Existence de Dieu

Questions et débats touchant à la conception spinozienne des premiers principes de l'existence. De l'être en tant qu'être à la philosophie de la nature.
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Cette partie du forum traite d''ontologie c'est-à-dire des questions fondamentales sur la nature de l'être ou tout ce qui existe. Si votre question ou remarque porte sur un autre sujet merci de poster dans le bon forum. Merci aussi de traiter une question à la fois et d'éviter les digressions.

Spinoza a-t-il prouvé valablement l'existence de Dieu ?

Oui, ses arguments sont parfaitement valides
14
58%
Non, ses arguments ne sont pas vraiment convaincants
6
25%
Non, ses arguments ne sont pas valides
4
17%
 
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hokousai
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Messagepar hokousai » 14 nov. 2009, 14:02

Y a-t-il vraiment une raison valable d'appeler la substance spinoziste Dieu? Ma question n'a pas de réponse à proprement parler chez Spinoza; c'est une question ontologique que je n'essayerai pas de résoudre ici,


cher maymay

Je pense qu il y a une raison valable : laquelle est que Spinoza l'appelle Dieu .Les raisons de cette appellation sont à chercher chez Spinoza lui même .(lequel Spinoza écrit dans un contexte .. donc considérer le contexte )

Le Dieu de Spinoza ce n'est pas le Dieu des monothéismes en ce qu' il est la nature toute entière .
Mais ce n'est pas véritablement la nature au sens de la nature du naturalisme du 18eme siècle .
bref
.......................................................................

Est -ce que ce qui est pensée comme existant en soi existe nécessairement .( c'est à dire qu'il faut se rendre à l'évidence que cela existe et non pas que ce soit une vue de l' esprit )
Ce que démontre Spinoza ce n’est peut être pas l’existence de la substance mais c’est à minima qu’on ne peut avoir le moindre doute sur son existence .

A la différence des modifications dont nous pouvons avoir des idées vraies bien qu'elles soient non existantes . car on peut par autre chose les concevoir (.leur concept se forme à partir de la chose en quoi elle sont ).
c'est par opposition que Spinoza parle de la substance(scolie 2 prop 7 partie 1) .

Nous ne pouvons avoir une idée vraie de la substance bien qu’elle soit inexistante . car on ne peut penser la substance par autre chose et avoir des doutes sur son existence .
Conclusion si on a une idée claire et distincte de la substance
1) on ne peut avoir de doute sur sa vérité (celle de l’idée ).
2) on ne peut la concevoir (la substance) que comme existante .C’ est à dire qu’on ne peut avoir de doute sur son existence .

Car comment la comprendre comme non existante ?
Il faudrait que j 'ai une idée de ce qui est en soi qui soit comprise dans une autre chose .
Ce ne serait plus l'idée (de substance telle que comprise dans la déf 3)
.....................................................................................................

(toute critique sur ce fondamental de la doctrine sera bienvenue...de même que les critiques sur ma façon d'interpréter )

hokousai

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sescho
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Messagepar sescho » 14 nov. 2009, 15:20

Bonjour,

maymay a écrit :Comme je l'ai dit, et j'insiste là dessus, le prédicat existentiel est un prédicat du second ordre; ce qui signifie que jamais un objet, un individu, une proposition quelconque, etc., ne peut contenir en lui ce prédicat.

J'entends bien que le point dur se situe ici. Spinoza s'y tient : une définition exprime une essence, point. La question de l'existence est d'un autre ordre, et de second ordre : une essence est en général concevable sans l'existence, l'existence n'est pas concevable sans essence, puisqu'une existence est toujours en tant que quelque chose, donc manifestation d'une essence.

C'est pourquoi en particulier zerioughfe (voir plus haut), n'avait pas le droit d'inclure l'existence dans une définition.

Il y a toutefois dans ce cadre un cas tout à fait particulier : une chose dont l'essence implique l'existence (et dans ce cas bien sûr elle existe éternellement, et son existence se confond avec son essence.) Autrement dit, une définition (soit ce qui exprime une essence ; génétique : toute l'essence) qui implique logiquement, moyennant quelques axiomes complémentaires, l'existence.

