réflexion sur l'anthropologie politique française

Questions philosophiques diverses sans rapport direct avec Spinoza. (Note pour les élèves de terminale : on ne fait pas ici vos dissertations).

elfiremi
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réflexion sur l'anthropologie politique française

Messagepar elfiremi » 05 févr. 2008, 09:44

Voici ma théorie avant toute chose: l'anthropologie de droite est foncièrement idéaliste, voire kantienne, tandis que l'anthropologie de gauche oscille entre plusieurs pôles, ce qui peut, peut-être, expliquer, par certains côtés certaines de ses difficultées.
Je baserai mon analyse en partie sur l'histoire, de la révolution française jusqu'à aujourd'hui.
Je suivrai cependant le conseil de Raymond Aron, en signalant que, malgré l'expression ici utilisée de "droite" au singulier, je ne crois pas en une véritable unité de cette partie du spectre politique. A partir de la révolution française, on parle dailleurs déjà d'une droite qui s'articule autours de trois tendances:
- Les légitimistes
- Les orléanistes
- Ou encore les Bonapartistes.
J'ai cependant bon espoir de pouvoir démontrer qu'un dénominateur commun est présent de la droite républiquaine jusqu'à la vieille droite gaulliste, en passant même peut-être, par l'extrême droite qui exacerbe cette perspective. Mais commençons.

Que se passe-t-il le 17 juin 1789 lorsque le tiers états se détache des états généraux pour se constituer en assemblée nationale constituante? Il y a une remise en question massive du mode de représentativité: doit-elle être l'oeuvre d'un seul homme intronisé, ou est-ce le corps populaire qui doit assurer cette fonction? Au-delà du refus d'une partie de l'assemblée de continuer à accepter un droit de véto royal, il me semble que quelque chose de structurel va s'y dessiner, et que cette structure ne quittera plus jamais vraiment les sous-bassements anthropologico-politiques de la droite.
Nous sommes donc le 17 juin, et une partie de l'assemblée se positionne à droite, pour lui affirmer son soutient (la tradition voulant que les amis du roi se positionne à sa droite). Ce que désirent les Légitimistes, au-delà de leur simple fidélité aux Bourbons, c'est conserver la figure du roi comme représentative de l'unité nationale. Ce roi, nous le savons, est de plus investi par la divinité, ce qui lui confère un statut transcendant: il n'est pas le sommet de la pyramide, tandis que le peuple en serait la base, il est hors de la pyramide, il est l'étoile qui scintille au-dessus. Cessons-là les métaphores: l'idée, c'est qu'ici se dessine une structure particulière. Le signifiant politique de l'unité nationale n'est pas sur le même niveau ontologique et hiérarchique, que le signifié qu'est l'ensemble du peuple: il y a un hiatus, une béance, dans la référence. C'est cela qui me laisse à penser que la droite, qu'elle soit conservatrice, libérale, autoritaire (...etc) est structurellement idéaliste. Elle s'articule autours d'un signifiant qui transcende ce à quoi il fait référence.
A contrario, la gauche qui s'établit alors relève plus de l'immanence dans sa structure puisque c'est le peuple qui représente le peuple par un système de représentation qui n'établit pas de hiérarchie de niveau. Le signifiant est cette fois-ci au même niveau que le signifié.

Nous pouvons ici utilisé la théorie politique hobbesienne, et sa notion d'auctoritas. La droite positionne dans la figure de l'acteur un comédien transcendant qui peut s'émanciper d'ailleurs du texte des auteurs d'une façon plus ou moins large selon la droite dont on parle (l'extrême droite se détache en ce sens tout simplement de la base populaire pour lui imposer ce qu'elle pense ou ce qu'elle décrête lui être favorable: c'est un despotisme éclairé). La gauche, quant à elle, installe un lien solide entre acteur et auteurs afin que, ce qui offre une unité à la république, n'en profite pas pour assurer sur elle un pouvoir despotique.
Mais je ne cherche pas ici à démontrer par a + b la supériorité structurelle de la gauche sur la droite: j'inste sur leur différence, des différence qui peuvent s'expliquer des deux côté par des arguments aussi raisonnable.

