Simplicité de la substance et multiplicité du monde

Questions et débats touchant à la conception spinozienne des premiers principes de l'existence. De l'être en tant qu'être à la philosophie de la nature.
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Cette partie du forum traite d''ontologie c'est-à-dire des questions fondamentales sur la nature de l'être ou tout ce qui existe. Si votre question ou remarque porte sur un autre sujet merci de poster dans le bon forum. Merci aussi de traiter une question à la fois et d'éviter les digressions.
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Messagepar 8 » 03 août 2008, 08:30

et la physique quantique...
Des particules elementaires peuvent etre à plusieurs endroits au meme instant.Superposition d'etat, sachant que chaque etat peut etre une position,un niveau d'energie.
Bien que parfait le reel est multiple.

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ECKHARTUS
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Messagepar ECKHARTUS » 04 sept. 2008, 13:40

Henrique a écrit :Salut Ghozzis et à tout le monde,
Heureux de te revoir ici, je te reconnais bien avec tes questions philosophiquement pertinentes. C'est sûr que pour celui qui cherche la béatitude spinozienne, ce genre de question abstraite peut paraître assez artificielle, mais tout l'intérêt de la philosophie de notre auteur est de ne pas opposer l'intellect et l'affect, contrairement à bon nombre d'approches spirituelles occidentales ou orientales. De fait Spinoza passe beaucoup de temps, notamment dans la partie I de l'Ethique, à déterminer rationnellement les rapports entre l'être et les êtres. Il ne nous propose pas avec l'Ethique une méthode d'illumination immédiate du type dzögchen, encore que ladite approche tibétaine passe par un certain nombre d'étapes avant d'arriver à l'immédiat... Et puis, pour finir de répondre au sévère mais souvent juste Faun, comme on l'a bien compris, on peut très bien s'intéresser ici à l'aspect uniquement théorique des difficultés rencontrées à la lecture de l'Ethique, nul n'est contraint de se sentir concerné par l'amour intellectuel. Et d'ailleurs dans une lettre Spinoza dit que le problème du rapport entre infini et fini, et donc de l'un et du multiple, est le plus important de sa philosophie.

Pour répondre à ta question, Ghozzis, je dirais que la difficulté que tu soulèves me semble relever d'une confusion entre le mode de production "ordinaire" que nous pensons observer empiriquement, qui procède de façon transitive, du type A heurte B, ce qui produit le mouvement de B, et la production immanente, non moins ordinaire en fait mais qui ne se comprend bien qu'en raisonnant, du genre "plus je m'exerce à penser de façon méthodique, plus j'éprouve le désir de le faire" (cf. le § 11 du TRE).

En l'occurrence, la substance ne "produit" pas le multiple au sens où une machine à café produit une grande multiplicité d'expressos ! La substance reste éternellement égale à elle-même, composée d'elle seule. Ainsi, rien n'émane de la substance, rien n'en sort, car il faudrait pour cela qu'il y ait un en dehors de la substance, ce qui est contraire à l'idée même de substance définie en E1D3 et à l'absolue infinité qui en découle (E1P8). Donc, de ce point de vue, la substance ne produit rien, elle conserve la pureté de son unité ou simplicité.

Aussi quand on aborde la décisive proposition 16 d'E1, la première chose à faire est de se départir de l'idée que la substance étant donnée "au commencement", il faudrait en tirer l'infinité des corps et des idées comme on tire des litres de lait du pis d'une vache. La priorité de la substance par rapport à ses affections (E1P1) est ontologique, c'est-à-dire essentiellement logique, essentielle et logique, non historique ou chronologique. Il n'y a donc pas de commencement au sens chronologique dans le système de l'Ethique, c'est une philosophie qui part de l'éternel pour comprendre ce qui nous est donné dans la durée, pour retourner à ce qui est éternel. Il n'y a pas alors à chercher un moment M où la substance une se pervertirait, se dégraderait pour se démultiplier : il n'y a éternellement qu'une seule substance absolument indivisible et éternellement une infinité de modes, simples affections et non composants de cette substance indivisible.

