Le Goncourt selon Spinoza

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Castelcailloux
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Le Goncourt selon Spinoza

Messagepar Castelcailloux » 05 mai 2006, 11:44

Bonjour à toute la communauté spinoziste.

Ancien journaliste littéraire pour Lire et La Revue des Deux Mondes, je me suis amusé à écrire un faux Spinoza développant sa pensée sur le petit monde de d'édition et général et sur le plus prestigieux prix littéraire français, le Goncourt, en particulier.

C'est pas facile Spinoza, il faudra que je m'y remette sérieusement un jour, je crois que j'ai pas compris grand chose !

Mais enfin bon, ce petit bout de sa pensée, je crois l'avoir saisie un peu moins mal que le reste.

Et, croyez-en mon expérience, il est impressionant d'actualité et d'acuité, notre philosophe !

L'adresse du pastiche : http://castelcailloux.blogspirit.com/ar ... inoza.html

Amitiés à toutes et à tous,

Philippe Perrier

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bardamu
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Re: Le Goncourt selon Spinoza

Messagepar bardamu » 06 mai 2006, 13:37

Castelcailloux a écrit :L'adresse du pastiche : http://castelcailloux.blogspirit.com/ar ... inoza.html

Amitiés à toutes et à tous,

Philippe Perrier

:D

2 petites propositions pour rapprocher "l'idée derrière la tête" du conatus des uns et des autres.
bien plus, il tient pour certain que l’Académie Goncourt elle-même a une idée derrière la tête. L’Académie, dit-il, crée chaque année le plus grand événement du monde de l’édition pour qu’en retour l’ensemble de l’édition française soit à ses pieds.


bien plus, il tient pour certain que l’Académie Goncourt est mû par un appetit dont on n'exprime pas l'idée claire et distincte. L’Académie, dit-il, crée chaque année le plus grand événement du monde de l’édition pour qu’en retour l’ensemble de l’édition française soit soumise à son essence actuelle, c'est-à-dire à son effort pour perséverer dans son être.

Il en résulte, en second lieu, que le petit monde de l’édition a toujours une idée derrière la tête, à savoir, ce qui est utile à sa maison d’édition ou à son journal.


Il en résulte, en second lieu, que le petit monde de l’édition est mû par un appetit dont on n'exprime pas l'idée claire et distincte, à savoir, ce qui est utile à sa maison d’édition ou à son journal.

--------------------

Et l'air de rien, ça me fait m'interroger sur la littérature ou l'art en général : y'a-t-il un jugement raisonnable possible de l'art, un jugement par notions communes (2nd genre), n'est-ce qu'une question d'adéquation entre des sensibilités imaginatives (1er genre) ou peut-on aller jusqu'à une sorte de sublime qui porterait à exprimer des essences s'imposant d'elles-même (3e genre) ?

Et sinon, tu penserais quoi si tu recevais le Goncourt ? :wink:

P.S. : l'histoire de Spinoza allant vérifier la transmutation du plomb en or (cf http://hyperspinoza.caute.lautre.net/ar ... e=1404#nh1 ), ça serait intéressant pour un scénario Nephilim...

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Castelcailloux
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Vaste débat

Messagepar Castelcailloux » 07 mai 2006, 18:58

Pour continuer dans le pastiche et puiser cette fois-ci dans une autre grande oeuvre philosophique, "Astérix en Corse" : "Tu es rôliste, toi, tu me plais !"

J'aimais beaucoup Nephilim, il y a quelques années. J'avais commencé à faire jouer la campagne des Templiers. Mais j'ai jamais pu continuer. J'ai un peu laissé tomber ensuite. Une erreur ? J'y reviendrai un jour certainement. D'ailleurs, un rubrique de mon blog s'appelle "Agartha ?"

Merci tout d'abord, Bardamu, pour l'intêret spinoziste (et célinien ?) que tu portes à la petite blague.

Je me suis permis d'ajouter tes corrections en commentaire sur mon blog, effectivement, c'est très bien vu, très juste par rapport à mon expérience de l'édition et ça améliore le texte, qui, sur ce point, était trop vague !

