Confrontation entre Spinoza et Liebniz

Questions et débats touchant à la conception spinozienne des premiers principes de l'existence. De l'être en tant qu'être à la philosophie de la nature.
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Andromalius
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Confrontation entre Spinoza et Liebniz

Messagepar Andromalius » 08 mars 2005, 21:15

Le monde des possibles de Leibniz peut-il impliquer l'existence de vérités éternelles?
Chez Spinoza, nous sommes sûrs qu'il en existe. Car les choses durent mais elles ne passent pas. "Au fond tout est éternel" J'en conclus donc logiquement que toutes les vérités sont éternelles.
Je remercie d'avance tous ceux qui m'aideront a avancer :D :P
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Henrique
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Messagepar Henrique » 09 mars 2005, 16:23

Par définition, une vérité est éternelle ou n'est pas une vérité. Un jugement changeant, ne sera qu'une simple opinion, une perception inadéquate.

Par définition, parce qu'on dit vrai un jugement qui s'accorde avec la chose dont il exprime l'idée (Ethique I, axiome 6). Si la chose est A et que je dis "B", mon jugement ne s'accorde pas avec la chose, il est faux. Pour une réalité donnée, il ne pourra donc y avoir qu'une seule vérité. C'est l'opinion qui est multiple par rapport à une réalité unique. Si la vérité est unique alors, elle ne peut être conçue autrement : elle est nécessaire. Quand je me demande combien font 2 et 2 en base 10, il y a une multiplicité indéfinie d'idées fausses possibles à ce propos, mais il n'y a qu'une seule réponse exacte, il n'est pas possible de concevoir 2 additioné à 2 autrement que comme égaux à 4, c'est nécessaire.

Or qu'est-ce que l'éternité ? C'est l'existence même en tant qu'elle découle nécessairement d'une chose comprise indépendamment du temps (E1D8). Par exemple, la fleur éclose ce matin peut être comprise indépendamment du temps, par son essence : ce qu'elle est et non le fait qu'elle soit ici et maintenant, après ceci et avant cela. Dans cette optique, le fait que la fleur cesse d'exister ou non pendant une certaine durée ne relève pas de son essence mais de l'environnement qui la soutiendra ou non dans cette continuation. Mais sa façon d'exister peut en partie découler de son essence : ses pétales se relèvent après la pluie parce que son essence est de persévérer dans son être. Le moment où les pétales de la fleur se relèvent est ainsi un moment d'éternité car ce qui existe concrètement dans ce que nous appelons ce "moment" découle nécessairement de l'essence de la fleur.

Quant au jugement qui exprimera la pensée de cette éternité, il sera vrai au sens où la mise en rapport de l'agir de la fleur avec son essence sera complet, adéquat. Comme ce jugement découlera nécessairement à son tour de la puissance de comprendre de notre mental, il sera également éternel.

Et effectivement, puisque tout peut être compris sous l'aspect de l'éternité à partir de cette essence unique et fondamentale de toutes les essences singulières qu'est Dieu, toute vérité authentique sera également éternelle.

Quant à Leibniz, il pose qu'il existerait une infinité de mondes possibles, c'est-à-dire de mondes où auraient pu coexister différents êtres dits "compossibles". Un monde composé de cercles carrés n'aurait pas été possible mais un monde sans moustiques ou sans hommes aurait été possible : on peut le concevoir sans contradiction. L'idée de ces mondes possibles existerait éternellement en Dieu et dans son infinie bonté, celui-ci n'aurait pu que choisir le "meilleur des mondes possibles", un monde notamment où la liberté de choisir est possible, c'est-à-dire un monde où le mal existe à côté du bien.

Une telle pensée est aux antipodes de celle de Spinoza : les mondes possibles de Leibniz dont l'idée préexisterait à la création même du monde ne font que remettre en cause l'idée même de toute puissance de Dieu. Car un Dieu qui produit un monde parmi d'autres possibles non seulement est conçu sur le modèle de l'homme, qui est un être limité, mais en plus est conçu au fond comme un être imparfait puisqu'il ne réalise pas pleinement toutes ses possibilités (cf. Ethique I, prop. 33, scol. 2). Ou si ce ne sont pas "ses possibilités" mais des possibilités lui sont extérieures, alors il se soumet à une réalité qui le délimite, qui n'est pas lui, il est donc imparfait.

En réalité, quand nous parlons de chose possible pour signifier qu'elle pourrait être ou ne pas être, nous avouons simplement l'ignorance où nous sommes de toutes les causes présentes dans l'univers, causes qui rendent toujours nécessaires leurs effets. Par exemple, un monde sans moustique ne nous paraît concevable sans contradiction que parce que nous faisons abstraction de la chaîne infinie des causes qui ont amené à l'existence nécessaire de cette espèce d'insectes.
Modifié en dernier par Henrique le 10 mars 2005, 02:15, modifié 1 fois.

