La liberté - le déterminisme

Questions et débats touchant à la doctrine spinoziste de la nature humaine, de ses limites et de sa puissance.
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sescho
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Messagepar sescho » 13 janv. 2009, 22:44

Bonsoir Sinusix,

Sinusix a écrit :L'enchaînement logique de la fusée à trois étages est le suivant :

...

- 3ème étage - Modes infinis médiats : Spinoza devrait développer son argumentaire sur deux plans, mais ne le fait bizarrement que concernant les corps - la facies totius universi (rien sur les idées existantes). C'est l'étage de l'existence et des existences. A ce niveau, chaque chose singulière est produite par l'attribut (dans le respect de l'interconnexion des attributs dans l'unité substantielle, rappelons-le) en tant qu'il cause en même temps la chaîne infinie des choses singulières. L'existence de chacune dépend donc de l'action de toutes les autres. A cet étage, chaque attribut peut se développer et agir en son genre, ce qui explique que pourront, par exemple, se développer les idées inadéquates

Pour moi, il est acquis que les "modes infinis médiats" n'existent pas chez Spinoza, malgré E1P22-23. Tout ceci n'est qu'une extrapolation hasardeuse selon moi. Un des premiers éléments est que E2L7S ne fait aucune référence à ces propositions. Mais il y a bien d'autres éléments qui me le confirment, comme cela a été discuté ici et dans le fil sur le long... Je suis prêt à en rediscuter avec vous, si cela vous intéresse.

Sinusix a écrit :Bizarrement, comme je le dis plus haut et le note M. Guéroult, nous constatons un déséquilibre d'exposition de la part de Spinoza, lequel contribue peut-être à la difficulté de reconstitution de sa pensée. En effet, au 3ème étage, le monde des idées existantes (mode infini médiat de la Pensée) est, en apparence, laissé vide (il semble répugner à mettre expressément en corrélation le total des existences psychiques et le total des existences corporelles - dixit M. Guéroult) ; en revanche, au 2ème étage, c'est le concept Mouvement et le repos qui reste "obscur" par rapport aux développements sur l'entendement infini.

Je ne trouve pour ma part aucun manque dans l'expression de Spinoza : la face de l'univers entier vaut tant pour la Pensée que pour l'Etendue, puisqu'il y a parallélisme entre les corps et les idées en acte en Dieu. Idem pour l'entendement infini : celui-ci recouvre tout ce que le Mouvement peut produire, soit tous les corps possibles.

Sinusix a écrit :... j'ai peine à comprendre, conformément à ce que je rappelais à Louisa de ma lecture de E2P8, que les essences individuelles (les sécantes E et D spécifiques) soient données et qu'il ne suffit pas de l'essence dont elles découlent génétiquement (celle du cercle). Par ailleurs, en quoi pose et supprime sont-ils des termes liés au fonctionnement de l'intellect puisque la définition porte sur toutes les essences (de corps et d'idées).

Les sécantes ne se réfèrent pas aux essences (il n'y a pas de différence entre l'essence du cercle et l'essence de tout ce qui en suit immédiatement) mais aux idées en acte. Tant qu'un corps n'existe pas en acte, sauf en ce qu'il est contenu dans l'Etendue (difficulté là...), son idée n'existe pas en acte, sauf en ce qu'elle est contenue dans l'entendement infini ou idée de Dieu, mais si le corps vient à exister (sous cette forme qu'on dit durer) alors l'idée de ce corps existe parallèlement dans la Pensée sous cette même forme.

Pour les "pose" et "supprime", il ne s'agit pas de naissance ou de mort de choses en acte, mais d'opérations de l'entendement (qui disent que si l'on pose A on a B, et si l'on supprime A on supprime B, autrement dit que A et B s'impliquent mutuellement, ou encore qu'il y a équivalence entre A et B, le tout dans l'entendement), ce qui seul est compatible avec des essences.

Sinusix a écrit :Là je préfère dire que je ne comprends pas ce paragraphe puisque l'objet la démonstration est de montrer au contraire qu'à l'essence de l'homme n'appartient pas l'être la substance ?

J'ai bien précisé que l'équivalence que je cherche (qui est positive en elle-même) se situe dans une démonstration par l'absurde (dont au moins une prémisse est fausse, donc.)

Sinusix a écrit :... on voit bien que, dans le fonctionnement du 3ème étage, les idées ne sont pas l'effet absolu de l'attribut Pensée, mais sont produites en tant que l'attribut est cause de l'ensemble infini des idées existantes nécessaires pour les déterminer, l'existence de chacune dépendant de l'action de toutes les autres (autrement dit, la connaissance ne vient que de la compréhension de l'enchaînement infini des choses).

Je ne suis pas sûr de suivre. Je vois que vous assimilez les (prétendus selon moi) "modes infinis médiats" aux canevas de choses singulières existant à un instant donné, et sous cet angle, je vois peu à y contester (ce n'est pas éternel, l'infinité appartient en fait à la substance elle-même, et de fait c'est donc la plus grande des choses singulières.) Si ce n'est par le raisonnement et l'imagination, l'enchainement des idées est assez difficile à percevoir. Sauf en faisant appel au parallélisme, qui lie l'enchaînement des idées à l'enchaînement des corps (et c'est sans doute pour cela que Spinoza fait autant d'aller et retour des corps aux idées.)

