Être heureux

Questions philosophiques diverses sans rapport direct avec Spinoza. (Note pour les élèves de terminale : on ne fait pas ici vos dissertations).

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nepart
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Être heureux

Messagepar nepart » 11 janv. 2008, 15:46

Bonsoir,

Je me suis inscrit à ce forum il y a 1 mois car je souffrais un peu, après la prise de conscience de l'illusion du libre arbitre, que je confondais alors avec la liberté.

Depuis je vais beaucoup mieux et je voudrais aller plus loin.

En effet, il y a quelques interrogations que j'aimerais réglé et être heureux.

Parmi ces interrogations, il y a:

Doit on essayer de ne plus avoir d'égo pour être heureux (cad, ne pas vouloir être fière, paraitre, vouloir avoir une bonne image, être estimé des autres).

Ne pas vouloir tout savoir. Car j'ai la tendance à tout vouloir savoir, par exemple, pourquoi faire ceci, écouter de la musique, regarder un paysage, me procure du plaisir. Et quand je trouve que ce plaisir n'est pas utile à la survie (exemple, la musique) je me dit que c'est inutile.

Doit on se refuser ou limiter de plaisirs sous prétextes qu'ils sont immoraux.

ex: Dois je prendre du plaisir si j'adore faire quelque chose, alors que je sais que cela cause du tort à quelqu'un, et donc se forcer de ne pas penser à l'autre, ce qui sur un bilan plaisir/douleur semble le mieux.
Ou dois je arrêter ce qui me procure du plaisir à moi et du tort à d'autre.

Ex: Si vous êtiez roi au moyen âge, demanderiez vous à vos consultant de ne jamais vous parler des problèmes du peuple à fin les oublier (je pense que c'est vraiment possible d'oublier), ce qui sur un bilan plaisir/douleur semble le mieux pour vous, car vous n'aurez plus la douleur de connaitre des tristes nouvelles.
Ou préférez vous ne pas se cacher le problème, même si vous risquer d'être moins heureux ainsi.

Techniquement cette question ne se poserais pas étant donné que le bonheur et le but final et que donc on est sensé opter pour la première solution.

Dans le même genre:
Imaginez vous dans le futur, il existe des machines qui peuvent stimuler votre cerveau ou vous créer l'illusion d'un monde presque parfait, et ainssi vous procurer un plaisir immense.
Pour pouvoir en bénéficier, il suffit de travailler jusqu'à 30 ans et vous bénéficier du droit d'utiliser la machine, jusqu'à votre mort naturelle.

Là aussi, si le bonheur serait notre finalité, je devrais trouver ça géniale, mais pourtant j'hésite.
Peut être que cela est du au fait que j'ai tendance à m'imaginer que la personne qui prendra un énorme plaisir n'ai pas vraiment moi.

Voila, merci d'avances pour vos réponses

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Louisa
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Messagepar Louisa » 11 janv. 2008, 22:59

Bonjour Nepart,

tentative de réponse à quelques-unes de tes questions (supposant que tu te demandes ce qu'il faudrait en dire d'un point d'un point de vue spinoziste).

Nepart a écrit :Doit on essayer de ne plus avoir d'égo pour être heureux (cad, ne pas vouloir être fière, paraitre, vouloir avoir une bonne image, être estimé des autres).


pour Spinoza, la "satisfaction de soi-même" est extrêmement importante, on ne peut pas s'en débarrasser. Il faut donc s'en servir. Cela veut dire: apprendre à s'estimer soi-même, au lieu de dépendre des compliments des autres pour avoir une idée positive de soi-même.

D'autre part, être fier de soi-même comme si tout ce qu'on sait faire a été causé par soi-même, c'est se tromper sur notre essence même: jamais nous ne sommes la cause de notre essence, celle-ci est toujours causée par Dieu (c'est-à-dire la Nature). On peut donc être fier de soi-même mais cela seulement en ce sens que l'on peut savoir que tout ce qu'on fait, c'est en réalité grâce à Dieu que nous le faisons.

Pouvoir se penser et se sentir ainsi, c'est ce que Spinoza appelle l'acquiescentia in se ipso, autrement dit "le suprême bonheur", ce que nous pouvons espérer de plus haut. Voir la proposition 52 du 4e livre de l'Ethique (= E4P52) et son scolie.

Pour l'Orgueil comme erreur (et tous les maux qui vont avec): E4P55 à 57. Voir aussi ce qu'il dit sur la flatterie, E4 chapitre XXI.

Nepart a écrit :Ne pas vouloir tout savoir. Car j'ai la tendance à tout vouloir savoir, par exemple, pourquoi faire ceci, écouter de la musique, regarder un paysage, me procure du plaisir. Et quand je trouve que ce plaisir n'est pas utile à la survie (exemple, la musique) je me dit que c'est inutile.


pour Spinoza le savoir, la compréhension, est source de Joie et donc toujours positive.

Pourquoi un plaisir qui n'est pas utile à la survie ne serait-il pas utile à l'homme? Pourquoi réduire l'existence de l'homme à ce qui est seulement nécessaire pour se maintenir en vie? Pour Spinoza, toute chose essaie de persévérer dans son être, et par là, essaie d'augmenter sa puissance, c'est-à-dire son bonheur. Ainsi tout ce qui augmente réellement la qualité de la vie est tout à fait important. La musique en fait entièrement partie. Un tas de choses sont agréables pour les sens et pour l'esprit, et en cela permettent à l'esprit de se reposer, de retrouver des forces, etc. Aussi longtemps qu'on n'en exagère pas l'usage, elles sont donc hautement utile.

Nepart a écrit :
Doit on se refuser ou limiter de plaisirs sous prétextes qu'ils sont immoraux.

ex: Dois je prendre du plaisir si j'adore faire quelque chose, alors que je sais que cela cause du tort à quelqu'un, et donc se forcer de ne pas penser à l'autre, ce qui sur un bilan plaisir/douleur semble le mieux.
Ou dois je arrêter ce qui me procure du plaisir à moi et du tort à d'autre.


on doit certes se refuser ce type de plaisirs, mais non pas sous le prétexte qu'ils soient immoraux. Le problème est plutôt que quand on prend plaisir à quelque chose dont on sait que cela cause du tort à quelqu'un, alors on ne se conduit pas selon les "règles de la raison", qui stipulent que la charité et la générosité, donc le fait de faire du bien aux autres, est ce à quoi aspire toute personne qui a bien compris que l'homme a tout intérêt à se lier d'amitié à un maximum d'autres personnes. Pour la Générosité: voir l'E3P59 scolie.