Vaste sujet, le Goncourt. A l'époque, en 2002, comme à tout le monde, il m'a fait perdre la tête et j'ai moi aussi attrapé la fièvre Drouant, qui n'est donc pas qu'un mythe : j'en témoigne.

Mon enquête "Goncourt et rumeurs", pour laquelle j'avais travaillé comme un damné, m'a appris beaucoup et fait perdre beaucoup d'illusions.

Le résultat, http://www.lire.fr/enquete.asp/idC=43539
même s'il est sans doute mon meilleur article de ma carrière de journaliste et m'a valu ma seule interview (France Culture), me laisse un goût amer dans la bouche, un goût de travail à moitié fait. Dommage !

C'est la seule fois où je me suis frité avec le grand Pierre Assouline, par ailleurs merveilleux d'intelligence, d'humour, de finesse, de sens littéraire, de tolérance, d'urbanité et j'en passe. Pierre, naturellement, à qui je dois beaucoup et même encore plus que ça, ne serait-ce que l'honneur et le bonheur immense d'avoir travaillé avec lui !

J'étais un tout jeune journaliste et Pierre qui, comme d'habitude, cherchait à tirer ses employés vers le haut, m'avait donné un gibier bien trop gros pour moi : le mythe Goncourt.

Ma première copie a été refusée, avec justice : elle était trop longue et pas assez maîtrisée : "Le Business Plan secret de l'Académie Goncourt", un mélange des lois de la robotique d'Asimov et de mes faibles connaissances sur Spinoza, une page absurde démontant une par une les rumeurs courant autour du Goncourt, rumeurs aléatoires comme les six faces d'un dé (rôliste inside !); chaque face étant, comme chez Asimov, plus probable que la précédente, jusqu'à la face 6 : "Une chose au moins est sûre, on décernera encore le Goncourt l'année prochaine !"

Il faudrait que je reprenne ce texte un jour pour l'améliorer et le publier.

Mais, à mon avis, aucun organe de presse ne le publiera jamais : suicidaire ! Dire que, au bout du compte, l'origine des rumeurs autour du Goncourt, est, entre autres, à chercher dans la stupidité des journalistes qui les traquent sans s'apercevoir qu'elle se créent sous leurs pieds, que le vrai but de l'Académie est simplement de "persévérer dans son être" (difficile en effet d'être plus précis), que le seul moyen d'améliorer la qualité littéraire du Goncourt serait de laisser l'Académie TOTALEMENT tranquille, de ne publier aucun article sur le sujet avant le Goncourt, écrire "la mort surveille assez les prix à notre place", laisser le spectre de la postérité, plus terrible qu'aucun journaliste, contrôler tout cela, etc. aucun rédacteur en chef ne le fera jamais, sous peine de tuer la poule aux oeufs d'or. Journalisme : prostitution de la curiosité. Le public achète des informations sur les rumeurs, nous publierons ces informations. Informer ? Oui. Penser ? Non.

Mais, encore une fois, Pierre Assouline a eu tout à fait raison de me demander de revoir ma copie. Je n'étais pas assez costaud pour soutenir ma pensée du Goncourt dans les règles, notamment en respectant les contraites de distance.

J'y reviendrai, avec du travail. Le fait que je ne sois plus journaliste aujourd'hui, mais jeune auteur et bloggeur change les règles du jeu.

Totalement.

En attendant, tu peux aussi consulter une autre blague anti-Goncourt, mon jeu de cartes absurde, pastichant Magic ! The Gathering. Si tu es rôliste, ça devrait t'intéresser !
http://castelcailloux.blogspirit.com/ar ... artes.html

Comme avec le "faux" Spinoza, je ne suis jamais aussi sérieux que lorsque je plaisante !

Maintenant, pour en venir à ta question : si on me donne un jour le Goncourt Drouant, je le refuse tout net ! Que mon éditeur soit d'accord ou non et même si cela me conduit à me faire mettre à la porte de ma maison d'édition.

Mais enfin, je ne crois pas. La folie Drouant est telle que, si demain un auteur refuse le prix, il vendra ENCORE PLUS ! Tellement l'info sera relayée par la presse et jusqu'à la télé, qui, lucide, relègue le Goncourt en queue de JT tellement tout le monde s'en fout ! Alors que, si un auteur leur crache dessus, ça pourrait faire l'ouverture ! Regarde comme on marche sur la tête !