Je passe à présent à l'idéologie des anti-lumières, afin de démontrer comment l'on retrouve une répétition de la structure idéaliste au sein de cette idéologie. Pour être honnête, c'est là que le difficile de l'argumentation commence.Tout d'abord, on pourrait me contredire, précisément grâce à cette pensée contre-révolutionnaire et ses arguments lorsque je dis que l'idéalisme est la base strcturelle de l'anthropologie de droite. En effet, les Lumières célèbrent au fond un homme abstrait afin d'assurer l'égalité entre les hommes et leur liberté. Ici, on pourrait être tenté de dire que les Lumières sont en ce sens idéalistes, qu'elles pense l'eidos, l'essence atemporelle de l'homme: cependant, il me semble qu'il s'agit plus ici de ce que Spinoza appelle une notion commmune de l'homme qui ne transcende pas l'espace et le temps comme croirait le faire une abstraction.
On sait que pour Bonald, au contraire, c'est bien l'inégalité qui est constitutive du corps sociale. C'est ici la conséquence d'une vision organiciste très répandues dans les contre-lumières. Les inégalités sont nécessaire à l'organicisme, afin d'assurer les fonctions différenciées des éléments en présence. Le roi n'a pas la même fonction, et le même poids ontologique que le noble et le fonctionnaire public, qui n'ont pas eux-mêmes le même rôle et le même poids ontologique que le féaux ou le peuple. L'organicisme érige obligatoirement, de part la hiérarchie qu'il institue, une verticalité dans l'espace social, là où l'égalité de gauche le sauvegarde dans une horizontalité démocratique (si verticalité il y a dans la représentation, elle n'est que symbolique). Ainsi s'organise un mouvement ascentionnel qui va de la base populaire en passant par les différents titres qui balisent le chemin jusqu'au suprême: le roi.

Dans "essai sur le principe générateur des constitutions politiques et des autres institutions humaines" (1809), Joseph de Maistre détermine le statut de l'homme comme outils de Dieu, et je le cite: "(...)dans l'ordre social où il est présent et agent, [l'homme] se met à croire qu'il est réellement l'auteur direct de tout ce qui est fait par lui: c'est dans un sens, la truelle qui se croit architecte. L'homme est intelligent, il est libre, il est sublime sans doute; mais il n'en est pas moins un outil de Dieu". J'aimerai ici insister sur un autre point qui me semble fondamental. Dans la pensée de droite, l'individu seul n'a aucun sens: il n'existe que par ce renvoie qui s'organise, soit entre lui et Dieu, soit entre lui et le roi, soit en tre lui et le groupe auquel il appartient. Dans tous les cas, il n'est toujours qu'un point qui se détache d'une partie bien plus vaste sans laquelle il est défaillant. Ce refus de l'individualisme hérité de la pensée contre-révolutionnaire ne doit pas nous leurrer: il ne rien d'autre que cela: l'homme n'a de sens que lorsqu'il est mis en rapport avec ce qui le dépasse et le complète: à savoir Dieu, son roi, ou même encore sa famille. Ce dernier point est d'ailleurs important: la famille. On sait que la droite entend en faire un pilier de la société. Ce pilier est hautement significatif de par le fait même qu'il est biologique. Ce triangle Mère-Père-Enfant est marquant parce qu'il marque précisément des positions qui sont figées, qui ne peuvent être changées: de père, on ne passe pas à mère...

