Spinoza phénoménologue

Questions et débats touchant à la nature et aux limites de la connaissance (gnoséologie et épistémologie) dans le cadre de la philosophie spinoziste.
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AUgustindercrois
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Messagepar AUgustindercrois » 16 avr. 2005, 11:49

Sur l’intellectualisme.

Tout à fait. Par intellectualisme, je sous-entends le primat de l"idée claire et distincte" chez lui. L'intellectualisme de Spin', c'est d'ailleurs tout le contraire de quelque chose d'abstrait: le principal de la vie de Spin' est intellectuel, Spinoza intellectualise sa vie. J'imagine assez bien que, face aux chaos qui ont été inhérents à sa vie (la mort de sa mère, la grande peste, le herem, la mort de son père), il se réfugie dans la sérénité des idées. Cette volonté d'ordonner la pensée englobe le mouvement désordonné du monde en le comprenant.

Votre rapprochement de Spinoza avec Epicure est donc une intuition, pas un dogme. (Je suis heureux de votre refus peu dogmatique du dogme). Imaginez cependant, que vous auriez pu vous glisser dans l'esprit de SPinoza quelques instants. (Je sais bien que SPinoza lui même se défiait de l'imagination, mais enfin quoi, en littérateur, je ne puis m'en empêcher). Imaginez que vous découvrez l'idée du conatus. Je me plais à rêver ce moment sublime...

Sur le conatus: vous en fait quelque chose de très actif. Or, le conatus est une tendance, c'est à dire, essentiellement, quelque chose de subi, et non quelque chose d'agi. C'est tout le problème de sa traduction. Si je dis effort (comme Caillois), j'en fais quelque chose d'actif. Si je dis élan, impulsion, j'en fais quelque chose de passif. Comment trancher? Par le concept d'idée claire et distincte. Sans l’idée claire et distincte du conatus, le conatus est pure passivité. Avec, il acquiert une dimension active. (cf EV, 3: "un sentiment qui est une passion cesse d'être un passion, sitôt que nous en formons une idée claire et distincte") Je comprends ici l'idée de sentiment comme une espèce incluse dans la catégorie générale conatus. C'est le conatus qui englobe toutes les espèces de sentiments.


Union du corps et de l'âme... C'est du Lucrèce, du De Natura Rerum: " c'est par des mouvements communs et combinés de l'un et de l'autre que s'allume et s'éveille, en tous nos organes, la sensibilité..." Or, contra, chez Spinoza: EV, 23: "L'esprit humain ne peut être absolument détruit avec le corps, mais il en subsiste quelque chose qui est éternel." Il y a parallélisme entre l'esprit et le corps, mais pas unité. Spinoza n’est pas moniste, mais il n’est pas dualiste pour autant. Les deux catégories sont trop simples.

Je cite le résumé de la thèse de Pascale Gillot :
« Nous avons tenté de restituer les traits spécifiques de la présence, dans la conception spinoziste de l’essence des choses singulières, d’un mécanisme paradoxal, ou radical, ce que nous avons appelé «un mécanisme sans finalité». Le modèle de l’automate, cette machine détentrice du principe de son action, nous a paru exercer une fonction décisive non seulement pour la compréhension de la nature et de l’activité du corps, et notamment du corps humain, mais aussi pour la définition nouvelle de l’esprit dans l’Éthique. Le fameux thème de l’automate spirituel, dont Spinoza est le premier théoricien, dessine les contours d’une causalité mentale au sens strict, articulée au postulat inédit de lois de la pensée. Cette représentation d’une activité mentale régie par des lois va de pair avec la « désubstantialisation » de l’esprit engagée par Spinoza. L’existence d’un «automatisme spirituel» marque l’originalité de la solution paralléliste au problème de l’union de l’âme et du corps: si le corps et l’esprit humains sont une seule et même chose, ce n’est pas parce qu’ils désigneraient une même substance, mais parce que l’indépendance et la traductibilité réciproques de leurs lois respectives, celles de l’étendue et celles de la pensée, permettent leur identification à un même dispositif automatique, à un seul individu.
« Le parallélisme psycho-physique ne se réduit donc pas à un matérialisme de type physicaliste. Spinoza, selon nous, maintient la distinction conceptuelle du corps et de l’esprit; mais par le biais de sa théorie de l’individuation et l’entremise de la figure singulière de l’esprit-automate, il récuse l’inférence, notamment cartésienne, d’une séparation réelle sur la base de cette distinction. Tels sont les réquisits du renversement spinoziste de ce que la tradition a nommé « dualisme ».

