L' essence de l'homme (par exemple )

Questions et débats touchant à la doctrine spinoziste de la nature humaine, de ses limites et de sa puissance.
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hokousai
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Messagepar hokousai » 13 juin 2005, 19:46

Cher miam

vous dîtes """""" L'attribut est la matière des rapports et les modes infinis le rapport des rapports (le rapport infini contenant tous les autres comme une synthèse de toutes les synthèses). L'ensemble des rapports, ce n'est pas Dieu, c'est au mieux le mode infini immédiat. Mais ce rapport est également une partie infinie de la puissance absolument infinie de Dieu. """""""
j'ai énormément de difficultés à comprendre votre texte .
..................................................................................................

Bien ,cela dit """Concevoir une essence, c'est donc percevoir l'expression de la puissance de Dieu (et non un objet fini de l'ensemble nommé Dieu"""""""

Si c’est cela ,certes, admettons, mais ce n'est pas ainsi qu' on m'en parle ICI.
On me parle ICI d 'essence de pomme .
Ce qui n’est pas concevoir une essence en général mais une essence particulière .

Soit dit en passant cette essence est un supposé indispensable. C’est un posé dans l’esprit comme prenant une place supposée vacante .Et c’est tout .Il n'y a pas de description possible ou donnée de cette essence supposée des pommes , l’image idéelle est vide . L’idée ne tient pas par son contenu mais par sa fonction . Elle remplit la fonction de tenir place dans un vide supposé de la pensée .C’est une idée fonctionnelle .
C’est ainsi que je le vois .

au plaisir de vous lire

Hokousai
( svp précisez à qui vous répondez )

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Miam
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Messagepar Miam » 13 juin 2005, 20:27

Excusez-moi je suis dans un coin à 200 bornes de chez moi où l'heure d'internet est horriblement cher et où le service se termine à sept heure pile sans prévenir. Alors j'ai changé de coin pour être plus à l'aise.

Contre Bardamu : Au niveau des modes finis, il n'y a que des essences de choses singulières, cad d'individus. L'humanité est elle même un individu et non une espèce ou un genre.

Contre Hokusaï : il y a des essences de choses singulières qui expriment la substance parce que la Substance elle-même est une singularité (pas une chose singulière, mais cependant une singularité). Cela veut dire qu'elle n'est pas le simple substrat de ses affections ou accidents mais une puissance de présentifier ces affections et, partant, une puissance qui demeure immanente à cette affection.

Par conséquent : "Faudrait-il concevoir l'essence spinoziste comme juste une manière de concevoir la chose hors des rapports qui l'ont constituée, de concevoir la chose seulement en ce qui la singularise? Comme si on suspend 'temporairement' le temps et l'enchaînement des causes/rapports, et qu'on essaie de parler de la chose fixée/isolée de son environnement et de son histoire (l'éternité comme un genre de pure présence?)?"

Sûrement pas. Bien au contraire. L'essence, comme toute autre chose, ne se distingue pas de sa production. C'est du reste cela qui définit la définition et l'essence : la chose n'est rien d'autre que sa production. Rien ne singularise une chose sinon sa puissance. Et sa puissance n'est qu'une partie de la puissance divine. Or celle-ci produit tout à la fois de sorte que chaque chose participe à la production de toutes les autres. Cela n'est du reste rien d'autre que ce que je nommais une synthèse. Mais Dieu n'est pas lui-même une synthèse. Il est la puissance qui se communique à travers ces synthèses. Lorsque les corps se communiquent leur mouvement selon un rapport constant, c'est la puissance infinie de Dieu qu'ils se communiquent au travers de ce mode infini immédiat. De même lorsque les idées se synthétisent, elles se communiquent la puissance de penser à travers le mode infini qu'est l'idée de Dieu. Une essence est tout sauf une entité isolée. Il faut voir les choses comme une production et non un produit. Il est vrai que par les temps qui courent, on nous expose le plus souvent le produit en dissimulant sa production. Mais il faut s'arracher de cela pour comprendre Spinoza.

