Qui a réussi ?

Questions touchant à la mise en pratique de la doctrine éthique de Spinoza : comment résoudre tel problème concret ? comment "parvenir" à la connaissance de notre félicité ? Témoignages de ce qui a été apporté par cette philosophie et difficultés rencontrées.
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Louisa
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Messagepar Louisa » 03 oct. 2009, 15:33

Durtal a écrit :Et ainsi cette stupide discussion roulera éternellement de la même façon,, faute pour toi de percevoir que lorsque tu expliques (je cite) que "A ton sens la puissance chez Spinoza ne désigne (...) rien d'autre que l'ensemble de tout ce qu'on sait faire ici et maintenant" tu impliques comme tout le monde et au même sens que tes contradicteurs, l'idée de potentialité sauf que toi à la différence d'eux tu ne t'en aperçois pas.

Considérons en effet l'exemple de semblable farine que tu m'avais fait il y a quelque temps concernant le même sujet soit : "que tu es capable de chanter sous ta douche" ( cela fait partie à ton sens -pauvrette- de l'ensemble des choses "que l'on sait faire ici et maintenant") et c'était même, du reste d'après toi, une illustration de ce qu'était une aptitude "au sens Spinoziste" dans l'échange auquel j'ai fait allusion.

Mais je suppose que tu ne veux pas dire par là que tu passes chaque instant de ton existence "à chanter sous la douche" et que si ce n'était pas le cas l'on ne pourrait plus dire de toi que tu n'as pas cette capacité!!!! ( ou bien si peut être ? c'est cela que tu voulais dire?)

Mais qu'est ce que ça signifie à ton avis? Autrement dit en admettant cela qu'est ce que tu admets implicitement? et bien que l'acte de chanter effectivement sous ta douche, lorsqu'il est considéré relativement à ta capacité de le faire est très exatement un potentiel, ce qui signifie simplement, qu'on peut dire de toi que tu as "la capacité de chanter sous ta douche" ( que ce peut être une proposition vraie) bien que tu ne sois pas en train de chanter au moment où l'on énonce cette proposition.


Bonjour Durtal,

essayons d'abord de formuler clairement ton argument.

Tu dis:
- X accepte l'idée que lorsqu'on dit que Y est un être capable de chanter sous la douche, cela ne se manifeste que de temps en temps (les moments où l'on chante effectivement sous la douche). Autrement dit, il n'est pas nécessaire de poser en permanence l'acte qui correspond à une capacité pour réellement posséder cette capacité.
- X dit que dans le spinozisme il n'y a pas de potentiel.

Ta conclusion: X se contredit lui-même.

Argument: être capable de quelque chose, c'est identique à être "apte" à faire quelque chose, au sens spinoziste du terme, et les deux (être capable de, être apte à au sens spinoziste) sont identiques à "avoir le potentiel" de ce quelque chose.

Le problème avec un tel argument, c'est qu'il présuppose ce qui est à démontrer (comme quasiment tout ce qu'on m'a répondu jusqu'à présent dans ce fil, d'ailleurs):

si une aptitudo chez Spinoza est identique à un potentiel, alors dire que quelqu'un "a un potentiel A" est identique à dire que cette même personne "est apte à faire A".

La conclusion de ce raisonnement (l'identité du potentiel et de l'aptitude spinoziste) n'est vraie si et seulement si la prémisse est vraie, donc si une aptitude chez Spinoza est identique à un potentiel. C'est donc précisément cette prémisse qu'il s'agit de démontrer (ou pour ceux qui trouvent cela difficile, on peut aussi prendre les arguments qui démontrent qu'il n'y pas de potentiel chez Spinoza et essayer de les réfuter).

D'habitude, dans ce fil de discussion, lorsque je rappelle ce fait, on me dit que ce n'est pas nécessaire de démontrer l'idée que chez Spinoza l'aptitude (ou le "pouvoir" (posse) etc.) est un potentiel, il suffit de rappeler que la notion de potentiel appartient au sens commun. Là je ne peux que répondre que si les philosophes étaient tenus à s'orienter sur le sens commun, il n'y aurait pas de philosophie du tout. Dans nombreuses variantes du sens commun, il est évident que l'homme possède un libre arbitre, par exemple. Cela n'a pas du tout empêché certains grands philosophes de s'en défaire aussitôt. Et il en va de même avec "potentiellement" n'importe quelle idée qui nous vient du "bon sens". Donc certainement aussi avec la notion de "potentiel".

Inversément, lorsqu'on est convaincu par les arguments qui démontrent l'impossibilité d'un potentiel dans le spinozisme (et que l'on trouve notamment chez P. Sévérac, A. Tosel, Ch. Ramond), on ne peut bien sûr plus se servir de la notion du potentiel pour décrire une capacité ou une "aptitude", on est plutôt obligé de repenser cette notion à nouveaux frais, comme l'a souligné Bernard Pautrat dans quelques-uns de ses derniers cours à l'ENS. Si cela intéresse quelqu'un: c'est exactement ce que Pascal Sévérac fait, en indiquant la différence entre ce qui est potentiel et ce qui est une propriété (voir Le devenir actif, Paris, Honoré Champion, 2005, pg. 134-148).

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Messagepar Louisa » 03 oct. 2009, 18:18

Bardamu a écrit :L'illustration que je donnais par le ressort correspondait donc à une chose simple (j'espère...) : j'appelle "potentiel" ce que Spinoza appelle "potentia" dans le cadre de l'application de la potentia intellectus à la liberté humaine, ce potentiel-potentia est une puissance de libération en acte qui s'exprime comme effort (dans la durée) et mène certaines personnes à la sagesse.
C'est par l'exploitation de cette puissance qu'on avance dans la voie que Spinoza propose aux hommes et ceux qui réussissent sont ceux qui expriment cette puissance. On ne sait pas si en jouant on va gagner mais on sait que tous les gagnants ont joué.