Et puis, si on regarde les choses un peu lucidement, on s'aperçoit que, si un jour on me donne le Goncourt, ce ne sera pas moi qui aurait reçu le Goncourt, mais le Goncourt qui aura reçu le prix Castelcailloux. Hors de question !

Exemple type, "Rouge Brésil" de Rufin, excellent en effet, manifestement primé pour relançer les ventes du prix. L'académie "volant au secours de la victoire." Grand bonhomme ce Rufin. J'ai pas tout lu, mais j'ai très impresionné par tout ce que j'ai lu.

Je pourrais en faire des tartines entières tellement il y aurait à dire. Mettons, pour aller à l'essentiel, qu'une fois écartés toutes les absurdités et les faux problèmes, il reste deux reproches majeures que l'on peut faire à l'Acamédie Goncourt et qui, quelle que soit sa force de prescription, force naturellement très respectable, la ravale au rang de pauvre pitresse.

1. Il faudrait quand même, pour gagner un rien de crédibilité, qu'ils arrêtent de s'écrier, sauf exception (Actes Sud) : "Oh, mon Dieu, c'est extraordinaire comme nos éditeurs ont encore fait du beau travail !" Pitoyable.
2. Je sais pas toi, mais moi, "Goncourt" + deux ou trois mots sortis de la cuisse de Jupiter, ca ne suffit pas pour me convaincre. Puisqu'ils sont censés tous savoir écrire, je ne considérerai pas leur prescription avec respect avant qu'ils ne prennent la peine d'écrire un éloge de 10 pages (10 membres) du livre primé.

D'autant que, lorsqu'on a eu, comme moi, la chance d'interviewer la présidente de l'Académie, Edmonde Charles-Roux, on revient de loin !!! Moment exceptionnel avec la présidente : charme, humour, brio, acuité mentale, culture, etc. C'est pas n'importe qui, cette présidente.

Bien entendu, je n'avais pas eu le temps de lire toute la sélection. Enorme ! Mais, par exemple, j'avais lu l'Abécassis, que je trouvais pitoyable. D'autant plus mauvais que l'auteur, que j'avais interviewé, m'enthousiasmait avec ses polars métaphysiques à la Umberto Eco. J'étais tombé de haut ! J'ai donc sorti mes petits crocs et j'ai demandé à la présidente par quelle absurdité un étron aussi infâme (le livre bien entendu, je ne juge pas la PERSONNE de l'auteur), par quelle absurdité ce livre était sur leur sélection. Peut-être pas très intelligent, mais en tout cas audacieux, j'ai contesté leur autorité et j'ai commencé à déchiqueter le livre. Point par point, citations à l'appui : je l'avais sous la main. Et tout ce que la présidente a trouvé à me répondre, c'est : "C'est un auteur qui compte. " J'étais tellement affligé que j'en suis resté sans voix. Ca doit voler haut les débats internes à l'Académie Goncourt ! C'est vrai que "Qmran", le premier roman d'Abécassis, est un coup de maître. J'en suis un grand fan. Mais enfin ça ne justifie pas que l'on ne remette pas l'auteur en place, quand, manisfestement, elle s'égare jusqu'à écrire qu'un de ses personnages a des cheveux "flambloyants comme des flammes." Ben voyons...

Par opposition, il faut rendre justice à la présidente d'avoir défendu le Nabe malgré la réputation sulfureuse de l'auteur. On parlait alors littérature, pas certificat de bonnes vies et moeurs. Cela dit, hélas, hélas, le Nabe 2002, est un énorme pavé. Enthousiasmant sur les 200-300 premières pages. Gavant au dernier degré ensuite, tellement il en fait TROP. Mais c'est un fait que l'ouverture du roman est épatante. Je m'interroge. L'académie l'avait-elle lu en entier avant de le sélectionner ? Je ne pense pas.

Mais en voilà assez.