Si nous cessons de de penser de façon mutilée et confuse en ignorant le lien de concaténation des corps qui nous environnent avec tous les autres corps et le rapport immanent avec l'étendue même, dans ce que nous appelons l'espace et les temps, les prenant ainsi pour des choses qui existent en elle-mêmes et par elles-mêmes, c'est-à-dire pour des substances, et si nous nous plaçons du point de vue global de cette substance, c'est-à-dire si nous nous mettons à penser adéquatement, nous dit Spinoza, alors nous percevons les corps et les idées, non plus comme des choses qui constitueraient des divisions ou composants de la substance, mais comme de simples "propriétés" éternelles de celle-ci, ainsi que le dit la démonstration d'E1P16. Le fait qu'il découle de l'essence d'un triangle que la somme de ses angles fait deux droits ne surajoute rien à sa puissance propre ; son essence n'est pas démultipliée du fait de ses propriétés, quel que soit leur nombre.

Envisage la substance comme la seule chose qui puisse exister : rien d'extérieur ne la fait être, rien ne peut la détruire. Elle est donc hors de toute temporalité. Mais comme cette substance est infinie, elle possède une infinité de propriétés éternellement accomplies de son point de vue - en devenir du point de vue d'un intellect fini.

Je pense à cet égard que Spinoza a d'abord eu l'intuition de ce rapport entre l'infini et le fini : non comme production transitive et temporelle du fini par l'infini mais le fini comme expression immanente et éternelle de l'infini. A mon sens, tout le vocabulaire de la substance, des attributs, des modes etc. a été élaboré pour tenter de rendre accessible et compréhensible (y compris pour lui-même) cette intuition.


Bonjour à tous,

Je decouvre agréablement votre site...
Je suis géné des le debut de l'ethique et à vrai dire depuis toujours.
Bien sur les parties 3 4 5 sont jubilatoires.
Je ne comprend pas la distinction nature naturante et naturée.
Si la substance n'est pas passive du fait de ses modes c'est bien que ces modes sont comme dans un autre.
Il doit y avoir une altérité entre la substance et les modes.
une exériorité.
La première proposition de l’éthique affirme que la substance est première par rapport à ses affections. « La substance est antérieure en nature à ses affections ». Il en résulte que la substance est cause et que les affections sont des effets.
Mais vous dites qu'elle ne les produit pas?
« par nature naturante, on doit entendre ce qui est en soi et est conçu par soi, ou bien les attributs de la substance qui expriment une essence éternelle et infinie, c'est-à-dire Dieu, en tant qu'on le considère comme cause libre.
J'entends, au contraire, par nature naturée tout ce qui suit de la nécessité de la nature divine, ou de chacun des attributs de Dieu ; en d'autres termes, tous les modes des attributs de Dieu, en tant qu'on les considère comme des choses qui sont en Dieu et ne peuvent être ni être conçues sans Dieu."
Donc, vous dites qu'elle ne produit pas les modes car ,en clair, la relation de la cause à l’effet ne s’ordonne plus à une problématique de la création et de la transcendance de la cause efficiente qui précède nécessairement l’effet dans l’ordre de la succession.
Le lien de la partie à la totalité relève d’une causalité immanente et non transitive.
Donc, la production est logique et ontologique et pad chronolgique car adossée à une éternité qui n'a pas de durée.
Dieu est cause immanente non transitive et n'est donc pas séparé de ses effets. Néanmoins, les effets restent extérieur à dieu car ne l'affectent pas sans quoi il serait passif.

Je ne comprend pas sur quoi je bloque.
Help.
Amicalement

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Messagepar hokousai » 04 sept. 2008, 23:54

Il est remarquable que le temps ( pourtant très accessible à notre intellect ) n’est pas compris par Spinoza comme un attribut de Dieu . La durée/ temporalité n’est pas de ce que l’intellect perçoit d’une substance comme constituant son essence ( du moins pour Spinoza )
La définition de l’éternité est négative " elle ne peut s’expliquer par la durée ou le temps ".
Autant Dieu peut s’expliquer sous les points de vue de l’étendue ou de la pensée autant il ne peut s’expliquer sous le point de vue du temps .

Il n’y a pas consécutivité (dans le temps) des modifications . Ce qui est sans doute contre intuitif , d’ où l insistance de Spinoza dans la partie 1
Les modifications n’ont aucune finitude liée à la durée , une modification n’ a ni début ni fin ( prop 21 /1)

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Messagepar hokousai » 12 sept. 2008, 00:38

Les modifications n’ont aucune finitude liée à la durée , une modification n’ a ni début ni fin ( prop 21 /1)

autrement dit :il ne se passe rien du tout ........