Sinusix a écrit :Par là, les choses se compliquent, mais ce n'est pas le lieu d'en parler, à partir du moment où, contrairement à ce que pouvait penser Spinoza à son époque, la chaîne de la Nature naturée ne part pas d'un premier niveau d'essences identifiées constituées dans l'absolu, mais qu'elle est susceptible de remonter jusqu'aux éléments de base de la soupe substantielle "primitive" (ce qui prouve que la clarification de l'incidence déformante du temps, abordée par Bardamu, est complexe, pour ne pas dire plus).

Je ne suis pas sûr de suivre non plus. Spinoza prend les choses en général, ce qui est peu susceptible d'être limité par quoi que ce soit. Il n'y a aucune limitation de nature posées aux essences a priori (et en aucun cas selon moi l'essence de Dieu n'est constituée d'une "penderie" d'essences particulières, mais d'un continuum d'essence duquel peuvent se manifester la particularité sous forme de telle ou telle chose singulière, à un instant donné ; c'est l'esprit des segments dans le cercle, qui appartiennent à l'essence du cercle et ne se distinguent que quand ils viennent à être manifestés - ce qui n'est pas loin de la lapalissade d'ailleurs.)

Sinusix a écrit :... tout corps a les propriétés de sa cause absolue, à savoir celles des essences éternelles et des lois qui font partie des modes infinis immédiats qui le concernent (par exemple le genre homme et toutes les lois associées, notamment de reproduction sexuée ; la faculté de penser)

Oui. Ce n'est pas aisé à percevoir, mais on sent que c'est fort...

Amicalement


Serge
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Messagepar Sinusix » 16 janv. 2009, 16:54

sescho a écrit :Bonsoir Sinusix,

Sinusix a écrit :L'enchaînement logique de la fusée à trois étages est le suivant :

...

- 3ème étage - Modes infinis médiats : Spinoza devrait développer son argumentaire sur deux plans, mais ne le fait bizarrement que concernant les corps - la facies totius universi (rien sur les idées existantes). C'est l'étage de l'existence et des existences. A ce niveau, chaque chose singulière est produite par l'attribut (dans le respect de l'interconnexion des attributs dans l'unité substantielle, rappelons-le) en tant qu'il cause en même temps la chaîne infinie des choses singulières. L'existence de chacune dépend donc de l'action de toutes les autres. A cet étage, chaque attribut peut se développer et agir en son genre, ce qui explique que pourront, par exemple, se développer les idées inadéquates

Pour moi, il est acquis que les "modes infinis médiats" n'existent pas chez Spinoza, malgré E1P22-23. Tout ceci n'est qu'une extrapolation hasardeuse selon moi. Un des premiers éléments est que E2L7S ne fait aucune référence à ces propositions. Mais il y a bien d'autres éléments qui me le confirment, comme cela a été discuté ici et dans le fil sur le long... Je suis prêt à en rediscuter avec vous, si cela vous intéresse.

Serge


Bonjour Sescho,

J'avais pris connaissance de ces échanges et suis au regret de ne pouvoir suivre votre point de vue pour la raison simple de la présence explicite de E1P22. Cela, conformément à l'esprit de l'article 1157 du Code Civil, selon lequel : Lorsqu'une clause est susceptible de deux sens, on doit plutôt l'entendre dans celui avec lequel elle peut avoir quelque effet, que dans le sens avec lequel elle n'en pourrait produire aucun.
L'opérabilité de cette proposition est de plus expressément confirmée, notamment par E1P23D et E1P28D et E1P28S.
Il y a donc bien un étage infini médiat (correspondant à l'infinité parallèle des modifications d'attributs). Je l'exprime ainsi pour éviter la confusion, que j'ai cru entrevoir dans certains échanges avec Louisa, consistant à poser plusieurs niveaux infinis médiats en cascade.
Ce niveau est fondamental car c'est celui de l'existence (donc du "transitif" selon votre formulation, ou de "l'instrumenté"), le niveau "supérieur" étant celui des essences éternelles et des lois.
La série infinie des enchaînements entre les choses finies fonctionne donc bien en partition "à l'horizontal" de ce niveau, ceci sous le "commandement" vertical de la "tour de contrôle" des essences éternelles et des lois appartenant à l'étage de l'infini immédiat. Cette double détermination causale ("transitive" et absolue) implique la présence du bi-couche.
Ce passage de la métaphysique à la physique, tel qu'exposé par E2LemmeVIIS que vous citez ne laisse pas cependant de poser problème dans la mesure où les enchaînements de choses singulières s'inscrivant dans une chaîne "éternelle" de transitions entre choses singulières, on se demande où se trouve le "saut" logique qui nous fait passer de l'infini homogène à l'infinité des singularités première (le big bang métaphysique), même si, nous en sommes bien d'accord, nous restons néanmoins dans le continu de la substance homogène.

Nous restons donc néanmoins, quelque part, dans le jeu de mots puisque personne ne détient la vérité du Rubicon métaphysique.