Indomptable et fier.. Oui, je crois. Oseriez - vous sous -entendre que SPinoza était orgueilleux, qu'il serait victime de surestime?

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Messagepar Faun » 17 avr. 2005, 16:17

AUgustindercrois a écrit :

Sur le conatus: vous en fait quelque chose de très actif. Or, le conatus est une tendance, c'est à dire, essentiellement, quelque chose de subi, et non quelque chose d'agi. C'est tout le problème de sa traduction. Si je dis effort (comme Caillois), j'en fais quelque chose d'actif. Si je dis élan, impulsion, j'en fais quelque chose de passif. Comment trancher? Par le concept d'idée claire et distincte. Sans l’idée claire et distincte du conatus, le conatus est pure passivité. Avec, il acquiert une dimension active. (cf EV, 3: "un sentiment qui est une passion cesse d'être un passion, sitôt que nous en formons une idée claire et distincte") Je comprends ici l'idée de sentiment comme une espèce incluse dans la catégorie générale conatus. C'est le conatus qui englobe toutes les espèces de sentiments.



J'essaie de répondre à ceci, pour le reste je suis plutôt d'accord. Je ne comprend pas ce que vous entendez par conatus, quelle importance ce mot a pour vous dans l'Ethique.
Définition des affects 1, explication :
"Hîc igitur Cupiditatis nomine intelligo hominis Quoscunque conatûs, appetitûs, & volitiones, (...)"
Donc ici, j'entend sous le nom de Désir tous les efforts, impulsions, appétits et volitions de l'homme, (...)"
La définition du désir est claire, et c'est l'essence de l'homme.
Voilà ce qui me semble important pour Spinoza.
Ensuite, c'est l'objet du Désir qui fait la différence, pas seulement le fait ou non d'avoir une idée claire et distincte : "c'est que notre bonheur et notre malheur dépendent uniquement de la nature de l'objet que nous aimons " (traité de l'amendement de l'intellect).




Indomptable et fier.. Oui, je crois. Oseriez - vous sous -entendre que SPinoza était orgueilleux, qu'il serait victime de surestime?


Ethique, partie 4 proposition 48 :

"Les affects d'estime et de mépris sont toujours mauvais."

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Messagepar AUgustindercrois » 17 avr. 2005, 23:14

Cher Faun,

Je suis heureux que nous trouvions un terrain d'entente et que nous nous rapprochions d'un accord.

La traduction de Caillois de E III définition des affects I, explication, est fort différente de celle de votre traduction:

"par conséquent, pour ne pas paraître énoncer une tautologie, je n'ai pas voulu expliquer le désir par l'appétit, mais j'ai pris soin de le définir de façon à y comprendre à la fois tous les efforts (conatus) de la nature humaine que nous nommons appétit, volonté, désir ou impulsion (impetus)."

Il semble à la lumière de cette explication, importante, que le désir (cupiditas) englobe le conatus. Or, cela me paraît contradictoire avec E I, propositions 6 à 9, dont l'importance et la généralité se manifestent.