Pour ne plus concevoir l'essence comme une entité sans dehors, voire comme une substance, il est alors préférable je crois de la comprendre en termes d'existence. Ainsi II 8 parle moins d'essences que des manières d'exister du mode corrélatives d'une temporalité qui, elle, dépend du point de vue objectif du Mental :

- l'être formel existe en tant qu'il est contenu dans l'attribut. Eternité. Présence.
- l'être actuel peut "être dit exister". Eternité et durée. Actualité de la présence-essence.
- l'existant en acte . Durée et temps imaginaire (cad affirmation de qqch comme présent et non plus de la présence)

Idem pour les modes infinis et l'attribut.

Attribut. Eternité.
Mode infini immédiat. Eternité et durée.
Mode infini médiat. Eternité et existence en acte.

Il faut expliquer tout cela.

Bref, la connaissance dépend de l'engagement temporel du sujet de connaissance et non de l'appréhension de tel ou tel type d'essences ou d'idées. Et les genres de connaissances dépendent de ces trois manières d'exister des modes, manières qui, elles-aussi sont issues du point de vue existentiel (et affectif) du Mental sur ces modes.

Bref, je suis fort loin de votre problématique dans la mesure où je rejette la conception de l'essence comme une entité et que j'en fait une présentification (puissance de penser) et une production (puissance d'agir).

Me fais-je bien comprendre ?

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Messagepar Louisa » 13 juin 2005, 20:37

Chers Miam et Hokusai,

un petit mot sur les deux derniers messages: je suis bien d'accord avec Miam que pour Spinoza, très probablement Dieu est plus que l'ensemble des rapports (PS: on peut concevoir des ensembles infinis, donc le problème ne se trouve pas là, à mon avis). Je vois bien qu'il pose, à côté des rapports, également des essences. Mais même sans se demander s'il existe des essences singulières ou non, pour l'instant je ne saisis pas où se trouve la nécessité conceptuelle d'ajouter le concept d'essence, en tant que notion qui n'est pas totalement épuisée par celle d'un rapport spécifique de rapports. Qu'est-ce que cela nous apporte? Pourquoi ne pas penser un degré de puissance d'agir et un effort pour persévérer dans son être qui ne serait que la résultante de rapports, au lieu de, dans un certain sens, 'autonomiser' cette puissance en la nommant 'essence'? Je ne vois donc pas du tout en quoi cette essence serait un 'supposé inévitable', comme le dit Hokusai.

Spinoza l'a ajouté à sa théorie, et il construit toute la notion de la connaissance du 3e genre autour de ce concept, donc je suppose bien que pour Spinoza, elle était tout à fait indispensable. Et il est vrai que si l'essence ne serait qu'un 'rapport de rapports', il est difficile de la concevoir comme éternelle, tandis que Spinoza sent et expérimente qu'il est éternelle. Mais comment penser une éternité qui est hors temps, qui n'est pas durée infinie, comme le pose Spinoza (Miam, qui travaille apparemment sur la temporalité, en a peut-être une idée?)? Bardamu dit (avec Deleuze, si je ne m'abuse): en tant que intensité pure, et j'ai l'impression qu'en effet, comme beaucoup de choses qu'il écrit sur la notion d'essence, cela permet très bien de concevoir plus clairement ce que Spinoza voulait dire par cette notion. Mais pour l'instant, j'ai encore des difficultés à concevoir cette intensité dans son caractère 'pure', c'est-à-dire tout à fait dissociée de toute extension.
Bien à vous tous,
Louisa

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Messagepar bardamu » 13 juin 2005, 20:43

hokousai a écrit :(...)Qu’une rose s'affirme ,certes .
Mais l’accent porté sur l’individualité de la rose n'est pas une compréhension de sa nécessité mais une compréhension de son individualité .Ce qui est différent .
J’estime que la connaissance du troisième genre fait porter l accent sur la nécessité et non sur l’individualité .

Dans le 3e genre de connaissance, il y a soi, les choses singulières et Dieu.
Le sujet portait sur les essences des choses singulières et nous avons donc parlé de celles-ci...
Ce n'est pas exclusif de la nécessité.
Mais pourriez-vous donnez les textes qui vous orientent vers l'idée de nécessité comme notion principale dans le 3e genre de connaissance ?
Hokousai a écrit :Lorsqu’on demeure dan l’individuation on est conduit vers l’essence .
Mais une chose est individuée d'un certain point de vue ,c'est le point de vue qui individualise. .La chose singulière peut être reconnue comme individuelle ou moins ou pas du tout ou comme partie d'un individu plus grand qu 'elle , cela est du second genre de connaissance .
(...)
Je lui oppose une philosophie de la relation et un perspectivisme. A l’idée de la rose dans l’attribut pensée co-existent des mouvements de l’étendue . L’événement est nécessaire , je ne vais pas plus loin .

