placerait le néant dans la substance et montrerait comment la substance elle même en vient à mourir elle même.

Pour ma part, je me contente de faire du vide, la fonction "sujet" sans référence à la substance.

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Messagepar mlefevre » 06 juin 2009, 23:54

Quand même ceci que l'inconvénient avec votre dernière intervention me semble résider dans son innocuité. "Interprétation" peut librement occuper la place d'"idée" dans ce problème classique énoncé par Quine (the problem of meaning in linguistics)
"confusion of meaning with reference has encouraged a tendency to take the notion of meaning for granted. It is felt that the meaning of the world "man" is as tangible as our neighbor and that the meaning of the phrase "evening star" is as clear as the star in the sky. And it is felt that to question or repudiate the notion of meaning is to suppose a world in wich there is just language and nothing for language to refer to. Actually, we can aknowledge a worldful of objects and let our singular and general terms refer to those objects in their several ways to our hearts' content, without ever taking up the topic of meaning.
an object referred to, named by a singular term, or denoted by a general term can be anything under the sun. Meanings, however, purport to be entities of a special sort : the meaning of an expression is the idea expressed. There is considerable agreement among modern linguists that the idea of an idea, the idea of the mental counterpart of linguistic form, is worse than worthless for linguistic science. I think the behaviorists are right in holding that talk of ideas is bad business even for psychology. The evil of the idea is that its use, like the appeal in Molière to a virtus dormitiva, engenders an illusion of having explained something. And the illusion is increased by the fact that things wind up in a vague enough state to insure a certain stability, or freedom from another progress.

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Messagepar alcore » 07 juin 2009, 00:00

hokousai a écrit :
Je vous rappelle que pour Spinoza la substance est indivisible, il n 'y a donc pas de multiples au niveau de la compréhension de la substance donc pas de question de l'origine du multiple à ce niveau là ..

)


Vous semblez confondre multiplicité et divisibilité.
Cette question renvoie également à une discussion du CT.
Spinoza tente de répondre à l'objection selon laquelle concevoir Dieu comme un Tout reviendrait fatalement à le diviser. Pourquoi ? Parce que la notion de tout présuppose celle de parties et lui est postérieur; votre objection est de la même veine: il n'y a pas de multiplicité en Dieu sinonil serait divisible !

La réponse de Spinoza est la suivante: il faut distinguer deux concepts de tout.
Le concept de tout au sens de collection suppose une multiplicité de parties extérieures les unes aux autres et le tout est le résultat de ces parties et n'existe qu'en elles, par elles, à partir d'elles. Dans ce cas, il est impossible que Dieu, substance, soit un tout puisqu'il serait constitué de modes.

Mais le concept de tout peut être pris autrement, à partir du concept de cause. Dieu est tout en tant qu'il est cause. Cela veut dire que l'acte efficient se décompose en 3 (logiquement):
a) production des conditions générales de toute production, cad les lois de la nature, cad l'univers
b) production des conditions particulières de production de tel mode
c) production de tel selon des rapports extérieurs

Dans la mesure où une chose singulière ne peut exister et être produite à titre de parties qu'à la condition d'être produite selon une loi, et que cette loi c'est l"univers tout entier, il est clair que toute chose singulière ne peut être unu effet, sans être immédiatement une partie, et ne peut être une partie d'un tout "extérieur" (l'univers selon notre poiint de vue, cad un ensemble de choses distinctes) qu'en étant également un effet (et nous ignorons le détail de ses causes)

Bref, Dieu est donc un Tout en tant qu'il est une Cause qui déploie son efficacité selon un premier multiple qui est celui des Attributs; ensuite chaque attribut affirme son efficacité selon un deuxième multiple qui est le tout des choses singulières, l'univers, loi de production des choses; enfin, l'univers à son tour se singularise en une multiplicité de lois; et c'est seulement en bout de chaîne que les modes diversifient ces lois et introduisent la divisibilité au niveau du fini.

Multiplicité d'attributs sans division
Multiplicité de modes infinis (mouvement, repos, loi)
multiplicité de lois

Je ne vois en tout ceci rien qui ressemble à une division en PARTIES.
Une pensée est une partie de l'entendement inifni, mais une loi n'est pas une partie d'une autre, et un attribut n'est pas une partie de la substance.

Tout ensemble infini enveloppe une infinité de multiples sans division de parties, ce que dit trs bien la let 12.

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Messagepar alcore » 07 juin 2009, 00:12

mlefevre a écrit :Quand même ceci que l'inconvénient avec votre dernière intervention me semble résider dans son innocuité. "Interprétation" peut librement occuper la place d'"idée" dans ce problème classique énoncé par Quine (the problem of meaning in linguistics)
.


Je ne crois pas devoir accepter de ramener le sens de 'idée" à celui de "interprétation"; mais ce sont des questions difficiles.

Je veux simplement dire que ce que nous prenons pour un donné, à savoir les significations, que nous soumettons ensuite à un travail d'interprétation, ne surgissent que dans et par une interprétation, fût elle "littéral", comme le suggère Spinoza dans le TTP;
la nécessité où nous sommes de n'avoir accès aux significations que par une interprétation (qui peut bien être passive ou reçue) n'implique pas que nous soyons condamnés à ne jouer qu'avec des interprétations dont aucune ne serait vraie.
La difficulté est de cerner et définir comment une interprétation peut être vraie et, quoi qu'en dise Quine, je ne vois pas comment il peut s'en sortir sans la notion d'idée, qui est tout sauf redondante.


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