Penser sur Internet.

Informations et questions sur le fonctionnement du site.
Avatar du membre
Durtal
participe avec force d'âme et générosité
participe avec force d'âme et générosité
Messages : 527
Enregistré le : 17 oct. 2006, 00:00

Messagepar Durtal » 16 juin 2009, 22:42

Non moi je suis pas d'accord...Korto était (dans le fond) stupide.

Mais cela n'engage que moi et bien sur cela va bientôt être effacé par bardamu.... Qu'importe!

(c'est vrai j'ai dit quelque chose de méchant)

D.

Avatar du membre
hokousai
participe avec force d'âme et générosité
participe avec force d'âme et générosité
Messages : 4105
Enregistré le : 04 nov. 2003, 00:00
Localisation : Hauts de Seine sud

Messagepar hokousai » 16 juin 2009, 23:58

à Bardamu

Bonjour Hokousai,
c'était de l''humour"...


bon d'accord , excusez moi .

amicalement
hokousai

Avatar du membre
hokousai
participe avec force d'âme et générosité
participe avec force d'âme et générosité
Messages : 4105
Enregistré le : 04 nov. 2003, 00:00
Localisation : Hauts de Seine sud

Messagepar hokousai » 17 juin 2009, 00:27

à
à Phiphilo


il y a peu à dire là vous dites abondamment .

Or ces deux difficultés (ne plus croire en t+n ce que je croyais en t ; admettre l'irruption de l'autre en moi-même) seraient dissolvantes pour mon identité personnelle si elles n'étaient dépassées, justement dans une forme d'identité qui englobe et assume cette opposition dialectique. C'est cette forme d'identité que Paul Ricoeur appelle "l'identité narrative" :


En quoi:

1) savoir reconnaitre ses erreurs
2) l'aptitude à changer d'idées
3)savoir reconnaitre la pertinence des idées d'autrui lesquelles induisent un changement d'idée chez moi même
Serait-il dissolvant ?

Mais dissolvant pour qui ? pour quoi ?

Ces trois attitudes (comportementales) ne sont- elles pas au contraire constructives /positives .


Mais enfin !! une fois certaines idées adoptées contre d'autres délaissées vais -je constamment ressasser les erreurs d'autrefois ?
Certainement pas .
Après tout si les manières anciennes de penser ne sont plus les miennes, je n'y pense plus .Faculté d oubli .

Vous nous faites comme une illustration de la culpabilité permanente .
Ricoeur était protestant , pas moi .
Et vous même ?


Ainsi que le dit Spinoza on ne jugera pas des choses par les noms mais les noms par les choses .

Je dois vous avouer que je ne me nomme pas moi même , je n'ai pas de nom .
Les autres me nomment et j 'ai dix noms , différents selon les contextes .
C'est sans importance profonde .
Ce n'est véritablement pas ça qui est important pour moi .

Vous focalisez sur .... disons de l'accessoire .
Et vous soutenez sur ce peu qu'on on ne peut faire de philosophie sur internet .

hks

Avatar du membre
Louisa
participe avec force d'âme et générosité
participe avec force d'âme et générosité
Messages : 1725
Enregistré le : 09 mai 2005, 00:00

Messagepar Louisa » 17 juin 2009, 07:33

Phiphilo a écrit :Bon. Reprenons une dernière fois. On ne peut pas faire de la philosophie sans conscience de soi. Platon et Hegel l'ont abondamment montré. Spinoza conclut même l'Ethique en soulignant que la conscience de soi, celle de Dieu et celle des choses, c'est tout un :

Citation:
Ex quibus apparet, quantum Sapiens polleat, potiorque sit ignaro, qui solâ libidine agitur. Ignarus enim, praeterquam quod à causis externis, multis modis agitatur, nec unquam verâ animi acquiescentiâ potitur, vivit praeterea sui, et Dei, et rerum quasi inscius, et simulac pati desinit, simul etiam esse desinit. Cùm contrà sapiens, quatenus ut talis consideratur, vix animo movetur ; sed sui, et Dei, et rerum aeternâ quâdam necessitate conscius, nunquam esse desinit ; sed semper verâ animi acquiescentiâ potitur. Si jam via, quam ad haec ducere ostendi, perardua videatur, inveniri tamen potest. Et sanè arduum debet esse, quod adeò rarò reperitur. Quî enim posset fieri, si salus in promptu esset, et sine magno labore reperiri posset, ut ab omnibus ferè negligeretur ? Sed omnia praeclara tam difficilia, quàm rara sunt. (V, 42, schol)

Autant dire que cette condition de conscience de soi est, au moins nécessaire, peut-être même nécessaire et suffisante, pour philosopher.


Bonjour Philippe,

merci de ces précisions. Je suis tout à fait d'accord pour dire que pour pouvoir philosopher, il faut une conscience de soi. Notre problème se trouve ailleurs: pourquoi utiliser un pseudo diminuerait-il nécessairement la conscience de soi?

Lorsque j'écris ici sous le nom de "Louisa", sans mentionner un nom de famille (donc en entravant, justement, consciemment, la possibilité de découvrir mon identité "objective" ou plutôt "civile"), est-ce que du même coup j'oublierais qui je suis? Est-ce que je n'aurais pas conscience du fait qu'ici, moi j'écris en utilisant le nom "Louisa"? Pourquoi supposer que l'usage d'un pseudo aurait nécessairement un effet sur la conscience de soi? C'est là que je reste un peu sur ma faim. D'autant plus que les rares philosophes qui se sont prononcés à ce sujet semblent dire exactement l'inverse. Car Hegel, Platon et Spinoza parlent certes de la nécessité d'une certaine conscience de soi, mais non pas de l'influence potentielle de l'usage d'un pseudo sur cette conscience. Ceux qui en parlent, en revanche, ne semblent pas partager votre opinion. Prenons par exemple Deleuze et Guattari, qui dans Mille Plateaux écrivent ceci:

Deleuze et Guattari a écrit :Nous avons écrit l'Anti-Oedipe à deux. Comme chacun de nous était plusieurs, ça faisait déjà beaucoup de monde. (...) Nous avons distribué d'habiles pseudonymes, pour rendre méconnaissable. (...) Pour rendre imperceptible, non pas nous-mêmes, mais ce qui nous fait agir, éprouver ou penser. (...) Non pas en arriver au point où l'on ne dit plus je, mais au point où ça n'a plus aucune importance de dire ou de ne pas dire je. Nous ne sommes plus nous-mêmes. (...) Nous avons été aidés, aspirés, multipliés.