Si je ne voyait pas les roses l’événement serait autre ,si je voyais plus que les roses l ‘événement serait autre et l’ordre des idées serait toujours le même que l’ordre des choses .La position de bardamu (concernant le rapport à l'événement présent )s'écarte de l'infinité des points de vue possibles pour n'en privilégier qu' un , le sien ..

A la question "comment s'établit la singularité ?" vous répugniiez à répondre mais finalement, il semble que ce soit, pour vous, notre rapport spécifique qui détermine l'individualité.
J'avais d'ailleurs anticipé cette réponse puisque je disais plus haut que selon vos idées (votre essence ?) vous devriez dire : "Hors d'une saisie perceptive, il n'y a pas de singularité."

Mais disons que vous appeliez "une rose" la cause extérieure d'une certaine combinaison d'impressions. Vous pouvez considérer que cette rose a elle-même son point de vue sur le monde, au nom de l'égale dignité de tous les modes.
L'essence n'est rien d'autre que le "point de vue" lui-même. Chaque chose à son "point de vue" qui est son mode d'effectuation de la puissance. Le "point de vue" n'est pas une perception passive mais un mode d'être actif, une manière d'être plutôt qu'une contemplation.
Mais j'ai l'impression que pour vous connaitre c'est reconnaitre, c'est identifier la bonne image ou le bon mot et je crains que vous ne considériez qu'un point de vue, c'est une contemplation, un regard passif plutôt qu'une manière d'appréhender (avec toute la force de l'étymologie de ce verbe).

Quand vous dites que parler d'essence c'est privilégier un point de vue, c'est au contraire accorder à chaque chose son point de vue.

Louisa évoque Leibniz et Leibniz a effectivement pris à Spinoza (" Leibniz venait lui piquer des morceaux de manuscrits pour dire après que c’était lui. Il y a des histoires très curieuses – c’était un homme dangereux, Leibniz. " dixit Deleuze, http://www.webdeleuze.com/php/texte.php ... a&langue=1 ).

La monade leibnizienne, c'est le champ modulé de la substance atomisé en particules isolées.
Le champ d'un monde unique animé de modes est explosé en monades, en mondes refermées sur eux-mêmes, dont le lien est externe, transcendant, harmonie pré-établie d'un Dieu au-dessus des monades choisissant quel monde elles reflèteront, elles impliqueront. C'est comme cela qu'il peut sauver le Dieu chrétien.

Lorsque vous évoquez des essences individualisés, il s'agit plutôt des monades de Leibniz. L'essence singulière de Spinoza n'est pas fermée, c'est un mode de la substance, ouverte sur elle.
Hokousai a écrit :Les choses n'ont pas de substance individuée ( matière forme et âme ) les sou-tenant individuellement dans leur existence accidentelle .

Or cela bardamu l ‘affirme .Il affirme qu’une rose est une rose de par sa matière, de par sa forme de par son essence que donc une rose est individuée et cela éternellement .Ce qui est la position de l’aristotélisme sauf sur l l‘éternité ...l’éternité serait une touche de platonisme .

Euh... où avez-vous vu que je parlais d'une substance individué alors que je ne parle que de modes ? Où avez-vous vu parlé de matière ?
J'ai même eu la prudence d'éviter le mot "forme" et je crois ne pas l'avoir employé une seule fois sachant combien il vous provoquerait des remontées d'aristotélicisme néfaste.

Je le re-cite, au cas où :
E3P7 : L'effort par lequel toute chose tend à persévérer dans son être n'est rien de plus que l'essence actuelle de cette chose.

L'effort. La force. La tendance. Le désir. La vie. L'action. L'orientation. L'ethos. Aller à droite ou aller à gauche, agir dans un sens particulier.

La substance est action, puissance en acte, les modes sont des modes d'action.
Modifié en dernier par bardamu le 13 juin 2005, 20:54, modifié 1 fois.

