Spinoza phénoménologue

Questions et débats touchant à la nature et aux limites de la connaissance (gnoséologie et épistémologie) dans le cadre de la philosophie spinoziste.
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hokousai
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Messagepar hokousai » 20 avr. 2005, 15:31

à AUgustin


Le texte de Macherey traite plutôt du rapport de Spinoza à la physique que d 'Ethique . Ce texte venant confirmer de manière érudite des intuitions que j'avais exprimées dans les débats avec miam et bardamu , je l'ai trouvé intéressant ( c'est naturel ) .

Ce sont les limites d' un rationalisme excessif à mes yeux que je cherche à mettre en évidence ( modestement et à mon usage non obstens ma participation à ce forum ) .
Rationalisme légitime en soi mais particulier et à l’époque et à la personnalité de Spinoza comme penseur individuel incarné .Rationalisme donc modulable, infléchissable , adaptable , confrontable à ce qui le précède et surtout à ce qui le suivi dans l ‘histoire et qui nous est plus proche et qui nous constitue aussi .

La systématicité de la pensée de Spinoza constitue un socle ferme et à ce titre interrogeable en sa fermeté même laquelle serait une fermeture sans quelques cercles aporétiques , laissés le plus souvent en jachère au bénéfice de consensus sur les parties bien fortifiées du système .

Bref le parallélisme n’est pas une grille d' interprétation infaillible .

Le visée du rationalisme comme Ethique de la béatitude , certes ... je ne pense pas que le seul travail de la raison conduise à la béatitude, en ce sens je ne suis pas spinoziste mais plutôt bouddhiste .Il nous faut des pratiques autres que celle de la seule raison, celles- ci demeurant capitales mais non exclusives d' autres tout autant nécessaires .
La cohérence du système justifient rationnellement la béatitude mais de la justification logique à l ‘existence réelle il y a un monde .cf (critique de l’argument ontologique chez les adversaires )

Je suis tout a fait apte à écrire des Haïkus ,mais je ne pense pas en avoir écrit beaucoup ici , Au plus ai -je cité Alexander Pope( éternal sunshine ….)
Je vous remercie cependant d' en avoir le souvenir .
C'est un compliment de ce voir imputer des actions louables bien qu'imaginaires .

J- luc Hokousai

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Messagepar bardamu » 20 avr. 2005, 20:09

hokousai a écrit :à AUgustin

http://www.univ-lille3.fr/set/machereybiblio65.html

Ce qui m’intéresse c’est la métaphysique de Spinoza et cela en ce que pour moi il est essentiellement un métaphysicien et cela souvent contre la physique de son époque (le texte de Macherey en parle bien )

Salut,
où avez-vous vu une quelconque opposition entre un Spinoza métaphysicien et un Boyle physicien dans le texte de Macherey, svp ?

Je cite
Macherey a écrit :Est ici esquissé le projet d’une sorte de division du travail scientifique, en fonction des dispositions propres à chaque tempérament national : aux Anglais revient le génie expérimental, aux continentaux l’attention aux principes des choses exprimés dans le langage abstrait de la rationalité mathématique. Mais, et c’est là le point fondamental, cette division n’est viable qu’entre des “philosophes” qui sont d’accord sur l’essentiel, ainsi que le rappelle Oldenburg au début du passage cité : et cet accord est, en dernière instance la condition d’existence de ce qu’il nomme, selon les cas, “République des Lettres” ou “République philosophique”, où débattent les tenants de la science moderne, ce lieu d’échanges qui constitue l’ébauche d’une cité scientifique, faisant cohabiter ceux qu’A. Comte appellera plus tard des savants spéciaux et des savants généraux.