Et si je refuse le Goncourt, je refuse aussi naturellement tous les sous-Goncourt, contre-Goncourt qui essaient de se partager les miettes de sa gloire, jusqu'au plus ridicule, l'Intergrasset, euf, pardon, l'Interallié (vérifiez donc le taux de réussite de Grasset à l'Interallié et vous comprendrez son nickname...)

Mais il ne faut pas non plus jetter le bébé avec l'eau du bain.

1. Je serais très fier d'être récompensé par l'Académie Française parce que je trouve sa quête sublime, même si elle est aussi un peu désuète aujourd'hui, avec le "Trésor de la langue française" et Wikitionnaire. Mais, pour citer Gautier je crois, "C'est encore plus beau lorsque c'est inutile". Mais enfin, j'ai un infini respect pour l'Académie et, dans mes rêves les plus fous, j'aimerais porter l'épée. (Ce qui est déjà plus honnête que tous les auteurs qui passent leur vie à cracher sur l'Académie... cinq minutes avant de se présenter.) Et, s'il ne fallait lui reconnaître qu'un seul mérite, c'est cette Académie ringarde, désuète et dépasée qui a eu le courage de couronner Jourde pour ses coups de hachoir contre les idôles à la mode et, on l'oublie toujours, ses coups de coeur pour les auteurs qu'il jugeait trop peu connus.

2. Je serais encore plus fier d'obtenir le Goncourt des lycéens. A mes yeux le meilleur prix de France. Hélas, pour obtenir le Goncourt des lycéens, il faut être sélectionné pour le Goncourt :-( (Cf. Supra pour les critères de sélection.) Mais, une fois sélectionné, on affronte l'impitoyable enthousiasme, l'audace, l'énergie et (aussi !) l'intelligence des lycéens, qui, souvent, en remontent aux journalistes officiels tellement ils sont motivés.

3. A ma connaissance, le Nobel de littérature est ultra-clean. Sélection rigoureuse, pyramidale, cloisonnée, rien ne filtre. Et comme par hasard, le meilleur roman que j'ai lu de toute ma carrière de journaliste littéraire, est, de TRES loin, "Etre sans destin", d'un prix Nobel. Donc, si je crache sur le Femina, le Médicis, etc. Je ne crache pas sur le Nobel. Mais c'est un fait que je n'ai pas beaucoup d'info dessus.


Maintenant,

y'a-t-il un jugement raisonnable possible de l'art, un jugement par notions communes (2nd genre), n'est-ce qu'une question d'adéquation entre des sensibilités imaginatives (1er genre) ou peut-on aller jusqu'à une sorte de sublime qui porterait à exprimer des essences s'imposant d'elles-même (3e genre) ?


J'ai pas les outils spinozistes pour te répondre, même si, bien entendu, j'ai quelques intuitions et queslques opinions vagues. Pas très construit, tout ça.

Je voudrais donc laisser la parole, modestement, à un de mes maîtres, Julien Gracq, pour un texte que je trouve magistral et pas assez connu.
C'est dans "En lisant en écrivant."

"Ce que je souhaite d'un critique littéraire - et il ne me le donne qu'assez rarement - c'est qu'il me dise à propos d'un livre, mieux que je ne pourrais le faire moi-même, d'où vient que la lecture m'en dispense un plaisir qui ne se prête à aucune substitution. Vous ne me parlez que de ce qui ne lui est pas exclusif, et ce qu'il a d'exclusif est tout ce qui compte pour moi. Un livre qui m'a séduit est comme une femme qui me fait tomber sous le charme : au diable ses ancêtres, son lieu de naissance, son milieu, ses relations, son éducation, ses amies d'enfance ! Ce que j'attends seulement de votre entretien critique, c'est l'inflexion de voix juste qui me fera sentir que vous êtes amoureux, et amoureux de la même manère que moi : je n'ai besoins que de la confirmation et de l'orgueil que procure à l'amoureux, l'amour parallèle et lucide d'un tiers bien disant. Et quand à l'"apport" du livre à la littérature, à l'enrichissement qu'il est censé m'apporter, sachez que j'épouse même sans dot. Quelle bouffonnerie, au fond, et quelle imposture, que le métier de critique : un expert en objets aimés ! Car après tout, si la littérature n'est pas pour le lecture un répertoire de femmes fatales, et de créatures de perdition, elle ne vaut pas la peine qu'on s'en occupe."