Si "certains sont arrivés" comme dit Acta93 c'est qu'ils ont exprimé leur "potentia intellectus".
Et lorsqu'il demande si il y a des signes de progression et au bout de combien de temps, je répondrais simplement que les signes (ou symptômes ?) ne sont que la joie qui se manifeste à chaque idée adéquate obtenue, que ce n'est pas au bout d'un certain temps mais dès le départ.


Bonjour Bardamu,

étant en train de reprendre plus en détail, grâce au dernier message de Durtal, la distinction entre un potentiel et une puissance spinoziste telle que la fait notamment Sévérac, je tombe sur un exemple qui peut-être aidera à mieux faire ressentir en quoi à mon sens il y a réellement une différence entre ce que tu penses et ce que je proposes que la réponse que je t'ai donnée ci-dessus hier.

Car si tu es d'accord pour dire que rien n'est "en puissance" chez Spinoza, il me semble que tu ne vas pas jusqu'au bout de cette idée, pour ré-introduire aussitôt l'idée d'un potentiel, ce qui t'a permis d'être d'accord avec l'idée proposée au début de ce fil, et qui était que la béatitude consiste à "atteindre" maximalement sa puissance, ou à actualiser maximalement le "potentiel" que contiendrait cette puissance, ou comme tu le dis ci-dessus, à "exprimer" maximalement cette puissance (ce qui suppose que nous pouvons à la fois avoir une essence et ne pas exprimer cette essence).

C'est que lorsqu'on abolit tout potentiel, il faut aller plus loin que cela, on ne peut plus accepter l'idée d'une puissance/essence qui existerait déjà mais ne s'exprimerait pas encore entièrement. La conséquence de dire qu'il n'y a pas de potentiel, c'est que toute puissance s'exprime toujours déjà entièrement/pleinement/complètement. C'est pourquoi la béatitude spinoziste n'est pas un projet d'"accomplissement" de soi, comme quelqu'un (toi?) a pu aussi l'appeler ci-dessus.

Puisque tu as donné l'exemple du ressort, voici ce qu'en dit Sévérac (en l'appliquant à n'importe quel corps "élastique") (d'ailleurs il l'applique parallèlement à l'exemple de la natation, qui parlera peut-être plus à Durtal):

Sévérac a écrit :Pour comprendre quel type de rapport entretiennent les propriétés d'un corps humain avec son essence, et savoir quel type d'aptitude elles définissent (aptitude pleinement effective ou seulement potentielle), deux interprétations sont possibles, qui engagent deux conceptions différentes de ce qu'est une "propriété":

- Ou bien la propriété est envisagée comme la capacité à produire un effet donné. Elle désigne alors un rapport conditionné de cause à effet: pour une essence donnée, si telle condition est donnée, alors l'effet est posé. La propriété existe certes dès lors qu'existe l'essence à laquelle elle appartient; mais l'effet dont est capable cette essence à travers sa propriété n'existe que si une cause extérieure est donnée. Dans cette perspective, la propriété, qui doit être comprise comme un "si... alors...", doit être distinguée de l'effet susceptible d'être produit par elle.


Il me semble que ceci est très proche de ce que tu as pu dire toi-même: on peut avoir la capacité ou puissance de devenir un bon musicien, mais on dépend partiellement de circonstances extérieures pour le devenir. Ainsi comprise, la béatitude consiste effectivement en une expression maximale de sa puissance, qui au début n'est exprimée que partiellement, et qu'on doit apprendre à exprimer davantage. On est déjà "potentiellement" un bon musicien, mais il faut encore pouvoir apprendre à actualiser cette "aptitude" ou "capacité" ou "puissance".

Ainsi, lorsque je t'ai répondu que ce n'est pas cela abolir le potentiel, tu as mis l'accent sur le fait qu'il faut distinguer la propriété (déjà actuellement là) de l'effet (qui n'est que potentiellement là, aussi longtemps qu'il n'est pas actualisé/réalisé). Tu pensais donc qu'éventuellement on était d'accord sur l'essentiel puisque tu admets comme moi que la propriété est toujours déjà actuelle, alors que, comme j'ai essayé de le signaler dès le début, la différence porte sur le statut qu'on accorde à l'effet, et là on pense différemment, puisqu'en ce qui me concerne, l'argumentation que Sévérac développera par la suite pour montrer en quoi il faut adopter une autre conception de la "propriété" (et donc donner un autre statut à l'effet) pour être pleinement en accord avec le spinozisme, est correcte. Voici cette deuxième conception (c'est moi qui souligne):

Sévérac a écrit :- Ou bien la propriété est envisagée comme la puissance effective de produire un effet, quelles que soient par ailleurs les conditions extérieures favorables ou défavorables à la production de cet effet. La propriété désignerait alors l'effet produit inconditionnellement par une essence donnée: si une essence est donnée, alors sont nécessairement données ses propriétés, c'est-à-dire sont nécessairement produits ses effets.

L'exemple géométrique conviendrait tout à fait pour illustrer cette conception de la propriété: si est donnée l'essence d'un cercle, alors la propriété de l'équidistance des points de sa circonférence par rapport à son centre est posée. Nul besoin ici du recours à une condition extérieure pour que la propriété produise son effet. Cependant, l'usage commun des notions de propriété et d'aptitude résiste à une telle interprétation: peut-on dire par exemple d'un corps apte à nager qu'en quelque manière il produit ses effets s'il marche? Peut-on dire d'un corps élastique, c'est-à-dire ayant la propriété de reprendre sa forme initiale après déformation, qu'il produit son effet s'il ne subit pas une action déformatrice?

