Il y a quelques jours, je suis revenu faire un petit tour par ici. En relisant mon dernier message, j'ai trouvé qu'une petite explication ne serait pas forcément malvenue : il ne s'agit évidemment pas de relancer le débat

Je crois maintenant comprendre parfaitement les arguments de Henrique (ou de Spinoza), à tel point que j'ai du mal à les réfuter sans entendre par avance les objections qu'on pourrait me lancer. Je vais quand même essayer de dépasser les cercles vicieux, car si l'erreur de Spinoza est difficile à mettre clairement en évidence (il faudrait réfuter toutes les objections en même temps), elle n'en est pas moins réelle.
La preuve de l'existence de Dieu part du pur concept de Dieu, et prétend prouver grâce à ce concept que Dieu existe. Mais qu'est-ce qui prouve qu'un pur concept peut démontrer l'existence de quoi que ce soit ? Voilà un présupposé sans aucun fondement. Spinoza a confondu le concept et la logique : il a traité l'existence comme une propriété banale, alors que rien ne prouve qu'il ait le droit de le faire. Dire que le chat est jaune (propriété banale), ça ne de sens que si on suppose, au moins virtuellement, que le chat existe (condition sine qua non). Dire que Dieu existe, ça ne de sens que si on suppose, au moins virtuellement, que Dieu existe. Certes, une montagne étant donnée, le concept de montagne suffit à prouver l'existence d'une vallée, mais cela n'est valable que parce qu'on a déjà supposé l'existence de la montagne.
Remarque : j'écarte volontairement les définitions du genre : "j'appelle bidule ce qui existe", car :
- elles prouvent seulement l'existence de "quelque chose" et ne sauraient prouver celle de Dieu
- il ne s'agit pas là d'une preuve purement logique car sa valeur démonstrative ne vaut qu'a posteriori : si rien n'existait, cette définition serait certes sans objet et impossible à prononcer, mais certainement pas absurde. En elle-même, cette définition ne prouve rien.
Sans vouloir partir du présupposé contraire, je ne vois pas par quel miracle un pur concept pourrait impliquer une existence. Comment passer du concept de Dieu à son existence ? L'existence contenue dans la définition de Dieu n'est pas, a priori, l'existence en acte de Dieu. Je crois donc que Spinoza a été victime d'un aveuglement très puissant qui consiste à accorder une confiance absolue au pur concept et à le confondre avec la logique. Bien sûr, il n'est pas assez stupide pour croire que la "licorne existante" existe, mais il donne une mauvaise raison à son inexistence, à savoir : l'incompatibilité entre le concept de "licorne" (qui dépend d'autre chose) et celui de nécessité. Ayant évité cette incompatibilité avec le concept de "Dieu", il croit donc, à tort, avoir éliminé tout obstacle à la démonstration de son existence.
Amicalement,
-Zerioughfe-