S'abstenir de tels actes n'est donc pas une question de "morale" (obéir à une norme) mais une véritable question de COMPREHENSION: on peut comprendre en quoi ce type de plaisirs en réalité sont à éviter (compréhension qui d'ailleurs, comme toute compréhension, donne de la Joie).

Nepart a écrit :Ex: Si vous êtiez roi au moyen âge, demanderiez vous à vos consultant de ne jamais vous parler des problèmes du peuple à fin les oublier (je pense que c'est vraiment possible d'oublier), ce qui sur un bilan plaisir/douleur semble le mieux pour vous, car vous n'aurez plus la douleur de connaitre des tristes nouvelles.
Ou préférez vous ne pas se cacher le problème, même si vous risquer d'être moins heureux ainsi.


une fois que l'on définit le bonheur par la connaissance, éviter à connaître le monde parce qu'on risque d'y rencontrer quelques problèmes n'est plus justifié. Au contraire: plus nous comprenons les choses singulières, plus nous comprenons Dieu, dit Spinoza (E5P24). Et comprendre Dieu est la source de la "béatitude", du suprême bonheur que peut atteindre l'homme.

Seulement, il faut bien apprendre à comprendre la misère du monde d'une façon précise: d'une part en comprenant les causes de cette misère, en comprenant en quoi toutes ses souffrances étaient inévitables, et d'autre part en essayant d'y remédier maximalement soi-même (par la charité et la générosité). Ce n'est qu'en comprenant ainsi le monde que la compréhension peut nous renforcer, nous rendre plus puissant et plus heureux.
Un roi a d'ailleurs le rôle de garantir la sécurité du peuple, comme l'explique le Traité Politique. Ce qui sera assez difficile s'il préfère ne pas réfléchir à l'état de son Etat ... .

Nepart a écrit :Dans le même genre:
Imaginez vous dans le futur, il existe des machines qui peuvent stimuler votre cerveau ou vous créer l'illusion d'un monde presque parfait, et ainssi vous procurer un plaisir immense.
Pour pouvoir en bénéficier, il suffit de travailler jusqu'à 30 ans et vous bénéficier du droit d'utiliser la machine, jusqu'à votre mort naturelle.

Là aussi, si le bonheur serait notre finalité, je devrais trouver ça géniale, mais pourtant j'hésite.


tout dépendrait de ce que sait faire cette machine. Car pour Spinoza, il existe un tas de "Joies passives", qui ne nous aident en rien à atteindre le bonheur.

Ce bonheur exige que nous nous efforçons à connaître un MAXIMUM de choses dans le monde. Pour cela, il faut posséder une capacité d'être affecté par le monde (et de l'affecter) qui est la plus grande possible (E4P38). Si donc grâce à cette machine davantage de choses dans le monde peuvent nous affecter, si l'on peut en comprendre davantage que ce qui serait le cas sans elle, et si ... grâce à elle nous pouvons nous-même affecter davantage le monde (donc y intervenir, de façon concrète), alors oui, je crois que l'on pourrait dire que cette machine pourrait réellement augmenter notre bonheur. Mais ce ne sera pas très facile d'en trouver une qui rassemble toutes ces capacités ... :) .
Porte-toi bien,
louisa

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Messagepar nepart » 12 janv. 2008, 00:15

Merci pour ta réponse.

J'aimerais tout d'abord, expliquer l'origine de ce sujet.
Je suis en terminale, je commence la philo et je prends conscience que dieu( dans le sens des religions), l'âme immatériel, et donc le libre arbitre n'existe pas.

Au début c'était dur, mais la ça va mieux.
Le soucis reste que quand même, je ne vois pas comment devenir heureux depuis que j'ai une image totalement matériel de mon corps.


Quand je prends du plaisir, je m'imagine des molécules qui se libèrent dans ma tête, et je me dis pourquoi je prends du plaisir, quelle est la finalité de tout ça, et j'en viens très vite à l'origine du plaisir, des choses agréables...
Je n'arrive pas à me contenter d'apprécier le morceau de musique, je me demande "Pourquoi est ce que je trouve ce morceau agréable?", quelle est la finalité de cela.

Le plaisir de manger je le comprends mieux, c'est pour la survie, mais la musique, rencontré des gens, vouloir savoir des choses.

La réponse que m'a apporté louisa ne m'a pas vraiment éclairé :/ , car on pourrait se dire, en quoi écouter de la musique améliorerait la qualité de vie.
Je pense que mon problème est lié au fait que je cherche une finalité dans la vie.



Pour l'égo, je vais prendre un exemple pour mieux illustré ma pensée.

Comparer son bonheur, ou sa chance par rapport à d'autre. J'ai la conviction que c'est néfaste pour son propre bonheur.
De même vouloir bien paraitre devant des inconnus me semble inutile.
Etre fier de soi, cela aussi n'a aucune raison d'être, car nous sommes déterminés et que comme tu l'explique c'est la nature qui cause tout, nous y compris bien sur.
Le seul avantage que je vois et que ce comparé à d'autre peut être stimulant pour des examens par exemple.

Pour les plaisirs qui cause du tort à d'autres, je me pose la question, car je pense qu'avec de l'autopersuasion, on peut oublier, ou ne plus avoir des sentiments négatifs à savoir que l'on cause du tort (la culpabilité par exemple). En effets, les tueurs à gages sont certainement sans remords, ni compassion au fil du temps.
Au final, ils peuvent donc oublier le mauvais côté et se concentrer sur tout les aspects positif de leur vie

Pour l'idée de machine stimulante, imaginons qu'elle pourrait créer la parfaite illusion de ce qui vous rendrait heureux dans la "vrai" vie.
Mais qu'elle maltraiterait des millions d'hommes pour la faire fonctionner.

Vous vous dîtes, pourquoi ne pas céder au bonheur, c'est la finalité de la vie, j'accepte.
Ou non, je ne peut pas faire cela, ce serait profiter du malheur des autres, je dois me battre pour rétablir leur liberté.

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SpinUp
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Messagepar SpinUp » 12 janv. 2008, 01:53

nepart a écrit :
Quand je prends du plaisir, je m'imagine des molécules qui se libèrent dans ma tête, et je me dis pourquoi je prends du plaisir, quelle est la finalité de tout ça, et j'en viens très vite à l'origine du plaisir, des choses agréables...
Je n'arrive pas à me contenter d'apprécier le morceau de musique, je me demande "Pourquoi est ce que je trouve ce morceau agréable?", quelle est la finalité de cela.