En de tels cas, il faut revenir, semble-t-il, à la conception conditionnelle de la propriété: si un corps élastique est déformé (et que cesse cette action déformatrice), alors il agira selon sa propriété: il reprendra nécessairement sa forme initiale. De même, si un corps apte à nager est plongé dans l'eau et ne désire pas couler, alors il effectuera les mouvements adéquats pour demeurer à la surface de l'eau, et pour se déplacer éventuellement. Dans ces cas, la propriété doti être comprise comme une aptitude au sens courant du terme: c'est-à-dire comme une capacité que le corps peut à tout moment mobiliser s'il y est déterminé (c'est-à-dire, dans le cas de l'homme, si son désir y est déterminé). Avec le concept de capacité - tout comme avec celui de propriété -, on aurait affaire non pas à l'idée d'une puissance toujours pleinement actuelle et agissante, mais à l'idée d'une puissance en puissance, pouvant être ou non actualisée, selon que les conditions extérieures favorisent ou non ce passage de la puissance à l'acte.

Cependant, à mieux examiner les exemples mêmes qui ont été choisis, il n'est pas absolument certain qu'on puisse conclure définitivement à l'inactualité possible des effets d'une propriété donnée. Certes, la propriété doit être comprise comme un "si... alors... ": avoir la propriété de nager, c'est avoir la puissance de nager si on le désire; avoir la propriété de l'élasticité, c'est avoir la puissance de recouvrer sa forme initiale si est supprimée la contrainte déformatrice. Mais ne peut-on pas envisager que ces propriétés ne cessent jamais de produire leur effet, dès lors que l'essence à laquelle elle appartiennent est donnée?


C'est là qu'on arrive à la divergence entre ce que tu dis et ce que je dis, il me semble. Pour toi, la puissance spinoziste est telle qu'il y a des propriétés qui ne produisent pas encore leur effet, et la béatitude, ou le "chemin" vers la béatitude, consisterait à essayer de faire produire à des propriétés qui sont déjà actuellement en nous les effets qu'elles sont "potentiellement" capables de produire. Pour moi, chez Spinoza toutes nos propriétés produisent toujours déjà leur effet, il n'y a pas d'effet potentiel. La béatitude consiste à prendre connaissance de cela. Sévérac poursuit:

Sévérac a écrit :Etre élastique, pour un corps, signifie non pas seulement pouvoir recouvrer sa forme initiale après déformation; mais être suffisamment souple - "mou", dirait Spinoza - pour être affecté par une action déformatrice (le caoutchouc peut être déformé par une action qui n'affectera en aucune manière le verre ou la pierre). Et simultanément, être élastique signifie avoir la puissance - nécessairement agissante - de résister à cette action déformatrice en s'efforçant de conserver, ou de recouvrer sa forme initiale. Et si on imagine qu'aucune action déformatrice n'affecte le corps élastique, celui-ci n'en conserve pas moins son état initial: le corps ne cesse d'agir à traver ses propriétés quelles que soient les circonstances extérieures.

Il en va de même du corps du nageur. Peut-on dire qu'il nage toujours, même lorsqu'il marche? Certes non. Mais peut-être un corps apte à nager et un corps inapte à nager ne marcheront-ils pas de la même façon. Un corps apte à nager n'est pas un corps qui de fait nage tout le temps, mais c'est un corps qui possède des affections, sous formes de traces ou de vestiges, qui sont telles que, si elles sont déterminées par d'autres corps à produire un certain effet, alors le corps nage. Cependant, ces traces corporelles constitutives de ce qu'on pourrait appeler un "savoir" du corps ne sont pas inertes lorsque le corps accomplit d'autres activités que la nage: elles ne peuvent être mises au compte d'une puissance seulement en puissance, qui attendrait l'occasion favorable pour être mobilisée. Ne peut-on pas dire plutôt qu'elles produisent toujours leurs effets sous la modalité de l'action entreprise par le corps? Certes, ces effets ne sont pas toujours "visibles" en eux-mêmes, surtout lorsqu'ils se combinent à ceux qui sont requis pour accomplis une activité différente de celle à laquelle ordinairement on les destine. Mais, ici comme ailleurs, il ne faut pas se laisser prendre au piège de la finalité: ce n'est pas parce que le corps ne mobilise pas ses dispositions à la nage pour nager, que celles-ci, n'étant pas alors les moyens d'une fin désirée, demeurent inactives. Est-il extravagant de penser que nous nous déplaçons différemment selon que nous sommes des nageurs expérimentés ou seulement occasionnels? Il en irait de même de n'importe quelle aptitude corporelle, innée comme acquise.

Ce "savoir" du corps effectif en chacun de ses mouvements est ce que nous pourrions appeler une mémoire des dispositions du corps: et il ne faudrait pas concevoir cette mémoire dispositionnelle comme un ensemble d'affections dormantez mais agissantes: elles agissent en chacune des actions du corps, et elles définissent une aptitude corporelle non pas potentielle, mais en acte.

(...)
Il n'y a donc pas à distinguer entre deux étapes, ou deux conditions, pour comprendre le devenir actif: d'abord, la nécessité de posséder des propriétés par lesquelles on puisse agir; ensuite, la nécessité de s'approprier ces propriétés en agissant effectivement par elles. C'EST UNE SEULE ET MEME CHOSE, POUR UN CORPS, D'ETRE APTE A QUELQUE EFFET ET D'AGIR EFFECTIVEMENT EN PRODUISANT CET EFFET. C'EST UNE SEULE ET MEME CHOSE, POUR L'ESPRIT, D'ETRE APTE A PERCEVOIR ADEQUATEMENT CERTAINES CHOSES ET DE COMPRENDRE EFFECTIVEMENT CES CHOSES.

Ainsi, posséder des propriétés, pour un individu, signifie posséder non pas une simple aptitude en puissance à agir, mais une (...) aptitude qui agit. L'aptitude corporelle est aptitude agissante; et partant elle ne saurait être lue, du point de vue de l'esprit, comme une simple possibilité d'agir.