La définition d’une telle chose ne peut certainement pas être n'importe quoi (et ne doit même faire référence à rien d'autre qu'à elle-même, car quand bien même elle serait sempiternelle qu'elle pourrait toujours être conçue comme n'existant pas, lorsqu'on concevrait seulement ce à quoi sa définition se réfère.) Cette définition unique est : ce qui est en soi et se conçoit par soi. Une substance.

L’ensemble E1P1-7 aboutit à ladite conclusion : il appartient à la nature d’une substance d’exister.

La première démonstration de la nécessité dans l’existence de Dieu dans E1P11 (le groupe de propositions E1P8-10 n’étant utilisé dans aucune de ses trois démonstrations) se réfère directement et simplement à E1P7, compte tenu de la définition de Dieu en tant que substance. Les deux autres démonstrations partent aussi de toute évidence comme d’un acquis que la notion / essence de Dieu est déjà claire.

Donc c’est une évidence : Spinoza considère l’idée de Dieu, donc l’essence de Dieu, comme claire. C’est pourquoi il la pose comme définition et qu’il peut à bon droit en déduire la nécessité de l’existence. C’est là que je dis que Spinoza ne fait pas de définition hypothétique : il ne met en définition que ce qui est déjà clair, et rien dont il pourrait déduire ensuite qu’il n’est rien (ou définir une substance à 2, 3, 4, 5, 6… attributs, qui existerait de toute façon nécessairement puisque substance, etc.)

C’est ici que je suis conduit à ajouter une certaine référence à « l’existence à un titre ou à un autre » : si l’idée (définition) est claire, elle suppose quelque part « la réalité de l’essence » qu’elle décrit, donc à quelque chose entrant d’une manière ou d’une autre dans le cadre de l’existence réelle (ou alors il faut préciser autrement ce qu’on entend par « réalité » ; Spinoza considère – mais cela apparaît en déduction dans l’Éthique – que nos idées claires et distinctes sont vraies.)

La conclusion a minima que je porte est en tout état de cause : Spinoza ne définit que ce qui est clair et donc qui existe en tant que « partie de l’essence de l’Univers. » L’essence ainsi définie est donc posée en préalable comme « réelle », et tout ce qui s’en déduit logiquement est vrai aussi (et Spinoza est au moins auto-cohérent de ce point de vue.) Cela admis, si l’on veut que toute forme de référence à l’existence soit incluse dans E1P11 et non dans la définition, et non seulement sa nécessité, je n’y voit pas grand inconvénient. De toute façon seule une existence nécessaire peut être démontrée.

L’essence de Dieu est affirmée (réelle) par sa définition.

Note : ce serait faire vraiment bien peu de cas de la puissance et de l’honnêteté de Spinoza (après Anselme et Descartes ; Gödel aussi semble-t-il donc) que de penser qu’il fait une erreur de logique aussi élémentaire ou use d’un subterfuge aussi grossier, surtout pour définir Dieu d’une façon qui heurtera dans tous les cas la superstition si généralement répandue et lui vaudra de graves inimitiés.

Note 2 : comme déjà dit au début de ce fil, un problème - quelque part inverse de celui posé par maymay – peut être soulevé : soit la conception est claire, et alors l’existence étant claire par là-même, il n’y aurait pas lieu de la démontrer (elle est immédiatement contenue dans la définition clairement perçue), ou la conception n’est pas claire, et alors on peut discuter son statut de prémisse même. Spinoza le dit lui-même dans des formules du type « si on avait une conception claire d’une substance, on ne douterait pas son existence… » Il dit aussi à la fois que la connaissance de l’essence de Dieu est claire en l’Homme, mais que l’existence de Dieu n’est pas évidente d’elle-même. D’un autre côté, on peut difficilement lui reprocher de se plier aux principes (pas si universels que cela à mon goût) affirmés par maymay : la nécessité de l’existence est bien déduite de l’essence / définition et non forcée dans la définition. Au global, la contestation ne peut qu’être marginale de mon point de vue.

maymay a écrit :… je voulais juste vous faire remarquer que la question posée au départ pouvait-être mal interprété, en ce sens que le Dieu spinoziste est un Dieu autre - tout lecteur de Spinoza le sait - que celui des religions monothéistes.

