Louisa a écrit :Durtal a écrit :Là franchement je ne sais plus: je veux bien être conciliant mais je ne vais quand même pas aussi t'apprendre à lire!
dis Durtal, je commence tout doucement à avoir marre du fait que tu insères sans cesse des remarques
ad hominem dans tes messages. Est-ce que je peux te demander d'arrêter de traiter ton interlocuteur de con, afin qu'on puisse se concentrer sur le contenu du débat?
En te remerciant par avance,
Louisa
Louisa,
il ne s'agissait nullement d'un argument "ad hominem". Cela signifiait que nous aurons beaucoup de mal en effet à avancer dans le débat si tu ne lis pas correctement les citations ou si tu y lis systématiquement autre chose que ce qu’elles disent.
Je SAIS pertinemment que Spinoza explique que l'erreur ne correspond pas à une détermination positive de l'idée, mais si tu tires de cela la conclusion que l'idée inadéquate "n'est pas fausse" tu ruines tout. C'est justement pour cela que j'insiste sur le fait que tu dois lire cette phrase comme elle s'énonce à savoir : "la fausseté consiste dans la privation qu'enveloppent les idées inadéquates". Autrement dit comme une phrase qui vise à expliquer
en quoi et pourquoi les idées inadéquates sont fausses. Et le fait que Spinoza caractérise l'erreur comme étant de la nature d'une privation de connaissance, est
justement une manière de caractériser
l'erreur et ne revient pas à dire qu'il n'y a pas de fausseté ou pas d’erreur dans les idées inadéquates .
Ainsi lorsque tu écris:
Louisa a écrit : Ce qui n'a pas de consistance, c'est la fausseté ou l'erreur, car ceci n'est qu'une privation, un manque. Un manque n'a pas de consistance. Ce qui en revanche est vraie en Dieu, a bel et bien une consistance/existence.
Je suis désolé, si cela ne te fais pas plaisir, mais
tu te trompes. Car c’est la « privation » qui n’a pas de « consistance » et qui est justement ce qui explique qu’une idée inadéquate enveloppe la fausseté. Une idée inadéquate est fausse
parce qu’il lui manque quelque chose, cela ne veut pas dire que ce « manque » empêche qu’on la dise fausse, puisque c’est justement pour
cela qu’on dit qu’elle est fausse ! Est ce que tu comprends la nuance?
Alors on se calme, je reconnais que mon tort a été jusque là de penser que c'était juste "par goût de la dispute", que tu contredisais. Il semble que non, tu as l’air sincère, alors je vais reprendre ton argumentation et te dire où elle pêche d’après moi. Mais lorsque je dis, même si je me peux me tromper bien sûr, que tu interprètes ou même simplement lis mal une phrase ( que ce soit une des miennes ou un énoncé de l’Ethique d’ailleurs) c’est que je pense avoir certaines raisons de le faire, je veux dire des raisons autres que celle de vouloir t’insulter. Il se peut vois-tu, de temps à autre, que cela ne soit pas uniquement explicable par le désir de te persécuter. Il est vrai cependant que je n’y mets guère les formes ce que je m’emploierai à faire un peu plus dorénavant.
Louisa a écrit : - en réalité, elles n'ont rien d'interne qui permet de les appeler fausses
- en réalité elles existent, elles existent même en Dieu.
Là dessus nous sommes d’accord : Dans la pensée de Dieu, ou en soi, ce sont des idées adéquates
Louisa a écrit : Que les idées que l'on DIT être fausses, sont vraies en réalité, c'est-à-dire en tant qu'elles se rapportent à Dieu.
Là nous ne sommes plus d’accord
si toutefois ( et cela va dans le sens de l’opinion que tu soutiens) par ton insistance sur le verbe « dire » tu veux suggérer que ce n’est « qu’une façon de parler » ou qu’elles ne sont « pas vraiment fausses ». Car comme nous concevons partiellement ces idées, donc comme il nous manquent certaines des déterminations qui sont dans la pensée de Dieu, ces idées (et je ne fais là qu’appliquer strictement la leçon de la proposition) sont
fausses pour nous c’est à dire mutilée et confuses. (ou si tu y tiens absolument : « nous sommes autorisés à les appeler « fausses » » ce qui revient au même).