@ Durtal

il faudrait qu'on reprenne texto ce que j'ai dit lorsque je parlais de l'aptitude à chanter sous la douche (je ne m'en souviens plus exactement), puisqu'il s'agissait là d'une tentative toute personnelle d'appliquer l'idée d'une aptitude qui n'implique plus aucun potentiel à un exemple concret, sans avoir déjà lu en détail ce que je viens de citer ici. Si j'y ai dit que toute aptitude produit toujours déjà, ici et maintenant son effet, ce que j'ai dit était correcte. Mais si j'y dis quelque part qu'après être sortie de la douche je ne suis plus "apte" à chanter sous la douche, au sens spinoziste du terme, je pense dès à présent qu'il s'agit d'une erreur. La façon dont Sévérac développe ici ses deux exemples me semble être plus correcte, plus convaincante. Et dans ce cas, je continue à avoir l'aptitude à chanter sous la douche, aussi une fois parti au boulot, seulement Sévérac montre comment il faut alors concevoir le fait que cette même aptitude reste toujours en acte, ou lieu de devenir potentielle.

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Messagepar hokousai » 03 oct. 2009, 19:47

chère Louisa

on parle de l'idée d'intention parce que vous avez écrit

à mon sens, le spinozisme abolit la notion d'"intention" (notamment en n'en parlant jamais). Ce qui est important pour "moi", ce n'est pas de savoir dans quelle mesure l'autre a l'intention de me nuire ou non, c'est simplement de savoir dans quelle mesure il me nuit ou non. Si la "rencontre fortuite" avec lui est nuisible pour moi, il faut que je fasse quelque chose, sinon tout va bien.


Disons que si je prête à autrui une intention de me nuire il faut que je fasse quelque chose.

Non ?

Il me semble que Spinoza n abolit pas l' idée de prudence .(caute!!)

............................ j'attends toujours que vous m'expliquiez comment vous comprenez le scolie de prop 8/2

Je lis peu de commentateurs mais j'ai lu Ramond lequel ne m'a pas du tout convaincu .Cessez de vous appuyer sur des autorités .Je suis convaincu qu'il y a du possible et de l'impossible chez Spinoza .J'en conclus qu'il y a du potentiel .
J y reviendrai .

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Messagepar Durtal » 03 oct. 2009, 21:35

Louisa a écrit :

Bonjour Durtal,

essayons d'abord de formuler clairement ton argument.

Tu dis:
- X accepte l'idée que lorsqu'on dit que Y est un être capable de chanter sous la douche, cela ne se manifeste que de temps en temps (les moments où l'on chante effectivement sous la douche). Autrement dit, il n'est pas nécessaire de poser en permanence l'acte qui correspond à une capacité pour réellement posséder cette capacité.
- X dit que dans le spinozisme il n'y a pas de potentiel.

Ta conclusion: X se contredit lui-même.

Argument: être capable de quelque chose, c'est identique à être "apte" à faire quelque chose, au sens spinoziste du terme, et les deux (être capable de, être apte à au sens spinoziste) sont identiques à "avoir le potentiel" de ce quelque chose.

Le problème avec un tel argument, c'est qu'il présuppose ce qui est à démontrer (comme quasiment tout ce qu'on m'a répondu jusqu'à présent dans ce fil, d'ailleurs):

si une aptitudo chez Spinoza est identique à un potentiel, alors dire que quelqu'un "a un potentiel A" est identique à dire que cette même personne "est apte à faire A".

La conclusion de ce raisonnement (l'identité du potentiel et de l'aptitude spinoziste) n'est vraie si et seulement si la prémisse est vraie, donc si une aptitude chez Spinoza est identique à un potentiel. C'est donc précisément cette prémisse qu'il s'agit de démontrer (ou pour ceux qui trouvent cela difficile, on peut aussi prendre les arguments qui démontrent qu'il n'y pas de potentiel chez Spinoza et essayer de les réfuter).

D'habitude, dans ce fil de discussion, lorsque je rappelle ce fait, on me dit que ce n'est pas nécessaire de démontrer l'idée que chez Spinoza l'aptitude (ou le "pouvoir" (posse) etc.) est un potentiel, il suffit de rappeler que la notion de potentiel appartient au sens commun. Là je ne peux que répondre que si les philosophes étaient tenus à s'orienter sur le sens commun, il n'y aurait pas de philosophie du tout. Dans nombreuses variantes du sens commun, il est évident que l'homme possède un libre arbitre, par exemple. Cela n'a pas du tout empêché certains grands philosophes de s'en défaire aussitôt. Et il en va de même avec "potentiellement" n'importe quelle idée qui nous vient du "bon sens". Donc certainement aussi avec la notion de "potentiel".

Inversément, lorsqu'on est convaincu par les arguments qui démontrent l'impossibilité d'un potentiel dans le spinozisme (et que l'on trouve notamment chez P. Sévérac, A. Tosel, Ch. Ramond), on ne peut bien sûr plus se servir de la notion du potentiel pour décrire une capacité ou une "aptitude", on est plutôt obligé de repenser cette notion à nouveaux frais, comme l'a souligné Bernard Pautrat dans quelques-uns de ses derniers cours à l'ENS. Si cela intéresse quelqu'un: c'est exactement ce que Pascal Sévérac fait, en indiquant la différence entre ce qui est potentiel et ce qui est une propriété (voir Le devenir actif, Paris, Honoré Champion, 2005, pg. 134-148).



Il semble que "reformuler clairement un argument" consiste chez toi à "éviter de répondre par tout moyen possible à la question posée"

Car il semble t'échapper que je posais une question. Et naturellement tu n'y réponds absolument pas, ce qui me force à la réitérer.