C’est une affirmation bien péremptoire de mon point de vue : il ne faut pas confondre la superstition populaire ou la constitution d’une Église avec le fond originel d’une religion. Repris dans leur sens profond les Évangiles, par exemple, montrent dans l’esprit de Jésus de Nazareth un Dieu immanent ; il y a eu dans les premiers siècles du Christianisme de nombreux sages ne faisant pas référence à un Dieu personnel extérieur, et cela existe encore de nos jours dans les monastères, pour autant que je sache.

maymay a écrit :Pour résumer ma pensée d'une manière un peu triviale, c'est comme si je posais un quelconque objet ou concept comme étant Dieu et que je prouvais son existence, ou sa nécessité; aurais-je pour autant prouver l'existence de Dieu? Oui et non... Spinoza qualifie la substance de Dieu, démontre sa nécessité comme vous l'avez dit, etc., mais que dire de cette attribution ?

Comme déjà dit, prouver l’existence ne se prête pas du tout à n’importe quel objet, seulement à quelque chose qui est en soi et se conçoit par soi. Si vous avez déjà une certaine conception de Dieu, vous jugez d’un autre usage de ce terme comme douteux. Sinon ce n’est qu’un mot sans sens par lui-même que vous pouvez associer à un certain sens. Mais même en admettant a priori qu’il s’agit dans tous les cas d’un être suprême : « Être en soi (et se concevant par soi : n’est rapporté à rien d’autre que lui-même) ayant une infinité de propriétés » n’est pas mal, non ?
Modifié en dernier par sescho le 14 nov. 2009, 19:27, modifié 1 fois.
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Messagepar hokousai » 14 nov. 2009, 19:07

à Serge
pardonnez une nieme médiation sur ce thème dit ""argument ontologique"" (objet fascinant ... la fascination peut certes paraitre ridicule et les amoureux transi le sont quelque part )

Je comprend très bien que des philosophes soit sensibles à l’argument de Kant (en gros tout cela n’est que pensé et rien de réel en dehors de l’intellect ne répond.)

Chez Spinoza nous avons une idée de quelque chose dont l’existence ne dépend de rien d’autre , rien ne peut l’ empêcher, rien ne peut l’obliger à exister .
Est-ce qu’il existe quelque chose de ce genre ?
Peut- on penser qu’’il n’existe pas quelque chose de ce genre ?
Mais ce n’est pas une chose dont il s’agit mais de l’existence hors de toute détermination autres .
L’existence peut elle ne pas exister ?

il y a t -il quelque chose plutôt que rien ,ou pas ?

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Messagepar maymay » 15 nov. 2009, 00:33

Bonjour,

[...] une essence est en général concevable sans l'existence, l'existence n'est pas concevable sans essence, puisqu'une existence est toujours en tant que quelque chose, donc manifestation d'une essence.

Ici je pense tout le contraire. Une essence est toujours essence de quelque chose, d'un aliquid; or cela existe. D'autre part, une existence peut je pense, se concevoir aisément sans essence, par exemple un néant de détermination. Ainsi, quelque chose, mais abstraction faite de la détermination.

La définition d’une telle chose ne peut certainement pas être n'importe quoi (et ne doit même faire référence à rien d'autre qu'à elle-même, car quand bien même elle serait sempiternelle qu'elle pourrait toujours être conçue comme n'existant pas, lorsqu'on concevrait seulement ce à quoi sa définition se réfère.) Cette définition unique est : ce qui est en soi et se conçoit par soi. Une substance.


Cela, si je ne me trompe pas, revient en quelque sorte au principe d'identité. Ainsi "p est p" par exemple. Cela parait évident et clair; quelque chose est défini par soi même, quelque chose est quelque chose... Mais méfiez vous tout de même. Aussi évident que cela puisse paraître, c'est dans un certain sens trop dire. Que signifie ce "p est p"? Et en vertu de quoi pourrions nous l'affirmer?

C’est une affirmation bien péremptoire de mon point de vue : il ne faut pas confondre la superstition populaire ou la constitution d’une Église avec le fond originel d’une religion. Repris dans leur sens profond les Évangiles, par exemple, montrent dans l’esprit de Jésus de Nazareth un Dieu immanent ; il y a eu dans les premiers siècles du Christianisme de nombreux sages ne faisant pas référence à un Dieu personnel extérieur, et cela existe encore de nos jours dans les monastères, pour autant que je sache.