Le plaisir de manger je le comprends mieux, c'est pour la survie, mais la musique, rencontré des gens, vouloir savoir des choses.


Je suppose que Spinoza (enfin, ses livres) te dirait que le corps humain est composé d'un "grand nombre de parties" qui peuvent être affectées de diverses manières. La musique est précisément ce genre de stimulation très méthodiques qui s'adapte bien à tes capacités propres de "patir". (Tiens, bonne question: qu'aurait pensé Spinoza de ce genre de plaisrs esthétiques? C'est vrai qu'ils sont "passifs", a priori.) Ton raisonement en terme de finalité est illusoire, il n'y a pas de causes finales, seulement des causes effectives (en ce sens le plaisir que tu prend à manger est cause de la conservation de ton corps, le fait que cet acte "serve" à la conservation de ton corps est presque irrelevant cependant. Plus précisément la "cause finale" de la conservation de ton corps n'est que le résultat du "feedback positif" de l'évolution des espèces, mais ce genre de "conservation de l'information" que la matière vivante permet me semble déjà difficilement pensable dans les termes de l'Ethique.)

Tu n'arrives pas à te contenter de la musique présente? Cela voudrait dire que tu as d'autres espoirs ou craintes quand tu écoutes de la musique? Autrement dit: quelles pensées correspondantes à des choses passées où à venir est-ce que cette musique éveille en toi? Sans doute j'essaye de coller au "spinozisme" un peu trop (en novice de ce forum qui m'étonne assez), mais autrement je ne comprend pas bien ce que tu veux dire par le fait que l'incapacité à justifier ton plaisir gâche ton plaisir?

Peut-être simplement que toute réelle rencontre (musique, personnes) nous donne une capacité de compréhension plus grande, donc augmente notre puissante, notre joie.


nepart a écrit :Pour les plaisirs qui cause du tort à d'autres, je me pose la question, car je pense qu'avec de l'autopersuasion, on peut oublier, ou ne plus avoir des sentiments négatifs à savoir que l'on cause du tort (la culpabilité par exemple). En effets, les tueurs à gages sont certainement sans remords, ni compassion au fil du temps.
Au final, ils peuvent donc oublier le mauvais côté et se concentrer sur tout les aspects positif de leur vie

Pour l'idée de machine stimulante, imaginons qu'elle pourrait créer la parfaite illusion de ce qui vous rendrait heureux dans la "vrai" vie.
Mais qu'elle maltraiterait des millions d'hommes pour la faire fonctionner.

Vous vous dîtes, pourquoi ne pas céder au bonheur, c'est la finalité de la vie, j'accepte.
Ou non, je ne peut pas faire cela, ce serait profiter du malheur des autres, je dois me battre pour rétablir leur liberté.


Je trouve l'idée du simulateur de vie intéressante bien sûr. Si tu ne connaît pas la souffrance des millions d'hommes, souffrance qui est la condition de ton bonheur, de tes shoots d'endorphine disons, comment ne céderais-tu pas à ce bonheur là? Rien de plus humain.

Maintenant, si tu es lucide sur les conditions de cette "simulation"... probablement ne résisterais-tu quand même pas à cet accroissement de ta joie... Ta question est très profonde, parce que cette "simulation" est précisément la situation de la plupart des "riches occidentaux" qui, tout en vivant le cul dans le beurre, savent confusément que, d'une certaine manière, la condition de leur bien-être repose sur l'exploitation de beaucoup de gens (y compris eux même à vrai dire). Pourtant, "nous" (un nous à définir, mais on m'aura compris j'espère) choisissons continûment la joie présente. Et souvent, malheureusement, ceux qui se révoltent contre cette joie "illégitime" (à tout le moins très passive) ne le font qu'au travers d'une "fausse conscience" qui ne révèle que tristesse, masochisme... J'aurais peut-être beaucoup plus à dire sur ce sujet, mais j'arrête ici, je suis trop fatigué et soul pour être sensé :)

De toute façon, népart, à moins d'être spinoza peut-être, le bonheur n'est jamais le résultat de ce que l'on pense, seulement de ce que l'on vit. Notre liberté étant pourtant de penser notre vie.

Merde je dis vraiment n'importe quoi moi :lol:

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Louisa
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Messagepar Louisa » 13 janv. 2008, 02:43

Nepart a écrit :J'aimerais tout d'abord, expliquer l'origine de ce sujet.
Je suis en terminale, je commence la philo et je prends conscience que dieu( dans le sens des religions), l'âme immatériel, et donc le libre arbitre n'existe pas.


bonjour Nepart,

certains philosophes, qu'on appelle "matérialistes", croient en effet qu'il n'y a que de la matière, que le domaine spirituel n'existe pas, et que le dieu des religions monothéistes n'existe pas non plus. Souvent, ils ont d'excellentes raisons pour ne pas y croire. Mais j'ai tout de même aussi l'impression qu'il y a au moins autant de philosophes qui croient tout à fait en l'existence de l'âme immatérielle (Spinoza par exemple ...), et qui ont de toutes aussi bonnes raisons pour défendre cette thèse. Idem en ce qui concerne le libre arbitre.

En fait, à mon sens il est difficile de trouver une thèse philosophique concernant un sujet "d'intérêt commun" (qui intéresse tout le monde, philosophe ou non; sujets tels que "Dieu", le libre arbitre, la liberté, ...) sans qu'il y ait quelque part aussi un autre philosophe qui argumente le contraire. La philosophie n'étant pas une science (mais de nouveau, il y a des philosophes qui contredisent cette idée), nous ne pouvons prouver nos thèses que par la raison. Or déjà depuis l'Antiquité, les "rhétoriciens" s'entraînaient à pouvoir prouver n'importe quelle thèse par le biais d'arguments logiques. Les vérités ainsi prouvées n'ont donc absolument pas la même "solidité" que celles prouvées par la physique ou la chimie, par exemple.

Nepart a écrit :Au début c'était dur, mais la ça va mieux.
Le soucis reste que quand même, je ne vois pas comment devenir heureux depuis que j'ai une image totalement matériel de mon corps.


en tout cas, chez Spinoza il n'y a aucun moyen de réduire l'esprit au corps, et encore aujourd'hui pas mal de philosophes sont d'accord avec lui là-dessus (même s'il y en a également beaucoup qui préfèrent travailler avec un matérialisme). En tout cas, d'un point de vue spinoziste, devenir heureux sans en passer par l'esprit est en effet assez impossible. Si donc tu veux vraiment toi-même opter pour un matérialisme, je ne sais pas si ce site, dédié à Spinoza, va pouvoir t'aider quant à un "bonheur matérialiste" ... :) .