Voici donc un exemple d'un philosophe pour qui effacer son identité subjective est précisément ce qu'il faut pour pouvoir philosopher. Et en effet, la véritable vérité n'est-elle pas totalement objective, c'est-à-dire indépendante du "sujet" qui l'exprime? Si oui, on comprend pourquoi, surtout en philosophie, l'usage d'un pseudo peut favoriser la recherche de la vérité: cela permet davantage de ne plus penser qu'en fonction de la vérité, et de mettre de côté tout ce qui a trait à la "Gloire" personnelle.

Phiphilo a écrit :Or, il est manifeste que nombre de ceux qui prétendent se livrer à l'activité philosophique ne satisfont pas cette condition. Soit parce qu'ils n'ont pas vraiment choisi de s'y livrer (c'est le cas parfois, hélas, des lycéens des classes terminales), soit parce qu'ils l'ont choisi mais en sous-estimant la difficulté qu'il y a à s'assumer comme personne.


si je vous ai bien compris, vous prétendez ici que suivre des cours de philosophie obligatoires a déjà en tant que tel comme effet de diminuer la conscience de soi ... ? Si c'est ce que vous pensez: pourquoi serait-ce le cas?

Et pourquoi faudrait-il "s'assumer comme personne" lorsqu'on philosophe? Ne pourrait-on pas dire qu'il s'agit bien plutôt de l'inverse: d'accepter que l'on ne peut philosopher qu'en admettant que l'on soit toujours "multiple", c'est-à-dire le résultat de multiples influences, et que cette multiplicité n'est jamais fixée une fois pour toutes, mais évolue constamment, qu'on le veuille ou non? Ainsi tout nouvel argument que l'on lit est à chaque fois une nouvelle influence qui nous transforme, qui nous rend plus multiple encore, qui par conséquent nous enrichit?

Phiphilo a écrit :En effet, faire de la philosophie, ce n'est pas, comme le croient certains, participer à une conversation de salon : un sujet, un verbe, un compliment.


je sais bien que le "camp" de Bouveresse présuppose que ces "certains" existent. Mais moi, j'aimerais bien les rencontrer un jour. Par conséquent, qu'est-ce qui vous fait penser qu'il y aurait des gens qui pensent que philosopher ce n'est que former des phrases grammaticalement correctes .. ??

Phiphilo a écrit : Il ne s'agit pas, d'"échanger" des arguments, mais de prendre un risque : celui de la contradiction. La contradiction minimale étant celle qui consiste à partir de la doxa, du sens commun dont chacun d'entre nous est porteur, nolens volens pour prendre conscience qu'il y a quelque chose qui ne va pas là-dedans :

Citation:
Un problème philosophique est toujours de la forme ‘je ne m’y reconnais pas’. (Wittgenstein, Recherches Philosophiques, §123)

D'où, première difficulté : pour faire de la philosophie, il faut admettre au minimum que l'opinion dont on est le représentant à l'instant t entre en contradiction avec l'analyse de l'opinion à l'instant t+n Mais, deuxième difficulté, une telle prise de conscience tiendrait du miracle si elle n'était pas provoquée par une deuxième contradiction, plus fondamentale encore : si ce que je crois à l'instant t est indiscutablement mien, ce à quoi j'adhère à l'instant t+n n'est pas encore mien. Car c'est autrui, sa conversation, sa lecture, son étude, qui m'a fourni l'occasion et la possibilité de ce changement de point de vue. La deuxième difficulté consiste donc à considérer autrui comme un autre soi-même, pour parler comme Aristote, plus précisément, à considérer que c'est autrui, en tant que différent de moi-même, qui va me fournir les outils conceptuels qui vont attaquer la doxa dont je suis porteur.


non je ne crois pas. Je crois que la vérité est objective. Elle introduit une position "tierce", qui est ni le moi, ni le tu (ou l'autre). C'est pourquoi Spinoza peut dire que l'essence de l'homme, c'est son désir de vérité. Dans le spinozisme, on désire la vérité "par essence". Cela veut dire que l'on a compris en quoi la vérité est salutaire dans la mesure même où sa puissance de pensée le permet. Autrement dit: tout le monde désire le vrai, seulement, on le désire avec plus d'ardeur si sa puissance de penser est plus grande.

Cela ne veut pas dire que ce que vous dites ici n'est pas vrai. Cela signifie seulement que le spinozisme propose de penser le problème autrement. Au lieu de se dire qu'un tel ne veut pas se mettre en question personnellement, il faut maintenant dire qu'il n'a pas une puissance de penser (donc un degré de puissance ou une essence) suffisamment grande pour pouvoir découvrir à tel ou tel sujet qu'il se trompe.

Dans ce cas il faut réagir différemment aussi. Il ne faut pas essayer de lui montrer sa faiblesse, sa "lâcheté" de ne pas se confronter à lui-même ou à autrui, il faut d'abord renforcer sa puissance de penser, afin qu'il puisse voir la vérité dans un argument objectif, vérité qui n'a rien à voir avec la personne réelle qui propose cet argument (raison pour laquelle l'usage d'un pseudo est intéressant, puisqu'il permet de créer une distance entre une idée (vraie) et celui qui la propose).