Il est bien entendu clair qu'il doit, dans toutes les religions, exister des croyants qui divergent des autres. Mais dans toutes les religions monothéistes; il y a un Dieu unique qui est autre que ce qu'il a créé, il y a transcendance, des arrières mondes, etc.

Mais même en admettant a priori qu’il s’agit dans tous les cas d’un être suprême : « Être en soi (et se concevant par soi : n’est rapporté à rien d’autre que lui-même) ayant une infinité de propriétés » n’est pas mal, non ?


Comme dit plus haut, cela n'est pas si évident que ça.

Cordialement,
maymay

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Messagepar hokousai » 15 nov. 2009, 01:42

Mais méfiez vous tout de même. Aussi évident que cela puisse paraître, c'est dans un certain sens trop dire. Que signifie ce "p est p"? Et en vertu de quoi pourrions nous l'affirmer?


(de mon point de vue) Spinoza pense P

Mais c"est assez difficile à communiquer ça . Alors il dit , peut être,quelque chose comme "P est P"
Une manière de rendre plus évidente ce qu'il pense .
Je ne pense pas que s'il vous l'avait sifflé vous auriez mieux compris .

hokousai

PS
""se méfier"" vous le savez peut-être c'était la devise de Spinoza(disons prudence, vigilance ) .C'est à peu près la mienne , celle de Mérimée « Souviens-toi de te méfier ».

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Messagepar sescho » 15 nov. 2009, 17:37

hokousai a écrit :Je comprend très bien que des philosophes soit sensibles à l’argument de Kant (en gros tout cela n’est que pensé et rien de réel en dehors de l’intellect ne répond.)

Je ne connais pas assez Kant pour en parler en profondeur, mais on pourra je pense toujours contester que l'idée intérieure corresponde à une réalité extérieure, puisque nous ne concevons rien que par l'idée...

D'où l'importance fondamentale des prémisses, qui ne sont pas de l'ordre de la Logique et donc non contestables de ce point de vue.

Il y a forcément là une certaine circularité (et dans ce cas on ne peut exiger que l'auto-cohérence - qui n'est pas une preuve absolue de validité, mais écarte l'invalidité prouvée.)

Spinoza a écrit :E2P34 : Toute idée, qui est complète en nous, c’est-à-dire adéquate et parfaite, est une idée vraie.

Démonstration : Quand nous disons qu’il y a en nous une idée adéquate et parfaite, c’est comme si nous disions (par le Corollaire de la Propos. 11) qu’elle est en Dieu adéquate et parfaite, en tant qu’il constitue l’essence de notre âme ; par conséquent, c’est comme si nous disions (par la Propos. 32, partie 2) qu’une telle idée est vraie.

E2P43 : Celui qui a une idée vraie sait, en même temps, qu’il a cette idée et ne peut douter de la vérité de la chose qu’elle représente.

Scholie : J’ai expliqué (dans le Schol. de la Propos. 21, part. 2) en quoi consiste l’idée d’une idée. Mais il faut remarquer que la précédente proposition est, de soi, assez évidente. Il n’est personne, en effet, qui, ayant une idée vraie, ignore qu’une idée vraie enveloppe la certitude ; car qu’est-ce qu’avoir une idée vraie ? c’est connaître parfaitement, ou aussi bien que possible, une chose. On ne peut donc nous contredire ici, à moins de s’imaginer qu’une idée est une chose muette et inanimée, comme une peinture, et non un mode de la pensée, et l’acte même du penser. D’ailleurs, je le demande, qui peut savoir qu’il comprend une certaine chose, si déjà il ne l’a comprise ? En d’autres termes, si déjà vous n’êtes certain d’une chose, comment pouvez-vous savoir que vous en êtes certain ? Et puis, quelle règle de vérité trouvera-t-on plus claire et plus certaine qu’une idée vraie ? Certes, de même que la lumière se montre soi-même et avec soi montre les ténèbres, ainsi la vérité est à elle-même son criterium et elle est aussi celui de l’erreur.
Cela suffit, à mon avis, pour répondre à tout cet ordre de questions. Si, en effet, une idée vraie ne se distingue d’une idée fausse que par sa convenance avec son objet, il en résulte donc qu’une idée vraie ne surpasse pas une idée fausse en réalité et en perfection (du moins quand on ne considère que leurs dénominations intrinsèques), et il y a la même égalité de perfection entre un homme qui a des idées vraies et celui qui en a de fausses. ...