Or tu dis que tu n'as commencé la philosophie que cette année-ci ... alors pourquoi ne pas d'abord prendre un peu le temps pour lire de différents types de philosophes, afin de pouvoir ensuite "librement" choisir la position qui te convient le mieux?

Car il y a par exemple des philosophes matérialistes, mais aussi des "idéalistes" (ceux qui croient que finalement, tout est esprit, notre corps n'est qu'une idée de notre esprit; voir par exemple le petit livre d'un grand philosophe Principes de la connaissance humaine, de Berkeley), et ceux qui comme Spinoza ou Descartes croient que l'homme est constitué d'un esprit et d'un corps (et alors se pose la question de comment l'un se rapporte à l'autre ... question dont encore aujourd'hui un tas de philosophes discutent chaque jour).

Nepart a écrit :Quand je prends du plaisir, je m'imagine des molécules qui se libèrent dans ma tête, et je me dis pourquoi je prends du plaisir, quelle est la finalité de tout ça, et j'en viens très vite à l'origine du plaisir, des choses agréables...


pourtant ... pour autant que je sache, les médecins, neurologues etc. qui étudient les aspects corporels du plaisir ... sont très loin d'en avoir déjà découvert l'origine! Ce serait quoi donc pour toi, l'origine du plaisir, une fois que tu penses aux molécules qui se libèrent dans ta tête?

Louisa a écrit :Je n'arrive pas à me contenter d'apprécier le morceau de musique, je me demande "Pourquoi est ce que je trouve ce morceau agréable?", quelle est la finalité de cela.


tu te demandes quel en est la finalité, ou quel en est le sens?

Puis j'avoue que cette question me semble être passionnante ... je ne vois pas très bien pourquoi elle t'empêcherait de trouver le morceau agréable. Tu pourrais peut-être expliquer un peu plus?

Nepart a écrit :Le plaisir de manger je le comprends mieux, c'est pour la survie, mais la musique, rencontré des gens, vouloir savoir des choses.

La réponse que m'a apporté louisa ne m'a pas vraiment éclairé :/ , car on pourrait se dire, en quoi écouter de la musique améliorerait la qualité de vie.


si tu veux rester un instant uniquement au niveau corporel, on sait déjà que justement, quand on écoute une musique que l'on trouve agréable, un tas de processus chimiques se mettent en route, dans le corps et dans le cerveau, qui consistent notamment en l'augmentation d'une molécule qui s'appelle "endorphine".

Cette molécule n'accompagne pas seulement le sentiment subjectif de plaisir, mais elle stimule en même temps pas mal d'autres processus corporel: elle est en partie responsable pour une meilleure circulation sanguine, elle augmente la puissance du système immunitaire, elle stimule les processus réparatoires dans le corps, et ainsi de suite. Bref, un moment de détente agréable augmente réellement la puissance de ton corps, et donc, si tu veux penser en termes de survie, ta chance de pouvoir vaincre plus facilement/efficacement des "attaques" venus du dehors (microbes, bactéries, mais aussi stress "psychologique" etc.).

Nepart a écrit :Je pense que mon problème est lié au fait que je cherche une finalité dans la vie.


savoir ce qu'on veut faire avec sa vie me semble en effet être important. Puis la question est un peu urgente, vu ta situation actuelle (il vaut mieux choisir tes études supérieures, si tu souhaites en faire, en fonction de ton "projet de vie"). D'autre part, la question est loin d'être facile, elle ne se résout pas en deux minutes ... . Mais tu as peut-être tout de même déjà quelques idées là-dessus ... ?

Nepart a écrit :Pour l'égo, je vais prendre un exemple pour mieux illustré ma pensée.

Comparer son bonheur, ou sa chance par rapport à d'autre. J'ai la conviction que c'est néfaste pour son propre bonheur.


en effet, je crois que Spinoza serait d'accord.

Nepart a écrit :De même vouloir bien paraitre devant des inconnus me semble inutile.
Etre fier de soi, cela aussi n'a aucune raison d'être, car nous sommes déterminés et que comme tu l'explique c'est la nature qui cause tout, nous y compris bien sur.


et pourtant ... selon Spinoza nous cherchons tous la "Gloire", l'estime des autres, et surtout de ceux qu'on estime nous-mêmes. Tandis que la satisfaction de soi-même, pouvoir tout à fait approuver qui on est et ce qu'on fait, c'est pour lui la définition même du bonheur.

C'est que si effectivement la nature cause tout, il n'empêche que moi-même, je suis une partie de cette nature. Si la nature est une "puissance infinie", je suis moi-même un certain "degré" précis de cette puissance. J'ai donc une puissance à moi. Je peux l'utiliser de façon "raisonnable", c'est-à-dire je peux l'utiliser pour essayer de devenir le plus heureux possible et pour essayer qu'un maximum de gens le deviennent avec moi. Et quand j'y réussis un peu, je peux bien sûr être fier de moi, car si je ne suis pas la seule cause de tout ce que je suis et fais, il y a tout de même des choses qui ne découlent que de ma nature à moi, dont je suis donc moi-même entièrement la cause.

Autrement dit: que je suis moi-même "causée" par autre chose dans la nature n'entrave en rien la possibilité de causer quelque chose dans la nature, d'être responsable de certains de mes actes. Si par exemple on a réussit à aider quelqu'un, si cette personne devient par là un peu plus puissante, un peu plus heureuse ... comment ne pas être content de soi-même? Ou plutôt: pourquoi ne pas l'être?

Nepart a écrit :Pour les plaisirs qui cause du tort à d'autres, je me pose la question, car je pense qu'avec de l'autopersuasion, on peut oublier, ou ne plus avoir des sentiments négatifs à savoir que l'on cause du tort (la culpabilité par exemple). En effets, les tueurs à gages sont certainement sans remords, ni compassion au fil du temps.
Au final, ils peuvent donc oublier le mauvais côté et se concentrer sur tout les aspects positif de leur vie


ils peuvent l'oublier ... à condition que la police ne les attrape pas .. . Or pour éviter la police, il vaut mieux en tenir compte, c'est-à-dire tenir compte du fait que la société, la loi juge les actes qu'on a perpétré comme étant des actes criminels, tout à fait "négatifs". C'est pourquoi je ne suis pas si certaine qu'ils peuvent oublier tout cela si facilement.