Elle était pourtant je crois parfaitement simple et directe: si il est vraiment impossible de se servir "de la notion de potentiel pour décrire une capacité ou une aptitude" chez Spinoza,( Très bien! D'accord! allelluia! merci Louisa! heureusement que tu es là! sans toi c'était la cata!) Alors comment dans ce cas expliques tu que tu le fasses toi-même????

Je comprends bien que tu rejettes cette imputation. Mais cela ne suffit pas. Ce qu'il faut faire, si tu veux bien cesser un instant de te défiler et d'enfumer le débat dans les généralités, c'est de montrer clairement que lorsque tu dis que tu as "la capacité de chanter sous ta douche" ( je n'invente pas cet exemple encore une fois c'est le tien), les actes effectifs qui manifestent cette capacité ne sont pas du tout une série indéfinie d'actes "potentiels" relativement à la capacité que tu as de les produire.

C'est une question directe et simple. Tu te contentes de répéter que interpréter cela comme du potentiel c'est supposer ce qui est en question Moi je veux bien, hein, mais ce n'est pas le début d'un commencement de réponse. Que je fasse ou non des pétitions de principe, que je sois ou non un naif zélateur du sens commun, ne change rien à l'affaire: si ce que tu prétends à de la consistance, tu dois être en mesure de produire l'explication alternative "spinoziste" de la structure logique en question c'est à dire être capable d'expliquer en quoi tes propres exemples et tes propres explications, contre l'apparence du contraire, sont réellement dépourvues de toute référence implicite à du "potentiel" .


Suis je supposé m'en convaincre simplement parce que tu l'affirmes? Et pourquoi ne serais-je pas plutôt convaincu que tes idées sur cette question sont confuses?

Et si d'aventure, les gens qui prétendent qu'il y a du potentiel chez Spinoza, bien qu'il soit clair pour eux que ce concept doive être pensé d'une manière ou d'une autre en rupture avec le traitement traditionnel de l'acte et de la puissance, était dans l'idée d'aller fouiller un peu cette question du coté de l'affirmation de l'éternité de l'âme et de certaines de ses propriétés.... n'apparaîtrait-il pas que, cette nouvelle "saga polémique" n'était qu'une fastidieuse querelle verbale de plus?

Faut-il que je "reformule" encore ou est ce que c'est plus "clair" maintenant?

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Messagepar hokousai » 03 oct. 2009, 23:13

à Louisa

Potentiel

Je prends les définitions du Robert

Je passe sur def philo ;"qui existe en puissance ( opposé à actuel )raccourci extrême du problème de l’existence de ce qui n’existe pas actuellement .Chez Aristote la puissance est associée à la matière laquelle a proprement parlée n’existe pas en soi puisque n existe réellement que des composés hylémorphiques . La matière être en puissance n’existe que si elle est actualisée par la forme .
Pour tout Dire chez Aristote (dont on voudrait que Spinoza se démarque ) ce qui est en puissance n’existe pas .Il n’ y a donc pas de potentiel chez Aristote .
"""""Chaque chose est dite ce que elle est plutôt quand elle est en acte que lorsqu’ elle est en puissance (physique 2)""""""

On est pas très avancé .
............................................................
Autres définitions
En grammaire Le mode potentiel (ou le potentiel) : qui exprime ce qui peut arriver sous certaines conditions ex s'il me payait je m'en irais .

En linguistique :ce qui est possible et conforme au système.

Spinoza parle souvent de ce qui peut arriver sous certaines conditions

exemples

"" si l’objet de l’idée constituant l’esprit humain est un corps il ne pourra rien arriver dans ce corps qui ne soit perçu par l’esprit (prop 12/2)"""

"""si d un corps autrement dit d’un individu certains corps se séparent … (alors ) l’individu gardera sa nature sans changement de forme .(lemme 4/2)"""
les lemmes 5 6 7 sont de la même forme grammaticale .

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Messagepar hokousai » 04 oct. 2009, 00:37

Si cela intéresse quelqu'un: c'est exactement ce que Pascal Sévérac fait, en indiquant la différence entre ce qui est potentiel et ce qui est une propriété (voir Le devenir actif, Paris, Honoré Champion, 2005, pg. 134-148)


Il semblerait que Severac sache ce qui est potentiel ou plutôt ce que signifie potentiel .
On peut espérer qu'il sache effectivement ce que signifie pour lui le mot""potentiel "" Non pas ce qu'il signifie pour Spinoza parce qu’ apparemment pour Spinoza ""potentiel"" ne signifie rien du tout .

Séverac a donc du chercher ailleurs une compréhension de potentiel . Mais où ?.

Si je le savais je serais peut- être d'accord avec lui ,ou peut être pas .

..............................................

donc admettons- le, il n’y a pas chez Spinoza l’idée qu' un tel se fait de potentiel au vu de l'idée qu'il sen fait .
................................................


on pourrait continuer ainsi :

il n’y a pas l’idée de vacuité chez Spinoza , ni l’idée de métamorphoses , ni celle d’ horloges biologique ….ni celle d’évolution des espèces, à tout le moins pas tel que nous nous en faisons l'idée .

Comme disait Hegel « c’est le travail du négatif . »

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Messagepar Durtal » 04 oct. 2009, 00:41

A louisa,

j'ai lu les nombreux extraits de Severac que tu produis à l'intention de Bardamu et par incidence à mon intention également.

je veux ici que tu remarques à titre général que tous les gens auxquels tu t'opposes à ce sujet, que ce soit moi, Bardamu, ou Serge, ou d'autres qui se sont exprimés aussi mais de façon moins "voyante", comme Amstel, mais non Hokusaï cependant qui semble lui être d'une opinion directement opposé à la tienne et indirectement opposée à la nôtre,(mais Hokusai nous le savons est un "franc tireur" :D ) n'ont jamais prétendu nier que chez Spinoza "tout était toujours en acte" ( formule stupide et vague au demeurant, mais elle fera l'affaire ici).