La droite marque ainsi la formation d'une structure statique, où les inégalités et les rapports de dépendance sont nécessaires et souhaitables afin d'assurer la pérénité de l'édifice social. Cette pensée est foncièrement, une fois n'est pas coutume, encore idéaliste en un certain sens. Les fonctions sociales qui sont comme des modèles figés, précèdent les individus qui ne viennent que s'y insérer. On se rappelle de la phrase: le roi est mort, vive le roi. Ce qui compte, c'est la fonction, non l'individu. En somme, en voulant éviter l'individualisme, la droite renvoie à la staticité d'une structure sociale ou chaque élément est pré-établit. Ce n'est plus l'homme qui fait la fonction mmais bien la fonction qui fait l'homme. L'homme est mis en rapport avec une abstraction fonctionnelle, une position sociale qui le détermine de pied en cap.

A ceux qui affirmeront que cette conception de la droite est bien ancienne, je rappelerai que Charles Maurras la reprendra dans l'Action française. Mais je vais à présent m'attarder sur notre temps, afin de démontrer que notre droite française reste foncièrement idéaliste.
Je vais d'abord insister sur De gaulle, anti-maurassien par excellence, et ce qu'il nomme lui-même la monarchie élective. J'entends par-là insister de nouveau sur l'aspect transcendant de la fonction gouvernementale. Je rappelle que le 16 juin 1946, à Bayeux, de Gaulle va majorer l'importance de l'exécutif dans sa nouvelle constitution. Insistons sur ce point: l'exécutif devient premier par rapport à l'autre chambre qu'est le législatif. L'assemblée nationale ne doit plus être en mesure de détruire ou saper des décisions prise par le président. De Gaulles confesse lui-même qu'il n'aime pas la "démocrassouille", la république: pour lui ( et selon des propres mots et discours), le gouvernement n'a d'autre substance en dehors de lui même.On sait que le Canard enchaîné de l'époque publie un épisode hebdomadaire de de Gaulle en roi soleil. Malgré sa volonté de connecter le peuple directement au président, par-dessus même l'assemblée nationale, il va de soi que de Gaulle reste dans une certaine tradition de la droite ou l'exécutif prime le législatif d'une manière absolue, au point même d'installer l'exécutif dan sles mains d'une seule personne, elle-même transcendante à la sphère publique.

Je finirai par la spécificité de la droite actuelle, le recul de l'état pour une majoration du marché, et j'insisterai sur une qualification idéologique. L'Etat doit donc reculer: laissons faire les volontés particulières qui, selon un idéal économico-politique périmé généreront un équilibre: microsoft est là pour prouver l'inverse, mais ce n'est qu'un exemple parmi d'autre qui génére une étanchéité globale du marché.
Ce culte de la volonté, je crois qu'il est kantien, et qu'il s'oppose selon moi, à une gauche plus foncièrement spinoziste. L'anthropologie de droite ménage à l'homme une place de choix: il est libre, entièrement, en ce sens qu'il peut trouver en lui quelque chose qui lui permet de dépasser tous les conditionnements qui ambrassent son être. La droite insiste sur un moi nouménal capable de s'extraire des circonstances, de s'en émanciper afin de créer, de générer un acte parfaitement libre. l'individu peut être en somme un réel commencement, au sens où il peut agir déterminé par sa seule volonté. Cette liberté transcendantale permet à notre président de dire: tout le monde peut s'en sortir, quelque soit son milieu, son background... La preuve: certains y arrivent. La gauche est et plus spinoziste, et plus rawlsienne. Elle n'oublie pas pour commencer que parler de volonté au singulier, c'est une hypostase qui s'oppose à un réel pluriel et en mouvement. Il y a des "volitions" qui s'originent dans deux dimensions de l'idée: l'aspect rationnelle, mais également affectif. La clarté d'une idée tant sur le plan intellectuel qu'émotionel, est seul garant de sa force motrice. La volonté ne vit pas à part: certains ne l'ont pas très puissante de nature tandis que d'autre l'aurait faible.
C'est ce que propose Rawls lorsqu'il parle d'une sociologisation de la volonté: la volonté elle aussi dépend du milieu sociale dans sa force et son étendue. Contrairement à la droite, la gauche ne pense pas qu'il puisse exister en l'individu une partie nouménale, en dehors de l'espace et du temps. Pas de sujet transcendantal donc: la seule liberté est dans la compréhension spinoziste, la lucidité par la réactualisation de la chaine causale qui mène jusqu'aux circonstances présentes: sonder l'ensemble des facteurs en jeu pour saisir le produit présent. La structure de droite est donc plus idéaliste dans son fonctionnement, tant du point de vue du pouvoir que de l'individu qui peut trouver en lui l'existence d'un sujet transcendantal avec lequel il demeure sans rapport (dialectique transcendantale oblige). A contrario, la structure qui traverse l'anthropologie de gauche me semble plus spinoziste, sinon plus matérialiste.