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Messagepar Louisa » 13 juin 2005, 20:43

PS: mon message a apparemment croisé celui de Miam. Il n'est donc pas une réponse au dernier message de Miam, que je n'avais pas encore pu lire.
Ciao,
Louisa

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Messagepar hokousai » 13 juin 2005, 23:36

à bardamu

""""""""""""L'essence singulière de Spinoza n'est pas fermée, c'est un mode de la substance, ouverte sur elle. """"""""""""""

Pour repartir du bon pied ,expliquez- moi ce qu'est l'essence singuière pour Spinoza .Il se peut très bien que nous soyons d' accord et entre nous et avec Spinoza .


""""""""Mais pourriez-vous donnez les textes qui vous orientent vers l'idée de nécessité comme notion principale dans le 3e genre de connaissance ? "

Alors ça je l'ai fait . Sur ce forum .Mais où ? j'ai beau chercher, je ne retrouve pas . Donc je vais continuer à chercher ou refaire pour vous ,mon cher ami ,le travail . Je suis parti de partie 5 (revoir d' où ) et puis je suis remoné de renvois en renvois "spinoziste " vers partie 1.

Mais ce sera pour demain ou plus tard .

hokousai

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Messagepar hokousai » 14 juin 2005, 14:01

à bardamu

J'ai retrouvé .Bon c'est un peu épuré mais cela correspond bien à ce que je pense .

prop 23 partie 5
et/ou par la démonst de prop 29 partie 5 renvoyant au corol 2 prop 44 partie 2 renvoyant à prop 16 partie 1

Hokousai

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Messagepar hokousai » 14 juin 2005, 14:28

à Bardamu
"""vous devriez dire : "Hors d'une saisie perceptive, il n'y a pas de singularité."""""""" "

D'accord ,c’est bien vu .Forte influence de Berkeley. Ce qui ne conduit pas au solipsisme, les choses percues sont elles mêmes percevantes( très opposé à la monade de Leibniz )"Vous parliez un jour de Mach lequel est un philosophe que j’apprécie beaucoup .

""""""""""""Dans le 3e genre de connaissance, il y a soi, les choses singulières et Dieu. .....Ce n'est pas exclusif de la nécessité. ""

D'accord .

"""""""""A la question "comment s'établit la singularité ?" vous répugniez à répondre mais finalement, il semble que ce soit, pour vous, notre rapport spécifique qui détermine l'individualité. """""""""""

D'accord .Je ne peux répondre en général mais disons pour l'homme normalement constitué ...

"""""""""""""Mais j'ai l'impression que pour vous connaître c'est reconnaître, c'est identifier la bonne image ou le bon mot et je crains que vous ne considériez qu'un point de vue, c'est une contemplation, un regard passif plutôt qu'une manière d'appréhender (avec toute la force de l'étymologie de ce verbe). """"""""""""""""

Je ne vois pas bien vos distinctions .Il n'y a strictement rien de passif dans identifier . Je suis de tendance pragmatiste et empiriste en philosophie .C’est une relation qui s’instaure ,la perception est active et non passive .Je me réfère à Wittgenstein qui est un philosophe des manières de dire, des styles de vie , des variations , des allez retour ,des expériences de pensée tout cela est pragmatique
Et corporelle pourquoi m’imaginez vous toujours comme inactif et passif alors que je suis actif..

bien à vous

Hokousai

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Messagepar Louisa » 14 juin 2005, 17:27

A Hokusai et Bardamu,

Bardamu a écrit :
"""""""""""""Mais j'ai l'impression que pour vous connaître c'est reconnaître, c'est identifier la bonne image ou le bon mot et je crains que vous ne considériez qu'un point de vue, c'est une contemplation, un regard passif plutôt qu'une manière d'appréhender (avec toute la force de l'étymologie de ce verbe). """"""""""""""""



Hokusai a écrit :
Je ne vois pas bien vos distinctions .Il n'y a strictement rien de passif dans identifier . Je suis de tendance pragmatiste et empiriste en philosophie .C’est une relation qui s’instaure ,la perception est active et non passive .Je me réfère à Wittgenstein qui est un philosophe des manières de dire, des styles de vie , des variations , des allez retour ,des expériences de pensée tout cela est pragmatique
Et corporelle pourquoi m’imaginez vous toujours comme inactif et passif alors que je suis actif..