Où se situe ce point d’accord ? Si l’on s’en tenait à l’opposition frontale entre un rationalisme et un expérimentalisme, on pourrait dire qu’il se formule en droit, au point de vue du philosophe pur que serait Spinoza, à travers le refus d’admettre des hypothèses qui mettraient les principes rationnels en contradiction avec eux-mêmes ; et, au point de vue du savant pré-positiviste que serait Boyle, à travers le refus symétrique de raisonner au-delà des faits et des relations que révèle entre eux l’expérience: ce qui reviendrait à dire qu’il n’y a pas du tout d’accord, mais antagonisme radical entre deux positions qui s’excluent, non seulement sur le plan des thèses particulières qu’elles développent, mais sur celui de la conception qu’elles se font du travail théorique comme tel. Or, si l’on examine attentivement l’échange qu’ont eu Spinoza et Boyle par l’intermédiaire d’Oldenburg, on s’aperçoit qu’il n’en va pas du tout ainsi. Sont en effet à plusieurs reprises définies au cours de cet échange les conditions qui le rendent possible : à savoir l’admission par les deux partenaires des thèses générales de ce qu’on peut appeler la vision mécaniste du monde, à l’intérieur de laquelle s’inscrivent les démarches de la science classique.


Le fait est que je ne vois pas comment Spinoza, qui était fabricant de lentilles pour instruments scientifiques et qui menaient lui-même des expériences de physique, pourrait être considérer comme un métaphysicien sans rapport au physique.
Sans parler de sa théorie même, et de l'indissoluble relation entre corps et esprit.
En physique, les rationalistes comme Spinoza, Leibniz ou Descartes ont pour héritier des gens comme Einstein pour qui la cohérence conceptuelle et les expériences de pensée étaient le principal du travail. Aujourd'hui, c'est toute la partie de physique théorique, de physique mathématique en plus des questions épistémologique qui peut se retrouver dans le genre d'étude du physique qu'avait Spinoza.

Mais j'ai l'impression que le fait que Spinoza puisse être considéré en rapport avec la physique vous dérange. Pourtant peut-on faire une physique sans ontologie ? Quelle ontologie correspond à la physique d'aujourd'hui ?
Et comment faites-vous pour distinguer entre "métaphysique" et "physique" si vous ne savez pas où s'arrête la physique ?
Et pour parler du mental, il est bon de savoir ce que peut un corps.

Pour Faun et Augustindercrois :
j'ai l'impression que vous "psychologisez" le conatus alors qu'il s'agit pour moi d'un concept ontologique qui s'applique tout aussi bien aux pierres (E3P7 dem. : potentia sive conatus, la puissance ou le conatus).
Le désir est l'appétit avec conscience de lui-même, et l'appétit est le conatus lorsqu'il se rapporte au mental et au corporel en même temps (E3P9). Les affects sont des variations de conatus, des variations de puissance (E3P11 scolie).
L'essence n'est rien d'autre qu'une puissance à être soi, un effort pour conserver son être (E3P7), puissance (désir) qui augmente ou diminue ce qui est signalé à l'esprit par les affects qu'on appelle "joie" ou "tristesse".
Les notions ontologiques correspondent aux notions psychologiques en tant qu'on considère le mental, mais ne se limitent pas à elle.
La puissance d'une pierre en tant que "être-qui-est-dur" varie selon ses affects, selon comment les affections de l'extérieur réagissent avec son intérieur, et j'appellerais "joie" un affect de durcissement de la pierre et "tristesse" un affect d'effritement.

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Messagepar bardamu » 20 avr. 2005, 20:29

Revenons à la phénoménologie...
reprobate a écrit :Ceci est ma première contribution sur Spinoza et nous, est la français n'est pas ma langue maternelle, alors avez de patience avec moi.... (Les corrections sont bienvenues.)

Welcome !
Reprobate a écrit :(...) Donc je voudrais suggérer qu'un lecture spécifiquement phénoménologique de l'Éthique peut commencer in media res de la 3me partie, et se proceder à la même fois vers l'avance et vers l'arrière.
(...)Si nous considérons la structure de l'Éthique comme ça, je pense que les affinités avec la phénoménologie se manifestent avec force. L'affection modulaire se semble aussi plus à la "style" (comme chez Merleau-Ponty), par example.