Tu peux quand même avoir la bienveillance de nous faire crédit d'être capable d'avoir saisi que ces deux informations: "Dieu est chez Spinoza pure actualité" et "Dieu chez Spinoza est tout le réel ( et rien que le réel)" entraînent la conséquence que "chez Spinoza tout ce qui est réel est actuel et tout ce qui est actuel est réel". ( désolé pour la parodie, j'ai pas pu m'empêcher)

Le problème n'est pas celui là: le problème est que Spinoza, ne peut pas faire l'économie de la notion d'un devenir et à plus forte raison puisque c'est l'objectif que poursuit l'Ethique, d'un "devenir actif". Ce qui étant donné ses présupposés métaphysiques, pose un problème qu'il est interessant de formuler et de tenter de résoudre.

Et c'est ça la problématique de Severac, il n'invente rien quant au problème lui même, son invention propre ( à savoir l'effectivité de la fiction) concerne la solution de ce problème, mais il n'entend pas du tout nier que spinoza affirme que tout homme a en un sens informel le "potentiel" d'être libre, ce qui lui importe est la façon dont on peut comprendre la coexistence de ce genre d'énoncés ( que Spinoza produit! ça ne sert à rien de le nier! ) avec des présupposés métaphysiques apparemment incompatibles avec eux.

Donc à la limite ton usage de Severac dans cette histoire serait intéressant et productif, dans le cadre de discussions sur les différents types de solutions que l'on peut apporter à ce problème, mais ici on n'en est même pas là, puisque ta façon de faire, consiste simplement à nier en bloc, contre une quantité invraisemblable d'évidences textuelles du contraire, (dont la préface de E5, et le prologue du TIE ne sont pas les moindres) que Spinoza parle effectivement d'un état de la nature humaine dont il suppose à l'évidence, qu'elle n'est pas donnée, et relativement à laquelle il ne suffit pas d'être simplement un membre de l'espèce humaine pour la posséder et l'exprimer en acte.

Ta façon de procéder revient à simplement annuler par avance le problème philosophique que cela pose et ce qui fait tout l'intérêt de cette question.

Tu veux faire valoir une partie de la vérité, comme le tout de la vérité, quitte à soutenir des choses invraisemblables et à faire enrager les gens qui éventuellement pourrait être disposés à discuter avec toi si tu étais simplement un peu plus fine, et "sensible" dans ton approche des problèmes.

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Messagepar Louisa » 04 oct. 2009, 01:03

Durtal a écrit :Elle était pourtant je crois parfaitement simple et directe: si il est vraiment impossible de se servir "de la notion de potentiel pour décrire une capacité ou une aptitude" chez Spinoza,( Très bien! D'accord! allelluia! merci Louisa! heureusement que tu es là! sans toi c'était la cata!) Alors comment dans ce cas expliques tu que tu le fasses toi-même????


Bonjour Durtal,

petit conseil: si tu désires que ton interlocuteur te comprenne immédiatement, alors laisse de côté tout ad hominem, car cela alourdit inutilement tes propos, et tu risques de passer à côté de l'essentiel de sa réponse en t'énervant ainsi.

Que veux-tu dire plus précisément par l'idée que j'utilise moi-même la notion de potentiel? Tu viens de le montrer: qu'il suffise qu'on parle d'une situation que le sens commun lit d'office par le biais e cette notion, pour que tu puisses toujours lire la même situation en te limitant au sens commun. C'est ce que j'ai appelé un raisonnement circulaire. Il va de soi qu'il n'est pas impossible de lire une situation ainsi, c'est même ce que nous tous, moi-même y compris, faisons d'office.

La question est bien plutôt de savoir si dans le spinozisme (= une philosophie, donc quelque chose qui depuis Platon veut dépasser l'opinion commune, ce que Spinoza reprend à son compte en disant que tout ce qui est opinion ou connaissance par ouï-dire n'appartient qu'au premier genre de connaissance, connaissance imaginaire, E2P40) il y a du potentiel ou non. Pas mal de gens qui se sont consacrés à temps plein à cette question répondent: non. Et ils montrent pourquoi. La question est donc: que trouve-t-on de ces arguments, sont-ils valides ou non? A ce sujet je me demande toujours ce que tu en penses plus précisément.

Durtal a écrit :Je comprends bien que tu rejettes cette imputation.


pas vraiment. Je rejette l'idée que chez Spinoza il y a du potentiel. Mais si tu me demandes si moi-même je me considère comme quelqu'un qui ai le potentiel de chanter sous la douche, je réponds volontiers: oui (enfin, faut juste pas être trop exigeant en ce qui concerne le "chanter" ... :-) ). Car je suis enfant de mon époque, bien évidemment, donc je n'échappe pas à ce cher "sens commun".

Durtal a écrit :Mais cela ne suffit pas. Ce qu'il faut faire, si tu veux bien cesser un instant de te défiler et d'enfumer le débat dans les généralités, c'est de montrer clairement que lorsque tu dis que tu as "la capacité de chanter sous ta douche" ( je n'invente pas cet exemple encore une fois c'est le tien), les actes effectifs qui manifestent cette capacité ne sont pas du tout une série indéfinie d'actes "potentiels" relativement à la capacité que tu as de les produire.


puisque tu le répètes: effectivement, c'est clairement moi qui ai proposé cet exemple. Si tu ne l'as pas encore testé: faut absolument le faire, cela fait du bien ... ! :-)

Sinon, encore une fois, je n'étais pas en train de parler de ce que pense le sens commun, ni de ma propre Philosophie ou Grandes Idées par rapport au monde. Je n'étais qu'en train d'essayer de comprendre le spinozisme. Si tu me demandes si je pense qu'il y a "réellement" du potentiel dans Le Monde ou non, je te dirais que je n'en sais strictement rien. Comment va-t-on prouver l'une version ou son inverse? Tu sais prouver qu'il y a du potentiel? Non. Tu sais juste rappeler que cela a du sens, pour nous tous (moi-même y compris), d'interpréter certaines situations en utilisant cette notion. Mais ce que je viens de citer de Sévérac pour moi est tout aussi "sensé" ... et l'est même beaucoup plus lorsqu'il s'agit de comprendre Spinoza.

