essence et existence; causalité

Questions et débats touchant à la conception spinozienne des premiers principes de l'existence. De l'être en tant qu'être à la philosophie de la nature.
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Messagepar alcore » 03 mai 2009, 13:33

Louisa

En y réfléchissant je crois comprendre ce qui nous sépare

Selon toi, la multiplicité invoquée des substances au début de l'Ethique n'est qu'une illusion qui doit se dissiper dès que l'on a compris qu'il n'y a qu' UN ETRE; alors, on comprend que les attributs ne sont pas en eux mêmes mais en la substance, qu'ils ne sont rien du tout par eux mêmes.

Selon moi, la multiplicité des substances n'est illusoire que si on la conçoit numériquement, mais dès que l'on pense cette multiplicité comme infinie actuellement alors on comprend aussi que ces substances sont relativisées, non par rapport à une chose extérieure, mais par rapport à cette multiplicité réelle. Ils conservent leurs propriétés mais elles changent de sens: elles ne sont plus propriétés de choses, mais des expressions.

La difficulté dans ta lecture c'est d'éviter que les attrbuts ne deviennent des modes. En effet, nulle part Spinoza neparle d'êtres qui seraient en autre chose tout en étant conçus par eux mêmes. Soit en soi et conçu par soi, soit non. Il n'y a pas d autres possibilités. D'où l'erreur de Deleuze.
si les substances initiales sont des fausses substances alors tout le début de l'Ethique devient hypothétique et je ne comprends plus.

La difficulté dans ma lecture c'est de comprendre ce qui fait que les attributs ne sont PLUS des substances au sens strict, puisqu'elles ne sont pas des êtres.
Selon moi, cette difficulté se résout quand on comprend que ce qui est en question c est le statut du multiple.
Oui bien sûr il n'y a pas DES êtres, puisque la multiplicité réelle et actuelle est infinie, donc transnumérique.
En même temps que l'on conçoit l'infini comme transnumérique on conçoit son unicité (comme non-un)
Rien n'empêche que Dieu soit multiple et unique. Un attribut ne sait rien des autres, il est "en soi", ce qui le relativise c'est qu'il est un PARMI une infinité d'autres, et qu il n'est pas la raison de cette infinité qui en ce sens lui est extérieure.
Donc à mes yeux ce qui relativise l'attribut ce n'est pas le fait qu'il soit dans la substance (comme dans autre chose), mais le fait qu'il soit dans l'"infinie multiplicité et cela suffit à fonder l'unicité de la substance par delà tout UN; cela suffit aussi à énoncer qu'il y a une infinité d'attributs sans qu'on puisse les distinguer numériquement, car ils sont tous "ENSEMBLE".
les attributs seraient des substances si et ssi l'un pouvait exister sans les autres de sorte que les autres seraient produits. Mais comme ils sont tous ensemble, simultanément, ils sont DE FAIT relativisés par là.

Enegoid
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Messagepar Enegoid » 03 mai 2009, 18:54

En connexion avec le festival conceptuel proposé par Alcore dans les discussions en cours, il m’est venu une interrogation basique (de chez basique) sur la construction Spinozienne de la substance et des attributs. Cette interrogation basique est : « Comment une substance peut-elle avoir plusieurs attributs ?

J’explique :

Un attribut est « perçu (par l’entendement) comme constituant l’essence de la substance ».

Définition de l’essence donnée en ETII D2 :

Ce qui appartient à l'essence d'une chose, c'est ce dont l'existence emporte celle de la chose, et la non-existence sa non-existence ; en d'autres termes, ce qui est tel que la chose ne peut exister sans lui, ni lui sans la chose.

Donc, si je pose l’attribut, j’ai la substance, et si je pose la substance, j’ai l’attribut.

Application : je pose la pensée (sans l’étendue) donc j’ai la substance. Mais comme je n’ai pas posé l’étendue (ou tout autre attribut X), je n’ai pas la substance. Contradiction.

La substance a une infinité d’attributs. Je suis bien incapable de dire quoique ce soit sur l’attribut X que je ne connais pas. Ne pouvant poser l’attribut X, qui constitue l’essence de la substance je ne peux pas concevoir la substance.
De plus, il est clair qu'aucune définition conceptuelle de la substance ne me donne un concept clair de l'attribut X.

Encore un coup tordu de la notion d’essence ?