J'ai l'impression que vous comprenez chacun une chose différente par 'connaissance active', et, pour autant que je l'ai compris, le sens de Bardamu me semble le plus proche du sens spinoziste. Pour Spinoza, une connaissance active consiste à avoir des idées adéquates, qui sont elles-mêmes liées aux affects adéquates, qui sont des actions. Mais action veut ici dire qu'on comprend quelque chose clairement et distinctement par soi seul. Ce qui veut dire qu'on n'est donc pas déterminé par dehors, ne fût-ce qu'en partie, mais qu'on est soi-même la cause.

Or, que la perception soit active pour Hokusai, semble plutôt vouloir dire que l'intellect humain y est pour une part, c'est-à-dire, que dans la perception, nous établissons une relation avec un corps extérieur, relation dans laquelle l'idée que nous avons est autant déterminée par ce corps que par nous-même. La passivité, ici, voudrait alors dire que l'Esprit ou le Corps recevrait 'comme un tableau de cire' l'image de la chose. Mais dans ce cas, ce serait dans la passivité que nous aurions l'idée la plus 'vraie' de la chose. Passivité qui n'appartient pas aux possibilités de l'homme, si on part de l'idée que le corps humain joue toujours le rôle d'intermédiaire entre la chose et l'idée.

Tandis que chez Spinoza l'idée vraie ne surgit qu'avec l'activité. Tant que nous sommes passifs, l'idée que nous avons de la chose confond la nature de cette chose avec la nature de notre propre Corps, et ne la voit pas distinctement. Il faut que l'Esprit agit avant que l'idée vraie surgisse. Et être passif fait tout aussi bien partie, chez lui, des états possibles de l'Esprit que l'être actif.

Hokusai a quelque part identifié les essences à une 'ressemblance', et il me semble que c'est exactement ce que veut dire Bardamu ici: si les essences sont des ressemblances, percevoir une essence veut donc dire percevoir une ressemblance. Ressemblance entre quoi et quoi? Si la perception est toujours une relation, il faut forcément supposer au moins une certaine ressemblance entre soi-même et la chose. Mais justement, si on conçoit la connaissance ou la perception d'une telle manière, on peut éventuellement avoir des idées adéquates, mais ce seront toujours des notions communes (chez Spinoza), c'est-à-dire, on se base sur ce qu'on a en commun avec la chose, ou sur ce que les choses ont en commun, ce qui ne donne aucun accès à leur singularité ou à leur essence (car chez Spinoza, ce qui caractérise l'essence est unique; impossible donc qu'elle aurait quelque chose en commun avec une autre essence, autrement dit, impossible de l'"identifier" dans ce sens, car il n'y a rien d'identique entre elles; on ne peut que les "intuitionner", ce qui est tout autre chose).

Donc: même dans un sens spinoziste, la perception hokusienne me semble ici quand même pouvoir être dite 'active' (PS: attention, il s'agit de notre IDEE DE CE QUE C'EST QUE l'ACTIVITE de la connaissance/perception, et pas de l'ACTIVITE ou passivité supposée DE CEUX QUI S'EXPRIMENT ICI sur cette question ... on peut de manière très active défendre l'idée d'une éventuelle passivité totale de la perception).
La perception hokusienne me semble spinoziste dans le sens où les notions communes sont déjà des idées adéquates. Mais cela reste une connaissance du 2e genre, tandis que les essences concernent la connaissance du 3e genre. C'est pourquoi je dirais que chez Spinoza, les essences ne peuvent jamais être des ressemblances (à Hokusai: serait-il éventuellement possible de nous expliquer un peu plus ce que serait une essence qui soit une ressemblance? Quels philosophes l'interprètent comme ça?).


Je viens de lire les passages indiqués par Hokusai. A mon avis, il est vrai que, si on le veut, on peut les interpréter dans un sens 'hokusien', c'est-à-dire, on peut les lire comme s'il ne s'agit que de la nécessité des choses et de l'essence (unique) de Dieu, sans supposer que Spinoza parle d'essences singulières. Mais on peut tout aussi bien, à mon avis, lire ces passages comme si Spinoza parle à chaque fois d'essences singulières. Car si on laisse tomber les essences singulières (une fois qu'on admet la notion d'essence, évidemment, notion dont je vous ai déjà dit que je ne comprends pas encore la nécessité), je ne vois pas comment interpréter le fait que Spinoza dit que l'essence de chaque chose consiste en un degré spécifique de puissance, tandis que Dieu a la puissance infinie.
Si l'essence de la pomme, c'est un degré de puissance qui la caractérise, même si cette puissance fait partie de Dieu, elle reste tout à fait singulière. Et comme une des définitions de l'essence que donne Spinoza, c'est précisément le fait d'être un degré de puissance, dès qu'on admet l'existence de degrés singuliers de puissance, on est obligé, il me semble, d'admettre l'existence d'essences singulières.