Ajoutez à cela que notre âme, en tant qu’elle perçoit les choses suivant leur vraie nature, est une partie de l’entendement infini de Dieu (par le Corollaire de la Propos. 11, partie 2) ; par conséquent, il est nécessaire que les idées claires et distinctes de notre âme soient vraies comme celles de Dieu même.

Dieu pensant précède ici la possibilité de la vérité en l'Homme. Mais il fallait bien que ce soit déjà vrai pour penser adéquatement Dieu... Pour Spinoza l'idée de Dieu est claire et ne doit rien aux choses extérieures : il se manifeste immédiatement à l'intelligence (mais ceci peut être enfumé par nombre de conceptions inadéquates.)

Soit on le voit clairement, soit non. Fin de l'histoire.

Il y a quand-même un présupposé supplémentaire, me semble-t-il : il ne peut pas y avoir de régression des causes immanentes à l'infini (qui vaut absence totale de substance.) Le simple fait de poser la substance en définition, selon l'approche qui me semble la bonne, règle la question (outre E1A1, mais qui peut aussi être vu comme purement logique.)

hokousai a écrit :Chez Spinoza nous avons une idée de quelque chose dont l’existence ne dépend de rien d’autre , rien ne peut l’ empêcher, rien ne peut l’obliger à exister .
Est-ce qu’il existe quelque chose de ce genre ?
Peut- on penser qu’’il n’existe pas quelque chose de ce genre ?
Mais ce n’est pas une chose dont il s’agit mais de l’existence hors de toute détermination autres .
L’existence peut elle ne pas exister ?

y a t -il quelque chose plutôt que rien ,ou pas ?

En passant : personnellement j’emploie « chose » comme Spinoza, c’est-à-dire pour « pas rien », le concept le plus général qui soit (de mémoire, il dit Dieu « chose étendue » et « chose pensante, » par exemple ; point sur lequel alcore avait tendance à faire une fixation... ; mais il est vrai que dans pas mal de grandes traditions le terme « chose » serait rejeté, s’agissant de l’infini indicible.)

Sinon on pourrait vous opposer que vous prenez une notion générale (« existence », « quelque chose ») pour un être réel… Mais c’est bien juste... Plus précisément, l’Etendue est clairement une dimension de l’être (sans forme, en amont de toute forme, conçue par soi sans référence à rien d’autre, étant Dieu même), et la Pensée aussi (ce qui peut être à nouveau contesté en vertu des limites humaines, mais intuitivement il n’y a effectivement pas de lien avec l’Etendue…)
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Messagepar sescho » 15 nov. 2009, 21:36

maymay a écrit :Une essence est toujours essence de quelque chose, d'un aliquid; or cela existe. D'autre part, une existence peut je pense, se concevoir aisément sans essence, par exemple un néant de détermination. Ainsi, quelque chose, mais abstraction faite de la détermination.

Hum ! Personnellement je suis volontiers Spinoza : un néant n’est rien, « quelque chose » est une notion générale et pas un être réel, l’Être est Dieu, Dieu a une essence. Je ne conçoit rien de tel aisément, c’est peu dire…

Cela va avec les définitions de Spinoza affirmant forcément une essence réelle : toute définition acceptable (exemple : cheval ayant des ailes) n’est pas du tout pour autant supposée traduire une essence (étant entendu par-là : la nature d’un être réel.)

Sinon, oui, une essence est intimement liée à une chose (E2D2 et E2P10S ne disent rien d'autre, sinon pour E2P10S que l'essence de Dieu n'appartient pas à l'essence des modes ; la définition de l’essence indique que la chose et la nature de cette chose se correspondent...) Mais il n’y a ici aucune référence à l’existence.