Phiphilo a écrit :Or ces deux difficultés (ne plus croire en t+n ce que je croyais en t ; admettre l'irruption de l'autre en moi-même) seraient dissolvantes pour mon identité personnelle si elles n'étaient dépassées, justement dans une forme d'identité qui englobe et assume cette opposition dialectique. C'est cette forme d'identité que Paul Ricoeur appelle "l'identité narrative" :

Citation:
Le pas décisif en direction d'une conception narrative de l'identité personnelle est fait lorsque l'on passe de l'action au personnage. Est personnage celui qui fait l'action dans le récit. [...] Le récit construit l'identité du personnage, qu'on peut appeler son identité narrative, en construisant celle de l'histoire racontée. C'est l'identité de l'histoire qui fait l'identité du personnage. (Ricoeur, Soi-même comme un Autre, vi, souligné par moi)

Ce que veut dire Ricoeur, influencé en cela par la conception arendtienne de l'identité de celui qui agit, c'est que la pluralité des actes, la diversité des états mentaux n'est pas nécessairement la preuve, comme le pensait Hume, d'une 'absence d'identité personnelle :

Citation:
Lorsque je pénètre le plus intimement dans ce que j’appelle moi-même, je tombe toujours sur une perception parti­culière […] ; je ne parviens jamais, à aucun moment, à me saisir ‘moi-même’ sans une perception [...], nous ne sommes qu’un faisceau ou une collection de perceptions différentes qui se succèdent avec une rapidité inconcevable et sont dans un flux et un mouvement perpétuel. (Hume, Traité de la Nature Humaine, I, iv, 6)

Ce qui va unifier le divers des expériences et des actes, le transcendantal, pour parler comme Kant, cela va être le récit que l'on va ffaire de moi-même. En ce sens, mon identité personnelle n'est, au fond, que l'histoire dont je suis le personnage central.


en effet! Mais à mon avis ceci montre pourquoi écrire sur un forum, sous un pseudo ou non, fait entièrement partie de la construction du "moi" réel: il est impossible de ne pas intégrer les actes qu'on y pose réellement dans l'histoire dont je suis le personnage principal, puisque c'est bien moi qui écris en utilisant tel ou tel pseudo. Cela, je ne peux pas l'oublier, je ne peux que le savoir, je ne peux qu'en être conscient. Autrement dit, si c'est "l'identité de l'histoire qui fait l'identité du personnage", on comprend aisément pourquoi écrire réellementsur un forum, sous pseudo ou non, ne peut que faire partie de son histoire personnelle, et donc s'intégrer à l'identité du personnage, non?

Phiphilo a écrit :Sauf que le personnage, dans toute histoire, dans tout récit, possède un nom propre qui est, en quelque sorte, le raccourci de l'histoire (d'où la tendance, dans les récits, qu'ils soient biographiques ou fictifs, à l'éponymie du personnage au titre) :

Citation:
La continuation de la même existence préserve l’identité de l’individu sous l’identité de nom. (Locke, Essai Philoso­phique concernant l’Entendement Humain, II, xxvii, 29)

Ce que dit Locke, qui, contrairement à Hume, développe une conception nominaliste quoique non sceptique de l'identité personnelle, c'est : "pour tout x, si x est dit être la même personne, alors x=A", A étant appelé le nom propre de x. Notons que si x n'était pas une personne, nous aurions aussi besoin d'un nom propre pour l'identifier en dépit de ses éventuelles modifications d'aspect. Mais la différence entre le nom propre "la Tour Eiffel" et le nom propre "Paul Ricoeur", c'est que ce dernier, en ce qu'il est le raccourci de l'histoire d'un personnage, va permettre à ce personnage de prendre conscience de soi en se racontant sa propre histoire. Donc, la converse de la conception lockienne sus-mentionnée est : "s'il existe un x tel que x=A, que x=A', et que A est différent de A', alors x ne peut pas être dit la même personne". Intuitivement, cela se comprend aisément : si x est identifié par deux noms différents, c'est qu'on trace de x deux schémas narratifs différents. C'est même exactement pour cela qu'il est parfois utile de changer de nom lorsqu'on entend se dépouiller d'une histoire dont on ne veut plus. A fortiori lorsque c'est x lui-même qui décide de changer de nom (on appelle cette opération "prendre un pseudonyme"), qu'il s'en rende compte ou non, c'est qu'il entend changer le récit de soi-même.


désolée, mais je ne vois toujours pas vraiment pourquoi ceci serait vrai. Lorsque j'écris ici sous le nom de "Louisa", je n'entends absolument pas changer le récit de moi-même. Je veux juste éviter que l'on réduise ce que je dis à mon histoire subjective, puisque ce que je cherche, c'est la vérité objective, donc je veux qu'on me dit en quoi on croit, objectivement, que je me trompe en disant ceci ou cela, et cela en donnant des arguments objectifs, c'est-à-dire indépendants de mon histoire personnelle.

Phiphilo a écrit :L'opération de prise de pseudonyme n'est, en soi, nullement condamnable, ni même problématique. Si Boris Vian n'était pas devenu Vernon Sullivan, si Louis Ferdinand Auguste Destouches n'était pas devenu Céline, si Romain Gary n'était pas devenu Emile Ajar, la perte en eût été inestimable pour notre patrimoine littéraire. De même, lorsque quelqu'un décide, de son propre chef, de changer d'identité après une conversion religieuse ou après un mariage, le changement de nom comme symbole d'un changement de vie n'a rien de particulièrement choquant. Le problème surgit lorsqu'il s'agit de faire de la philosophie : comment celui qui a (mettons) deux noms propres (un "aléthonyme" A et un pseudonyme A') peut-il d'une part modifier sa croyance, d'autre part accepter l'irruption de l'autre en lui-même, procédures dont on a dit supra qu'elles constituent le fond même de la démarche philosophique ?


il le peut précisément parce qu'il sait qu'en général, dès qu'il utilise un pseudo, ce qu'on lui répond ne peut pas avoir trait à sa personnalité subjective, donc doit quelque part dépasser l'aspect purement subjectif, pour prétendre à la vérité objective.

Phiphilo a écrit :Car, dans ce cas là, rien n'empêche d'attribuer la pensée en t à A et la pensée en t+n à A'. Exemple : je pense, en t, que l'inégalité parmi les hommes est naturelle ; puis, en t+n, la lecture de Rousseau m'a convaincu qu'il n'en était rien. Sauf que c'est mon second moi (nommé A') qui est convaincu par Rousseau, tandis que mon premier moi (nommé A) continue à croire que (et à me comporter comme si) l'inégalité est naturelle.


d'un point de vue spinoziste, cette situation est absurde donc irréelle. Comme Spinoza le dit au début de l'E5, lorsqu'il y a en moi deux affections qui se contredisent, elles vont immédiatement se résoudre dans un genre d'équilibre. On n'a jamais deux "moi" différents, on est toujours une multiplicité dont les multiples aspects sont, le cas échéant, plus ou moins "intégrés". Je ne peux donc pas à la fois penser que Rousseau a raison et qu'il n'a pas raison. Ou bien l'argumentation de Rousseau m'a convaincu, ou bien nom. Je ne vois pas ce que le fait de parler de Rousseau en utilisant un pseudo y changerait?