Quant à l'importance du conatus dans la pensée spinoziste, je la considère comme immense. POurquoi? Je l'ignore. Peut - être parce que, du fond de mes souvenirs, ce seul mot m'était apparu, au - delà de tout ce qui avait pu être oublié, au - delà de tout ce que j'avais pu laisser dans les tréfonds de l'obscurité, au - delà de l'indicible et de l'indit, comme la pointe lumineuse et pourtant impénétrable d'une immensité de glace.
C'est cela, oui, un sentiment. Un sentiment me porte à croire, de manière parfaitement irrationnelle, de manière merveilleusement impromptue, irréductuble, insoupçonnée. Un sentiment, rien qu'un sentiment.

Il est parfait, je trouve, que vous puissiez vous intéresser en même temps à Spinoza et à Tschouang Tseu. Figurez - vous que Pascal Quignard combinait ces deux centres d'intérêt dans un récent entretien. Tout se tient, tout se ramasse, en une improbable et résistible coïncidence. Je lis Quignard, j'écris sur Spinoza. Quignard aime Spinoza et Tschouang Tseu. Faun, ce mystérieux interlocuteur avec lequel je disserte avec un sérieux oisif sur Spinoza, cite Tschouang Tseu, que pourant j'ignore. Il semble me souvenir que Confucius ou ses disciples en parlent dans leurs entretiens.

Cher Faun, vale.
Scripturus vos salutat.

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Messagepar hokousai » 18 avr. 2005, 23:27

""""mais parce que l’indépendance et la traductibilité réciproques de leurs lois respectives, celles de l’étendue et celles de la pensée, permettent leur identification à un même dispositif automatique, à un seul individu. """"(résumé de la thèse de Pascale Gillot ,sans doute très estimable .)

Cette proposition me pose problème .

1) d' abord : "leurs lois "

Une loi est efficiente , elle produit des effets.
Il y a t-il causalité efficiente chez Spinoza.L'ordre des chose obéit- il a un(ou des ) principes extrinsèques ? Cela est douteux .
C’est à dire :Il y a t-il contrainte extrinsèque à l'ordre ?
L’ordre est il un ordre c’est à dire ordonné, ou non ? Sinon, ce n'est pas un ordre .
Mais ce n’est pas un désordre non plus , c’est l’apparition des choses telles quelles apparaissent .
Et on ne peut alors comprendre la loi comme un universel perdurant hors ( et dans une éternité des lois ) de l’apparition des existences particulières .Ces lois sont des manières de penser .

2)" traductabilité "

Enorme question de la traductibilité , ne serait que de deux discours, celui sur les corps(physiologie ) et celui sur les pensées( psychisme ) .Les neuro- sciences par exemple ne traduisent pas, elles expriment en leur langage et sont donc un réductionnisme .La traductibilté des diverses psychologies est déjà un problème .Pour faire bref On parle de traductibilité quand une excitation d’un nerf est coexistante du mot douleur , c’est très abusif .

3)"réciproque "(.Plus grave )


Demandons à l’ordre des corps , qui ne parle pas , quel est son discours sur ses supposées lois ? Problème de traductabilité accentué .

4)" identification à un seul individu ."

Les lois( douteuses) sont indépendantes donc difficilement traduisibles l’une dans l’autre , si de cela on extrait un individu je veux bien ,mais je pense que l’individu est extrait d'un ailleurs , d’une idée plus immédiate et moins théorique à cet effet aussi claire et distincte sinon plus .
L' homme n’a pas attendu que des machines automatiques se présentent à l’esprit comme paradigme séduisant pour se concevoir comme individu .
Cette interprétation cybernétique peut convenir à l’époque , je doute que la symbolique de l’automate fut- il spirituel nous mène à la béatitude plutôt qu ‘au somnambulisme .Je l’estime pour ma part tout à fait déprimante .

hokousai .

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Messagepar AUgustindercrois » 19 avr. 2005, 11:37

Cher Hokousai,

Sur quel plan, au juste, se place votre analyse?