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Messagepar Sinusix » 14 sept. 2008, 08:53

Faun a écrit :Parce que sa puissance est infinie, et donc elle le peut.

Voir la proposition 35 partie 1.


Connaissance prise de l'ensemble de ces échanges (plus réconfortants au demeurant sur l'esprit du site que certains autres), je rebondis à cet endroit sur cette orientation de réflexion lapidaire, mais pertinente au regard du système.
Le problème comme toujours ne relève pas seulement de "l'esprit humain", enfermé dans la (sa) logique de "causalité/nécessité", elle- même inhérente au système. Il croit y échapper par le concept de l'infini (par définition indéfinissable en acte ?), lequel permet d'évacuer le problème récurrent de tout système "métaphysique", à savoir le passage du statique au dynamique.
A quel endroit se situe le "big bang" chez Spinoza. Il doit bien s'y trouver si l'on doit, ici comme ailleurs, penser que s'applique le théorème d'incomplétude de Gödel : "l"inexplicable" auquel il faut adhérer n'est-il pas effectivement l'impossibilité dans laquelle nous sommes "d'enchaîner" les modes sur la substance. Autrement dit, de toute éternité (fondement logique et non chronologique, bien sûr) la substance ne peut être séparée des modes, l'Etre a toujours été modal). Il ne s'agit donc pas d'enchaîner le multiple sur l'un, puisque l'enchaînement revient à intégrer le temps, donc l'imagination de l'homme.
Quoiqu'on fasse, quel que soit le système sur lequel chacun se base (religieux ou pas), il repose sur une "intuition/adhésion" première, à partir de laquelle fonctionnent les raisonnements "ordine geometrico", ce que montrent avec talent certains des animateurs du site.
Et finalement, s'il fallait donner le point de fixation central de la connaissance du 3ème genre, n'est-ce pas cette seule première et fondamentale intuition dont s'agit, à partir de laquelle tout peut se construire. Et la beauté du spinozisme n'est-elle pas dans cette capacité à nous situer, selon l'ordre de la nécessité et sans intervention continuelle d'un deus ex machina, dans l'ordre cosmique et de trouver matière raisonnée à guider notre vie.
Il n'empêche que, théorème d'incomplétude toujours, il y a un instant premier du raisonnement, qui reste une intuition et qui relève donc d'une adhésion.
D'où l'intérêt de ne pas transformer cette intuition/adhésion en "acte de foi" précurseur à la constitution d'une chapelle.
Amicalement

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Messagepar Faun » 18 sept. 2008, 10:08

Sinusix a écrit :Il n'empêche que, théorème d'incomplétude toujours, il y a un instant premier du raisonnement, qui reste une intuition et qui relève donc d'une adhésion.
D'où l'intérêt de ne pas transformer cette intuition/adhésion en "acte de foi" précurseur à la constitution d'une chapelle.
Amicalement


Si vous vous voulez dire que le troisième genre de connaissance, autrement dit l'intuition, est le fondement de l'Ethique, pourquoi pas, mais cependant Spinoza n'en a pas besoin pour poser ses définitions et ses axiomes.
Prendre comme idée fondatrice celle d'un être absolument infini ne demande pas d'acte de foi ni d'adhésion particulière. Cette idée doit seulement être examinée avec un esprit scientifique et logique, afin d'en déduire tout ce qui peut en être déduit, ou en tout cas tout ce qui nous intéresse dans une certaine optique. Mais au lieu d'acte de foi ou d'intuition, j'aurais plutôt parlé d'expérience immédiate. Cet être infini n'est pas seulement perçu par l'esprit mais aussi par le corps, en même temps, au même moment. L'incomplétude réside dans le fait que nous ne saurons jamais tout ce que la puissance de cet être infini peut produire, nous pouvons en tous cas en déduire les idées qui nous intéressent en tant qu'hommes.

Cette expérience que notre corps n'est rien d'autre qu'un élément du corps de Dieu, ou d'un corps infini, n'a rien de mystique ni de religieux, autrement dit d'irrationnel. Ce n'est pas l'intuition d'un théorème, ni une révélation, c'est l'affirmation physique d'une puissance, en nous et autour de nous.