Puis on peut se demander si le vrai bonheur consiste en la simple tentative d'essayer d'oublier tout ce qui te rend triste (ce qui n'est pas déjà si simple que ça) ... . Je ne le crois pas, en fait. Tu peux réussir à oublier beaucoup, en effet (avec un grand effort), mais ce n'est pas juste en oubliant que tu CONSTRUIS déjà une vie heureuse. Si le bonheur requiert tout un ART de la vie, je ne vois pas comment simplement s'adonner à l'oubli puis à des plaisirs faciles mais peu durables pourraient te rendre heureux.

Nepart a écrit :Pour l'idée de machine stimulante, imaginons qu'elle pourrait créer la parfaite illusion de ce qui vous rendrait heureux dans la "vrai" vie.
Mais qu'elle maltraiterait des millions d'hommes pour la faire fonctionner.

Vous vous dîtes, pourquoi ne pas céder au bonheur, c'est la finalité de la vie, j'accepte.
Ou non, je ne peut pas faire cela, ce serait profiter du malheur des autres, je dois me battre pour rétablir leur liberté.


pour moi le problème avec l'idée de cette machine stimulante, c'est qu'implicitement elle contient déjà une conception TRES précise de ce que c'est que le bonheur. Elle suppose que le bonheur est un simple "état", état passif, qui plus est.

On parle alors souvent des "molécules du bonheur" tel que le médicament anti-depresseur "Prozac". Et il est vrai que parfois des gens non dépressifs mais seulement fort timides, par exemple, commencent à oser sortir, une fois qu'ils sont sous Prozac. Après quelques années, cela peut avoir une effet assez impressionnant sur la qualité de vie et le bonheur de ces gens.

Or, est-ce la simple molécule qui a provoqué ce bonheur? Pas du tout. Il se fait qu'une fois que la personne commence à sortir, elle commence non seulement à visiter des amis, aller à toutes sortes de fêtes etc. Elle commence surtout aussi à de nouveau oser suivre des formations, chercher un emploi, s'investir à fond là-dedans une fois qu'elle a trouve un emploi qui lui plaît etc.

Résultat: après quelques années, cette personne, qui était socialement fort isolée, a pu construire tout un réseau social, a ressenti quels sont ses points forts et ses points faibles, a constaté que les gens peuvent l'apprécier, lui donner leur amitié et leur confiance, a pu développer ses capacités. Bref: elle a pu s'épanouir, a pu développer sa personnalité, en travaillant activement sur soi-même et sur son entourage.

Tout cela n'a pas DU TOUT été l'effet de cette seule molécule. C'est bien elle-même qui a commencé à s'activer et à s'investir sérieusement, puis à trouver un amant, à se marier, à avoir des enfants etc. La molécule a juste brisé certaines barrières, qui ont fait qu'elle a pu faire le premier pas. Mais ce n'était pas du tout ce premier pas qui lui rendait déjà heureuse! Elle a bien dû travailler dûr, avant d'y arriver.

C'est pourquoi une conception du bonheur telle que la défend Spinoza me semble être beaucoup plus crédible que celle qui est présupposée par l'idée d'une machine stimulante: le bonheur ne réside pas simplement en le fait d'être stimulé "positivement", le véritable bonheur réside dans un engagement de longue durée par rapport à sa propre vie, et cela aussi bien sur le plan professionnel, amical et amoureux. Cela nécessité également un développement d'une capacité à aimer, à devenir bon dans son métier, à devenir un ami capable de rendre hommage à ce que c'est que la "vraie" amitié etc. Tout cela implique forcément que l'on se soucie d'autres gens.

C'est aussi pourquoi selon Spinoza celui qui est vraiment heureux ne peut que souhaiter la même chose pour les autres gens, et va activement travailler au bonheur des autres. C'est bien pourquoi il est alors logique, de ce point de vue spinoziste, que tu sens tout de même qu'il y a quelque part un problème s'il fallait "combiner" un bonheur parfait avec les pires souffrances pour le reste de l'humanité. Pour certains philosophes, l'homme est avant tout un "animal social": il a véritablement besoin d'autres gens, et de bonnes relations, intenses et valorisantes, avec ces gens. Comme il s'agit d'un VRAI besoin, on n'a pas envie d'être trompé là-dessus, donc on ne va pas trop être tenté de se bercer dans des illusions.

Bref, si quasiment tout le monde est d'accord pour dire que le but de l'homme, c'est de trouver le bonheur, le problème commence déjà dès qu'on essaie de définir ce bonheur. La définition spinoziste fait qu'être parfaitement et vraiment heureux quand le prix à payer c'est que tout le monde sauf soi-même souffre, est tout simplement une contradiction dans les termes, c'est-à-dire impossible. Mais d'autres vont croire que le bonheur ne consiste que dans une circulation de quelques molécules dans la tête, et croient qu'il est possible d'être heureux de façon "illusoire". Enfin, il existe encore un tas d'autres conceptions du bonheur. Peut-être que commencer à y réfléchir, puis éventuellement lire de différents philosophes, c'est précisément ce qu'il faut pour mieux savoir COMMENT devenir plus heureux?
A bientôt!
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Messagepar sescho » 13 janv. 2008, 12:21

Bonjour nepart,

Mes appréciations (et rien de plus...) :

nepart a écrit :Doit on essayer de ne plus avoir d'égo pour être heureux (cad, ne pas vouloir être fière, paraitre, vouloir avoir une bonne image, être estimé des autres).

Oui.

Mais j'ajoute aussitôt des précisions : 1) On peut être fier sans ego, et même la seule vraie fierté est sans ego. 2) Il n'est pas inutile de prendre en compte l'opinion des autres, mais comme simple fait (ce qui n'est généralement pas le cas, d'où le problème : on le prend comme valeur immédiate de soi, en confondant le vrai soi avec l'image en miroir que l'on s'en est forgé.) 3) L'idée selon laquelle il faut d'abord se débarrasser de l'ego pour ensuite être heureux est assez fausse dans son expression, et assez douteuse quant à ses résultats. Le bonheur va de pair avec la dissolution de l'ego, mais l'ego n'est pas un objet clairement identifiable, extérieur, et qu'il suffit de vider pour être tranquille. Ceci c'est une simple schématisation, nullement un plan opérationnel, sinon il crée d’emblée une scission interne : moi et mon ego. La réalité c'est que je suis, en partie, "mon" ego. De l'ego. Il est nettement plus efficace, je pense, d'aller dans le positif, et d'apprendre (autant que possible sans se tendre à son propre sujet, et vouloir tout de suite des résultats avant que d'avoir compris), par exemple dans la description des mécanismes egotiques, ou par la réflexion au sujet de la nature universelle qui comprend tout et s'impose en tout, y compris moi-même et les autres. Il y a plusieurs auteurs que je considère comme des premières références (Alfred Adler, p.e. "Connaissance de l'Homme", Paul Diel, p.e. "Psychologie, psychanalyse et médecine" (ne pas avoir peur du titre), Arnaud Desjardins, p.e. "Les chemins de la sagesse", Matthieu Ricard, p.e. "Plaidoyer pour le bonheur"), mais force est de constater que Spinoza nous en dit beaucoup sur ces plans.

nepart a écrit :Ne pas vouloir tout savoir. Car j'ai la tendance à tout vouloir savoir, par exemple, pourquoi faire ceci, écouter de la musique, regarder un paysage, me procure du plaisir. ...