Spinoza a écrit : E2P10S : … si l’on écoute la plupart des philosophes, ce qui appartient à l’essence d’une chose, c’est ce sans quoi elle ne peut exister ni être conçue ; ils pensent donc de deux choses l’une, ou bien que la nature de Dieu appartient à l’essence des choses créées, au bien que les choses créées peuvent exister ou être conçues sans Dieu ; mais ce qui est plus certain, c’est qu’ils ne sont pas suffisamment d’accord avec eux-mêmes…

Mais je n’insiste pas, mon dessein n’ayant été ici que d’expliquer pourquoi je n’ai pas dit que l’essence d’une chose, c’est ce sans quoi elle ne peut exister ni être conçue. [Parce que] Les choses particulières, en effet, ne peuvent exister ni être conçues sans Dieu ; et cependant Dieu n’appartient point à leur essence. En conséquence, j’ai dit : ce qui constitue l’essence d’une chose, c’est ce dont l’existence emporte celle de la chose, et la destruction sa destruction, en d’autres termes, ce qui est tel que la chose ne peut exister sans lui, ni lui sans la chose.

En général, la chose peut ne pas exister (et n’existe généralement pas en acte.) Autrement dit, sans même une référence au temps : elle se conçoit très bien comme n’existant pas. Autrement dit encore : l’existence n’appartient pas à son essence. Donc son essence se conçoit parfaitement sans l’existence (quand bien même il est admis que la chose viendra forcément à l’existence à un instant ou un autre.) Seule une substance ne peut être conçue comme n’existant pas. Ainsi le seul être qui peut être considéré comme « possédant » l’existence est Dieu. L’existence en acte d’un mode est juste une manière d’être de Dieu (qui, lui n’est pas soumis au temps.) En revanche, exister en tant que rien n’a pas de sens.

Mais, je suis intéressé alors de savoir ce qui vous fait dire que « le prédicat existentiel est un prédicat du second ordre. »

maymay a écrit :Cela, si je ne me trompe pas, revient en quelque sorte au principe d'identité. Ainsi "p est p" par exemple. Cela parait évident et clair; quelque chose est défini par soi même, quelque chose est quelque chose... Mais méfiez vous tout de même. Aussi évident que cela puisse paraître, c'est dans un certain sens trop dire. Que signifie ce "p est p"? Et en vertu de quoi pourrions nous l'affirmer?

Je ne vois pas trop de quoi il s’agit… L’identité « p est p » est très générale et toujours valable en Logique ; ce n’est pas pour autant qu’elle définit une substance… Elle ne définit rien, d’ailleurs.

La définition (et il ne peut y en avoir d’autre) d’une substance dit indirectement qu’elle est cause première, qui n’a donc elle-même pas de cause, et est donc « cause de soi. » Corrélativement, elle ne se définit par rien d’autre qu’elle-même, puisque sans antériorité ontologique. Son concept s’impose de lui-même sans référence à rien (c’est pourquoi sa connaissance doit forcément être immédiate, puisqu’elle ne dépend de rien d’autre.) Elle n’est contenue dans rien.

Puisque vous parlez de Dieu : pouvez-vous donner une définition de Dieu ? Dans quel univers Dieu existe-t-il ? Qui / quoi a créé Dieu ?

maymay a écrit :… dans toutes les religions monothéistes; il y a un Dieu unique qui est autre que ce qu'il a créé, il y a transcendance, des arrières mondes, etc.

C’est aussi le cas chez Spinoza, et d’autres grandes traditions : bien que tout soit en Dieu, Dieu transcende les modes. La transcendance est dans l’immanence même. Rien ne peut être conçu sans Dieu ni être extérieur à Dieu, mais pour autant il n’est pas Dieu. L’essence de Dieu ne fait pas partie de l’essence des modes, alors même que l’essence des modes fait partie de celle de Dieu.

Mais la « création » n’est pas hors Dieu mais en Dieu.

Panthéisme :

« Le Fini dépendant de l'Infini, en d'autres termes, les phénomènes dépendant de l'Être, les Substances contingentes de la Substance absolue; le Monde et la Nature dépendant de Dieu, comme l'effet dépend de sa cause, en vertu de la toute puissance qui les a créés, et qui les conserve, on s'explique parfaitement que le Fini coexiste avec l'Infini, et en reste distinct sans le limiter en quoi que ce soit. »

Début du Prologue de l’Évangile de Jean (en suivant Paul Diel, Le symbolisme dans l’évangile de Jean, dans le redressement logique d’interpolations ajoutées a posteriori par déplacement de versets) :

Note : je prend pour signification de « Verbe » les lois de Dieu / Nature, en particulier les lois de la béatitude (qui est véritable connaissance de Dieu.)