Enfin, pour la gauche, le juste prime le bien, ce qui fait encore une différence avec une droite qui, tout en rejetant l'état et son omniscience, lui fait cependant jouer le rôle d'étendard moral. Dans un véritable système libéral et social, chacun est libre de choisir sa propre conception du bien, du moment que ce dernier ne rentre pas en interaction avec les normes de droit en vigueur. L'Etat n'a pas pour fonction d'assurer un rôle moral. Je crois que nous vivons aujourd'hui un retour de l'état moralisateur, un appareil d'état qui ne se contente plus de faire respecter les grandes valeurs de la civilisation mais propose véritablement un modèle de vie.

Je m'arrêterai là pour l'instant, attendant l'offensive kortienne, ou la discussion...

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Messagepar elfiremi » 07 févr. 2008, 21:03

j'aimerai, non sans une certaine brieveté, revenir sur ce dernier point, qui selon moi reste fondamental. Fondamental il l'est déjà parce qu'il peut marquer, à lui seul, un malaise au sein même de la machine étatique actuelle.

En effet, il y a, de toute évidence, un paradoxe, et même, si j'ose dire, une contradiction qui travaille, selon moi, l'état français contemporain dans son fonctionnement même.
D'un côté, la droite veut être, économiquement, la signature d'un retrait de l'Etat. Le marché, qui est l'infrastructure économique de la liberté, doit prendre le pas sur la sphère politique, puisque, dans son dénouement quotidien est généré le libre échange entre acteurs.
D'un autre côté, la droite veut être parallèlement et moralement, celle qui met l'Etat en avant comme garant d'un certain ordre moral. C'est un grand drame que le divorce de nicolas sarkozy ne touche réellement que ceux qui ont voté pour lui...

Mais cet état est alors digne des théorisations théologiques des jansénistes. En effet, pour ces derniers, Dieu était sans cesse dans un jeu de montrer-cacher. Il se cachait aux yeux des libertins qui de toute façon n'avaient pas les yeux pour le voir. Mais celui qui faisait la démarche de le chercher pouvait, si toute fois Dieu lui accordait la grâce, le trouver.

Je file peut-être avec exagération la métaphore, mais l'état de droite est voué à cette déchirure, quelque part entre une monstration, une démonstration même, morale, et une éclipse économique.
Coment jouer sur ses deux plans? Notamment aujourd'hui, puisque les deux registres se croisent. On se pose quelque part la question d'une moralité économique: on le voit d'ailleurs dans les affaires touchant l'écologie.
Comment l'état peut-il dénouer ce noeud sacré qui est une conséquence directe de son idéologie, qui vient des bas-fonds de sa structure? N'est-il pas alors tout simplement voué à l'habileté, une habileté d'ailleurs mensongère?

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Messagepar hokousai » 07 févr. 2008, 22:50

Les gens de gauche vont peut être se sentir caressé dans le sens du poil .Moi ça me le hérisse un peu , le poil .

C’est votre genre d’explication que je trouve un peu ….idéaliste , au sens d’idéologique . Le clivage gauche droite est de plus en plus incertain ,ce n’est ni de la blague ni un point de vue de droite .On voit bien cette ambigüité du clivage sur l’Europe et la souveraineté .

Raymond Aron était- il plus à droite que Sartre ?. Ce n’est pas évident. Il y eut des opinions et des pratiques dites de gauche ( et pas les pratiques les plus honorables ) qui dans l’ histoire du siècle ressemblèrent beaucoup à d’ autres de droite .