Merci à toute bonne âme de m’aider à sortir de cette ornière…
(E1p10 scol me paraît peu convaincant)

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Messagepar alcore » 03 mai 2009, 19:53

Enegold

La difficulté est bien réelle.
Voici quelques éléments de réponse
a) Descartes distinguait 2 choses: l'attribut comme principe d'intelligibilité de la substance comme principe d existence. L'attribut c'est ce qui fait connaître une substance, mais la substance EST encore autre chose que nous en connaissons; voilà pourquoi Descartes pouvait dire: il y a de la pensée, il y a de l'étendue, il y a Dieu et je me garde bien de dire quelle est la substance "en soi".

Spinoza connaît cette position. C'est pour cela qu'au début il examine deux pistes

a) l'attribut ne fait que qualifier une substance, dans ce cas la substance est en reste par rapport à la qualification.
Dans ce cas, dit Spinoza, rien ne permet de distinguer une substance d'une autre; ergo il n'y en a qu'une. Mais c'est une façon trop simple de parvenir à l'unité de la substance, d'où:

b) admettons que l'attribut ne soit pas seulement principe d'intelligibilité mais encore prinicipe ontologique. Conséquence: l'attribut que je CONCOIS est aussi un constituant interne de la substance conçue. Dans ce cas impossible de distinguer une substance de son ou ses attributs. On devra toujours penser le couple substance-attribut.

Explorons cette voie dit SPinoza.
Que s'ensuit il ?
on doit admettre une pluralité de substances avec chacune son ou ses attributs.
Chacune existe en soi, cause de soi, infinie, etc.

Donc là normalement Spinoza devrait conclure: il y a une substance pensée, une substance étendue, et d'autres si on veut; bref il devrait conclure au pluralisme et cela sur la base de son concept de substance.
rien dans le concept de substance n'implique son unicité (son infinité oui mais il y a plusieurs iinfinis)

A ce point, Spinoza procède à un coup de théâtre : il sort Dieu de son chapeau.
Son raisonnement est alors le suivant: parmi toutes les substances qui existent il y en a une, qui s'appelle Dieu, et qui est absolument infinie.
Notez bien que, en ce point, rien ne démontre que Dieu est seule substance; au contraire il y en a plein, seulement on dit: il y en a une qui est absolue.
La suite consiste à dire: si Dieu est substance absolument infinie alors toutes les autres doivent partager leur attribut avec lui, sinon Dieu serait pas vraiment absolu.
Donc toutes les autres substances sont en réalité des attributs de Dieu et il n'y a qu'une substance.
ouf !

On est parvenu au même résultat qu'en Eth,I, 5, sauf qu'on est parti de l'identification de l'intelligible et de l'ontologique et que l'unicité est alors plus difficile à établir.

Certains comme Alquié disent alors la chose suivante:
soit la substance absolue est incohérente, un bric à brac confus
soit Spinoza est contraint d'admettre un minimum de transcendance de la substance par rapport à ses attributs, comme le faisait déjà Descartes. Et donc nous revenons à Descartes: l'attribut est un principe d'intelligibilité et la substance est inconnaissable.
C'est une solution comme une autre.

Pour ma part, je dirai que chaque attribut reste un constituant de la substance; mais comment sait on qu'il y en a plusieurs, et même une infinité ?
réponses possibles :
a) on le sait parce qu'on est humain et qu'on est déjà 2.
Mauvais réponse, car l'homme n'existe pas en Ethique I !
b) chaque attribut sait qu'il n'est pas seul.
Non, car il est infini en son genre, et ne peut rien connaître de ce avec quoi il n' a rien en commun
c) il existe un Dieu extérieur à tous les attributs et qui contemple leur infinie diversité, car lui seul le peut ! C'est la thèse d'Alquié.
y en a t il une autre?
d) Dire comme Brunschwicg que l'identité est celle d'un ordre intelligible, c'est chercher dans la pensée leprincipe de l'unité spirituelle de Dieu (thèse spiritualiste intellectualiste); thèse fausse puisqu'elle revient à privilégier l'attribut pensée. Ou alors il faudrait admettre une SURPENSEE au dessus de la pensée. Pourquoi pas ? Mais alors Spinoza est idéaliste.
e)La substance n'est pas une du tout; on ne peut pas parler d'unité, au mieux d'unicité, et cette unicité est le strict corrélat de l'infinie infinité des attributs. On ne doit pas chercher l'unité, ni même l'union car il n'y en a pas. L'attribut est une détermination interne de la substance, cad d'un multiple. Du coup le problème du rapport un-multiple disparaît puisque la substance est unique parce qu'elle n'est jamais une.
Chaque attribut dans ce cas reste substantiel (sans être une substance), et ce qu'on appelle l'ETRE absolument infini, n'est qu'un motpour désigner l'infinie multiplicité des attributs substantiels.