Exemple : La pensée que « le soleil est situé à 200 pieds de distance de la terre » est une idée fausse, une erreur. Même si en Dieu, (qui a l’idée de cette pensée en même temps qu’il a l’idée des causes qui nous la font produire) cette idée est vrai. Qu’est ce que ça veut dire ? Cela veut simplement dire que Dieu a une idée adéquate de ce qui arrive à l’esprit d’un homme qui perçoit le soleil. A savoir que cet homme forme justement la pensée « que le centre du système solaire est à environ 200 pieds de distance du point à partir duquel il l’observe » quand il est soumis à ces conditions. Dans la pensée de Dieu en effet sont formées les idées des causes de cette illusion perceptive, les raisons pour lesquelles elle se produit et pour lesquelles elle se produit de cette façon là et pas une autre. Et c’est en ce sens que Dieu a l’idée adéquate de ce que l’esprit humain imagine. Cependant en tant que l’esprit humain ne forme pas la pensée des causes qui le déterminent à percevoir ce qu’il perçoit, alors il reste dans l’erreur et se trompe en jugeant que le soleil est à cette distance de la terre. Il est dans l’erreur précisément dans la mesure où
manquent à l’idée qu’il a, les idées des causes qui la produisent.
C'est pourquoi Spinoza écrivait dans le scolie de E2p17
Spinoza a écrit :Maintenant, pour indiquer ici par avance en quoi consiste l'erreur, je prie qu'on prenne garde que les imaginations de l'âme considérées en elles-mêmes ne contiennent rien d'erroné ; en d'autres termes, que l'âme n'est point dans l'erreur en tant qu'elle imagine, mais bien en tant qu'elle est privée d'une idée excluant l'existence des choses qu'elle imagine comme présentes.
b)
Louisa a écrit : Ce qui n'a pas de consistance, c'est la fausseté ou l'erreur, car ceci n'est qu'une privation, un manque. Un manque n'a pas de consistance. Ce qui en revanche est vraie en Dieu, a bel et bien une consistance/existence.
Je ne reviens pas sur ceci ( voir plus haut), qui constitue à mon sens ta principale erreur de lecture.
c)
Louisa a écrit : C'est l'essence même de cette démo: c'est parce que l'idée inadéquate EXISTE sans se définir par l'erreur, que la vérité n'est pas son contraire, et donc ne peut pas la supprimer.
Ce qui existe et cela seul qui existe c’est la détermination de la pensée qui est adéquate en Dieu en tant, ici, qu’il constitue la nature de notre esprit en même temps que la nature de l’esprit d’autres choses. Comme la fausseté s’explique uniquement par le fait que l’homme perçoit une idée sans certaines autres par lesquelles cette idée s’explique, s’en suit que l’idée inadéquate est un « être de raison » ou une « dénomination extrinsèque ». En effet, rien de positif (d’existant) ne la détermine à être l’erreur qu’elle est, mais c’est au contraire, parce qu’il lui manque quelque chose qu’elle l’est et qu’on ne dit d’une idée qu’elle est fausse qu’en se référant à ce qui n’est pas elle. Et l’une (l’idée vraie) et l’autre (l’idée fausse) sont si contraire l’une à l’autre que Spinoza en dit qu’elles sont entre elles comme « l’être au non-être ».
Exemple : L’idée qui enveloppe le soleil comme se situant a 200 pieds de distance du globe terrestre, existe dans l’esprit humain telle quelle. Elle existe pareillement en Dieu mais prise dans le réseau des idées qui la produisent, idées qui ne sont pas, par hypothèse (puisqu’on le suppose ici ayant des idées inadéquates), dans l’esprit humain. Tu vois donc que dans toute cette description n’existe que des idées adéquates qui se trouvent en Dieu. Au point de vue de cette idée sur la distance du soleil considérée en elle-même il n’y a aucune différence entre celle qui se trouve dans la pensée de Dieu et celle qui se trouve dans l’esprit humain, puisque c’est justement une seule et même idée. Ce qui fait que l’une est dite fausse et inadéquate ( en considérant l’esprit humain seul) et l’autre non ( en considérant Dieu en tant qu’il constitue non seulement la nature de l’esprit humain mais aussi la nature de l’esprit de tous les corps agissant sur le corps humain à ce moment là), c’est simplement en l’occurrence, qu’il se forme dans l’esprit de Dieu, d’autres idées en relation à celle là que l’esprit humain ne forme pas. C’est en ce sens que je dis que l’idée inadéquate n’a pas « d’existence propre »et c’est cela que Spinoza explique en disant que rien de « positif » ne constitue la forme de l’erreur.