Oui.

Il est beaucoup mieux de désirer connaître, sans a priori, avec l'esprit curieux du jeune enfant, que de vouloir (déjà, tout) savoir. La nuance est dans d'ouverture, et l'absence de tension négative. Outre qu'il est impossible de tout savoir, et a fortiori absolument, la tension négative est telle tant pour le bonheur que pour la connaissance elle-même.

nepart a écrit :Doit on se refuser ou limiter de plaisirs sous prétextes qu'ils sont immoraux.

Non. Avec nuances : de la façon dont tu le poses, il s'agit purement de morale moralisante (morale externe sous contrainte.) Ce n’est pas totalement rédhibitoire en soi, car il vaut mieux parfois faire mieux sous contrainte que mal tout seul, mais cela reste très partiel.

Mais il n’y a jamais aucun mal à se faire du bien, et les plaisirs des sens mesurés font du bien. La question est : le plus grand bien ? La réponse pour les plaisirs des sens considérés seuls est : non. Parce qu’il y a souvent de l’excès, qui se paye ensuite. Parce que c’est très partiel vis-à-vis du bonheur, et donc de l’amour, de la puissance, etc. et par exemple qu’un Mental egotique est une auto-punition permanente, plaisirs des sens ou pas.

nepart a écrit :ex: Dois je prendre du plaisir si j'adore faire quelque chose, alors que je sais que cela cause du tort à quelqu'un, et donc se forcer de ne pas penser à l'autre, ce qui sur un bilan plaisir/douleur semble le mieux.
Ou dois je arrêter ce qui me procure du plaisir à moi et du tort à d'autre.

Il faudrait voir un cas concret et en quoi le plaisir et le tort sont réels. Dans la santé mentale, faire du tort à autrui est un déplaisir pour soi. C’est la balance qui emporte le morceau (en général de ne pas faire de tort.) Mais encore une fois, il faudrait savoir de quel « tort » il s’agit (s’il s’agit d’une interdiction extérieure par un particulier, la notion est très nuancée.)

nepart a écrit :Ex: Si vous êtiez roi au moyen âge, demanderiez vous à vos consultant de ne jamais vous parler des problèmes du peuple à fin les oublier (je pense que c'est vraiment possible d'oublier), ce qui sur un bilan plaisir/douleur semble le mieux pour vous, car vous n'aurez plus la douleur de connaitre des tristes nouvelles.
Ou préférez vous ne pas se cacher le problème, même si vous risquer d'être moins heureux ainsi.

Dans la santé mentale, qui implique l’honnêteté, je ne vois que la dernière solution pour un roi. Mais attention : ceci ne signifie pas la pitié au sens de Spinoza, autrement dit se morfondre du malheur des autres. Voir les choses et se morfondre de ce qu’elles sont, c’est très différent. Cela ne veut pas dire du tout non plus qu’il ne faut rien faire (au contraire : l’action est plus efficace quand elle n’est pas artificiellement tendue) : il faut faire à mesure de ses moyens, et se contenter de cela, car il n’y a pas mieux possible. L’erreur : l’exaltation, où, par exemple, l’on prend tout en responsabilité morale, en dépit de la réalité de sa puissance réellement et immédiatement mobilisable dans les faits.

Finalement, la bonne réponse c’est : 1) Ne pas avoir de douleur à voir le malheur des autres. 2) Exprimer la générosité pour les en soulager dans l’exacte mesure de ses moyens.

nepart a écrit :Imaginez vous dans le futur, il existe des machines qui peuvent stimuler votre cerveau ou vous créer l'illusion d'un monde presque parfait, et ainsi vous procurer un plaisir immense.
Pour pouvoir en bénéficier, il suffit de travailler jusqu'à 30 ans et vous bénéficier du droit d'utiliser la machine, jusqu'à votre mort naturelle.

Une drogue permanente sans effets secondaires… La question n’est pas facile… mais pour moi c’est clairement : non.

Et qui va payer les retraites ! ;-)


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Messagepar sescho » 13 janv. 2008, 13:37

nepart a écrit :Le souci reste que quand même, je ne vois pas comment devenir heureux depuis que j'ai une image totalement matériel de mon corps.

Mais tu penses en disant cela, non ? Pourquoi alors dire que tu es matériel ? Parce que les physiciens disent que le vivant c’est de la matière ? Il ont raison en quelque chose. Mais les as-tu vus prédire ab initio l’amour maternel, par exemple, à partir de leurs équations d’électrodynamique quantique ?

Tout cela c’est pour dire que ce que nous connaissons de ce que nous associons à ce mot « matière » est très très loin de résumer l’Univers, et que c’est pure croyance que de penser que ce sera un jour le cas. C’est même impossible, car l’Homme n’est pas la Nature dans son entièreté, et de même qu’on ne concède pas au bonobo la puissance de penser de l’Homme, il n’y a aucune raison de concéder à l’Homme la pensée absolue. Cela, c’est pure folie mégalomaniaque. Et comment imaginer que la matière va se comprendre elle-même sous sa forme pensée, à laquelle la Physique appartient, qui n’en est qu’un sous-ensemble, au lieu de ce qui semble nécessaire c’est-à-dire qu’elle doive sortir d’elle-même pour cela, chose impossible.

Un conseil : laisse tomber la bêtise ; il n’y a qu’une Nature, et sans doute fondamentalement qu’un attribut (PenMat), mais jamais l’Homme ne le verra en pure vérité. Tu penses. Prends-le comme tel comme nous y invite Spinoza, c’est ce qu’il y a de mieux.

nepart a écrit :Je n'arrive pas à me contenter d'apprécier le morceau de musique, je me demande "Pourquoi est ce que je trouve ce morceau agréable?", quelle est la finalité de cela.

Chercher la finalité, c’est chercher le sens de la vie.