Je trouve que ce texte devrait être gravé en lettres d'or à l'entrée de toutes les Facs de Lettres et de toutes les rédactions de soi-disant "critiques" (toujours la confusion entre l'information et la pensée. Combien de journalistes pensent la littérature ?)

Aucun journaliste littéraire n'osera l'écrire. Pareil, on ne tue pas la poule aux oeufs d'or (mais ils sont en train de devenir des oeufs de plombs), mais l'édition contemporaine est globalement médiocre, ni bonne ni mauvaise, juste comparable de la bouillie tiède. Et il faut tout le courage de Tontons Flingeurs style Jourde & Nauleau (Naulleau chez qui j'espère être édité) pour essayer de faire un peu de ménage. On peut certes reprocher aux Tontons Flingeurs parfois leurs gros sabots, mais certainement pas leur manque de bravoure et de patience ! Perso, je les admire.

On a fait, de manière stupide et par goût de la facilité, de la NOUVEAUTE un critère en soi. Si vous saviez combien de fois, en lisant des romans que je pouvais même pas qualifier de "merdes" (ce qui m'aurait donné au moins la joie de la haine), je me suis dit, entre autres, "et pendant ce temps, je ne suis pas en train d'étudier Spinoza." Arf !

Pareil, par un tabou stupide et castré, on parle le plus souvent (brillantes exception ça et là, ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit), de tout donc, sauf de l'essentiel, de la JOUISSANCE que procure un texte.

J'imagine que le débat est identique pour toutes les formes d'art. Je ne vois même pas par quel miracle il en serait autrement. Mais enfin moi, ma spécialité, c'était le roman français contemporain.

Il me semble qu'il est possible de porter un jugement non pas raisonnable (le monde de l'édition est justement très raisonnable, c'est bien le problème), mais au contraire rationnel sur la littérature, si on accepte que la JOUISSANCE (Reviens, Sade ! Ils sont devenus fous.), est une forme de rationnalité, et même une rationnalité supérieure, une rationnalité ARDENTE. (Cf voir ce point Molière et sa Préface au Précieuses Ridicules sur tout le respect que le grand Momo porte au public et, en substance, sur les applaudissements comme forme de rationalité.)

A mes yeux, le public, puisqu'il aime, a toujours raison sur le long terme, raison d'une raison supérieure à celle des pharisiens qui ne savent plus aimer.

Parmi mes grands ennemis, les pharisiens. (Je ne suis pas catholique pour rien.)

Reste à éclairer le public et à lui montrer comment JOUIR encore plus, comme on enseignerait le Kama-Sutra à deux amoureux se contentant du missionnaire.

Je pourrais parler simplement de JOIE, et du petit peu que j'ai compris de Spinoza (éclaire-moi, je suis très flou sur ce point), la joie est capitale dans son système. Spinozisme : recherche de la joie maximale à travers l'amour intellectuel de Dieu cad la Nature ? C'est ça ?

Mais je préfère jouissance pour enfoncer le clou et marquer le caractère scandaleux, sexuel, FATAL de la vraie littérature. (Cf Gracq.)

Même si ce n'est pas très "cool" au regard du relativisme ambiant (je suis en train d'écrire une première charge contre le relativisme), même si ce mot est devenu tabou, je prétends avoir une AUTORITE en matière de jouissance romanesque, comme un vieux libertin pourrait juger si une femme est une déesse du sexe ou un mauvais coup.

Cette autorité, je la tire de l'EXPERIENCE du plaisir et de lui seul. Tout le reste (biographie de l'auteur, critique génétique, psychocritique, etc.), n'étant que de simples appuis qui ne me servent qu'à augmenter cette jouissance, toujours première.

Jusqu'à un certain point, cette jouissance est subjective. On peut préférer les brunes, les blondes, le 95 D ou C, les asiatiques, les rousses, etc.
De même, jusqu'à un certain point, sur le plan romanesque, "autant de têtes, autant d'avis."

Mais ce relativisme ne tient pas lorsque l'on recherche, comme moi, la jouissance maximale, et, pour ce faire, la jouissance parallèle des autres est nécessaire.