Amicalement

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Messagepar sescho » 16 janv. 2009, 21:30

Sinusix a écrit :J'avais pris connaissance de ces échanges et suis au regret de ne pouvoir suivre votre point de vue pour la raison simple de la présence explicite de E1P22. ...

Je suis moi-même au regret de vous dire que je le confirme ;-) Je ne vais pas reprendre l'argumentaire du fil que j'ai mentionné, que j'estime complet et assez clair. La présence explicite n'est établie nulle part (aucune trace, le rapport à E2L7S étant une extrapolation distante), y compris dans E1P22 (pour laquelle il n'y a en outre aucun exemple, au contraire de E1P21.)

Sinusix a écrit :L'opérabilité de cette proposition est de plus expressément confirmée, notamment par E1P23D et E1P28D et E1P28S.

Nullement selon moi. E1P23D n'ajoute rien à E1P22 et E1P28S est au contraire opposé (puisqu'il n'y apparaît rien entre : premièrement les modes immédiats, ou qui suivent de la nature absolue de l'attribut, et secondement : les choses singulières.)

Par ailleurs, tous les usages de E1P22-23 sont négatifs et non positifs (autrement dit, c'est pour dire que la chose en question ne peut pas découler absolument d'un mode éternel et infini, soit d'un mode qui découle lui-même de la nature absolue d'un attribut.)

Sinusix a écrit :Il y a donc bien un étage infini médiat (correspondant à l'infinité parallèle des modifications d'attributs). Je l'exprime ainsi pour éviter la confusion, que j'ai cru entrevoir dans certains échanges avec Louisa, consistant à poser plusieurs niveaux infinis médiats en cascade.

Il ne suffit pas de le dire - comme Louisa et Pourquoipas -, il faut le prouver. Puisque vous affirmez la positivité de E1P22, vous devez poser l'infinité des modes médiats. Car il est dit qu'un mode infini et éternel doit avoir pour effet un mode infini et éternel...

Ou quoi ? La positivité qui ne sert qu'une fois ?

Sinusix a écrit :Ce niveau est fondamental car c'est celui de l'existence (donc du "transitif" selon votre formulation, ou de "l'instrumenté")...

Mais je ne conteste nullement ce niveau (c'est celui de toutes les choses singulières existant dans l'infinité de leur attribut, par exemple, le "canevas" de tous les corps en interdépendance couvrant toute l'étendue.) Je ne conteste nullement la face totale de l'Univers : c'est une évidence. Ce que je conteste c'est que ce soit un soi-disant "mode infini médiat." Je conteste qu'il soit plus éternel qu'une existence de chose singulière (qui ne l'est pas selon Spinoza.) Comme toutes les choses singulières (disons les corps) se touchent et se contraignent mutuellement au sein de l'attribut, il est on ne peut plus normal de considérer le tout, c'est-à-dire la face totale de l'univers (c'est un synonyme d'interdépendance, ou presque.) Cela n'en fait nullement un mode infini et éternel (l'identification entre le soi-disant mode médiat et la face totale de l'Univers est forcée, je le répète ; elle ne reçoit aucune légitimité du texte de Spinoza, qui je le répète ne fait aucun lien entre E2L7S et E1P22 - ce qui en passant me semble bien valoir au moins ce que vous appelez la "positivité de E1P22".)

Pouvez-vous m'expliquer en quoi la face totale de l'univers est éternelle ?

Je ne vois pas en outre en quoi cette face totale de l'univers pourrait être considérée une cause des choses singulières. Ou comment voyez-vous ce rapport de causalité ? (Car par ailleurs Spinoza dit bien très explicitement que les choses singulières sont reliées aux attributs par la causalité (immanente.))

Comment aussi expliquer que dans E2L7S on passe d'un individu (qui est une chose singulière) à un individu englobant (qui est une autre chose singulière) sans que prolongeant à l'infini on n'ait encore une chose singulière ?

Je rappelle enfin que les extraits du CT que j'ai produits excluent totalement (aucun espace n'est laissé) la présence de ces prétendus "modes infinis médiats" entre les modes infinis (immédiats) et les choses singulières (ou la face totale de l'Univers, car c'est la même chose que [les choses singulières].)

Cela fait je pense plus qu'assez pour considérer que le parallèle avec l'interprétation des textes légaux puisse être éventuellement envisagée comme faible...

Sinusix a écrit :Ce passage de la métaphysique à la physique, tel qu'exposé par E2LemmeVIIS que vous citez ne laisse pas cependant de poser problème dans la mesure où les enchaînements de choses singulières s'inscrivant dans une chaîne "éternelle" de transitions entre choses singulières, on se demande où se trouve le "saut" logique qui nous fait passer de l'infini homogène à l'infinité des singularités première (le big bang métaphysique), même si, nous en sommes bien d'accord, nous restons néanmoins dans le continu de la substance homogène.

C'est un point qu'il m'intéresse beaucoup de clarifier. La causalité immanente a trait aux essences, et de ce côté il n'y a pas de problème. Le problème vient de la "transmission" et de la distinction de statut vis-à-vis de l'existence. Nous passons de l'existant par son essence à l'existant sempiternellement par la vertu de sa cause à l'existant temporairement (sans modes médiats chez moi, évidemment ; E1P22-E1P28). Spinoza pose le Mouvement comme cause immanente des corps, mais pas comme cause de l'existence (ce sont d'autres corps) ; c'est là que se situe le nœud de compréhension.