Aussi Faun avait-il parfaitement raison de dire que l’imagination est une sorte de délire et d’état hallucinatoire ( pense ainsi à ce que Spinoza dit de la passion d’Orgueil) Dans un cas limite où nous ne ferions rien d’autre qu’imaginer les choses, nous ne comprendrions rien aux raisons qui font que nous voyons ceci plutôt que cela, pourquoi nous le voyons ainsi et pas autrement etc. Nous serions toujours en quelque sorte « captifs » d’« îlots perceptifs » sans relations les uns aux autres. Et nous vivrions alors comme en plein rêve, les perceptions se substituant les unes aux autres sans que nous soyons capables d’y repérer un ordre, et à plus forte raison sans que nous soyons capables d’y repérer l’ordre de la nature par lequel nos perceptions et nos images sont produites. Et ceci, si tu as compris ce que j’essaye d’expliquer, ne contredit en rien cette autre idée selon laquelle l’imagination est une puissance et une vertu du corps humain, c’est à dire cette idée que les productions de l’imagination sont conçues adéquatement en Dieu comme un effet résultant de certaines causes. Car les, rêves, les épisodes hallucinatoires ou délirant eux aussi ont des causes précises et déterminées et sont conçues adéquatement dans l’esprit de Dieu, alors que bien sûr, dans l’esprit humain, ils ne correspondent pas à des idées adéquates mais à des idées fausses.
Et si nous ne vivons pas tous complètement dans l’hallucination c’est que nous sommes capables à quelque degré de restituer et de comprendre la trame causale au sein de laquelle notre imaginaire se produit. C’est ainsi qu’une fois que l’on connaît la véritable distance du soleil, ce qui implique l’idée de son diamètre réel, nous
savons pourquoi il nous paraît être situé à 200 pieds et notre imagination n’enveloppe plus alors aucune erreur, de la même façon nous ne croyons pas que le bâton plongé dans le verre empli d’eau se brise réellement, nous savons que c'est un effet de réfraction.
d)
Louisa a écrit : Si tu veux que l'idée fausse n'existe pas, tu renverses la proposition en son contraire: tu fais comme si l'idée fausse n'a rien de positif, comme si une fois enlevé l'erreur, il ne reste plus rien d'interne du tout à cette idée. Alors que la proposition affirme justement qu'elle A quelque chose de positif, qu'elle a donc bel et bien une consistance, et que la vérité ne pourra pas enlever cela.
Ce qui est « positif », « existant », dans l’idée inadéquate c’est l’idée adéquate qui est en Dieu et qu’il forme en tant qu’il constitue la nature de mon esprit à ce moment là. Comme, néanmoins, relativement à un esprit humain, on dit cette idée fausse parce que cet esprit
n’a pas certaines autres idées, s’en suit qu’en tant qu’elle est fausse ( c’est à dire en considérant seulement ce qui lui manque pour être vraie) l’idée fausse n’a pas de positivité ou d’existence, une « privation de connaissance » n’étant pas un être.
e) Enfin il est parfaitement possible (et cf. plus haut c’est que nous faisons tous a un degré quelconque, sans cela nous serions des moules plutôt que des hommes) qu’un esprit humain se mettent à former les idées des causes produisant ce qu’il imagine, c’est à dire d’en former un concept clair et distinct, auquel cas ce qu’il imagine n’enveloppe plus aucun manque ni aucune négation, c’est à dire qu’il conçoit ce qu’il imagine comme la pensée de Dieu même le conçoit. Et dans ce cas, Dieu est la cause adéquate des idées que l’esprit humain forme en tant qu’il constitue la seule nature de cet esprit. Et c’est ce qui arrive lorsque l’esprit humain est actif . C’est pourquoi je disais, qu’en dernier ressort, les considérations sur l’imagination changent de face selon que l’on parle d’un esprit imaginant en tant qu’il est passif ou d’un esprit imaginant en tant qu’il est actif. Dans le premier cas (la passivité) les imaginations sont adéquates et complètes dans l’esprit de Dieu seul, et dans le second cas ( l’activité) elles sont adéquates tant dans l’esprit humain que dans l’esprit de Dieu, puis qu’alors l’esprit humain pense de la pensée de Dieu même (« autant qu’il est en lui » bien sûr, il ne peut non plus TOUT concevoir adéquatement). Et je t’ai donné par là un moyen de distinguer idées inadéquates et imagination. Nous pouvons former des idées adéquates à partir de l’imagination (si nous sommes actifs en tant que nous imaginons) mais nous ne pouvons pas former d’idée adéquates à partir d’idée inadéquates, une idée vraie à partir d’une idée fausse (car dans cas nous sommes nécessairement passifs).
Voilà.
D.