Au commencement était le Verbe, et le Verbe était en Dieu, et le Verbe était Dieu.

Il était au commencement en Dieu.

Tout par lui a été fait, et sans lui n’a été fait rien de ce qui existe.

En lui était la vie, et la vie était la lumière des hommes,

Et la lumière luit dans les ténèbres, et les ténèbres ne l’ont point reçue.

Il (le Verbe) était dans le monde, et le monde par lui a été fait, et le monde ne l’a pas connu.

Il vint chez lui, et les siens ne l’ont pas reçu.

Mais quant à tous ceux qui l’ont reçu, Il leur a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu, à ceux qui croient en son nom,

Qui non du sang, ni de la volonté de la chair, ni de la volonté de l’homme, mais de Dieu sont nés.

Et le Verbe s’est fait chair, et il a habité parmi nous, (et nous avons vu sa gloire, gloire comme celle qu’un fils unique tient de son Père) tout plein de grâce et de vérité.

et c’est de sa plénitude, que nous avons tous reçu, et grâce sur grâce ;

parce que la loi a été donnée par Moïse, la grâce et la vérité sont venues par Jésus-Christ.

Dieu, personne ne le vit jamais : le Fils unique, qui est dans le sein du Père c’est lui qui l’a fait connaître.


http://livres-mystiques.com/partieTEXTE ... istia.html :

« Cependant, selon l'enseignement chrétien, Dieu est partout, Il est donc aussi bien dans chacune des parties et dans chacun des êtres de notre univers. »

http://smokerlezard.perso.infonie.fr/rt ... ristia.rtf :

« Si, enfin, le panthéisme affirme que Dieu est en tout, qu'il pénètre, comme une force mystérieuse, chaque goutte, chaque atome du système de l'univers, le christianisme est d'accord avec cela aussi, bien qu'il ne réduise pas l'action de Dieu à cette omniprésence panthéiste. »
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Messagepar hokousai » 15 nov. 2009, 23:40

her Serge

quand je vous dis ""Est-ce qu’il existe quelque chose de ce genre""?
c’est parce que quelque chose du genre chose singulière ( modification = chose par autre = effet d’une cause )on comprend qu’ elle existe( qu’il en existe )
Donc la question est :existe- t- il quelque chose du genre absolument indéterminé par autre chose ?( cause de soi )
............................................................................................

Spinoza pense qu’ elle est intelligible d' où la définition 3
il dit bien intelligible et non seulement dicible
on a donc une idée .
l’idée d’ un X( pur ne pas dite de qq chose !!)

question :ce X existe- t- il ?

alors c’est quoi exister ?
Mais c’est quoi exister pour les choses singulières dont on admet l’existence ?
C’est quoi ?
Est-ce aller de son train quelle que soit notre présence ?. Pas forcement et on a vu Descartes en douter .
Donc la présence dont le paradigme est le cogito = présence à soi même du moi pensant .

Mais la présence qui se donne absolument positivement c’est à dire sans se rapporter à l’ absence( ce qui serait la penser par autre chose) et sans rapport à moi-même . ( ce qui serait la penser par autre chose) ; la présence pure ,

la présence se donne comme existante .
...................................................................................

n’ayant pas de déterminations qui la borne elle est infinie .(ce qui est second ,ou dit après )

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Messagepar sescho » 16 nov. 2009, 21:10

Cher Hokousai,

Jamais il ne m'est venu à l'idée - alors qu'on a immédiatement la solution : l'étendue, par exemple, se conçoit par elle-même et ce en amont de tous les corps - que l'hypothèse de régression à l'infini des causes ontologiques puisse être recevable. La vigueur du principe d'économie (devant la dépense infinie) sans doute...

En fait, les choses singulières n'existent pas vraiment (c'est "chose" - dénommée comme si elle pouvait être prise en soi - qui est contestable, pas "existe") ; seul Dieu existe (et si "chose" n'existe pas, Dieu existe lui ; je conçois alors qu'on répugne à le dire "chose.")

Pour le reste, je suis tellement d'accord avec la force de ce que vous avez écrit que je vais me passer de commenter : la conscience pure, la présence pure, c'est Dieu même.


Amicalement


Serge
Connais-toi toi-même.


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