Voilà ce que je peux en dire pour le moment

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Messagepar hokousai » 03 mai 2009, 23:36

A Alcore

Spinoza écrit ( axiome 2) ""ce qui ne peut se concevoir par autre chose doit se concevoir en soi ""
Certes , mais quid de ce qui ne peut se concevoir par autre chose ?

Spinoza nous dit qu’une pensée est bornée par une autre pensée .
La question est : est-ce qu’une pensée de l’infini est une pensée infinie ?
Ou comment , au cas où une pensée serait infinie , comment retrouve- t-elle la finitude ? Une pensée infinie n’est ( théoriquement ) pas bornée , comment par quel processus de cause à effet retrouve –t-elle des bornes ? Génération spontanée ?

Ou bien cette pensée de l’infini n’est pas infinie et c’est se payer de mots que de parler d’un rapport à l’ en soi qui serait d’une autre nature que celle du rapport à l’ en autre chose .Il est de plus évident que le concept de rapport introduit une détermination .


Penser l’indétermination est logiquement possible ce qui ne signifie pas que la pensée qui pense l’indétermination est indéterminée .
Si les choses qui n’ont rien de commun entre elles ne peuvent se comprendre l’une par l’autre ,force est d’avouer que le commun entre une pensée indéterminée et une pensée déterminé supposerait que nous ayons l’expérience d’une pensée indéterminée sans quoi la compréhension du commun est impossible et ces pensée n’ ayant rien de commun ne peuvent pas se comprendre .

Conclusion, de mon point de vue on ne comprend pas ce qu’ est une pensée indéterminée faute d’expérience possible .On a en revanche une forme logique qui peut convenir à ce dont les philosophes ont le désir de parler .

(j’ ai repoussé à plus tard la question de la substance )

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Messagepar alcore » 04 mai 2009, 00:18

hokousai a écrit :A Alcore

Spinoza écrit ( axiome 2) ""ce qui ne peut se concevoir par autre chose doit se concevoir en soi ""
Certes , mais quid de ce qui ne peut se concevoir par autre chose ?
)


Spinoza dit plutôt que ce qui ne peut être conçu par autre chose, doit être conçu PAR SOI

l'en soi est le corrélat du concept qui se forme par lui même.
Mais Spinoza introduit une tournure négative et une impuissance : le concept par soi est la limite d'une puissance. Le concept par soi c'est que je ne PEUX pas former à partir d'un autre. Etrange formulation qui appellerait un commentaire. En tt cas cela suppose la pensée comme attribut, et non comme mode ou phénomène.

hokousai a écrit :Spinoza nous dit qu’une pensée est bornée par une autre pensée .
La question est : est-ce qu’une pensée de l’infini est une pensée infinie ?
Ou comment , au cas où une pensée serait infinie , comment retrouve- t-elle la finitude ? Une pensée infinie n’est ( théoriquement ) pas bornée , comment par quel processus de cause à effet retrouve –t-elle des bornes ? Génération spontanée ?

)