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Messagepar Pej » 08 févr. 2008, 16:44

Quoiqu'on en dise, la distinction politique droite/gauche continue à être pertinente et le restera. Certes, comme toute opposition, elle a tendance à simplifier des réalités complexes, mais c'est le propre de tout effort de conceptualisation.
Impossible de revenir sur tout ce qu'a dit Elfiremi. Je suis d'accord avec lui pour dire que toute idéologie se fonde nécessairement sur une anthropologie, c'est-à-dire sur une certaine conception de l'homme. Et à cet égard, il est vrai que la pensée "de gauche" s'appuie sur une vision de l'homme différente de la pensée dite "de droite". Toutefois, je ne suis pas d'accord pour dire que la pensée de droite se caractérise uniquement par l'affirmation d'une liberté humaine fondamentale.

L'anthropologie de droite ménage à l'homme une place de choix: il est libre, entièrement, en ce sens qu'il peut trouver en lui quelque chose qui lui permet de dépasser tous les conditionnements qui ambrassent son être. La droite insiste sur un moi nouménal capable de s'extraire des circonstances, de s'en émanciper afin de créer, de générer un acte parfaitement libre. l'individu peut être en somme un réel commencement, au sens où il peut agir déterminé par sa seule volonté.


Cette analyse est valable pour la pensée libérale de droite (je rajoute "de droite" pour signifier que je prends le mot libéral dans l'acception française du terme, et non anglo-saxonne). Mais c'est oublier qu'il existe une pensée conservatrice de droite.
Par exemple, Carl Schmitt est un penseur de droite conservateur, alors que Hayek est un penseur de droite libéral. Et inutile de dire qu'ils s'opposent sur un grand nombre de points. Pourtant, il y a un sens à dire qu'ils défendent tous les deux une idéologie de droite, mais ce qui les rassemble ne peut bien sûr être le fait que l'homme est fondamentalement libre.
Pour ma part, j'aurais tendance à caractériser la pensée de droite (conservatrice ou libérale) par le fait qu'elle considère que les hommes méritent leur situation, et qu'une situation dans laquelle les hommes ont ce qu'ils méritent peut être qualifiée de juste. Le conservateur dira que l'homme mérite son sort dans la mesure où il lui était dévolu par sa naissance (le noble mérite, de par sa naissance, ses privilèges). Le libéral dira que l'homme mérite son sort dans la mesure où, parce qu'il est libre, il est responsable de ce qui lui arrive (le riche mérite donc d'être riche, car c'est par ses seuls efforts, son seul travail, qu'il est devenu riche).
La pensée de gauche se caractérise en revanche effectivement (comme l'a montré Elfiremi) par une prise en considération des déterminismes environnementaux (en particulier sociaux). Dans cette optique, les hommes ne sont pas entièrement responsables de ce qui leur arrive, ni en bien, ni en mal. Il est donc juste que le riche (si je caricature) "donne" à la société, car il ne fait ainsi que rembourser sa dette envers celle-ci ; tandis qu'il est juste que le pauvre soit aidé par la société, car c'est elle qui l'a défavorisé.
Tout ceci est bien sûr simplificateur, mais traduit toujours à mon sens l'actualité du clivage droie/gauche.[/b]

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Messagepar hokousai » 08 févr. 2008, 16:57

elle a tendance à simplifier des réalités complexes, mais c'est le propre de tout effort de conceptualisation.


ce qui n'est pas très optimiste .