Amicalement

Serge
Modifié en dernier par sescho le 17 janv. 2009, 13:35, modifié 1 fois.
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Messagepar hokousai » 17 janv. 2009, 11:42

Cher Serge
je reviens sur mes préoccupations
Pour moi, il est acquis que les "modes infinis médiats" n'existent pas chez Spinoza,

Bon d’accord
Mais il faut bien recoudre , c’est à dire trouver un lien entre les modes infinis ( immédiats ou médiats peu importe ) et les modes finis .

Ce qui se passe au niveau des prop 25 26 27 partie 1
est intrigant .
Spinoza parle d’un attribut de Dieu en ce qu’il est modifié par une modification qui est finie et a une existence déterminée ensuite cette cause etc … l’infinité se trouve dans l’infinité de la chaîne des causes . Ce qui est bien décevant , on a alors une image de Dieu comme collections infinies de parties finies .
Dites- moi une bonne fois comment ne pas échapper à cette idée ? Si on ne rompt pas la finitude du mode fini on ne peut y échapper )

Pour un aristotélicien la question n’a pas vraiment de sens . Bien que posée par les scolastiques ,et on connaît la réponse scotiste par l’ héccéité, certains scolastiques (par ex Pierre D’ Auriole ) ne voient pas le sens de la question (de l‘individuation / singularité des choses ) , les substances chez Aristote sont séparées de fait .(à la limite on ne discute pas le fait ).
Chez Spinoza on a une substance infinie ,indivisible ( c’est affirmé ), la question a donc un sens ...

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Messagepar Sinusix » 17 janv. 2009, 14:06

Bonjour Sescho,

sescho a écrit :Nullement selon moi. E1P23D n'ajoute rien à E1P22 et E1P28S est au contraire opposé (puisqu'il n'y apparaît rien entre : premièrement les modes immédiats, ou qui suivent de la nature absolue de l'attribut, et secondement : les choses singulières.)


Je prends note de vos convictions. N'étant pas de taille à lutter avec vous sur le sens et la portée du et alia mediantibus his primis de E1P28S, je laisse à ceux qui ont votre puissance le soin de prendre le relais, si cela est nécessaire, car en effet, je suis bien en phase sur le résultat, au final, de tout ceci, à savoir :

sescho a écrit :
Sinusix a écrit :Ce passage de la métaphysique à la physique, tel qu'exposé par E2LemmeVIIS que vous citez ne laisse pas cependant de poser problème dans la mesure où les enchaînements de choses singulières s'inscrivant dans une chaîne "éternelle" de transitions entre choses singulières, on se demande où se trouve le "saut" logique qui nous fait passer de l'infini homogène à l'infinité des singularités première (le big bang métaphysique), même si, nous en sommes bien d'accord, nous restons néanmoins dans le continu de la substance homogène.


C'est un point qu'il m'intéresse beaucoup de clarifier. La causalité immanente a trait aux essences, et de ce côté il n'y a pas de problème. Le problème vient de la "transmission" et de la distinction de statut vis-à-vis de l'existence. Nous passons de l'existant par son essence à l'existant sempiternellement par la vertu de sa cause à l'existant temporairement (sans modes médiats chez moi, évidemment ; E1P22-E1P28). Spinoza pose le Mouvement comme cause immanente des corps, mais pas comme cause de l'existence (ce sont d'autres corps) ; c'est là que se situe le nœud de compréhension.


Dont je doute que nous puissions le résoudre, sinon c'est la renommée assurée et pour vous le Nobel, puisque même les physiciens en appellent aux philosophes pour conceptualiser les murs qui se présentent devant eux quand ils remontent la chaîne.

Amicalement.

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Messagepar Sinusix » 17 janv. 2009, 14:31

hokousai a écrit :Cher Serge
Bon d’accord
Mais il faut bien recoudre , c’est à dire trouver un lien entre les modes infinis ( immédiats ou médiats peu importe ) et les modes finis .
Ce qui se passe au niveau des prop 25 26 27 partie 1
est intrigant .
Dites- moi une bonne fois comment ne pas échapper à cette idée ? Si on ne rompt pas la finitude du mode fini on ne peut y échapper )

Chez Spinoza on a une substance infinie ,indivisible ( c’est affirmé ), la question a donc un sens ...