Nous allons commencer par les choses de premier abord « désagréables » : la Nature n’a pas de fin, pas d’autre « finalité » que d’être telle qu’elle est. Il en est à ce titre de même pour tous ses modes, Homme compris, tel qu’il est par chaque individu actuel.

Toutefois, pour l’Homme pris en particulier, il y a bien une fin dans un sens particulier : il y a, fondée dans la Nature, une Loi qui fait que tout homme qui atteint un certain état physico-psychique dynamique, que l’on peut appeler de plein de noms mais que nous appellerons « bonheur absolu » ne veut en aucune façon en changer : il ne souhaite rien d’autre que de continuer. Cet état est tout en même temps la puissance absolue accessible à l’Homme.

Par ailleurs, le bonheur est un ressenti dans l’individu et donc à ce titre est sa propre norme.

Autrement dit : dans un certain sens (relatif mais néanmoins fondé absolument dans la Nature) La fin de la vie humaine c’est d’être heureux. Comme il a déjà été dit.

nepart a écrit :Le plaisir de manger je le comprends mieux, c'est pour la survie, mais la musique, rencontré des gens, vouloir savoir des choses.

Tu as du plaisir – et donc une part de bonheur, même très partielle – à écouter de la musique ? Eh bien la Nature t’invite à le prendre… Prends-le !

nepart a écrit :Comparer son bonheur, ou sa chance par rapport à d'autre. J'ai la conviction que c'est néfaste pour son propre bonheur.

Clairement. Et à plus d’un titre (pour comparer son bonheur, il faut déjà en avoir conscience. Avoir conscience vraie du bonheur des autres, c’est inatteignable sauf à la marge. Et comparer, hormis factuellement pour en tirer des enseignements, c’est sans utilité.)

nepart a écrit :Pour les plaisirs qui cause du tort à d'autres, je me pose la question, car je pense qu'avec de l'autopersuasion, on peut oublier, ou ne plus avoir des sentiments négatifs à savoir que l'on cause du tort (la culpabilité par exemple). En effets, les tueurs à gages sont certainement sans remords, ni compassion au fil du temps.
Au final, ils peuvent donc oublier le mauvais côté et se concentrer sur tout les aspects positif de leur vie.

Il ne faudrait quand-même pas confondre la sagesse, ou santé mentale, qui est sans remord parce que sans tache, et son exact opposé, la banalisation, qui est sans remord parce qu’elle a réussi à éteindre la culpabilité, et est une vie de m… L’état milieu c’est la nervosité, comme l’explique parfaitement Paul Diel, dans lequel l’alerte de la culpabilité (qui est un phénomène interne) est encore sensible (ce qui est plus positif.) La souffrance qu'est la culpabilité tend à faire verser d’un côté ou de l’autre pour l'éliminer. Inutile de te préciser que je te conseille la voie de la sagesse…


Serge
Modifié en dernier par sescho le 13 janv. 2008, 19:04, modifié 1 fois.
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Messagepar sescho » 13 janv. 2008, 15:17

J'ajoute J. Krishnamurti, p.e. "Le sens du bonheur."

J'espère que notre K n'a rien vu... :oops: ;-)


Amicalement


Serge

P.S. Par ailleurs, le livre de Paul Diel dont j'ai dit qu'il ne fallait pas craindre le titre (Psychologie, psychanalyse et médecine)... a été réédité en 2007 sous un autre titre... : Culpabilité et lucidité, toujours à la Petite Bibliothèque Payot.
Modifié en dernier par sescho le 22 janv. 2008, 21:25, modifié 1 fois.
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Messagepar nepart » 13 janv. 2008, 18:21

A propos du matérialisme: j'ai plutôt l'impression que la grande majorités des philosophes comtemporains qui suivent, de près ou de loin, les avancées scientifiques, de même que les scientifiques eux mêmes et les neurologues, sont materialistes

Cependant il me semblait que Spinoza était matérialiste :/

J'ai fait un peu le tour des principales thèses qui s'opposent au matérialisme, et aucune ne m'a convaincu. J'ai l'impression qu'elles sont dépassée par la science maintenant et que leurs arguments ne tiennent pas la route.


Pour la musique, c'est plus généralement la question du beau, de l'harmonieux qui m'interroge. Qu'est ce qui fait ce quelque chose est beau?
La seul piste que j'ai et que cela pourrait rappeler des vision que l'on avait encrée à un moment de sécurité ex: la verdure synonyme de manger à sa faim.

Si le beau augmenterait notre puissance, 1 question se posent pour moi:

Pourquoi une chose serait belle et donc augmenterait notre puissance, et d'autres laide et nous rendrait plus faible?

Quand je dis, je cherche une finalité à la vie, cela signifie quels sens, quel interet, pourquoi vivre c'est pour mourir.

Pour l'histoire de "j'en suis moi même la cause, donc je peut être fière", je ne suis pas d'accord avec toi", je ne suis pas d'accord avec toi Louisa.

Ce qui est logique puisque je suis déterministe. Pour moi par exemple, si tu sauve quelqu'un de la noyade, tu n'as pas à être fier, car c'est tout simplement parce que tu était au là au bon moment, que l'on t'avait apris les gestes qui sauvent, que tes parents t'avait éduquer selon des valeurs tel que la solidarité...

Pour l'exemple du prozac, tu penses que ce n'est pas cela qui rends heureux, mais ceux qui suit, les rencontres, les sorties.
Mais c'est donc les molécules libéré lors de ces rencontres qui procurent du plaisir. C'est donc au final toujours des molécules qui sont à l'origine de nos sensations/sentiments et donc du bonheur. A cela on ajoute une sorte de redémarrage à neuf. Tu oublis toutes tes connaissances sur le monde "imparfait".

La machine, elle est visible de 2 façons. Soit elle crée un monde parfait, ou le bonheur est presque sur, tel un paradis.
Ou alors une sorte de drogue très puissante et non néfaste.

Pour sescho

Pour le problème des retraites, il faudrait justement travailler jusqu'a 30 ans, les pauvres eux travailleront jusqu'a leur mort, et pour ceux qui utiliseront la machine, il couteront peu (intraveineuse, électricité de la machine)

Sur le fait que les physiciens ne peuvent pas tout prédire, cela ne veut pas dire que tout n'est pas déterminé. Le tirage du loto ne se fait pas au hasard, mais les facteurs sont si important que l'on ne peut pas le prédire. De même pour l'homme mais à un niveau encore bien plus complexe.

"Un conseil : laisse tomber la bêtise " => Je n'ai pas compris.