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Messagepar elfiremi » 08 févr. 2008, 22:11

pej,
vous me précédez, mais vous justifiez bien mon point de vue. Comme toute analyse, elle croque une réalité qu'aucun langage ne peut saisir dans sa totalité.
Le but est d'en saisir les grandes lignes de forces qui s'établissent au sein de l'édifice politique et surtout anthropologique puisque, là est mon but.
L'aspect conservateur de certaine droite n'est pas écarté de mon analyse, je l'introduis dans ma réflexion globale sur l'organicisme. LA tradition est le refus de l'histoire, la volonté d'une répétition exacerbée du même, des fonctions prédéfinies dans lesquelles les individus rentrent de force. La gauche a contrario, c'est l'histoire.
En ce qui concerne la droite libérale, je pense que sa spécificité en france est un jeu que Nietzsche avait bien saisi sur le plan psychique. Je me réfère ici à la généalogie de la morale. Dans cet ouvrage, Nietzsche fait état de la dette sur laquelle la religion, et notamment la religion chrétienne, joue. Je crois que la droite libérale a retranscri cette pensée de la dette dans l'espace économique. Nous sommes passés de: sentez vous coupable devant Dieu, à sentez vous coupable devant le marché, la dette qui augmente par votre faute.
Je n'ai malheureusement ce soir guère le temps de m'y attarder, mais je tenterai d'y revenir afin d'avoir votre avis sur cette idée. Cependant, si l'on se replonge dans la deuxième partie de la Généalogie de la morale, on est forcément surpris par ce parallèle entre l'utilisation de la dette psychique par le christianisme, et l'utilisation de la dette économique par la droite actuelle.
Je vous remercie en tout cas de vos réponses, et vous dit à très bientôt.

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Messagepar elfiremi » 08 févr. 2008, 22:20

Je rajoute juste, car, pardonnez moi pej, mais je l'ai oublié au passage: la droite conservatrice repose aussi sur une liberté, celle du libre arbitre. Elle pense aussi un sujet à l'écart du monde, non pas forcément de manière kantienne, mais cela du moins s'en rapproche. J'y reviendrai, mais, je ne crois pas que l'écart soit si fort entre droite conservatrice et droite progressiste et économique.
J'en profite pour rappeler que Hayeck n'est pas un penseur et économiste libéral mais bien libertarien, comme Nozick aujourd'hui. Il y a une différence de taille il me semble, notamment si l'on compare le libéralisme rawlsien avec le libertarisme d'Hayeck.
Je vous souhaite une bonne soirée, mais m'empresserai de revenir sur cette histoire de dette...

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Messagepar hokousai » 09 févr. 2008, 01:08

je ne souhaite pas trop approfondir mais

La gauche a contrario, c'est l'histoire.


La gauche c'est aussi 'les lendemains qui chantent' .
Il y a une eschatologie "de gauche" ( optimisme ) et un pessimisme de droite .
Pour un homme de droite c'est l'Histoire qui sera toujours la même histoire ,une histoire de bruits et de fureur racontée par un idiot
Pour un homme de gauche l 'histoire est une promesse d' avenir radieux ( plus radieux en tout cas )

Quant à la culpabilité ! Excusez moi , mais les régimes soviétiques fonctionnaient très bien là dessus . Il y avait faute parce qu'il y avait règles ( le plan ) . Ne pas satisfaire aux exigences du plan était une faute (morale ).

Et puis on a eu et on a encore des chrétiens dits de gauche et d'autres de droite .

enfin bref pour le début de mes remarques .

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Messagepar Pej » 09 févr. 2008, 09:52

elfiremi a écrit :J'en profite pour rappeler que Hayeck n'est pas un penseur et économiste libéral mais bien libertarien, comme Nozick aujourd'hui. Il y a une différence de taille il me semble, notamment si l'on compare le libéralisme rawlsien avec le libertarisme d'Hayeck.


La frontière entre libéralisme et libertarisme est parfois ténue, mais Hayek se définit lui-même comme un libéral. D'ailleurs, certains passages de La route de la servitude doivent faire bondir les libertariens.
Quelques extraits :

"L'État possède donc un domaine d'activité vaste et incontestable : créer les conditions dans lesquelles la concurrence sera la plus efficace possible, la remplacer là où elle ne peut être efficace, fournir les services qui, comme l'a dit Adam Smith, « tout en présentant les plus grands avantages pour une collectivité importante, sont toutefois d'une nature telle que le profit ne saurait en rembourser le coût à aucun individu ou petit groupe d'individus ». Il n'y a pas de système rationnellement soutenable dans lequel l'État ne ferait rien."