Tout à fait d'accord, ce propos étant en phase avec l'interrogation précédente. C'est comme si, dans les deux "dimensions" de l'essence Dieu, qui n'en font certes qu'une seule, l'une, statique, pose de l'Etre, était indivisible, l'autre, dynamique, sa puissance, ne pouvait pas ne pas être exercée autrement que par la division, donc la singularisation.
C'est donc ne pas pouvoir franchir le mur et simplement affirmer qu'il était de la nature de Dieu d'exprimer sa puissance dans l'infinie division de son Etre, faute de laquelle aucune puissance, même infinie, n'était exerçable (la division et/ou le déséquilibre dans la division de l'homogène, puisque, par exemple, le Monde ne pourrait devoir son existence qu'au déséquilibre semble-t-il expérimentalement constaté entre matière et antimatière).
Mais à ce moment là, si l'Un est par nature divisible pour pouvoir exercer sa puissance (le pour n'étant bien entendu que construction de phrase et non germe d'intentionnalité), ne faut-il pas se réinterroger sur le statut du nombre, voire du binaire, puisque tout ceci tourne, soit autour du tiers exclu, donc le nombre 2, mais aussi d'autres nombres (six quarks).
Certes, tout ceci sent l'être de raison. Mais tout de même.

Passionnant la philosophie !

Amicalement

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Messagepar hokousai » 17 janv. 2009, 15:33

à Sinusix

vous écriviez

on se demande où se trouve le "saut" logique qui nous fait passer de l'infini homogène à l'infinité des singularités première (le big bang métaphysique), même si, nous en sommes bien d'accord, nous restons néanmoins dans le continu de la substance homogène.


c'est tout à fait le problème .

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Messagepar Enegoid » 20 janv. 2009, 12:48

Coucou ! Revoilà les modes infinis médiats, dont le conatus est bien vivace, malgré leur inexistence supposée.

Tout le monde est d’accord pour dire qu’il y a un problème de « passage », que l’on qualifie ce passage de chose à recoudre, de saut ontologique, de passage de métaphysique à physique, ou de transmission de statut de l’essence à l’existence.

Je vais exprimer ma compréhension de ce problème, et je dirai ensuite ce qui me paraît erroné dans les conceptions de Seischo, avec qui j’ai débattu en novembre dernier sur le sujet.

Ma compréhension du problème :
(Je la donne sous l’angle de l’étendue. On peut dire la même chose sous l’angle de la pensée)

Sous l’angle de l’étendue, donc, on a :
1. L’attribut : l’étendue
2. Le mode infini immédiat : mouvement et repos (p21)
3. Le mode infini médiat (p22, qui pose problème) : la « face totale de l’univers » cf lettre 64

Ces trois « choses » sont infinies et éternelles. Ce sont des modifications « logiques », intemporelles, toujours là : c’est « Deus sive natura ». La nature, grand « corps » qui a toujours existé, ou, si l’on veut, c’est la « corporéité » comme existante, nécessairement, couche de peinture sur l’étendue/mouvement.
Le problème vient du lemme 7 : « la nature entière est un seul individu ». La nature entière, c’est Dieu, elle est donc éternelle et infinie. Mais la nature entière est un individu, donc un corps, donc fini.
Contradiction.

Cette « face de l’univers » est un ovni. (De même, en passant, que la notion de loi, que l’on ne sait qualifier, sinon, peut-être, comme une propriété de la substance. Autre sujet.)

Ce qui me paraît erroné dans la conception de Seischo :

1. Il est amené à faire l’impasse sur p22 : il n’a pas d’explication sur ce qu’elle signifie. Et il ne veut pas lire la lettre 64.

2. Il pense que p23 n’apporte rien. Je pense que p23 est nécessaire pour clore la série potentiellement infinie que laisse supposer p 22. P23 explique pourquoi il n’y a que deux niveaux de modes infinis.

3. Il dit que P28s ne comporte que deux éléments, ce qui est vrai, mais il oublie que p28 demo réfère bien à P21 et P22. (On a un problème, effectivement, parce que les deux éléments de la démo ne sont pas les mêmes que les deux éléments du scolie).

4. Il conclut des choses d’une absence de liens (entre p22 et le lemme 7). Pour moi, cette absence de lien est un symptôme du côté problématique du concept de « face totale ». Le lien existe cependant, via la lettre 64.

5. Les citations du CT. Effectivement le CT ne laisse pas de place au mode infini médiat. Qu’en conclure, au sujet de la face totale de l’univers, sans contredire ce qu’en dit Spinoza dans l’éthique et dans la lettre 64 ?
Pour être complet, il faut noter que, concernant le mouvement, Spinoza botte en touche explicitement vers la physique, dans le CT. Ce qui suppose qu’il avait bien conscience de quelque chose restant à expliquer : voir espace/temps et physique quantique ?

En conclusion, pour rebondir sur une appréciation de Sinusix, celui qui aura le Nobel sera-t-il philosophe ou physicien ?

Cordialement

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Messagepar Sinusix » 20 janv. 2009, 19:00

Enegoid a écrit :Coucou ! Revoilà les modes infinis médiats, dont le conatus est bien vivace, malgré leur inexistence supposée.

Tout le monde est d’accord pour dire qu’il y a un problème de « passage », que l’on qualifie ce passage de chose à recoudre, de saut ontologique, de passage de métaphysique à physique, ou de transmission de statut de l’essence à l’existence.

3. Il dit que P28s ne comporte que deux éléments, ce qui est vrai, mais il oublie que p28 demo réfère bien à P21 et P22. (On a un problème, effectivement, parce que les deux éléments de la démo ne sont pas les mêmes que les deux éléments du scolie).