"Tu as du plaisir – et donc une part de bonheur, même très partielle – à écouter de la musique ? Eh bien la Nature t’invite à le prendre… Prends-le ! "
Justement cela me fait penser que certains plaisir sont en quelquesorte des arnaques faite à la nature. Comme jouer à des jeux videos qui crée l'illusion que l'on a une vie formidable, les femmes qui se maquillent ou la fameuse machine à bonheur.
Doit on aussi les prendre ces plaisirs? car au fond on sait qu'il y a "arnaque, illusion.



Enfin pour finir, quel lecture me conseiller vous, car je n'ai pas beaucoup de réferences, et je n'ai que des passages de l'éthique pour Spinoza.

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Messagepar sescho » 13 janv. 2008, 21:15

nepart a écrit :A propos du matérialisme: j'ai plutôt l'impression que la grande majorités des philosophes comtemporains qui suivent, de près ou de loin, les avancées scientifiques, de même que les scientifiques eux mêmes et les neurologues, sont materialistes

Cependant il me semblait que Spinoza était matérialiste :/

Je ne vais pas entrer dans un nouveau débat de mots, mais il y a je pense plusieurs formes de matérialisme. Tous rejettent l'idéalisme (seules les idées sont vraies) et l'existence d'un Dieu transcendant, mais tous ne sont pas de la forme réductionniste mécaniste (autrement dit qui rabat la pensée sur la matière telle que nous la connaissons.) Mais je ne suis pas bien bon en "ismes." Spinoza n'est clairement pas de la forme réductionniste, puisque pour lui la pensée existe en parallèle de la matière, sans avoir de point commun en tant que dimension de l'existence. Pour le reste ses tenants se revendiquent généralement matérialistes.

En aucun cas les résultats de la neurobiologie ne contredisent Spinoza, qui pose le parallélisme des affections du corps et des sensations (pour les idées adéquates, c'est moins net.) Tant qu'on n'aura pas déduit ab initio (en particulier sans corrélation précédente faites en demandant au cobaye à quoi il pensait) une idée en tant qu'idée de phénomènes strictement physiques, cela tient. Et ce n'est pas demain la veille, à mon avis, que cela arrivera...

nepart a écrit :J'ai fait un peu le tour des principales thèses qui s'opposent au matérialisme, et aucune ne m'a convaincu. J'ai l'impression qu'elles sont dépassée par la science maintenant et que leurs arguments ne tiennent pas la route.

Moi je t'ai donné la mienne s’agissant du réductionnisme mécaniste, qui est que dire que la pensée est réductible à la matière telle que nous la connaissons est une forfanterie ou une simple croyance : il est impossible que l'Homme puisse intelliger la Nature entière. Ceci n'est pas pour autant nier le lien de l'idée et du corps.

C'est très simple : tant que l'on n'aura pas une théorie absolue de la Matière, tout réductionnisme mécaniste nous vendra du mou. Et comment penser que la pensée, par hypothèse une partie de la matière (phénomènes matériels), puisse se rendre équivalente au tout ? La théorie des cordes semble s'y diriger (dans les cordes :-) ) et bientôt on n'aura pas assez du tour de la Terre pour construire les instruments qui soi-disant conviendraient...

nepart a écrit :Pour la musique, c'est plus généralement la question du beau, de l'harmonieux qui m'interroge. Qu'est ce qui fait ce quelque chose est beau?

Pour moi, un sens inné d'une harmonie (interne à l'Homme, tout étant harmonieux per se au sein de la Nature, et perçu comme tel par le sage.) "Flatte nos sens", dirait je pense Spinoza (je n'ai pas vérifié.)

nepart a écrit :Pourquoi une chose serait belle et donc augmenterait notre puissance, et d'autres laide et nous rendrait plus faible?

Je ne pense pas que le plaisir augmente notre puissance. C’est une sorte de « gratification. » Spinoza ne me semble pas, de mémoire, accorder une grande importance aux plaisirs et à l’esthétique, comme pas mal des Anciens.

nepart a écrit :Quand je dis, je cherche une finalité à la vie, cela signifie quels sens, quel interet, pourquoi vivre c'est pour mourir.

Ma mort n’est rien, si ce n’est la fin d’une vie de mode. Le sage s’occupe de la vie. Et le sens de la vie, c’est la vie même, et à l’intérieur de la vie, la puissance. Et la Nature est éternelle.

nepart a écrit :Ce qui est logique puisque je suis déterministe. Pour moi par exemple, si tu sauve quelqu'un de la noyade, tu n'as pas à être fier, car c'est tout simplement parce que tu était au là au bon moment, que l'on t'avait appris les gestes qui sauvent, que tes parents t'avait éduquer selon des valeurs tel que la solidarité...

Je préciserais simplement que la générosité est une valeur qui accompagne la puissance et n’est donc pas une invention au même titre que pourrait l’être son contraire. On peut être fier (satisfaction de soi-même) sans pour autant que ce soit egotique.

nepart a écrit :Sur le fait que les physiciens ne peuvent pas tout prédire, cela ne veut pas dire que tout n'est pas déterminé.

Ah mais je dis avec Spinoza que tout est déterminé. Simplement, je ne l'extrapole pas à l'opinion que l'Homme pourrait intelliger tous les mécanismes de cette détermination.

nepart a écrit :"Un conseil : laisse tomber la bêtise " => Je n'ai pas compris.

Je voulais juste dire : ne suis pas le réductionnisme mécaniste.

nepart a écrit :Justement cela me fait penser que certains plaisir sont en quelque sorte des arnaques faite à la nature. Comme jouer à des jeux videos qui crée l'illusion que l'on a une vie formidable, ou la fameuse machine à bonheur.
Doit on aussi les prendre ces plaisirs?

Qui pourrait considérer le jeu comme nuisible ? La question fondamentale reste : est-ce là toute ma puissance potentielle ?

nepart a écrit :Enfin pour finir, quel lecture me conseillez-vous, car je n'ai pas beaucoup de références, et je n'ai que des passages de l'éthique pour Spinoza.

Pour les auteurs hors Spinoza, j’ai donné ce que je pense être les meilleures références (pour commencer) en « science du bonheur » plus haut. Pour Spinoza, on trouve toutes les œuvres à peu de chose près sur le site. Je conseillerais de lire les passages généraux (au moins) du Traité Théologico-Politique. La meilleure traduction de l’Ethique a été donnée comme celle de Pautrat. Pour les commentateurs de Spinoza, il faudra attendre, en le redemandant explicitement, qu’un autre plus compétent que moi (Henrique par exemple) le dise (mais il y a des éléments sur le site.)

Amicalement

Serge
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