Durtal a écrit :C'est une question directe et simple. Tu te contentes de répéter que interpréter cela comme du potentiel c'est supposer ce qui est en question Moi je veux bien, hein, mais ce n'est pas le début d'un commencement de réponse. Que je fasse ou non des pétitions de principe, que je sois ou non un naif zélateur du sens commun, ne change rien à l'affaire: si ce que tu prétends à de la consistance, tu dois être en mesure de produire l'explication alternative "spinoziste" de la structure logique en question c'est à dire être capable d'expliquer en quoi tes propres exemples et tes propres explications, contre l'apparence du contraire, sont réellement dépourvues de toute référence implicite à du "potentiel" .


la question me semble être mal posée. Si tu veux expliquer la "structure logique" propre à notre Esprit contemporain qui nous fait penser aujourd'hui les choses en termes d'actualisations d'un potentiel, il va falloir référer à la notion de potentiel, bien sûr. Mais Spinoza propose une autre structure logique, qui ne réfère plus à aucun potentiel. Pour expliquer cette structure alternative, il faut ne plus référer à du potentiel. C'est l'un ou l'autre, mais on ne peut pas expliquer l'un par l'autre. Pour avoir une idée de ce que cela donne que de comprendre une situation sans la penser sur base d'un potentiel, voir la façon dont Sévérac explique ci-dessus ce qui se passe lorsqu'un Corps a appris à nager. Qu'en penses-tu?

Durtal a écrit :Suis je supposé m'en convaincre simplement parce que tu l'affirmes? Et pourquoi ne serais-je pas plutôt convaincu que tes idées sur cette question sont confuses?


tu ne me rendrais aucun service si tu disais déjà être convaincu simplement parce que je l'affirme, au contraire.

Puis il est évident que de prime abord, on est sceptique lorsqu'on entend quelqu'un s'attaquer à une idée appartenant au sens commun, donc oui, bien sûr, on aura d'abord l'impression qu'il s'agit de quelqu'un chez qui quelque chose ne va pas. J'ai eu la même impression lorsque je lisais pour la première fois l'argumentation contre l'idée d'un potentiel dans le spinozisme. Mais si l'on prend le temps d'y réfléchir un peu, je crois qu'on est obligé à en admettre la vérité. A moins que tu penses à l'une ou l'autre chose qui permet d'invalider cette argumentation? Si c'est le cas, moi-même et Pascal Sévérac seront contents de l'entendre (pas d'ironie dans cette phrase).

Durtal a écrit :Et si d'aventure, les gens qui prétendent qu'il y a du potentiel chez Spinoza, bien qu'il soit clair pour eux que ce concept doive être pensé d'une manière ou d'une autre en rupture avec le traitement traditionnel de l'acte et de la puissance, était dans l'idée d'aller fouiller un peu cette question du coté de l'affirmation de l'éternité de l'âme et de certaines de ses propriétés.... n'apparaîtrait-il pas que, cette nouvelle "saga polémique" n'était qu'une fastidieuse querelle verbale de plus?


euh ... peut-être? Que veux-tu dire plus précisément par là... ?

Durtal a écrit :Faut-il que je "reformule" encore ou est ce que c'est plus "clair" maintenant?


comme toujours, ce n'est que toi qui peux en juger. Si à tes yeux j'ai répondu cette fois-ci à la question, tu seras convaincu que je l'ai bien comprise, sinon il va effectivement falloir reformuler encore une fois.

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Messagepar hokousai » 04 oct. 2009, 01:24

mais non Hokusaï cependant qui semble lui être d'une opinion directement opposé à la tienne et indirectement opposée à la nôtre,(mais Hokusai nous le savons est un "franc tireur" Very Happy )


allons, allons , je ne suis pas directement opposé à ce que pense Louisa , je cherche à lui faire mieux exprimer ce qu'elle pense ......Je lui oppose des objections parce que sans objections le débat cesse .

Or je n'ai pas envie qu'il cesse .Nous n'avons aucun intérêt à ce qu'il cesse .

Cela dit je ne suis pas d'accord pour tirer les coup francs .

bien à vous tous

hokousai


J'ai un handicap actuellement sur ce fil , je n'ai pas lu Severac . Donc acte de mes insuffisances .

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Messagepar Louisa » 04 oct. 2009, 01:26

Durtal a écrit :j'ai lu les nombreux extraits de Severac que tu produis à l'intention de Bardamu et par incidence à mon intention également.


ok chouette, merci.

Durtal a écrit :je veux ici que tu remarques à titre général que tous les gens auxquels tu t'opposes à ce sujet, que ce soit moi, Bardamu, ou Serge, ou d'autres qui se sont exprimés aussi mais de façon moins "voyante", comme Amstel, mais non Hokusaï cependant qui semble lui être d'une opinion directement opposé à la tienne et indirectement opposée à la nôtre,(mais Hokusai nous le savons est un "franc tireur" ) n'ont jamais prétendu nier que chez Spinoza "tout était toujours en acte" ( formule stupide et vague au demeurant, mais elle fera l'affaire ici).


je n'en suis pas certaine. A mon sens seul Bardamu l'a dit explicitement. Mais si tous sont d'accord là-dessus, tant mieux, alors on peut commencer à se concentrer sur les conséquences d'une telle absence de potentiel. Or ce que tu écris ci-dessous laisse plutôt penser qu'on en n'est pas encore là ... . Disons déjà qu'à mon sens la formule n'est ni stupide ni vague, mais tout simplement révolutionnaire. Seulement cela, on ne le voit que lorsqu'on en explore systématiquement toutes les conséquences. Ce que Sévérac a fait (seulement, je ne peux pas commencer à citer tout son livre, ce que tu comprendras aisément).