Phiphilo a écrit : Imaginons qu'un interlocuteur désire me pousser dans mes retranchements et s'assurer que j'assume les conséquences de la thèse de Rousseau à laquelle je prétends adhérer. De deux choses l'une : ou bien je vais abandonner la confrontation que j'estimerai ne plus me concerner (elle concerne A' et pas A, je me réfugie dans ce que Sartre appelle "la mauvaise foi"), ou bien je vais l'assumer dans l'incohérence et l'angoisse la plus totale (j'ai l'impression que mon histoire A' commence à contaminer mon histoire A, ce que je refuse à tout prix). Dans un cas je me répandrai en arguments superficiels. Dans l'autre je serai agressif, et d'autant plus agressif que mon pseudonyme (du grec pseudès qui veut dire "mensonger", ne l'oublions pas) sera plus flatteur en ce qu'il connotera un personnage plus connu et respecté (à cet égard, le choix de "pseudos" tels "Hokusai", "Durtal", "Bardamu" et quelques autres en dit long sur le désir inconscient de certains de s'identifier à des héros). Dans tous les cas, ma pensée sera affectée par cette double identité et ne sera pas disponible pour philosopher.


idem: pourquoi utiliser un pseudo créerait-il une double identité? C'est ce qui constitue l'essentiel de votre thèse, et qu'à mes yeux vous n'argumentez jamais.

Puis pourquoi assumer les conséquences d'une thèse à laquelle on croît provoquerait-il par définition une "angoisse la plus totale" ... ???

Phiphilo a écrit :Ma thèse est, à cet égard, que le pseudonymat, en encourageant la Ichspaltung, la fragmentation du moi, rend impossible, en règle générale, la pratique philosophique. C'est pourquoi il n'y a pas plus de philosophie sur "Spinozaetnous" (et sur les autres forums prétendument "philosophiques", bien entendu) que de beurre en branche !


j'ai toujours le même problème: quels sont vos arguments pour dire qu'utiliser un pseudo implique une Ichspaltung, une double identité?.

Phiphilo a écrit :Certes, il arrive qu'exceptionnellement, ce soit le cas, mais le dialogue ne dure jamais très longtemps, faute d'être assumé par des personnalités cohérentes.


je ne peux que vous dire ceci: je me perçois comme ayant une personnalité plus ou moins cohérente, et écrire sur ce forum en utilisant le nom "Louisa" ou "Nathalie" n'y changera strictement rien ... . Mon identité ne sera plus cohérente lorsqu'un jour j'écris sur ce forum x, et le jour suivant non x, en niant que le jour précédent je croyais x. Mais aussi longtemps que ce que j'écris ici s'intègre dans ma conscience de moi, je ne vois pas en quoi le simple usage d'un pseudo devrait créer une double identité?

Phiphilo a écrit : Et un fragment de dialogue n'est pas un dialogue. La faute ne repose d'ailleurs pas sur les participants, mais sur une techno-structure qui ne sécrète que des relations virtuelles et détermine de la Ichspaltung. Voyez-vous, je suis professeur de philosophie et je n'ai jamais, je dis bien jamais, rencontré chez l'un quelconque de mes élèves ou étudiants (dont certains n'étaient pourtant pas prédestinés à l'exercice de la philosophie) un comportement qui ressemblât, de près ou de loin, aux comportements pathologiques rencontrés sur ce forum. Même avec mes élèves les plus difficiles de classes technologiques, j'ai toujours réussi, tant bien que mal, à les faire lire, à les faire disserter, à les faire dialoguer. Mais je n'y suis pour rien. Tous mes collègues en font autant. Simplement les quatre murs d'une classe et la relation directe maître-élève favorisent la construction d'une identité cohérente et, partant, l'exercice de la pensée. La relation virtuelle via clavier, écran et pseudonyme, non.


oui peut-être. Mais il se peut aussi que vos élèves ont déjà suffisamment de "conscience de soi" pour comprendre qu'ils ont besoin d'une cote positive de votre part à la fin de l'année, et que donc il vaut mieux au moins faire semblant de faire ce que vous voulez qu'ils fassent. Ce genre de rapport de force est totalement absent sur internet. A mon avis, c'est cela qui permet à n'importe qui de commencer à insulter au lieu de penser, il suffit qu'il se sent choqué par les propos de tel ou tel pseudo pour qu'il "contre-attaque". Or, inversement, cela signifie aussi que si l'on s'intéresse à la vérité, l'usage d'un pseudo permettra de se concentrer entièrement sur la vérité d'un argument (et donc sur la mise en question de soi-même), au lieu de se laisser distraire par la personne qui propose tel ou tel argument, ou par les sanctions qui suivront si l'on ne fait pas ce que l'autre désire que l'on fasse.

Bref, si je suis d'accord avec de nombreuses choses abordées ci-dessus, je ne vois toujours pas d'où tirer la nécessité de votre thèse qui dit que le pseudo, en tant que tel, rendrait le débat philosophique (au sens où celui-ci vise la vérité) difficile voire impossible. Pourtant j'ai toujours le sentiment que vous touchez à quelque chose d'important ... mais ce serait quoi alors?
L.

PS: désolée des fautes d'orthographe, je n'ai plus le temps de relire et corriger ce message, je le ferai donc sous peu.