Ce n'est pas sûr mais dépend de l'interprétation que l'on fait du et, moyennant ces premières du début du scolie : Comme certaines choses ont dû être produites immédiatement par Dieu, j'entends celles qui suivent nécessairement de sa nature absolue, et, moyennant ces premières, d'autres.....

Personnellement, même si cela ne résout rien, mais permet, comme vous le dîtes, d'éviter la prolifération des strates d'infini, je maintiens bien un niveau infini des fixes, les essences et lois, ensemble de parties deux à deux disjointes comme diraient les mathématiciens (en raison de "determinata"), et le niveau infini des variables transitives, les existences singulières, mais sempiternellement collectivisables comme la face de l'univers.

Enegoid a écrit :En conclusion, pour rebondir sur une appréciation de Sinusix, celui qui aura le Nobel sera-t-il philosophe ou physicien ?


Les physiciens en fait butent sur le statut du temps (qui n'est pas, paraît-il, un "opérateur hermitien") et en appellent aux philosophes sur ce point. D'où la position majoritaire vers l'Univers bloc.
Sans vouloir créer un casus belli, une partie du problème ne vient-elle pas de la qualité d'attribut qui a été donnée à l'étendue et des conséquences implicites de l'assimilation de la puissance à l'essence.
1/ D'une part l'étendue ne peut se penser directement par l'homme, mais Spinoza ne le savait pas, indépendamment de la vitesse limite de la lumière, autrement dit l'étendue n'est pas un "absolu" mais une des faces d'un complexe à quatre dimensions. On pourrait envisager aussi que cette dimension attributive inconnue de Descartes/Spinoza, pour des raisons de perception immédiate par les sens de l'homme, ferait partie de l'infinité des attributs inconnus, mais qui participent à l'enchaînement substantiel.
2/ En élevant la puissance de Dieu (ce qu'on ne peut pas ne pas soutenir comme fondement du tout spinoziste) au statut de "propre" de Dieu, ladite puissance signifiant puissance d'agir, Spinoza intègre bien le mouvement (pas d'action sans mouvement/changement) comme inhérent à l'essence de Dieu, ce qui, puisqu'on ne peut introduire le temps, imposerait de rejoindre la conception scientifique d'un univers-bloc.

Mais tout ceci n'est pas peut-être pas fondamental puisque, de Aristote à Quine, et de Pythagore à Einstein, personne n'a encore trouvé la solution, si elle existe. Comme quoi l'intelligibilité totale de Dieu n'est pas si évidente que cela.

Heureusement, il y a le reste Spinoziste pour espérer.

Amicalement.

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sescho
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Messagepar sescho » 20 janv. 2009, 22:06

Je m'use depuis plusieurs jours sur une synthèse complète du problème ; je ne suis pas encore satisfait du résultat. Je saisis pour l'heure la récréation que m'offre Enegoid...

Enegoid a écrit :Ma compréhension du problème :
(Je la donne sous l’angle de l’étendue. On peut dire la même chose sous l’angle de la pensée)

Sous l’angle de l’étendue, donc, on a :
1. L’attribut : l’étendue
2. Le mode infini immédiat : mouvement et repos (p21)
3. Le mode infini médiat (p22, qui pose problème) : la « face totale de l’univers » cf lettre 64

L'association du soi-disant "mode infini médiat" et de la "face totale de l'univers" n'est absolument pas faite par Spinoza (pas de référence à E1P22 dans E2L7S). Cette apposition est forcée et donc n'est qu'une hypothèse, qui revient à prendre E1P22 comme strictement affirmative, ce qui est précisément en question. Car évidemment, quand on pose a priori l'existence d'un seul mode infini médiat (ce qui en outre contredit E1P22, qui doit être utilisée en boucle, à moins de prouver par la logique pourquoi il devient dès le deuxième niveau illégitime de l'appliquer...), on est obligé par la lettre 64 de dire que c'est la face totale de l'univers... Mais Spinoza, lui, n'établit aucun lien.

Enegoid a écrit :Ces trois « choses » sont infinies et éternelles.

En quoi la face totale de l'Univers peut-elle être dite éternelle ?

(J'attends autre chose qu'une simple répétition de la formule de la lettre 64, pour laquelle d'ailleurs je me demande si la traduction est correcte - pour moi c'est l'univers qui reste le même, pas la face, mais je suis loin d'être un expert en latin, ou néerlandais ; c'est le seul problème que j'ai avec cette lettre.)

Enegoid a écrit :Ce sont des modifications « logiques », intemporelles, toujours là : c’est « Deus sive natura ». La nature, grand « corps » qui a toujours existé, ou, si l’on veut, c’est la « corporéité » comme existante, nécessairement, couche de peinture sur l’étendue/mouvement.
Le problème vient du lemme 7 : « la nature entière est un seul individu ». La nature entière, c’est Dieu, elle est donc éternelle et infinie. Mais la nature entière est un individu, donc un corps, donc fini.
Contradiction.

