Durtal a écrit :louisa a écrit :Comme tu l'auras pu constater toi-même, Spinoza n'y parle pas de propriétés de cercles.
Je regrette Louisa mais ce que tu dis est simplement faux. S se réfère à un théorème de géométrie et donc il expose une propriété (bien connue du reste) du cercle. Il n’y a rien à faire.
Je suppose que tu comptes tirer argument, comme d’habitude, du fait que le mot "propriété" ne se trouve pas dans le texte? C’est ça ?
oui et non, j'aurais peut-être dû avoir été plus précis.
D'abord, il va de soi que le théorème auquel Spinoza réfère expose une propriété, nous sommes bien d'accord là-dessus.
Or dire que Spinoza ne parle pas de propriétés dans ce scolie, ce n'est pas du tout la même chose que de dire que Spinoza y nierait qu'il s'agit d'une propriété d'un cercle (puisque pour le nier, il aurait dû en parler, alors que, encore une fois, il n'en parle tout simplement pas, au sens littéral en effet).
Dire qu'il n'y parle pas de propriété c'est simplement dire qu'il veut apparemment parler d'un autre aspect lié à ce théorème que le fait qu'il énonce une généralité concernant les cercles et les carrés. Et en effet, il veut illustrer le scolie, qui lui ne parle pas non plus de propriétés des choses, mais des choses singulières en tant que singulières et des deux manières dont elles peuvent être dites exister (l'exemple parle donc lui aussi de tel ou tel carré et cercle singulier, et non pas de la propriété en générale). Si tu trouves que le scolie ne traite pas de cela, de quoi s'agit-il plutôt, selon toi?
Durtal a écrit :Mais tu sais il te faudrait déjà prouver que « parler d'une chose » consiste nécessairement à la nommer , et c’est être d’une très grande naïveté ou d’un très grand manque de sérieux que de le prétendre. Ajoute à ceci qu’il peut arriver par exemple que Spinoza ne dise pas telle ou telle chose tout simplement parce que cela va de soi , et que cela fait aussi partie des raisons, en général, pour lesquelles on ne dit pas quelque chose.
j'opterais pour: il ne mentionne pas ici le mot "propriété" puisqu'il va de soi qu'il s'agit d'une propriété. Mais il n'en parle pas non plus, encore une fois, parce qu'ici il ne veut pas parler d'une généralité, il veut illustrer ce qu'il vient de dire, et dans ce qu'il vient de dire il ne s'agit pas de généralités ou d'êtres de raison, il s'agit de l'existence réelle des choses singulières.
Durtal a écrit :Mais d'accord livrons nous à cet exercice laborieux et sans intérêt jusqu'au bout.
si je peux bien comprendre qu'on n'a pas tous une vocation pédagogique, j'avoue que j'ai du mal à m'imaginer comment on peut à la fois aimer la philosophie et le trouver sans intérêt d'essayer d'expliciter maximalement sa pensée. Est-ce que cela ne t'arrive vraiment jamais de découvrir des choses nouvelles, lorsque tu essaies (pour toi-même ou sur un forum) de davantage expliciter ce que tu penses ou comment tu interprètes Spinoza? C'est pas que je veux à tout prix exclure la possibilité, c'est juste que jusqu'à présent je ne peux pas m'imaginer comment ce serait possible (sans ironie).
Durtal a écrit :Donc en E16dem Spinoza explique: "étant donné la définition d'une chose quelconque, l'intellect en conclut plusieurs propriétés, lesquelles, en vérité, en découlent nécessairement ( c'est à dire de l'essence même de la chose) etc..."
Un cercle est une chose, d’autre part il appartient à sa nature, son essence, « que les "rectangles construits à partir des segments de toutes les lignes droites...ect.." la proposition 16 ( qui est absolument générale) m'autorise donc à conclure, de façon tout à fait « Spinoziste » du reste, que Spinoza parle bien ici d’une "propriété" du cercle.
ok, compris en ce sens-là, on peut effectivement dire qu'il "parle" d'une propriété (je dirais plutôt qu'il s'y réfère, mais peu importe, du moment qu'on comprend ce qu'on veut dire en utilisant tel ou tel mot).
Durtal a écrit :Voilà.
Mais on se doute quand même qu'il n'y a pas vraiment de raison ni de sens pour lui à mettre une panneau pour signaler "je suis en train de parler d'une propriété du cercle" encore une fois, sauf pour toi semble-t-il, tout cela va de soi.
non non, il s'agissait d'un malentendu, cela va bien sûr aussi de soi pour moi, ce que j'ai essayé de dire, c'est que ce dont parle Spinoza dans ce scolie, ce qu'il essaie de montré, ce n'est pas quelque chose qui a trait à une propriété, c'est quelque chose qui a trait à l'existence d'une chose singulière.