Tout à fait d'accord.
On peut faire partir Spinoza d'un donné, d'une pure positivité du réel, et faire ensuite une extension de ce donné en un Réel pré-subjectif modal dont la substance n'est que lui-même. En partant de la partie 3, on va d'un côté vers la substance comme être unique et non-particulièr, et de l'autre vers la compréhension de la substance par la Science Intuitive des modes particuliers qui l'exprime.

Cela nous mène à une phénoménologie pure pour laquelle le terme même de "phénoménologie" est discutable puisqu'il n'y a plus de noumène. Toute chose, toute réalité particulière est modale, et il n'y a pas de substance particulière sous le mode particulier. Pas de chose-en-soi sous la chose-pour-soi, mais UN en-soi infiniment modifié qui n'est pas caché, pas voilé, pas inaccessible mais dans lequel, au contraire, on baigne en tant que mode.

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Messagepar hokousai » 20 avr. 2005, 22:36

à Bardamu

"""""Mais j'ai l'impression que le fait que Spinoza puisse être considéré en rapport avec la physique vous dérange. """"""""

Ah mais pas du tout .! L'important est de bien cerner le rapport ce que Macherey fait admirablement bien .On ne peut donc pas, et je ne le fais jamais ,considérer Spinoza comme un métaphysicien sans rapport au physique, j ajouterais à la physique comme science telle quelle commençait à se chercher depuis .....disons Copernic .

Le dialogue entre physique et métaphysique est constant chez tous les philosophes depuis les grecs , il serait stupide d'en exclure Spinoza ..

En revanche ce que montre Macherey c’est que Spinoza privilégie la rationalité sur l’ expérience ce qui est un trait de caractère du métaphysicien et cela contre Boyle .Et aucuns des physiciens ultérieurs ne peut se mouvoir dans cette tradition mais bien plutôt dans celle de Boyle c’est à dire l' expérimentale( Einstein y compris naturellement.)

La tradition métaphysique ( ou l’option ) ne produit pas de physique mathématique au sens de la physique actuelle mais une discours rationnel sur ce que doit être logiquement en vertu d ' axiomes métaphysique, ce que doit être la nature ,ce qui est plus une philosophie de la nature qu’une physique et c’est ce que vous faites vous et miam .( Whitehead est dans cette mouvance là , vous devriez comparer votre démarche à celle de Whitehead dans procès et réalité ce qui n’est pas une comparaison infamante )

Ce contre quoi je n'ai rien sauf à devoir bien la voir se distinguer de la physique ..

Spinoza à des difficultés à faire coexister dans le système l’ontologie et la philosophie naturelle difficultés éprouvées par Aristote , donc à coordonner nature naturée et nature naturante .
A un niveau Il parle de corps, de surface, de forme, quand à un autre niveau il nie devoir pouvoir en parler .Il parle des lois du mouvement dans l’une et l’autre nature sans distinguer ,ce qui est une confusion des registres .Je vous dis cela à titre d’exemple de questions posables .

Je ne veux pas être trop long .

Bien à vous

Hokousai

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Messagepar AUgustindercrois » 20 avr. 2005, 22:59

Cher Hokousai,


Chez Spinoza, comme chez Hobbes en ce qui concerne le rapport entre physique et politique, le rapport entre physique et éthique est très étroit, à mon sens. Tout est régi par un déterminisme très fort, une congruence absolue et radicale. Les historiens qui détachent la physique de Descartes de sa métaphyqisue ont tort, selon moi.

Il serait très intéressant que tu précises les zones aporétiques chez Spinoza, car pour ma part, je n'en vois pas. (Mais je suis nouveau en spinozisme...)