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Messagepar Sinusix » 18 sept. 2008, 19:12

Faun a écrit :
Sinusix a écrit :Il n'empêche que, théorème d'incomplétude toujours, il y a un instant premier du raisonnement, qui reste une intuition et qui relève donc d'une adhésion.
D'où l'intérêt de ne pas transformer cette intuition/adhésion en "acte de foi" précurseur à la constitution d'une chapelle.
Amicalement


Si vous vous voulez dire que le troisième genre de connaissance, autrement dit l'intuition, est le fondement de l'Ethique, pourquoi pas, mais cependant Spinoza n'en a pas besoin pour poser ses définitions et ses axiomes.
Prendre comme idée fondatrice celle d'un être absolument infini ne demande pas d'acte de foi ni d'adhésion particulière. Cette idée doit seulement être examinée avec un esprit scientifique et logique, afin d'en déduire tout ce qui peut en être déduit, ou en tout cas tout ce qui nous intéresse dans une certaine optique. Mais au lieu d'acte de foi ou d'intuition, j'aurais plutôt parlé d'expérience immédiate. Cet être infini n'est pas seulement perçu par l'esprit mais aussi par le corps, en même temps, au même moment. L'incomplétude réside dans le fait que nous ne saurons jamais tout ce que la puissance de cet être infini peut produire, nous pouvons en tous cas en déduire les idées qui nous intéressent en tant qu'hommes.

Cette expérience que notre corps n'est rien d'autre qu'un élément du corps de Dieu, ou d'un corps infini, n'a rien de mystique ni de religieux, autrement dit d'irrationnel. Ce n'est pas l'intuition d'un théorème, ni une révélation, c'est l'affirmation physique d'une puissance, en nous et autour de nous.

Je suis parfaitement en phase avec vous et n'ai parlé "d'acte de foi" que comme repoussoir à une démarche que j'ai appelée d'adhésion, en tant que par adhésion j'entends ce que vous nommez expérience immédiate et démarche rationnelle.
Deux compléments cependant à ce que je voulais dire.
Par incomplétude, je faisais référence à ce qu'a voulu dire par là Gödel, à savoir la présence, dans une "théorie" d'un énoncé qui ne peut être démontré dans la théorie elle-même. C'est bien le cas ici (sinon le spinozisme serait universel) et l'esprit scientifique et logique suit d'autant mieux le cours de l'Ordre Géométrique" qu'il est riche de cette expérience immédiate.
Le spinozisme n'étant pas universel, loin s'en faut, le "maudit juif" ayant été vilipendé par de grandes têtes pensantes, il serait intéressant de s'interroger, en termes spinozistes, sur le fait que des hommes différents, quelles que soient leurs "intelligences" avérées, ont des "expériences immédiates" si différentes. Ne serait-ce pas alors une démonstration de plus de cette inconnue : "que peut le corps", et puisque chacun "règle toute chose à partir de son propre affect" de l'incommunicabilité des "expériences immédiates" qui ne seraient alors, entre les êtres humains, qu'une des différences parmi d'autres, comme la couleur des yeux ou la capacité respiratoire (et donc qualifierait la "grâce" des croyants comme une donnée "nature naturée neutralisée" et non attribuée).
En dernier lieu, puisque vous parlez d'esprit scientifique", on peut s'intéresser à l'insertion dans cette expérience immédiate du problème que pose le "big bang", à savoir "impetus" premier du "moteur immobile", ou mieux, expansion après effondrement gravitationnel, théorie qui permet de "mieux respirer".
Amicalement

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Messagepar sescho » 18 sept. 2008, 20:58

Ce qui me semble franchement douteux ici c'est l'association implicite d'"intuition" avec "incertitude" ou "relativisme."

1) Tout raisonnement doit de façon incontournable partir de prémisses, par nature non démontrées. Opposer le raisonnement à l'intuition dans ce cadre veut dire qu'on considère que les prémisses sont toujours arbitraires (et finalement qu'il n'y a aucune intuition, en fait, sauf peut-être du futur résultat d'une démonstration rigoureuse.) Dans ce cas, tout soi-disant développement scientifique (en fait beaucoup de scientifiques ne considèrent pas la Mathématique comme une science, mais à part, ou comme une partie de la Philosophie, car elle ne fait aucunement appel à l'expérimentation extérieure) consisterait à développer pas à pas de la logique de base sans aucune portée existentielle autre que cet exercice de logique même (ce qui est manifestement très peu par rapport à la réalité.)