Comme on peut fantasmer sur une paire de seins si fascinante qu'elle pourrait faire envie aux amateurs de petites poitrines, de même, un roman est d'autant plus grand qu'on peut écrire dessus :"Vous l'aimerez, même si d'habitude, vous n'aimez pas la littérature fantastique, le polar, la littérature chinoise, etc."

Il me semble que, s'il y a des GENERALITES en matière de jouissance romanesque, il n'y a aucune LOI. OU plutôt que cette loi n'est qu'une série d'EXCEPTIONS. Qu'on ne peut pas déduire la suite d'une oeuvre, puisque la liberté de l'auteur n'est pas mathématique. Que la critique littéraire est un art, difficile, de l'exception.

C'est pourquoi la presse littéraire est stupide. Français, étranger, polar, philo, document, etc. Ce n'est pas une catégorie de jouissance. Chaque numéro devrait être une divine SURPRISE.

Pas facile !

Il faudrait proposer une ORGASMOSOPHIE de la littérature et pas simplement une philosophie. Philosophie, plus personne ne comprend la philia. ORGAMOSOPHIE, au moins ce serait clair.

De même, dans le Credo catholique, quand on dit que Jésus descend aux Enfers, personne ne comprend qu'il descend au Shéol. De même, il faut rendre grâce à un autre grand, Grainsbourg, pour avoir chanté Ronsard 58, avec courage, brio et générosité pour le peuple qui ne connaissait pas Ronsard. Gainsbourg, conscient d'être un artiste mineur. Sans doute sa plus grande gloire.

Pardon de ne pas être plus précis. Mais c'est un point qui m'intéresse beaucoup, sur lequel je travaille et que j'affinerai avec le temps. (on peut pas tout faire en même temps.)

Mais le coeur c'est ça, et je pense qu'il ne bougera pas : DE LA CRITIQUE LITTERAIRE COMME RECHERCHE DE LA MAXIMISATION DE LA JOUISSANCE, JOUISSANCE D'AUTANT PLUS GRANDE QU'ELLE EST PARTAGEE.

Pour terminer cette longue note, et puisque je voudrais te répondre sur tout : l'alchimie.

Lettre très intéressante et très aride de Spinoza comme d'habitude.

Personnellement, je suis naturellement très sceptique sur la possibilité de , littérarelement, transformer le plomb en or.

Mais enfin, comme s'exclame Horatio à l'ouverture de Hamlet "Il y a plus de choses au Ciel et sur la Terre que vous ne pouvez en rêver avec toute votre philosophie". Donc, je ne me prononce pas sur un point sur lequel je suis aussi incompétent.

Par contre, l'Alchimie m'intéresse, comme m'intéresse Tchouang Tseu (cf les remarquables leçons de JF Billeter. Ed Allia.)

Même si je fais de l'Alchimie à la Néphilim, donc certainement très grossièrement, mon parcours littéraire à commencé par l'oeuvre au noir : décomposer les textes des autres, en aperçevoir les éléments, les analyser, les décortiquer, les critiquer. Puis, avec l'expérience et la mâturité, est venue l'oeuvre au blanc, la recréation de la matière : me couler dans les moules existants, écrire des articles moi aussi jusqu'à, sommet de l'oeuvre au blanc : le pastiche. Aujourd'hui, naturellement, je cherche à passer à l'oeuvre au rouge, le Grand Oeuvre : écrire ma propre littérature.

Je trouve ça très joliment dit et, encore une fois, pour moi, la beauté, comme le mythe, est une forme de raison ardente. Comme Spinoza est une raison froide. C'est pourquoi je le trouve beaucoup moins sexy Platon (ce qui ne veut pas dire, naturellement, qu'il soit moins intelligent).

Ca ressemble beaucoup à l'anecdote de Tchouang Tseu sur le boucher devenu si compétent qu'il découpe désormais la viande sans se rendre compte de ce qu'il fait, tellement le geste juste lui est devenu naturel.

Mais, naturellement, la transformation littéral du plomb en or, et non le plomb de l'ignorance en l'or de la connaissance, je demande à voir...





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