"De la justification logique à l'existence réelle il y a un monde": oui, et c'est précisément là le questionnement fondamental qui doit nous occuper. SPinoza est il un philosophe (au sens étymologique) ou un sage?
Car à quoi sert-il de tracer le chemin de la béatitude par la voie de la raison, si ce chemin n'a pas été parcouru en sa totalité par le philosophe?

Là est la question.

Je m'aperçois que ce n'était pas toi qui avais écrit des haïkaÏ, mais peut - être H2O, dont je ne trouve plus trace dans le site.

Connais -tu Pope? De lui, je ne connais que le "Whatever is, is right", que Voltaire brocarde dans Candide, l'optimisme total dont il fait preuve.

Quant à mon imagination, eh bien je dois avouer que j'en suis victime, et que notre ami SPinoza serait le premier à me taper sur les doigts...

Bien à to,

Ader

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Messagepar hokousai » 20 avr. 2005, 23:53

à Augustin

C'est un forum avec toutes les qualité et celui- ci en a d' éminentes dans la forme d' abord et en son contenu ,celui ci sous la responsabilité des participants , reconnaissons et apprécions l'exigence et le sérieux de ces derniers .
Mais un forum nous contraint à limiter le champ du débat ,je ne peux ainsi en quelques mots expliquer les cercles aporétiques ( sic ) . Cela ce fait donc plus ou moins au coup par coup . Mais de fil en aiguille et de messages en messages, sur le long termes , nous parvenons bien à nous expliquer et cela aussi bien que si tout était dit d' un coup en une longue thèse ( d’Etat ou pas ) .
La physique de Spinoza pose des problèmes comme toute physique déductive de la raison et fondée sur l’expérience commune . La physique expérimentale et mathématisée en pose moins en son sein mais les physiciens revenus de leur science et de retour à la pensée commune ,source en fait de la philosophie ,ne sont pas moins démunis que les métaphysiciens qu’ils n’étaient pas mais qu’ils deviennent , ils le deviennent et soufrent des mêmes affres .

Pour parlez d' autre chose si vous n’avez pas lu la lettre de Spinoza à Pierre Balling ( 20 juillet 1664) c’est à lire ..

bien à vous
Hokousai

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Messagepar Miam » 22 avr. 2005, 05:36

"lorsque je fais un cauchemar, toutes les images que je vois sont fausses, elles sont le produit de mon imagination, en revanche, la peur que j'éprouve est elle bien réelle. "

C'est je crois egalement ce que veut dire Spinoza : seul mes affects ont quelque teneur de realite (Artaud dit la mëme chose). Et il est certain que la phenomenologie husserlienne fait un sort un peu facile au contenu materiel - a la "hyle" - du vecu. Toutefois tout affect se refere a un rapport au monde et un affect de peur, bien que reel, produit une connaissance inadequate pour Spinoza. Je pense que Henry comme Husserl demeurent dualistes en separant l,aspect materiel de l,aspect ideal (au sens husserlien) du vecu. Et la sans doute Spinoza ne peut etre dit phenoñenologue. Il depasse la phenomenologie. Mais on ne saurait contourner celle-ci.

Qu'Hokusai reprenne des arguments de la philosophie analytiaue pour separer totalement rationalisme et empirisme me laisse reveur. Cela prouve encore une fois le voilement du fondement metaphysique (ou ontologique) ineluctable a tout rapport au monde' y compris de ceux qui nient ce fondement.

Enfin je me demande de plus en plus si, en effet, il est necessaire de trouver un modele physique a l Ethique. Lorsque Spin est le plus phenomenologue, cad en effet dans la 3e partie de l Ethique, ne se rapproche t il pas plutot d un modele biologique. Je crois qu une comparaison de l animisme de Leibniz et de celui de Spin montre que celui ci est proche de la biologie.