Si l'on pense cela, il faut être conséquent avec soi-même : ne faire aucune philosophie, n'argumenter en rien sur ce qui relève du non-démontré - y compris toute prémisse, donc - mais s'exercer au sudoku, aux mots croisés, à la Mathématique, etc. (activités tout-à-fait honorables, quoique très partielles vis-à-vis de la vie et de la Nature en général.)

2) Plus embêtant cependant dans cette optique est le fait que les opérations de logique sont elles-mêmes non-démontrées et donc intuitives... Donc être conséquent dans ce cadre devient assez simple : ne rien penser, ne rien dire, ne rien voir, etc.

Ou alors le relativisme est une maladie de l'esprit et il faut abandonner cette association : une intuition n'est pas douteuse parce qu'elle est une intuition et donc elle peut être vraie ou fausse. La question devient : quelles intuitions sont vraies et quelles fausses.

Et là ce n'est pas comme la couleur des yeux (rarement rouges à pois jaunes en passant) : les lois de la béatitude, de la liberté, de la parfaite santé mentale sont communes à tous les hommes et des témoignages millénaires en attestent, et Spinoza en est. Mais comme il le dit on ne plus clairement à la fin de l'Ethique, les passions règnent partout et la réalisation de cela ne se trouve donc pas sous le pied d'un cheval...


Serge

P.S. Sauf erreur, le théorème d'incomplétude de Gödel ne porte en aucune façon sur l'axiomatique - qui est, encore une fois, indémontrée par nature dans tous les cas - mais sur des théorèmes qui sont vrais dans le champ de cette axiomatique quoiqu'indémontrables selon cette même axiomatique.
Connais-toi toi-même.

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Messagepar Durtal » 18 sept. 2008, 21:46

Sinusix, je te conseille vivement, si ce n'est déjà fait la lecture de ce GRAND "petit" ouvrage de J. Bouveresse intitulé: Vertiges et prodiges de l'analogie. C'est un retour sur "l'affaire Sokal" et qui fait un point extrêmement précis et néanmoins accessible au commun des mortels, sur les "exportations" du théorème de Godel hors de son champ d'application, c'est à dire hors des mathématiques (la "cible" de Bouveresse étant R. Debray, qui lui aussi invoque le théorème de Godel, en....philosophie politique) . C'est publié dans la collection fondée par Bourdieu "Raisons d'agir".


D.
Modifié en dernier par Durtal le 19 sept. 2008, 01:06, modifié 1 fois.

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Messagepar Louisa » 18 sept. 2008, 21:57

Sinusix a écrit :Par incomplétude, je faisais référence à ce qu'a voulu dire par là Gödel, à savoir la présence, dans une "théorie" d'un énoncé qui ne peut être démontré dans la théorie elle-même. C'est bien le cas ici (sinon le spinozisme serait universel) et l'esprit scientifique et logique suit d'autant mieux le cours de l'Ordre Géométrique" qu'il est riche de cette expérience immédiate.


ne faudrait-il pas distinguer entre énoncé indémontrable et axiome? Car pour autant que je sache, par "énoncé indémontrable" Gödel dans son célèbre théorème ne réfère pas aux axiomes, qui sont des vérités (vérités "évidentes", et en ce sens précis indémontrables), mais à certains théorèmes qui sont "indécidables", c'est-à-dire dont on ne peut dire s'ils sont vrais ou faux. C'est en cela qu'une théorie peut être dite "incomplète": il y aura toujours des énoncés dont on ne peut déterminer la vérité ni la fausseté, autrement dit dont on ne peut déterminer la valeur de vérité. Ce sont donc des propositions "indépendantes" du système, là où les axiomes sont les véritables fondements de tout le système, et pour cette raison même sont entièrement liés à tous les énoncés qu'on va en déduire.

Dans ce cas, la "relativité" que tu cherches dans le spinozisme n'a peut-être pas grand-chose à voir avec une incomplétude "gödelienne", mais se déduit plutôt du caractère pas toujours évident des axiomes du spinozisme, alors que ces axiomes étaient probablement (?) considérés par les contemporains de Spinoza comme étant évidemment vrais?
Amicalement,
L.


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