PhiPhilo
persévère dans sa puissance d'être ici
persévère dans sa puissance d'être ici
Messages : 148
Enregistré le : 24 juin 2008, 00:00

Messagepar PhiPhilo » 17 juin 2009, 12:38

Louisa a écrit :D'autant plus que les rares philosophes qui se sont prononcés à ce sujet semblent dire exactement l'inverse. Car Hegel, Platon et Spinoza parlent certes de la nécessité d'une certaine conscience de soi, mais non pas de l'influence potentielle de l'usage d'un pseudo sur cette conscience. Ceux qui en parlent, en revanche, ne semblent pas partager votre opinion.
Mais enfin, ma chère Louisa, le phénomène Internet est tellement récent ! Moi-même (qui ne suis certes pas une référence en la matière), je n'ai commencé à le pratiquer (par nécessité professionnelle, d'ailleurs) qu'en 2005 ! Comment voulez-vous qu'il y ait des recherches philosophiques approfondies concernant les implications du choix d'un pseudonyme sur la possibilité ou non de philosopher sur Internet ! Ce n'est pas sérieux ! J'essaie, pour ma part et très modestement d'ouvrir une voie encore inexplorée à propos d'un phénomène qui me paraît être d'une modernité radicale : je partage les soupçons d'un Philippe Murray ou d'un Alain Finkielkraut s'agissant de la soi-disant inocuité d'une techno-structure, pour parler comme Kenneth Galbraith, comme celle d'Internet. Je considère tout au contraire, influencé en ceci par le criticisme de Heidegger, Arendt, Sartre ou Marcuse à l'égard du progrès technique en général, qu'Internet est un véritable existential. En d'autres termes, je suis de ceux qui craignent que l'Internet ne soit pas qu'un simple moyen d'atteindre des buts préalablement fixés, mais très cerainement une modification très profonde des fondements de l'existence humaine. Alors, dans la mesure où la philosophie commence dans l'étonnement, je me permets de proposer un problème : et si Internet entraînait la disparition de la philosophie ? Question dont la pertinence m'a semblé corroborée par ce qui se passe sur les forums électroniques à prétention philosophique en général, et celui-ci en particulier. A savoir que l'on n'y pratique pas la philosophie mais du bavardage. En effet, dans tous les forums prétendument philosophiques que j'ai fréquenté (et que j'ai quittés avec effarement) depuis quatre ans, j'ai été confronté à des formes de bavardage allant de la conversation de salon à l'anathème en passant par la logorrhée et la logomachie. Et c'est en vertu de ma fonction sociale qui consiste, dans un premier temps, à induire l'apprentissage de la philosophie, et, dans un second temps, à évaluer le degré de maîtrise de cet apprentissage chez leurs destinataires, que j'ai conclu sans l'ombre d'un doute que toutes ces formes de bavardages, non seulement n'ont rien à voir avec la philosophie, mais, plus gravement, lui nuisent insidieusement. C'est à partir de là que je me suis (très récemment, cela date de quelques mois au plus) posé la question de savoir comment analyser philosophiquement (je veux dire, à la lumière de ma propre culture philosophique) cet inquiétant phénomène. Vous connaissez la suite.


Louisa a écrit :Prenons par exemple Deleuze et Guattari, qui dans Mille Plateaux écrivent ceci: [...] Voici donc un exemple d'un philosophe pour qui effacer son identité subjective est précisément ce qu'il faut pour pouvoir philosopher. Et en effet, la véritable vérité n'est-elle pas totalement objective, c'est-à-dire indépendante du "sujet" qui l'exprime? Si oui, on comprend pourquoi, surtout en philosophie, l'usage d'un pseudo peut favoriser la recherche de la vérité: cela permet davantage de ne plus penser qu'en fonction de la vérité, et de mettre de côté tout ce qui a trait à la "Gloire" personnelle.
Mais enfin, Louisa, comment pouvez-vous mettre sur le même plan la pratique choisie et seconde de deux intellectuels connus et reconnus dont l'identité personnelle est, depuis longtemps, solidement établie, avec la pratique induite et primitive d'une tripotée d'adolescents boutonneux à l'identité incertaine et fragile ? Ce n'est pas sérieux ! Et comment pouvez-vous mettre sur le même plan le fait de composer pendant des mois et des mois un tel ouvrage (et quel ouvrage : un manifeste politique de plus de 600 pages !) avec le fait de poster en quelques minutes un misérable message lacunaire, superficiel, ponctuel et mal écrit ? Décidément, non, ce n'est pas sérieux !

Louisa a écrit :Si je vous ai bien compris, vous prétendez ici que suivre des cours de philosophie obligatoires a déjà en tant que tel comme effet de diminuer la conscience de soi ... ? Si c'est ce que vous pensez: pourquoi serait-ce le cas?
Mais non ! Mais non ! Voilà à quoi conduit le présent medium : lecture fragmentaire et superficielle faisant suite à une argumentation elle-même fragmentaire et superficielle ! Ce que je voulais dire, c'est qu'une part non négligeable des élèves de terminale ne remplissent pas, a priori, l'une des conditions de possibilité de l'activité philosophique : être prêt à remettre en question tout ou partie de leurs doxai et donc, être préparé à accepter l'irruption critique de l'autre dans le moi. Mais, dans la mesure où leur contact avec le monde de la philosophie est réel et non virtuel, dans la mesure où ils se trouvent confrontés à un professeur et à d'autres élèves, et non pas à un écran et un clavier, cette condition est, en règle générale, en voie de satisfaction pour la plupart d'entre eux.

Louisa a écrit :Et pourquoi faudrait-il "s'assumer comme personne" lorsqu'on philosophe? Ne pourrait-on pas dire qu'il s'agit bien plutôt de l'inverse: d'accepter que l'on ne peut philosopher qu'en admettant que l'on soit toujours "multiple", c'est-à-dire le résultat de multiples influences, et que cette multiplicité n'est jamais fixée une fois pour toutes, mais évolue constamment, qu'on le veuille ou non? Ainsi tout nouvel argument que l'on lit est à chaque fois une nouvelle influence qui nous transforme, qui nous rend plus multiple encore, qui par conséquent nous enrichit?
Désolé, mais j'ai déjà répondu :
PhiPhilo a écrit :D'où, première difficulté : pour faire de la philosophie, il faut admettre au minimum que l'opinion dont on est le représentant à l'instant t entre en contradiction avec l'analyse de l'opinion à l'instant t+n Mais, deuxième difficulté, une telle prise de conscience tiendrait du miracle si elle n'était pas provoquée par une deuxième contradiction, plus fondamentale encore : si ce que je crois à l'instant t est indiscutablement mien, ce à quoi j'adhère à l'instant t+n n'est pas encore mien. Car c'est autrui, sa conversation, sa lecture, son étude, qui m'a fourni l'occasion et la possibilité de ce changement de point de vue. La deuxième difficulté consiste donc à considérer autrui comme un autre soi-même, pour parler comme Aristote, plus précisément, à considérer que c'est autrui, en tant que différent de moi-même, qui va me fournir les outils conceptuels qui vont attaquer la doxa dont je suis porteur.