Ce que fait Pascale Gillot, c'est situer la pensée "métaphysique" de Spinoza sur le corps par rapport à sa pensée physique. C'est la situer par rapport au cartésianisme dont Spinoza est à la fois l'héritier et le critique radical.

Je vais essayer de la contacter afin qu'elle réponde mieux que moi là - dessus.

Bien à vous,

Ader.

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Messagepar hokousai » 19 avr. 2005, 15:13

Pascale Gillot dont je viens de re-lire un long texte sur le net ne reviendra certainement pas sur sa thèse et il n'est pas question de reprendre tout ce qu'elle montre et démontre très intelligemment ..
Je parle de mon point de vue de certaines propositions qui me font problème .

je la cite sur un point

"""""""""
Selon Spinoza, rappelons-le, l’être individué d’une chose singulière se conçoit à partir du modèle de la composition : plus une chose est complexe, à savoir composée de parties qui peuvent à leur tour être composées, plus elle est individuée, et disposée en conséquence à accomplir les opérations les plus diversifiées49. L’esprit humain, étant cette idée extrêmement complexe, constituée d’idées elles-mêmes très composées, apparaît donc doué d’une puissance considérable, laquelle s’effectue dans son ordre propre, l’ordre de la Pensée. Or cet être-individué de l’esprit, indicatif de ce qu’il peut faire, se révèle directement proportionnel au degré de composition de son objet, en l’occurrence du corps lui-même. Les idées entrant dans la composition de cette idée qu’est la mens humana correspondent aux parties elles-mêmes constitutives du corps humain, dont elles sont les essences objectives, conformément à la doctrine du parallélisme psycho-physique, présentée à partir de la Proposition 7 du De Mente, qui pose la correspondance terme à terme entre tel mode de l’Étendue et l’idée de ce mode dans l’attribut Pensée.""""""

je souligne """""se révèle directement proportionnel au degré de composition de son objet, en l’occurrence du corps lui-même. Les idées entrant dans la composition de cette idée qu’est la mens humana correspondent aux parties elles-mêmes """""

Je demande qu'en est- il de la relation entre l'esprit d'un chimpanzé et son corps , le corps du chimpanzé étant somme toute assez comparable à celui de l 'homme comparable en sa complexité .
Le chimpanzé a t- il un corps ?Le chimpanzé est- il un être individué ?cet être-individué de l’esprit du chimpanzé , indicatif de ce qu’il peut faire, se révèle t-il directement proportionnel au degré de composition de son objet, en l’occurrence du corps lui-même?

Hokousai

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Messagepar Florian » 19 avr. 2005, 17:53

Je m'excuse pour la petite digression mais je permet de répoondre à Miam:

"Et cela veut dire que pour M Henri, le phenomene n'est pas objectif ? Je n'aime precisement pas ce aspect idealiste chez MH. A vrai dire je n'ai jamais pu le lire avec plaisir. C'est tout juste si je parviens a le comprendre. Je ne vois pas comment un sujet peut ëtre immediatement l'objet de lui-meme. C'est donner trop d'importance au sujet. Confondre l'idiosyncrasie et l'aperception. Mais bon je ne comprends rien a MH. Lorsque j'entend parler d'une autonomie originelle du sujet, je degaine mon revolver. Peut-ëtre Florian pourrait-il m'eclairer sur MH afin de m'eviter une lecture penible ? Alleguer l'immanence du sujet a lui-meme et cette seule immanence, n'est-ce pas aussi le rendre transcendant par rapport a ce qui n'est pas lui et manquer derechef l'immanence sujet-objet ? Il y a un fort accent religieux chez MH non ? Et par consequent une transcendance. Parler d'immanence me semble alors abusif. Accepter ce "fictionnement" genre derridien pour ressuciter l'ame, c'est jouer Descartes contre Spinoza. "