Durtal a écrit :Tu peux quand même avoir la bienveillance de nous faire crédit d'être capable d'avoir saisi que ces deux informations: "Dieu est chez Spinoza pure actualité" et "Dieu chez Spinoza est tout le réel ( et rien que le réel)" entraînent la conséquence que "chez Spinoza tout ce qui est réel est actuel et tout ce qui est actuel est réel". ( désolé pour la parodie, j'ai pas pu m'empêcher)


oui oui, pas de problème.

Que Dieu soit pure actualité est déjà le cas chez Aristote. Ce qui est moins évident, et même tout à fait nouveau, c'est que Sévérac montre que cela vaut autant pour les choses singulières. C'est là qu'on obtient deux interprétations très différentes d'une situation comme "savoir chanter sous la douche", ou, si tu préfères, "savoir nager".

Durtal a écrit :Le problème n'est pas celui là: le problème est que Spinoza, ne peut pas faire l'économie de la notion d'un devenir et à plus forte raison puisque c'est l'objectif que poursuit l'Ethique, d'un "devenir actif". Ce qui étant donné ses présupposés métaphysiques, pose un problème qu'il est interessant de formuler et de tenter de résoudre.


le problème que Sévérac pose, après avoir démontré que même au niveau des choses singulières il n'y a pas de potentiel, c'est: comment penser le devenir actif sans référer à la notion de potentiel?

Durtal a écrit :Et c'est ça la problématique de Severac, il n'invente rien quant au problème lui même, son invention propre ( à savoir l'effectivité de la fiction) concerne la solution de ce problème, mais il n'entend pas du tout nier que spinoza affirme que tout homme a en un sens informel le "potentiel" d'être libre, ce qui lui importe est la façon dont on peut comprendre la coexistence de ce genre d'énoncés ( que Spinoza produit! ça ne sert à rien de le nier! ) avec des présupposés métaphysiques apparemment incompatibles avec eux.


d'abord, Sévérac le nie explicitement (voir la citation ci-dessus, et si cela ne suffit pas, ci-dessous). Si tu penses que Spinoza produit des énoncés genre "tout homme a le potentiel d'être libre", serait-il possible d'en donner un exemple?

Sévérac a écrit :Dire, comme le fait le début du scolie de E, V, 39, que les corps humains sont aptes à un très grand nombre d'effets, et que partant ils peuvent être d'une nature telle qu'ils se rapportent à des esprits très intelligents, ce n'est pas à proprement parler introduire du possible, ou du potentiel, dans la pensée du devenir actif humain.


Durtal a écrit :Donc à la limite ton usage de Severac dans cette histoire serait intéressant et productif, dans le cadre de discussions sur les différents types de solutions que l'on peut apporter à ce problème, mais ici on n'en est même pas là, puisque ta façon de faire, consiste simplement à nier en bloc, contre une quantité invraisemblable d'évidences textuelles du contraire, (dont la préface de E5, et le prologue du TIE ne sont pas les moindres) que Spinoza parle effectivement d'un état de la nature humaine dont il suppose à l'évidence, qu'elle n'est pas donnée, et relativement à laquelle il ne suffit pas d'être simplement un membre de l'espèce humaine pour la posséder et l'exprimer en acte.


la question est de savoir quel statut donner à ce qui n'est pas encore. Celui d'un potentiel? Sévérac est parmi ceux qui montrent que non, cela est inconcevable d'un point de vue spinoziste. Il faut donc s'y prendre autrement.

La "quantité invraisemblable d'évidences textuelles" à mon sens (c'est-à-dire jusqu'à preuve du contraire) n'existe donc que dans l'esprit de celui qui lit Spinoza déjà avec des lunettes qui injectent partout du potentiel.

Durtal a écrit :Ta façon de procéder revient à simplement annuler par avance le problème philosophique que cela pose et ce qui fait tout l'intérêt de cette question.


non, je crois que tu te trompes (mais tu me convaincras peut-être de l'inverse). Sévérac (et d'autres) nous obligent de commencer à poser le problème lui-même en d'autres termes, c'est-à-dire, encore une fois, sans se référer à la notion de potentiel.

Durtal a écrit :Tu veux faire valoir une partie de la vérité, comme le tout de la vérité, quitte à soutenir des choses invraisemblables et à faire enrager les gens qui éventuellement pourrait être disposés à discuter avec toi si tu étais simplement un peu plus fine, et "sensible" dans ton approche des problèmes.


argument ad hominem, donc, comme le disait déjà Cicéron, tout à fait "externe" au sujet en discussion, bref argument qui n'en n'est pas un, au sens où il n'apporte rien (que tu "assumes" les ad hominem ou non n'y change évidemment rien; on n'est pas en train d'évaluer tes "intentions" ou ta "valeur morale" en tant que personne, il s'agit de ce que fait tel ou tel argument lorsqu'on veut comprendre la vérité concernant le spinozisme).

Si tu veux éviter les "généralités", il faudrait dire en quoi ce que je dis n'est qu'une partie de la vérité, et en quoi j'en ferais le tout de la vérité. Sinon impossible de savoir de quoi tu parles. Puis il va de soi que confondre ce que tu as compris de ce que j'essaie de dire avec mes "intentions", c'est une erreur.
Modifié en dernier par Louisa le 04 oct. 2009, 02:20, modifié 3 fois.


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