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Messagepar hokousai » 22 avr. 2005, 16:43

à miam

"""Qu'Hokusai reprenne des arguments de la philosophie analytique pour separer totalement rationalisme et empirisme me laisse rêveur. Cela prouve encore une fois le voilement du fondement métaphysique (ou ontologique) inéluctable a tout rapport au monde y compris de ceux qui nient ce fondement. """"

Je ne comprends pas du tout ce que vous voulez dire .
Séparer rationaliste et empirisme l'un de l’autre ?
ou bien séparer les deux, mais de quoi donc ?

Quand au voilement prouvé du fondement ? Non décidément je n'y comprends rien .Vous êtes beaucoup trop concis .. je ne peux vous le reprocher dans les conditions de voyageur où vous êtes .

Mais vous voila partie sur d' autres bases, plus biologisantes semble t-il ....attendons la suite .

portez vous bien
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Messagepar bardamu » 23 avr. 2005, 01:13

hokousai a écrit :(...)
Séparer rationaliste et empirisme l'un de l’autre ?
(...)

Ben oui...
Quand vous écrivez : "En revanche ce que montre Macherey c’est que Spinoza privilégie la rationalité sur l’ expérience ce qui est un trait de caractère du métaphysicien et cela contre Boyle .Et aucuns des physiciens ultérieurs ne peut se mouvoir dans cette tradition mais bien plutôt dans celle de Boyle c’est à dire l' expérimentale( Einstein y compris naturellement.) "

Spinoza étant rationaliste et réaliste, je vois mal comment il pourrait séparer l'expérience de la rationalité. La rationalité est elle-même une expérience du monde.
Quand à Einstein, il a refusé tout sa vie les interprétations des expériences quantiques au nom de principes théoriques généraux.
Un petit texte où il expose sa conception de la physique théorie :

Einstein a écrit :Albert EINSTEIN, 1933

Mais si l'expérience est le commencement et la fin de toute notre connaissance au sujet de la réalité, quel rôle est laissé, dans la science, à la raison ? Un système complet de physique théorique consiste en concepts et en lois de base pour relier ces concepts avec les conséquences qui dérivent de là par déduction logique. C'est à ces conséquences que doivent correspondre nos expériences particulières, et c'est la dérivation logique de ces conséquences qui, dans un ouvrage purement théorique, occupe de beaucoup la plus grande partie du livre. (...) Nous venons d'assigner à la raison et à l'expérience leur place dans le système de la physique théorique. La raison donne au système sa structure ; les données de l'expérience et leurs relations mutuelles doivent correspondre exactement aux conséquences de la théorie. C'est uniquement sur la possibilité d'une telle correspondance que reposent la valeur et la justification de l'ensemble du système, et spécialement de ses concepts fondamentaux et de ses lois de base. Sinon, ceux-ci ne seraient que de libres inventions de l'esprit humain n'ayant aucune justification a priori, ni par la nature de l'esprit humain ni de quelque autre manière que ce soit. Les concepts et les lois de base dont on ne peut pousser plus loin la réduction logique constituent, dans une théorie, la partie indispensable et qui ne peut plus être rationnellement déduite. On ne peut guère nier que le but suprême de toute théorie est de rendre ces éléments irréductibles de base aussi simples et aussi peu nombreux qu'il est possible sans avoir à renoncer à la représentation adéquate d'une seule donnée de l'expérience. (...) Si donc il est vrai que la base axiomatique de la physique théorique ne peut-être obtenue par une inférence à partir de l'expérience, mais doit être une libre invention, avons-nous le droit d'espérer que nous trouverons la bonne voie ? (...) Je suis convaincu que la construction purement mathématique nous permet de découvrir les concepts et les lois qui les relient, lesquels nous donnent la clef pour comprendre les phénomènes de la nature. L'expérience peut, bien entendu, nous guider dans notre choix des concepts mathématiques à utiliser ; mais il n'est pas possible qu'elle soit la source d'où ils découlent. Si elle demeure, assurément, l'unique critère de l'utilité, pour la physique, d'une construction mathématique, c'est dans les mathématiques que réside le principe vraiment créateur. En un certain sens, donc, je tiens pour vrai que la pensée pure est compétente pour comprendre le réel, ainsi que les Anciens l'avaient rêvé.