Si tu veux lire du Henry, je te conseille de commencer par les recueils de ses articles parus récemment aux Puf sous le titre de Phénoménologie de la vie (notamment les deux premiers).
Pour résumer la connaissance du sujet par lui-même, on peut prendre, en suivant Henry, l'exemple cité par Descartes au paragraphe 26 du Traité des Passions de l'âme: lorsque je fais un cauchemar, toutes les images que je vois sont fausses, elles sont le produit de mon imagination, en revanche, la peur que j'éprouve est elle bien réelle. Pour expliquer cette dualité de l'expérience du cauchemar, Henry postule qu'il y a deux types d'apparaître: celui du monde (dont Descartes a montré la faiblesse, par lequel je perçois par exemple les images de mon cauchemar) et celui de la Vie (qui parce qu'il est imanent est infaillible, par lequel je perçois par exemple ma peur). Le propre de l'apparaître de la vie et qu'en lui, c'est la vie elle-même qui se donne, c'est pourquoi Henry parle d'une auto-donation de la vie. Par exemple, dans l'expérience de la douleur, si je m'attarde à ce que je ressens, j'en reviens toujours à la douleur elle-même: ce qui se donne dans la douleur, c'est la douleur elle-même (et c'est bien sûr extensible à toutes les expériences qui passent par l'apparaître de la vie: a peur, la faim, la chaleur, etc.).
J'aurai un peu plus de mal à te répondre exactement quand à la dialectique immanence-transcendance chez Henry.
Quoi qu'il en soit, pour Henry, seul l'apparaître du monde est à proprement parler ob-jectif, ek-statique. L'apparaître de la Vie (qu'il définit comme une Archi-intelligibilité) est lui tout le contraire d'un ob-jet puisqu'il est immanent à la vie.
"Si l'on veut savoir le peu de cas que Dieu fait de la richesse, il n'est qu'à regarder ceux à qui il la dispense." Félicité Robert de Lamennais.

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Messagepar AUgustindercrois » 19 avr. 2005, 22:58

Cher Hokousai,

Je digresse sur la digression de notre ami Floran, initiateur de nos interrogations, et en reviens aux vôtres.

Peut - être trouve - t- on là les limites de la pensée de SPinoza. Son déterminisme radical repose lui - même sur des données de la science de son époque. Or, ce que savaient les scientifiques de l'époque sur la biologie se réduisait à presque rien. Donc, Spinoza gloserait sur du presque rien. Il extrapolerait, et serait aussi aventureux que le Descartes de la glande pinéale qu'il dénonce dans E III, Introduction.

Pourtant, il y a une intuition fondamentale, de laquelle la science contemporaine se rapproche: celle de la composition (des atomes, des protéines, de l'ADN...) Composition, combinaison, on est là dans la même perspective, le même mouvement.

Quant à la différence entre le chimpanzé et l'homme, je ne suis pas biologiste, mais il me semble que notre patrimoine génétique ne diffère qu'à la marge. D'où l'idée que la variation de la composition pour reprendre l'idée de Spinoza, est croissante. Plus le degré de compostion croît, moins la quantité de variation nécessaire à la diversité de divergence est importante.

Est - ce que cette réponse vous agrée?

J'ajoute que plus la science progresse plus l'objet vers lequel elle tend se dérobe à elle. Asymptote du néant et de l'infini que rien ne peut assouvir. on en revient aux deux infinis de Pascal... Affirmer, c'est déjà trop dire.

Bien à vous,

Ader. :lol: :lol:

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Messagepar hokousai » 20 avr. 2005, 00:26

à AUgustin


Certainement ,on ne peut comprendre Spinoza (ni Descartes ,ni personne d' ailleurs ) sans le contexte et je lisais à cet effet d' auto-information ,ce soir même , un texte de Macherey sur la relation Boyle -Spinoza à propos du salpêtre .Fort instruit et fort intéressant !!

http://www.univ-lille3.fr/set/machereybiblio65.html

Ce qui m’intéresse c’est la métaphysique de Spinoza et cela en ce que pour moi il est essentiellement un métaphysicien et cela souvent contre la physique de son époque (le texte de Macherey en parle bien )