Durtal a écrit :Louisa a écrit :Il compare bien plutôt deux carrés singuliers: l'un qui se déduit de toute façon de la définition du cercle, puis le même carré en tant qu'il est tracé par quelqu'un dans tel ou tel cercle.
Et bien non. Spinoza n'est pas en train de dire dans cet exemple qu'il existe une infinité de tracés singuliers de rectangles qui découlent de l’essence ou de la nature du cercle mais non encore tracés ou si tu préfères « tracés en lui de toute éternité », sinon, il soutiendrait cette opinion absurde que l'on peut déduire de la définition du cercle que ma main ( par ex) en tracera ou en a tracé un (car après tout il est l’un de ces tracés). Et il ne peut pas vouloir dire cela par l’exemple qu’il a choisi, parce que c’est grossièrement faux.
tel que tu le dis en effet, c'est clairement faux. Mais j'avoue que je ne vois pas le rapport entre ce que tu dis et ce que je viens de dire ... ?
Durtal a écrit :En revanche c'est que tu essayes de lui faire dire: il y a un tracé " éternel" et un "tracé temporel" pour le même rectangle.
mais non, il faut bien sûr réserver le mot "tracé", introduis par toi, pour un processus qui se déroule dans le temps. Cela n'a aucun sens de parler d'un "tracé" d'un point de vue de l'éternité, c'est précisément cette distinction entre les deux plans que l'exemple illustre.
Durtal a écrit :Sauf que c'est idiot, car, que ce tracé soit éternel ou temporel, ne fait rien à l'affaire; on ne déduit pas des définitions des objets géométriques des propositions qui concernent les figures que nous traçons. Or la proposition qui concerne l'égalité des paires de rectangles est une proposition de la géométrie ; elle affirme quelque chose de la nature d’un cercle et non une proposition qui concerne des tracés de figures que ceux ci existent temporellement ou éternellement ou de quelque autre façon qu'il te plaira de l'envisager.
oui bien sûr. Et c'est précisément sur cette propriété que Spinoza s'appuie pour dire que donc, même déjà avant de l'avoir tracée, telle ou telle figure doit être comprise dans l'idée (= essence objective) du cercle, or il n'y a pas d'essences objectives sans essences formelles chez Spinoza. Donc c'est parce que tel ou tel carré se laisse déduire de l'idée même de tel cercle qu'il faut lui accorder une essence formelle et objective, tu vois ... ? Et c'est en ce sens que ce carré existe de toute éternité. Que par ailleurs il n'existera dans le temps que lorsque ta main l'aura effectivement tracée n'y change rien. Il s'agit de deux types d'existence différents.
Durtal a écrit : Donc il s'agit de considérations qui sont foncièrement hétérogènes que tu crois juste pouvoir faire coïncider en basculant d'un adjectif à l'autre parce que tu te trompes sur la portée et le sens de cette illustration (et je ne parle même pas ici de ce qu’elle est censée illustrer)
euh ... quelles sont ces considérations hétérogènes?
Durtal a écrit :Et c'est justement sur cette hétérogénéité qu'il insiste en contrastant d’une part l'infinité de paires de rectangle qui existe dans le cercle et qui sont a) non distinguées entre elles . et b) . non distinguée du cercle lui même (et j’ajoute qui existent alors en-tant-que propriété-du-cercle) avec d’autre part deux rectangles quelconques tracés qui eux sont a) distincts l’un de l’autre et aussi de tout autre et b) qui sont distingués du cercle lui-même.
là je ne te suis plus. Comment faire pour dire que l'infinité des rectangles qui existent dans le cercles ne se distinguent pas entre eux? Et comment peut-on ne pas distinguer un rectangle d'un cercle ... ?
A mon avis tu dis cela parce que présupposes que seuls des rectangles tracés ne peuvent être distingués l'un de l'autre, alors que justement, toute cette proposition essaie de montrer l'inverse: on ne peut pas avoir une distinction de choses existant dans le temps si elle ne se distinguent pas déjà du point de vue de l'éternité. Spinoza quitte ici radicalement tout thomisme, qui stipule que ce ne serait que l'existence dans un temps et un lieu précis qui permet d'individuer et donc de distinguer les choses singulières.
Durtal a écrit :ps : Blaise Pascal tu connais?
un peu ... j'aime pas. Trop chrétien pour moi, donc trop de valorisation des Passions Tristes ...