Louisa a écrit :Je sais bien que le "camp" de Bouveresse présuppose que ces "certains" existent. Mais moi, j'aimerais bien les rencontrer un jour. Par conséquent, qu'est-ce qui vous fait penser qu'il y aurait des gens qui pensent que philosopher ce n'est que former des phrases grammaticalement correctes .. ??
Ce qui se passe sur ce forum (encore que, s'agissant de la correction grammaticale, il y ait beaucoup à dire). Ou les pratiques dénoncées par Bouveresse, après Sokal et Bricmont.

Louisa a écrit :Je crois que la vérité est objective. Elle introduit une position "tierce", qui est ni le moi, ni le tu (ou l'autre). C'est pourquoi Spinoza peut dire que l'essence de l'homme, c'est son désir de vérité. Dans le spinozisme, on désire la vérité "par essence". Cela veut dire que l'on a compris en quoi la vérité est salutaire dans la mesure même où sa puissance de pensée le permet. Autrement dit: tout le monde désire le vrai, seulement, on le désire avec plus d'ardeur si sa puissance de penser est plus grande. Cela ne veut pas dire que ce que vous dites ici n'est pas vrai. Cela signifie seulement que le spinozisme propose de penser le problème autrement. Au lieu de se dire qu'un tel ne veut pas se mettre en question personnellement, il faut maintenant dire qu'il n'a pas une puissance de penser (donc un degré de puissance ou une essence) suffisamment grande pour pouvoir découvrir à tel ou tel sujet qu'il se trompe.
Non. Pour Spinoza, mens idea corporis et, conversement, corpus objectum mentis. Les "idées" qu'elles soient vraies ou non, ne subsistent pas dans une sorte de topos noètos ou de kosmos noètos comme le pensaient les platoniciens. Les idées sont incarnées. Et, en tant que les idées sont toujours les idées d'un corps, elles sont aussi toujours nécessairement les idées de quelqu'un en tant que ce quelqu'un est considéré sous l'attribut de la res cogitans. Votre distinction entre objectif et subjectif n'est donc pas pertinente.

Louisa a écrit :Dans ce cas il faut réagir différemment aussi. Il ne faut pas essayer de lui montrer sa faiblesse, sa "lâcheté" de ne pas se confronter à lui-même ou à autrui, il faut d'abord renforcer sa puissance de penser, afin qu'il puisse voir la vérité dans un argument objectif, vérité qui n'a rien à voir avec la personne réelle qui propose cet argument (raison pour laquelle l'usage d'un pseudo est intéressant, puisqu'il permet de créer une distance entre une idée (vraie) et celui qui la propose).
Non, ça c'est le Pays de Candy. C'est du manga japonais, ou du soap opera. Mais ce n'est pas de la philosophie ! Le mouvement philosophique est dialectique ou n'est pas :
La lutte de la reconnaissance est à la vie et à la mort ; chacune des deux consciences de soi met en péril la vie de l'autre et accepte pour soi cette condition, mais se met seulement en péril ; en effet, chacune a aussi en vue la conservation de sa vie comme étant l'être-là de sa liberté. La mort de l'une qui résout la contradiction d'un côté par la négation abstraite, grossière par conséquent de l'immédiateté, est ainsi, du côté essentiel, l'être là de la reconnaissance qui y est en même temps mise de côté, une nouvelle contradiction, supérieure à la première. (Hegel, Encyclopédie des Sciences Phi­losophiques, §432)
Voilà pourquoi, précisément, la dualité ou la multiplicité des identités est un obstacle insurmontable au dépassement philosophique de la contradiction qui naît de la remise en question de ses croyances primitives. La philosophie est l'Aufhebung d'une contradiction inhérente à la même personnalité. A contrario, l'Ichspaltung consiste à cliver la personnalité pour résoudre la contradiction sans la dépasser.

Louisa a écrit :Ecrire sur un forum, sous un pseudo ou non, fait entièrement partie de la construction du "moi" réel: il est impossible de ne pas intégrer les actes qu'on y pose réellement dans l'histoire dont je suis le personnage principal, puisque c'est bien moi qui écris en utilisant tel ou tel pseudo. Cela, je ne peux pas l'oublier, je ne peux que le savoir, je ne peux qu'en être conscient. Autrement dit, si c'est "l'identité de l'histoire qui fait l'identité du personnage", on comprend aisément pourquoi écrire réellementsur un forum, sous pseudo ou non, ne peut que faire partie de son histoire personnelle, et donc s'intégrer à l'identité du personnage, non?
Non.
Je me fais triste, c’est-à-dire que je ne suis pas triste [...] c’est la conscience qui s’affecte elle-même de tristesse comme recours magique à une situation trop urgente [...]. L’acte premier de la mauvaise foi est pour fuir ce qu’on en peut pas fuir, pour fuir ce qu’on est. (Sartre, l’Être et le Néant, I, ii, 3)
En termes ricoeuriens, je me raconte l'histoire de ma propre tristesse, mais je ne suis pas réellement triste. En termes sartriens, je joue à être ce que je ne suis pas : "je me la joue" personnage de Huysmans ("Durtal") ou de Céline ("Bardamu"), "je me la pète" peintre célèbre ("Hokusai") ou groupe de hardrock ("Alcore"), etc. Mais, bien entendu, au moment où je me raconte une histoire sur moi-même, au moment où je joue un autre moi que moi-même, j'adhère pleinement à ce que je raconte/joue. D'où le problème en cas de contradiction entre mes diverses personnalités concurrentes :
PhiPhilo a écrit :Le problème surgit lorsqu'il s'agit de faire de la philosophie : comment celui qui a (mettons) deux noms propres (un "aléthonyme" A et un pseudonyme A') peut-il d'une part modifier sa croyance, d'autre part accepter l'irruption de l'autre en lui-même, procédures dont on a dit supra qu'elles constituent le fond même de la démarche philosophique ? Car, dans ce cas là, rien n'empêche d'attribuer la pensée en t à A et la pensée en t+n à A'. Exemple : je pense, en t, que l'inégalité parmi les hommes est naturelle ; puis, en t+n, la lecture de Rousseau m'a convaincu qu'il n'en était rien. Sauf que c'est mon second moi (nommé A') qui est convaincu par Rousseau, tandis que mon premier moi (nommé A) continue à croire que (et à me comporter comme si) l'inégalité est naturelle. Imaginons qu'un interlocuteur désire me pousser dans mes retranchements et s'assurer que j'assume les conséquences de la thèse de Rousseau à laquelle je prétends adhérer. De deux choses l'une : ou bien je vais abandonner la confrontation que j'estimerai ne plus me concerner (elle concerne A' et pas A, je me réfugie dans ce que Sartre appelle "la mauvaise foi"), ou bien je vais l'assumer dans l'incohérence et l'angoisse la plus totale (j'ai l'impression que mon histoire A' commence à contaminer mon histoire A, ce que je refuse à tout prix). Dans un cas je me répandrai en arguments superficiels. Dans l'autre je serai agressif, et d'autant plus agressif que mon pseudonyme (du grec pseudès qui veut dire "mensonger", ne l'oublions pas) sera plus flatteur en ce qu'il connotera un personnage plus connu et respecté (à cet égard, le choix de "pseudos" tels "Hokusai", "Durtal", "Bardamu" et quelques autres en dit long sur le désir inconscient de certains de s'identifier à des héros). Dans tous les cas, ma pensée sera affectée par cette double identité et ne sera pas disponible pour philosopher.



