Spinoza - par Alain/La vie et les œuvres de Spinoza

De Spinoza et Nous.
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par Alain

La vie et les œuvres de Spinoza



SPINOZA


Alain


(Émile Chartier)

1946



Sommaire

Préface

LA VIE ET LES ŒUVRES DE SPINOZA

LA PHILOSOPHIE DE SPINOZA

Introduction
I. La méthode réflexive
II. De Dieu et de l’âme
III. Des sentiments et des passions
IV. De l’esclavage de l’homme
V. De la raison
VI. De la liberté et de la béatitude

CONCLUSION

Table analytique des matières et des références

La vie et l’œuvre de Spinoza
La philosophie de Spinoza

Mémento bibliographique


Document numérisé par Mme Marcelle Bergeron,
Professeure à la retraite de l’École Dominique-Racine de Chicoutimi, Québec
Dans le cadre de la collection: Les classiques des sciences sociales
dirigée et fondée par Jean-Marie Tremblay,
professeur de sociologie au Cégep de Chicoutimi
Fichier:Spinoza - par Alain.rtf

Baruch Spinoza naquit le 24 novembre 1632. Il appartenait à une famille de Juifs portugais. Ses parents voulurent faire de lui un rabbin ; aussi fit-il de fortes études ; il apprit l'hébreu et le latin ; en même temps il étudia la géo­métrie et la physique. La lecture des œuvres de Descartes l'amena à la philosophie.

Sa vie fut celle d'un sage. Il voulut, afin de penser librement, vivre du travail de ses mains, et passa une partie de son temps à polir des lentilles pour les instruments d'optique. L'Électeur palatin lui fit offrir une chaire de philo­sophie à l'Université de Heidelberg. Il répondit en ces termes : « Je me dis, d'abord, que je devrai renoncer à faire avancer la philosophie, si je veux m'occuper d'instruire la jeunesse. Je me dis, ensuite, que je ne sais pas quelles limites je devrai apporter à cette liberté de la pensée dont vous me parlez, si je ne veux pas paraître inquiéter la Religion établie ; car les schismes ne vien­nent pas tant d'un ardent amour pour la Religion que des diverses passions qui agitent les hommes et de leur goût pour la contradiction, qui leur font d'ordi­naire déformer et tourner à mal les choses les plus nettement dites. Et, comme je l'ai déjà éprouvé, alors que je vis seul et à l'écart, j'aurais bien plus à le redouter si je m'élevais jusqu'à la dignité que vous m'offrez. » Il est probable qu'il refusa aussi, et sans doute pour des raisons du même ordre, une pension que Condé voulait lui faire donner par Louis XIV. On voit que sa vie retirée n'avait pas empêché sa réputation de s'étendre fort loin. Leibniz, revenant d'Angleterre, lui fit visite. Un des frères de Witt s'honora d'être son élève et son ami.

Nous savons, par ses biographes, qu'il était simple et bon, qu'il vivait de fort peu de chose, et que, malgré sa mauvaise santé, il était heureux. Nous savons aussi, notamment par son Traité théologico-politique, qu'il était pro­fondément attaché à la République hollandaise, et qu'il mettait la liberté de conscience et la liberté politique au nombre des biens les plus précieux.

Comme il cherchait les principes de la véritable Religion, et qu'il pré­tendait remplacer la révélation par les lumières naturelles de la raison, il fut accusé d'athéisme. Le moyen de supporter un homme qui écrivait, en parlant des Turcs et des Gentils : « S'ils offrent en prière à Dieu le culte de la justice et l'amour de leur prochain, je crois qu'ils ont en eux l’esprit du Christ, et qu'ils sont sauvés, quoi qu'ils puissent croire de Mahomet et des oracles ! » À ces accusations il répondait simplement ceci : « Si l'on me connaissait, on ne croirait pas si facilement que j'enseigne l'athéisme. Car les athées ont coutume de rechercher par-dessus tout les honneurs et l'argent, choses que je méprise, comme tous ceux qui me connaissent le savent. » On voit qu'il donnait lui-même, comme une preuve de sa Religion, une vie simple et frugale, détachée de tout ce qui n'était pas la Vérité. Et il faut avouer que, sans cette preuve-là, les autres ne valent rien. Comment croire qu'un homme connaît, comprend et aime Dieu lorsqu'il poursuit encore les honneurs et l'argent ? Nul ne peut servir deux maîtres.

Il mourut à quarante-cinq ans, le 23 février 1677, d'une maladie de poi­trine qu'il avait supportée pendant de longues années avec égalité d'âme. Il avait publié les Principes de la Philosophie cartésienne suivis de Pensées métaphysiques, et un Traité théologico-politique, dans lequel il s'efforçait d'interpréter la Bible selon les lumières de la Raison. On devine aisément qu'il eut à regretter de s'être ainsi exposé à des critiques violentes et injustes; aussi ne donna-t-il au public aucun autre ouvrage. L'année même de sa mort, deux de ses amis firent paraître les ouvrages qu'il laissait. Ce sont un Traité politique inachevé, véritable manuel de politique rationnelle, où sont déve­loppés les principes posés dans le Traité théologico-politique. Il y est traité de la monarchie et de l'aristocratie; les conditions d'existence de ces deux formes de gouvernement sont analysées avec une précision et un souci du détail qui révèlent une profonde connaissance des hommes. Le chapitre XII et dernier n'est que l’introduction d'une étude sur la démocratie. Un autre traité, inachevé aussi, a pour titre : De la Réforme de l'intellect. C'est là, semble-t-il, qu'il faut chercher la clef du système tout entier : c'est comme une préface de l’Éthique, et il n'existe sans doute pas au monde un autre modèle aussi parfait de l'ana­lyse philosophique. Le lecteur pourra s'en faire quelque idée en lisant notre premier chapitre. Enfin l’Éthique elle-même, l'œuvre maîtresse dont tout le monde connaît la forme géométrique. L’Éthique est divisée en cinq parties qui portent les titres suivants : de Dieu, de l'âme, des passions, de l'esclavage humain, de la liberté humaine. Les deux premières correspondent à peu près à notre deuxième chapitre la troisième, à notre chapitre troisième la quatrième, à nos chapitres quatrième et cinquième, et la cinquième à notre chapitre sixiè­me. Un Traité de Dieu et de l'homme, qui est comme une ébauche de l'Éthi­que, a été traduit du hollandais et publié en 1862 par Van Vloten.

Un certain nombre de Lettres sont pour nous un précieux commentaire de l’Éthique. Les plus intéressantes sont la célèbre lettre XXIX, sur l'Infini ; la lettre XLII, sur la Distinction de l'essence et de l'existence ; la lettre XLV, sur la Démonstration de l'existence de Dieu ; la lettre XLIX sur Dieu, les destins et le salut, et la lettre LXXIV, contre la Religion catholique. Citons pour mé­moire un Abrégé de la Grammaire hébraïque. Tous ces ouvrages, à l'exception du Traité de Dieu et de l'homme, sont écrits en latin.

Venons sans plus tarder à l'exposé de la philosophie de Spinoza. Il y a, pour tout système, un point de vue duquel on le saisit comme vrai et comme complet. Nous allons essayer de faire apercevoir au lecteur en quel sens Spinoza a raison. Pour ce qui est de montrer en quel sens il a tort, nous le laissons à de plus habiles, et il n'en manquera point. Faisant donc grâce au lecteur des « Spinoza dit... » et des « selon Spinoza... », nous prenons la parole à sa place pour le citer souvent et le paraphraser toujours.


Préface Spinoza par Alain Introduction à sa philosophie
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