Donc ce qui m’intéresse dans ce que j’ai cité c'est

""". Les idées entrant dans la composition de cette idée qu’est la mens humana correspondent aux parties elles-mêmes constitutives du corps humain, dont elles sont les essences objectives, conformément à la doctrine du parallélisme psycho-physique, """"""

Mais quelles sont donc les essences objective du corps du chimpanzé ? Les mêmes que celles du corps de l'homme ? Probablement .
Essences objectives ...objectives !..comment ?
Je me demande s'il n'y a pas une "objectivité " de trop .

Je parcours ce labyrinthe de l’Ethique sur le fil de certains concepts : causa sui , raison , idées adéquates, corps , notions communes et je vais de ceci me renvoyant à cela et encore plus loin ou plus antérieurement, tel que Spinoza nous y invite d’ ailleurs ..lisez vous ainsi l’ Ethique ?

On peut lire l’Ethique une fois d’ un bout à l’autre ( le peut -on ?)
Mais pas ensuite , ensuite c’est un incomparable terrain d’ aventures intellectuelles ,peut -être le genre "livre dont vous êtes le héros" avant la lettre ...si vous voyez ....

Je parle donc au niveau le plus abstrait en fait ,ou le plus théorique , au niveau de la tectonique des plaques de l’Ethique et plus précisément au niveau des failles entre les plaques .
Avec obstination .

amicalement
Hokousai

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Messagepar AUgustindercrois » 20 avr. 2005, 12:03

Cher Hokousai,

Je crois comprendre votre problème, mais qui n'en est pas un. Reprenons E III 13: ..."le corps, autrement dit un certain mode de l'étendue existant en acte, et rien d'autre".

Et Démonstration: "Si le corps, en effet, n'était pas l'objet de l'esprit humain..."

Ce passage me semble résoudre la difficulté. Qu'en pensez - vous?

Par ailleurs, cette référence de Pierre Macherey est très intéressante. Je vous remercie de me l'avoir communiquée. Je ne l'ai pas lue encore in extenso, mais il y a déjà une chose très intéressante: le contexte des lettres à Oldenburg, si essentielles pour Spinoza, puisque ce dernier réduit la question du Mal à celle de l'adéquation. Il me semble que la question du mal est résolue par Spinoza. Et c'est peut - être son apport le plus essentiel à la philosophie mondiale.

Le mal est réduit à l'inadéquation, il est objectivé. Révolutionnaire, fondamentale pensée.

Cela mène d'ailleurs Spinoza à une aporie.

Je suis heureux de discuter avec vous, car j'avais beaucoup apprécié votre texte sur le parcours affectif de Spinoza, littéraire. Vos haïkaï sont très beaux, et leur mise en parallèle très frappants.

Je parcours Spinoza comme vous, transversalement, par thèmes.

Je crois qu'il faut lire la cinquième partie de l'Ethique d'un seul trait. La force phénoménologique de E V 10 scolie est extraordinaire. Voilà un manuel pratique, une manière de vie et de penser consolante. Ou EV 17: le refus de tout anthropomorphisme quant à Dieu. Ou encore solie de EV proposition 18, ou encore EV 20.

Ou encore, pour la question qui vous intéresse EV 23: l'objectivité du corps, c'est l'actualisation parallèle de l'esprit. Cette proposition qui est essentielle anéantit une conception trop matérialiste de la conception du corps chez Spinoza. Pour SPinoza, l'esprit est éternel, au contraire du corps. Il n'y a donc pas un parallélisme absolu. Seul le corps entendu comme attribut de DIeu, propriété de l'étendue, possède une dimension éternelle.


Ou encore, toujours pour notre question: E V 30. L'objectivité qui vous fait question, en toute dernière analyse, c'est Dieu en tant que Nature naturante.

Amicalement,

Ader


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