Louisa a écrit :Désolée, mais je ne vois toujours pas vraiment pourquoi ceci serait vrai. Lorsque j'écris ici sous le nom de "Louisa", je n'entends absolument pas changer le récit de moi-même. Je veux juste éviter que l'on réduise ce que je dis à mon histoire subjective
Vous confirmez donc ce que je dis : vous vous créez une deuxième identité ("je veux juste évier que ..."). Vous ouvrez un "nouveau dossier", si je puis me permettre cette analogie !

Louisa a écrit :Il le peut précisément parce qu'il sait qu'en général, dès qu'il utilise un pseudo, ce qu'on lui répond ne peut pas avoir trait à sa personnalité subjective, donc doit quelque part dépasser l'aspect purement subjectif, pour prétendre à la vérité objective.
Encore une fois, je récuse formellement cette opposition subjectivité/objectivité.

Louisa a écrit :D'un point de vue spinoziste, cette situation est absurde donc irréelle. Comme Spinoza le dit au début de l'E5, lorsqu'il y a en moi deux affections qui se contredisent, elles vont immédiatement se résoudre dans un genre d'équilibre. On n'a jamais deux "moi" différents, on est toujours une multiplicité dont les multiples aspects sont, le cas échéant, plus ou moins "intégrés".
Sauf erreur de ma part, Spinoza ne thématise pas le problème de l'identité personnelle.

Louisa a écrit :Pourquoi utiliser un pseudo créerait-il une double identité? C'est ce qui constitue l'essentiel de votre thèse, et qu'à mes yeux vous n'argumentez jamais.
Vous prenez le problème à l'envers : pourquoi diable un être humain prendrait-il un pseudonyme, sinon pour se constituer une double identité ? Le nom propre est le fondement et la garantie de l'identité.

Louisa a écrit :Puis pourquoi assumer les conséquences d'une thèse à laquelle on croît provoquerait-il par définition une "angoisse la plus totale" ... ???
Vous avez une conception un tout petit peu simpliste et mécaniste du fonctionnement du psychisme humain, chère Louisa. Je crois que la lecture de Freud, de Sartre, de Ricoeur et les thèses sur la self-defeating s'imposent.

Louisa a écrit :oui peut-être. Mais il se peut aussi que vos élèves ont déjà suffisamment de "conscience de soi" pour comprendre qu'ils ont besoin d'une cote positive de votre part à la fin de l'année, et que donc il vaut mieux au moins faire semblant de faire ce que vous voulez qu'ils fassent.
Il n'y aucune contradiction (à condition d'avoir une identité personnelle cohérente) :
Vous vou­lez aller à la foi, et vous n'en savez pas le chemin ; vous voulez vous guérir de l'infidélité, et vous en demandez le remède : apprenez des [...] gens qui savent ce chemin que vous voudriez suivre, et guéris d'un mal dont vous voulez guérir. Suivez la manière par où ils ont commencé : c'est en faisant tout comme s'ils croyaient, en prenant de l'eau bénite, en faisant dire des messes, etc. (Pascal, Pensées)


Louisa a écrit :Ce genre de rapport de force est totalement absent sur internet.
Vous confondez "force" et "autorité", chère Louisa :
Puisque l'autorité requiert toujours l'obéissance, on la prend souvent pour une forme de pouvoir ou de violence. Pourtant l'autorité exclut l'usage de moyens extérieurs de coercition : là où la force est employée, l'autorité proprement dite a échoué. [...] L’autorité, c’est la hié­rarchie elle-même dont chacun reconnaît la justesse et la légitimité, et où tous deux ont d’a­vance leur place fixée. Pour cette raison, l’autorité implique une obéissance dans laquelle les hommes gardent leur liberté. (Arendt, la Crise de la Culture, iii)
Ce qui manque à l'Internet, notamment pour pouvoir faire oeuvre éducative, en particulier, pour pouvoir éduquer à la pratique philosophique ce n'est pas la force, c'est l'autorité. La force existe : c'est la force de la conformité sociale, de la paresse intellectuelle, de la tentation familiale, de l'apprentissage de plus en plus précoce de l'informatique, etc. En revanche, ce qui manque, c'est l'autorité d'un ou plusieurs maîtres. Potestas domini auctoritas magistri non est.

Voilà, chère Louisa. Je suis très honoré d'avoir pu débattre avec vous (ainsi que, sur un tout autre sujet, avec Flumigel). Soyez-en, l'un et l'autre, remerciés. En tout cas, je vous encourage à persévérer. Comme disait l'autre, sapere audete !
Modifié en dernier par PhiPhilo le 17 juin 2009, 16:28, modifié 1 fois.

Avatar du membre
hokousai
participe avec force d'âme et générosité
participe avec force d'âme et générosité
Messages : 4105
Enregistré le : 04 nov. 2003, 00:00
Localisation : Hauts de Seine sud

Messagepar hokousai » 17 juin 2009, 15:41

à phiphilo

Vous n'aurez convaincu personne, sinon laissé soupçonner des doutes que vous pouvez avoir sur votre propre identité .