" On the Method of Theoretical Physics ", cité par R. Blanché, La Méthode expérimentale et la Philosophie de la physique, Ed. Armand Colin 1969, p. 274.

Source : http://sergecar.club.fr/documents/einstein1.htm

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Messagepar hokousai » 23 avr. 2005, 17:40

à Bardamu

Einstein semble en effet plutôt dans l'esprit rationaliste de Spinoza que dans celui expérimentateur de Boyle .
Mais Je pensais à l'expérience de Michelson quand je citait Einstein, laquelle n’est pas une expérience commune mais construite ,du type de celles que faisait Boyle et qui ne satisfont pas Spinoza ..

La rationalité est d' abord et avant tout une expérience intellective c'est une expérience de pensée .
La rationalité se pense comme en relation bijective avec son objet ce qui est acceptable si elle pense son objet comme intelligé (les mathématique pare exemple ) ce qui est plus périlleux quand son objet est censé lui être extérieur (le monde objectif ou dit réel ) ,
ce que vise la critique kantienne contre tous les réalistes issus de l’ aristotélisme ..

Une expérience construite rationnellement est à l’évidence conforme à la rationalité du projet . Spinoza et Hobbes observaient que cette expérience n’était pas de la nature telle qu’elle se donne naturellement en ce sens ils étaient réalistes et méfiant à l’ égard d ‘un constructivisme pratique ..

Parlons de l’expérience

De mon point de vue l’expérience naturelle n’est pas d' évidence a priori rationnelle pas a priori , cela reste à montrer .Il semble à l ‘homme de la modernité toujours y avoir un écart entre le donné et son intelligibilité .Ecart très bien mis en lumière par Descartes .

L’ expérience naturelle ne se donne pas toujours comme rationnelle .La rationalité des choses est à découvrir. La raison des choses est à trouver ou a construire et parfois cela est impossible .d'aucuns dirait que cela est toujours impossible in fine, que cela est impossible en soi .Que l’effort est louable mais que le succès est très incertain .

En ce sens Spinoza est un rationaliste incertain en ce que de la connaissance de l'infinité des causes nous en sommes par notre condition à une distance conséquente .J 'ajouterai que rien ne nous autorisant à mesurer cette distance notre rationalité reste orpheline d’une certitude et de la principale à savoir celle des choses dont elle parle et dont elle parle comme extérieures à elle même ( le réel ).

Affirmer que Spinoza est réaliste n'a guère de signification particulière dit comme ça .. et cela n'en guère pour aucun philosophe sérieux . Aucun ne s'est revendiqué irréaliste .Le réel est toujours considéré avec le plus grand sérieux comme un incontournable à examiner .
Ce qui serait contesté ,en serait la matérialité ou l’objectivité ou bien la succession des causes et des effets intelligés, les lois les principes que sais- je, mais pas ce dont il s’agit de parler le sujet même qui est le réel en ce qui est donné comme une présence ayant existence sous les sens ou dans la pensée .

Je ne vois toujours pas en quoi il y a allégation chez moi de séparation nécessaire du rationalisme et de l’ empirisme , soit l'un de l'autre soit les deux d'une option concurrente .
Relativement à certains projets ( dans un certain pragmatisme ) les démarches ne sont pas exclusives mais complémentaires ,relativement à d' autres projets l’une ou l’autre l’ emporte .
Il existe des manières d ‘exister qui ne sont ni rationalistes ni empiriques et reconnue comme tout à fait importante pour l’homme qui y séjourne .
La préférence pour l’une ou l’autre manière d' exister n ' a pas de légitimité hors de la sphère d' existence où l'individu séjourne .Ce qui signifie qu’il n y a pas de cause extrinsèque à l'évènement .

bien à vous

Hokousai


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