On peut peut-être dire que c'est un passage à la limite. Mais dans cette limite l'infinité vient de l'Etendue elle-même, pas de sa manifestation (qui reste finie de nature.) Il y a bien derrière toujours la même difficulté (surtout notable pour l'Etendue) : le changement est dans la Nature mais la Nature ne change pas. Ce qui ne change pas c'est l'Etendue en Mouvement (l'Univers sauf erreur), ce qui change (et n'est donc pas éternel) c'est la face (visage) de l'Univers. Il n'y a pas de différence entre l'Etendue en mouvement et l'ensemble des corps (existant ou pas, soit l'Univers entier). Les corps ne se distinguent que par la proportion de mouvement et de repos.

Spinoza a écrit :PM1Ch6 : … Que si toutefois ce raisonnement paraît un peu obscur, accordons, je le veux, que la tendance à se conserver est quelque chose en plus des lois mêmes et de la nature du mouvement ; puis donc qu’on suppose que cette tendance est un bien métaphysique, il faudra nécessairement que cette tendance ait elle-même une tendance à persévérer dans son être et cette dernière une autre et ainsi à l’infini, ce qui est la plus grande absurdité qu’à ma connaissance on puisse imaginer. …

CT1Ch3 : 5° Dieu est cause principale de ses œuvres, de celles qu’il a créées immédiatement, par exemple du mouvement dans la matière : auquel cas les causes secondes ne peuvent avoir aucune action, puisqu'elles ne se manifestent que dans les choses particulières

CT1Ch8 : La nature naturée se divisera en deux parties, l’une générale, l’autre particulière. La première se compose de tous les modes qui dépendent immédiatement de Dieu (nous en traiterons dans le chapitre suivant) ; la seconde consiste dans les choses particulières qui sont causées par les modes généraux, de telle sorte que la nature naturée, pour être bien comprise, a besoin d'une substance.

CT1Ch9 : (1) Quant à ce qui concerne la nature naturée générale, c'est-à-dire les modes ou créatures qui dépendent immédiatement de Dieu ou sont créées par lui, nous n'en connaissons pas plus de deux, à savoir le mouvement dans la nature et l’entendement dans la chose pensante, lesquels modes sont de toute éternité et subsisteront pendant toute éternité…

CT2Pré Note 7. Toute chose particulière qui arrive à l’existence réelle, devient telle par le mouvement ou par le repos ; et c'est ainsi (c'est-à-dire par le mouvement et le repos) que se produisent tous les modes dans la substance étendue que nous nommons des corps.

CT2Ch19 : (8) Si donc nous considérons l'étendue toute seule, nous n'y trouverons rien autre chose que le mouvement et le repos, et tous les effets qui en dérivent

CTApp1P4Dm : … Telles sont les choses que nous voyons autour de nous, lesquelles, avant d'exister, étaient contenues en puissance dans l’idée de l’étendue, du mouvement et du repos, et qui, lorsqu'elles existent, ne se distinguent de l'étendue que d'une manière modale et non réelle. …

CTApp2 : (14) Supposons comme une chose démontrée qu’il ne peut y avoir dans l’étendue d'autre mode que le repos et le mouvement, et que toute chose corporelle particulière n'est rien autre qu'une certaine proportion de mouvement et de repos, de telle sorte que, si dans toute l'étendue il n'y avait que repos absolu ou mouvement absolu, il n'y aurait aucun corps distinct : il s'en suit que le corps humain ne peut être qu'une certaine proportion particulière de repos et de mouvement.

E1P28S : Comme il est nécessaire que certaines choses aient été produites immédiatement par Dieu, c’est à savoir celles qui découlent nécessairement de sa nature absolue, sans autre intermédiaire que ces premiers attributs, qui ne peuvent être ni être conçus sans Dieu ; il suit de là : premièrement, que Dieu est la cause absolument prochaine des choses qui sont immédiatement produites par lui ; absolument prochaine, dis-je, et non générique, comme on dit ; car les effets de Dieu ne peuvent être ni être conçus sans leur cause (par la Propos. 15 et le Coroll. de la Propos. 24) : secondement, que Dieu ne peut être appelé proprement la cause éloignée des choses particulières, si ce n’est afin de distinguer cet ordre de choses de celles que Dieu produit immédiatement, ou plutôt qui suivent de sa nature absolue. …

E1P32C2 : Il en résulte : 2° que la volonté et l’entendement ont le même rapport à la nature de Dieu que le mouvement et le repos, et absolument parlant, que toutes les choses naturelles qui ont besoin, pour exister et pour agir d’une certaine façon, que Dieu les y détermine ; car la volonté, comme tout le reste, demande une cause qui la détermine à exister et à agir d’une manière donnée, et bien que, d’une volonté ou d’un entendement donnés, il résulte une infinité de choses, on ne dit pas toutefois que Dieu agisse en vertu d’une libre volonté, pas plus qu’on ne dit que les choses (en nombre infini) qui résultent du mouvement et du repos agissent avec la liberté du mouvement et du repos. Par conséquent, la volonté n’appartient pas davantage à la nature de Dieu que toutes les autres choses naturelles ; mais elle a avec l’essence divine le même rapport que le mouvement, ou le repos, et en général tout ce qui résulte, comme nous l’avons montré, de la nécessité de la nature divine, et est déterminé par elle à exister et à agir d’une manière donnée.

E2L1 : Les corps se distinguent les uns des autres par le mouvement et le repos, la vitesse ou la lenteur, et non par la substance.