Il y a symptôme là a focaliser sur cet argumentaire à l'évidence non pertinent pour ceux , certes peu nombreux, qui vous ont répondu .
Nous sommes en effet peu nombreux tentés par cette aventure que vous dénigrez .
Jamais vous n'avez été en mesure de sympathiser avec ce qui fait le fond de notre investissement et qui est à mes yeux , ici même, un intérêt réel pour la philosophie de Spinoza .
A quel moment avez -vous laissé paraitre que vous compreniez cela ?
En place de quoi vous dissertez sur une généralité confuse: la prise de pseudo .C'est un phénomène tout à faits secondaire .

Lorsque vous demandez à vos élève de vous appelez"" Monsieur"" et non pas Philippe , encore moins fifi , vous endossez un pseudo de la même manière que je demande ici qu 'on m'appelle hokousai .

Les conventions du lieu ( dont je n'ai pas décidée ) l 'impose .

....................................................


Les convention de la culture japonaise impose à une soeur cadette de ne jamais nommer son frère par le prénom de son frère , lequel sera utilisé en revanche par les parents .

je cite """"""""""Le français comprend un éventail de formes infiniment moins étendu que le japonais : la possibilité d’interchangeabilité des formes linguistiques (vous et tu appelant généralement un vous ou un tu en retour) participe à la limitation du choix allocutoire. En revanche, les indices de la personne du japonais sont plus variés : ils traduisent la réalité socio-affective (lexèmes référant au statut, à la profession, à la position dans la structure familiale, formes de déférence, etc.) et permettent de se situer ou de situer l’autre en fonction de la place de chacun dans la structure familiale, hiérarchique, sociale .

Chantal Claudel Université Paris 8 – Syled-Cediscor (Paris 3)

...........................................................

Mais après tout pourquoi untel usage ( pseudo ) s'est- il imposé comme conventionnel sur internet ?
Votre réponse est de l'ordre de la construction d'une seconde identité .
A mon avis pas du tout: il est de l'ordre de la prudence . ( caute )



S'Il ne s'agit pas, d'"échanger" des arguments, mais de prendre un risque : celui de la contradiction
Et bien là , je vous contredis .Vous avez pris un risque qui à mes yeux n'est pas mortel .
A ce niveau d' innocuité du risque on pourrait aisément en rester à l'échange d'arguments .

On évitera le risque lui bien réel du ridicule de la posture, celle prétendue héroïque du professeur de philosophie exposé, sur son estrade, aux tirs des sarbacanes à boulettes de ses potaches .

hokousai .
Modifié en dernier par hokousai le 17 juin 2009, 19:59, modifié 1 fois.

Avatar du membre
8
a déjà pris quelques habitudes ici
a déjà pris quelques habitudes ici
Messages : 70
Enregistré le : 02 sept. 2007, 00:00
Localisation : paris

Messagepar 8 » 17 juin 2009, 19:15

C'est aussi pour la même prudence que Spinoza avait recommandé le plus strict anonymat pour la publication de l'éthique qui dans sa première édition de 1677 portera simplement ses initiales.
D'un point de vue logique ,Pilphilo, si vous pensez internet impropre a la philosophie considérez-vous vos propres propos ici comme du bavardage .
Et pourquoi ne pas avoir choisi une petite édition ( à compte d'auteur on en trouve sur internet pour pas très cher) pour aller dans le sens de vos idées?

PhiPhilo
persévère dans sa puissance d'être ici
persévère dans sa puissance d'être ici
Messages : 148
Enregistré le : 24 juin 2008, 00:00

Messagepar PhiPhilo » 20 juin 2009, 10:29

Pour tous les Bouvard, tous les Pécuchet qui fréquentent ce site (et Dieu sait qu'ils sont nombreux), cf. http://sites.radiofrance.fr/chaines/france-culture2/emissions/repliques/ pour avoir une idée de ce qu'est un dialogue philosophique. Ecoutez et podcastez et écoutez encore ! Vous finirez peut-être par avoir quelque chose entre les oreilles !

Avatar du membre
hokousai
participe avec force d'âme et générosité
participe avec force d'âme et générosité
Messages : 4105
Enregistré le : 04 nov. 2003, 00:00
Localisation : Hauts de Seine sud

Messagepar hokousai » 20 juin 2009, 22:22

Dans l'autre je serai agressif, et d'autant plus agressif que mon pseudonyme (du grec pseudès qui veut dire "mensonger", ne l'oublions pas) sera plus flatteur en ce qu'il connotera un personnage plus connu et respecté (à cet égard, le choix de "pseudos" tels "Hokusai", "Durtal", "Bardamu" et quelques autres en dit long sur le désir inconscient de certains de s'identifier à des héros)
.

je ne voudrais pas enfoncer le clou , mais à défaut de pseudo( supposé trop valorisant chez les autres )vous avez choisi un avatar ( petite image ) plutôt flatteuse (du moins à vos yeux

Image

Avatar du membre
Durtal
participe avec force d'âme et générosité
participe avec force d'âme et générosité
Messages : 527
Enregistré le : 17 oct. 2006, 00:00

Messagepar Durtal » 21 juin 2009, 12:05

Dans l'autre je serai agressif, et d'autant plus agressif que mon pseudonyme (du grec pseudès qui veut dire "mensonger", ne l'oublions pas) sera plus flatteur en ce qu'il connotera un personnage plus connu et respecté (à cet égard, le choix de "pseudos" tels "Hokusai", "Durtal", "Bardamu" et quelques autres en dit long sur le désir inconscient de certains de s'identifier à des héros)
.

Ah...ah...ah

Bien vu Hokusai....C'est vraiment l'hôpital qui se fout de la charité.

Je note qu'il ne connaît pas "Goldorak" ("Alcor")

et qu'il ne comprend pas que "Durtal" est un personnage de Huysmanns notoirement ridicule.

Bref il a du mal avec ce qu'on appelle l'autodérision.

D.


Retourner vers « Vie et fonctionnement du site »

Qui est en ligne

Utilisateurs parcourant ce forum : Aucun utilisateur enregistré et 4 invités