En quoi une essence singulière se différencie-t-elle donc de l'essence de Dieu? Hokusai vient de poser la question (enfin, je la traduis pour mon propre compte), et je crois qu'essayer d'y répondre pourrait en effet aider à comprendre l'essence spinoziste, et donc également la notion de connaissance du 3e genre. J'y réfléchis donc.

Bien à vous,
Louisa

PS: question à Hokusai: j'ai bien compris que, malgré le fait que vous n'acceptez pas l'existence d'essences singulières chez Spinoza, vous voulez garder la notion d'essence (notion que je croyais que vous interprétiez alors comme cause première des choses singulières, mais comme vous n'avez pas confirmé cela, je suppose que vous ne vous y retrouvez pas?). Mais avez-vous l'impression qu'il y ait un corrélat de ce que vous entendez par essence chez Spinoza, chez Wittgenstein ???

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Messagepar hokousai » 14 juin 2005, 19:30

chere Louisa """""""

'''''''''''''''"(car chez Spinoza, ce qui caractérise l'essence est unique; impossible donc qu'elle aurait quelque chose en commun avec une autre essence, autrement dit, impossible de l'"identifier" dans ce sens, car il n'y a rien d'identique entre elles; on ne peut que les "intuitionner", ce qui est tout autre chose).""""""""""""""""

C'est très bien ce qu vous dîtes là ,on ne peut que les intuitionner .
La chose singulière n'a donc rien de commun et surtout pas une essence commune avec d'autres choses .
ce qui n’est pas le cas des notions communes d’ accord et vous distinguez bien,mais les notions communes ne sont pas des choses.
………………………………………………………

action !! Le terme est assez vague, tout est action si vous voulez mais quand même plus ou moins .Dans la passivité on a pas une idée plus vraie mais une idée plus calme (ou pacifiée ).

Je ne dis pas que nous établissons des rapports ( donc pas de SUJET ni actif ni passif )je dis qu'il n’existe pas que ma perception ( ce qui serait du solipsisme et pas facilement tenable en Spinozisme ou même en para spinozisme puisqu’on m accorde encore cela et même du point de vue du simple bon sens .lequel j essaie de ne pas oublier )
………………………………………………………………………………..

Parlons des ressemblances .Ressemblances entre quoi et quoi ?

D'abord il faudrait avouer que nous en voyons des ressemblances et ne pas douter de ce phénomène .
Une ressemblance n'est pas une essence ,car une ressemblance est un rapport .Une essence est une propriété ( le propre d' un individué non relatif )et je nie la pertinence des individués .Tous les philosophes ayant critiqué les essences parlent de ressemblance de Okham à Wittgenstein .
………………………………………………………………………………………….

"""""Spinoza dit que l'essence de chaque chose consiste en un degré spécifique de puissance, """""""""" je suis d'accord avec cela bien que cela me semble assez abstrait comme savoir ..

je pense que" essence singulière "est contradictoire dans les termes . Sauf erreur Spinoza ne parle pas d’essence singulière .

………………………………………………………………….
Pour résumer ce qui risque de partir un peu dans tous les sens .

De mon point de vue les choses n' ont pas d'essence .Du point de vue de Spinoza ,peut- être après tout, il reste probablement scolastique là -dessus .Son époque l’était encore fortement .On attribue peut être trop à une complexité de pensée ce qui était chez lui une incertitude ,car voyez- vous les essences chez Spinoza ce n’est véritablement pas clair .
Dire que pour lui c’est ceci ou c’est ,cela relève de l’invocation .

Une inaptitude à penser l’invocation clairement et distinctement est une inaptitude que j’ assume plus que je revendique (ce n’est pas vous c’est henrique qui m'en parlait ).

Il faut attendre les empiristes Anglais pour véritablement contester l’ essentialisme .

un peu las
Hokousai


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