"Il n'y a pas de raisons non plus pour que l'État ne protège pas les individus contre les hasards courants de la vie, contre lesquels peu de gens peuvent se garantir eux-mêmes. En organisant un système complet d'assurances sociales, l'État a une excellente occasion d'intervenir, quand il s'agit vraiment de risques susceptibles d'être couverts par l'assurance. Les partisans du régime de concurrence et ceux qui voudraient le remplacer par un autre système seront en désaccord au sujet de maints détails, car sous l'étiquette de l'assurance sociale on peut édicter des mesures susceptibles de supprimer totalement ou partiellement le jeu de la concurrence. Mais, en principe, il n'y a pas d'incompatibilité entre l'intervention de l'État pour assurer une plus grande sécurité et la liberté individuelle. Dans les cas de catastrophes naturelles, l'État peut également apporter son aide, sans aucun inconvénient. Chaque fois que la communauté peut agir pour atténuer les conséquences des catastrophes contre lesquelles l'individu est impuissant, elle doit le faire."


Il est donc faux à mon sens de ranger Hayek parmi les libertariens.

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Messagepar elfiremi » 09 févr. 2008, 11:53

pej,
je ne peux vous donner entièrement tort...
Cependant, Hayeck rejoint beaucoup la position de Nozick, sur l'idée d'une état minimal. Son seul rôle reste la défense de la propriété privé comme espace ultime où s'exerce la liberté des individus. Contrairement à ce qui est l'idée d'une véritable libéralisme, l'état n'est plus un opérateur de redistribution qui intervient en amont pour garantir l'égalité des chances, et en aval pour assurer par la redistribution une vie digne de ce nom au plus mal lotis.
Je dirai que le libertarisme de Hayeck laisse primer l'économique sur le politique (là je vous rejoins, c'est proprement digne d'une droite ultra-libérale, et plus simplement libérale). Pour lui, la société contemporaine est un ordre endogène et non exogène, c'est-à-dire que, rien ne l'ordonne de l'extérieur (ce n'est pas en ce sens, selon Hayeck une "organisation"), mais son ordre est autogénéré par le marché. Ce dernier est proprement l'infrastructure économique de la liberté. Pour Hayeck, il met en jeu un trop grand nombre de facteurs et d'activité diveses pour qu'un seul homme puisse le diriger et orienter son cours.
Rawls reprendra cette dernière idée pour parler d'une avantageuse fragmentation du pouvoir économique et financier où personne ne peut prendre le pouvoir entier.

Cependant, et pardonnez moi d'insister pej, mais le libéralisme n'est pas impossible à concilier avec une intervention de l'état, et même l'idée que la politique prend le pas sur l'économique.
L'état rawlsien apparaît comme un opérateur de redistribution juste, afin de combler les insuffisance du marché. EN ce sens, il se rapproche d'une vision keynésienne du rôle de l'état. On parle alors d'un respect de la justice sociale tout en abandonnant pas l'idée de liberté individuelle.

Je ne sais pas exactement quelle est votre opinion pej, mais pour ma part je reste persuader qu'un libéralisme est possible sans pour autant qu'il génére les injustices qu'on connaît aujourd'hui. MAis je crois que nousne sommes plus dans un libéralisme mais bien un ultra-libéralisme avec une absolue liberté et opacité du marché contre l'impossible action des institutions politique. Selon moi, seul l'Europe et une cosmopolitique pourra réussir à intervenir comme régulatrice du marché. A l'échelle de notre simple nation, nous n'avons plus aucun pouvoir, c'est ce qui fait dire à ceux qu'on appelle les nouveaux keynésiens comme Mirrless ou Blanchard, que les théories keynésiennes classiques ne peuvent plus suffir, qu'il faut les repenser à l'échelle internationale.


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