E3P2S : … Or, il résulte clairement de tous ces faits que la décision de l’âme et l’appétit ou détermination du corps sont choses naturellement simultanées, ou, pour mieux dire, sont une seule et même chose, que nous appelons décision quand nous la considérons sous le point de vue de la pensée et l’expliquons par cet attribut, et détermination quand nous la considérons sous le point de vue de l’étendue et l’expliquons par les lois du mouvement et du repos

Lettre 32 à Oldenburg : … tous les corps sont environnés par d’autres corps, et se déterminent les uns les autres à l’existence et à l’action suivant une certaine loi, le même rapport du mouvement au repos se conservant toujours dans tous les corps pris ensemble, c’est-à-dire dans l’univers tout entier ; d’où il suit que tout corps, en tant qu’il existe d’une certaine façon déterminée, doit être considéré comme une partie de l’univers, s’accorder avec le tout et être uni à toutes les autres parties. Et comme la nature de l’univers n’est pas limitée comme celle du sang, mais absolument infinie, toutes ses parties doivent être modifiées d’une infinité de façons et souffrir une infinité de changements en vertu de la puissance infinie qui est en elle. …

Ces extraits, si l'on veut bien les lire attentivement, proposition (grammaticale) par proposition, recèlent bien des indications. Je note en particulier :

- Que c'est de toute évidence répétée le mouvement (et repos) qui est la cause immédiate (immanente) des corps.

- Que le parallélisme doit aussi être utilisé. Il est clair dans le texte que l'entendement infini est le parallèle du mouvement. Où sont donc les soi-disant modes infinis médiats de la Pensée ? Notamment en rapport avec le fait que notre entendement (notion générale recouvrant toutes nos idées) est une partie de l'entendement infini ?

- Que la lettre 32 reprend, en d'autres termes, ce qui est en question dans la lettre 64. Comme la lecture, toutefois, n'est pas univoque, je me réserve le développement pour plus tard.

Enegoid a écrit :Ce qui me paraît erroné dans la conception de Seischo :

1. Il est amené à faire l’impasse sur p22 : il n’a pas d’explication sur ce qu’elle signifie. Et il ne veut pas lire la lettre 64.

Après ce que j'ai déjà dit et répété, ceci confine à la diffamation ;-) Je ne fais aucune impasse sur E1P22, je dis qu'elle ne dit pas qu'IL EXISTE des modes infinis soi-disant médiats, mais que SI IL EXISTE des modes suivant immédiatement des modes immédiats ALORS ils sont éternels et infinis.

Sinon il va falloir m'expliquer par quel tour de passe-passe le Mouvement se trouve être (ce qui est on ne peut plus explicitement dit par Spinoza ci-dessus) en même temps la cause des corps...

Quant à la lettre 64, je dis qu'il n'y a AUCUN RAPPORT entre la face totale de l'univers et un soi-disant mode infini médiat. Je dis que les choses singulières découlent directement du Mouvement, et qu'il n'y a pas de différence entre [la totalité des choses singulières (à un instant donné, donc)] et la face totale de l'univers.

Enegoid a écrit :2. Il pense que p23 n’apporte rien. Je pense que p23 est nécessaire pour clore la série potentiellement infinie que laisse supposer p 22. P23 explique pourquoi il n’y a que deux niveaux de modes infinis.

C'est encore n'importe quoi, cher ami... Je dis que E1P23 n'apporte rien sur la teneur propre de E1P22 ; c'est complètement différent. E1P23 est un complément à E1P21 et E1P22 qui dit qu'il n'y a pas d'alternative tierce (à ces deux propositions) pour la production d'un mode infini.

Enegoid a écrit :3. Il dit que P28s ne comporte que deux éléments, ce qui est vrai, mais il oublie que p28 demo réfère bien à P21 et P22. (On a un problème, effectivement, parce que les deux éléments de la démo ne sont pas les mêmes que les deux éléments du scolie).

La démonstration se réfère à E1P21-22 de façon NÉGATIVE (soit pour dire que ce ne peut pas découler d'un attribut pris absolument ni immédiatement d'un mode infini immédiat.) C'est pourquoi les éléments du scolie sont différents. Donc il reste que E1P28S ne laisse pas d'alternative, confirmant ainsi le CT.

Enegoid a écrit :4. Il conclut des choses d’une absence de liens (entre p22 et le lemme 7). Pour moi, cette absence de lien est un symptôme du côté problématique du concept de « face totale ». Le lien existe cependant, via la lettre 64.

Spinoza ne fait pas de lien, parce qu'il n'y a pas de lien, y compris dans la lettre 64.

Enegoid a écrit :5. Les citations du CT. Effectivement le CT ne laisse pas de place au mode infini médiat. Qu’en conclure, au sujet de la face totale de l’univers, sans contredire ce qu’en dit Spinoza dans l’éthique et dans la lettre 64 ?

Idem. Cela ne contredit ni l'Ethique ni la lettre 64. Il faut peut-être commencer à se dire que je n'ai peut-être pas complètement mal vu ce que Spinoza avait dans l'esprit...

Cordialement
Connais-toi toi-même.


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