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Messagepar Andromalius » 09 mars 2005, 16:52

Chèr Henrique,
j'essaierai un un peu plus tard de réagir à ton message par des questions, qui je l'éspère ne seront pas trop mal formulées.
Mais pour l'instant, je voudrais te faire part de ma révolte concerant les propos de certains de mes camarades.
Notre professeur nous parlait du Dieu de Spinoza, et certains ont répondu"oui mais monsieur, moi je ne croie pas en Dieu"
Notre professeur avait beau expliquer le Dieu dont parle Spinoza n'a rien à voir avec le sens que nous lui assignons habituellement,mais était un TOUT, rien n'y faisait...
Enfin, voilà c'était juste une petite parenthèse. :D
Modifié en dernier par Andromalius le 09 mars 2005, 20:51, modifié 1 fois.
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Messagepar Andromalius » 09 mars 2005, 20:00

Chèr Henrique,
De quelle façon pourrait- on nier l'existence de vérités étèrnelles? :?:
Sachant que la théorie Spinoza repose en quelque sorte sur la durée :!:
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Messagepar hokousai » 09 mars 2005, 23:24

à Henrique

(je reprends certaines de vos phrases à l'intérieur de mon texte )

Lorsque "nous faisons abstraction de la chaîne infinie des causes qui ont amené à l'existence nécessaire de cette espèce d'insectes", nous formons un certains réel .
Ou bien nous le formons(idéalisme ) ou bien il nous est imposé( réalisme ) ou les deux , et j ‘opte pour les deux ,c’est à dire pour une forme de co-existence et de co- naissance de l'objet et du sujet .

Vous dîtes que "pour une réalité donnée, il ne pourra donc y avoir qu'une seule vérité'. Ce que je partage .
Mais autant nous ferons abstraction dans la chaîne infinies des causes autant de réalités nous seront données et ainsi autant de vérités .

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Messagepar FabriceZ » 11 mars 2005, 08:25

à Andromalius,

Tu disais :

Mais pour l'instant, je voudrais te faire part de ma révolte concerant les propos de certains de mes camarades. Notre professeur nous parlait du Dieu de Spinoza, et certains ont répondu"oui mais monsieur, moi je ne croie pas en Dieu" Notre professeur avait beau expliquer le Dieu dont parle Spinoza n'a rien à voir avec le sens que nous lui assignons habituellement,mais était un TOUT, rien n'y faisait...


En effet, pour comprendre l'Ethique il faut dépouiller les termes de Spinoza de tout sens qui ne résulte pas de ses définitions à lui.

Il le dit lui-même dans EV31 Scholie :

(Il n'y a) aucun danger d'erreur, pourvu que nous ayons la précaution de ne rien conclure de prémisses pleinement claires.


Il faut donc éviter de projeter sur le vocabulaire de Spinoza nos propres définitions qui sont culturellement et idéologiquement codées : le Dieu de Spinoza n'est pas le Dieu Judéo-Chrétien, la Béatitude n'est pas le bonheur, le Bien et le Mal ont un sens bien particulier...

Fabrice
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Messagepar Florian » 09 avr. 2005, 19:06

Je pense qu'on peut tout de même rapprocher Leibniz et Spinoza en ce que tous deux ramènent l'ontologie à une théologie:

Chez Spinoza, Dieu est principe de tout, donc de l'homme, de son âme comme de son corps. Chez Leibniz, Dieu est le principe de l'harmonie préétablie entre l'âme et le corps. On ne peut chez l'un comme chez l'autre comprendre l'homme qu'en ne comprenant Dieu.

La différence entre Spinoza et Leibniz s'instaurerait donc en fait à partir de cette onto-théologie (pas au sens heideggerien bien sûr :!: ), en son sein, dans la mesure ou le Dieu spinozien n'a pas grand chose à voir avec celui de Leibniz.
"Si l'on veut savoir le peu de cas que Dieu fait de la richesse, il n'est qu'à regarder ceux à qui il la dispense." Félicité Robert de Lamennais.

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Messagepar AUgustindercrois » 10 avr. 2005, 21:50

Pour répondre à Florian, si je simplifie les choses, et parle en historien, je puis en conclure que Leibniz et SPinoza sont des philosophes judéo - chrétiens.

Mais Spinoza, en tant que philosophe de la subversion, permet le Nietschéisme, comme le remarquera pertinemment Deleuze (même si l'on peut ne pas adhérer au rapprochement total, où à l'analyse marxiste du spinozisme). Tandis que Leibniz ouvre plutôt la voie à Kant....

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