une pensée peut être limitée par une autre pensée, mais non pas par sa propre essence, l'attribut qu'elle enveloppe.
La pensée absolue est ce qui explique que je pense CECI, et non seulement que je pense en général (EthII,1).
La pensée n'est donc pas indéterminée, elle enveloppe et produit toute détermination.
La perception que j'ai de cette table par ex est une pensée produite par Dieu dans ses moindres détails. C'est aussi un corps produit par l'attribut Etendue, c 'est vrai.
Donc la pensée, parce qu'elle est infinie, produit ce qu'il y a de plus singulier dans chacune de mes pensées; Spinoza rejette tout mécanisme empiriste, réaliste. Ce n'est pas la donnée d'un objet singulier qui expliquerait la singularité de mes pensées. Non. La seule chose qui soit donnée à la pensée, c'est la puissance infinie de penser, et comme elle est infinie mes pensées sont objectives par là mêmes.
Mais cet infini n'est pas plus pensée qu'étendue, ou aussi bien l'un que l'autre. Ne faisons pas de l'infini simplement une idée ! c'est aussi un être actuel.
La pensée infinie n'a pas à retrouver le fini, puisque l'infini (qui est dans l'en soi et s'exprime dans la pensée comme dans l'étendue) s'explicite, se complique jusque dans tes moindres pensées singulièrres, et c'est en cela qu'il est infini.
Il y a quelque chose de transpsychologique qui s'exprime dans tes pensées, même les plus imaginatives, même les rêves. et nous pouvons former le concept de l'infini, tout en étant fini, pour cette raison sinon il serait impossible de penser l'infini. L'infini, dans l'en soi, s'exprime dans chacune de mes pensées finies, et je le découvre en chacune comme condition de la passivité de l'objet perçu. Ce qu'il y a de passif dans la perception vient, non du fini, mais de la puissance de l'infini qui s exprime par devers moi dans mes perceptions !
Je perçois cette table, cela signifie: l'infini, dans l'en soi, s'exprime dans la pensée absolue, et donc aussi mon âme, qui, parce qu'elle est liée à un corps ne peut pas percevoir cette table dans sa complexité infinie;
Alors il y a deux choses:
a) la puissance infinie du penser qui produit le mode en sa singularité, qui elle aussi enveloppe l'infini
b) moi qui ne perçoit pas tout cet infini dans l'objet fini de ma perception, à cause de quoi ? de ce que mon âme a pour objet un corps ? il le semble
Peut être faut il donc lier deux choses: lapassivité liée à la puissance infinie du penser qui dépasse la finitude de mon âme (fondement de lapassivité dans l'en soi de la pensée) et la passivité liée à la présence d'un corps dont mon âme est particulièrement l'idée.


hokousai a écrit :Ou bien cette pensée de l’infini n’est pas infinie et c’est se payer de mots que de parler d’un rapport à l’ en soi qui serait d’une autre nature que celle du rapport à l’ en autre chose .Il est de plus évident que le concept de rapport introduit une détermination .
)


A mon sens l'attribut n'est pas DANS l'en soi comme le mode est dans autre chose, il n'y a pas de rapport de l'attribut à la substance.
En fait, l'attribut, ici la pensée infinie vit son être sur le mode, non d'une chose-qui-est, mais sur le mode de: j 'exprime la substance, et la substance elle-même n'est pas au sens de: chose-qui-est, mais au sens de: je m'exprime dans l'attribut.
Bref à mon sens Spinoza veut nous dire qu'il ne faut pas penser l'être de la substance et des attributs comme des choses mortes; le fond de l'être est expression.

Mais je crois comprendre ta question. si la pensée de l'infini n'est pas elle même infinie, cad si MA pensée n'est pas en même pensée DE l'être même alors ma pensée n'atteint pas le coeur de la substance et du coup je n'ai aucun rapport à l'en soi.
Est cela ?

Ce n'est pas nous qui formons la pensée des attributs, en Eth I l'homme n'existe pas. Ce sont les pensées de Dieu avant qu'il y ait un monde et un homme. C'est Dieu qui forme le concept de l'en soi qu'il est, justement parce qu'il est expressif.
Dieu est "en soi", et ce qu'il est "en soi", s'expose dans le concept "par soi", et c'est cette connexion de l'en soi et du concept qu 'est la substance.
Cela veut dire que la substance n'est pas l'en soi vide des Eléates; elle s'exprime, se perçoit elle-même; c'est là la VIE de l'absolu dont je parlais.
Ensuite, le Concept n'est pas un abstrait, il a une base ontologique. Ce n'est pas Moi qui conçoit, qui pense, etc. L'en soi n'est que le corrélat. La substance absolue suscite son propre concept, concept absolu.
Cela ne veut pas dire non plus que le concept absolu soit TOUT; justement non: le concept est absolu dans la mesure où il est concept de l'en soi. La pensée infinie produit d'elle même le concept de l'en soi dont son infinité est l'expression. L'absolument infini est sur le mode du se conceptualiser-dans-la pensée infinie.
La pensée infinie forme tte seule LE Concept, et ce faisant, atteste qu'elle est aussi DE l'infini, de l'en soi. L'"infini de la pensée atteste un infini extra mental; la liberté du concevoir ouvre à l'en soi pré pensé.

hokousai a écrit :Penser l’indétermination est logiquement possible ce qui ne signifie pas que la pensée qui pense l’indétermination est indéterminée .
Si les choses qui n’ont rien de commun entre elles ne peuvent se comprendre l’une par l’autre ,force est d’avouer que le commun entre une pensée indéterminée et une pensée déterminé supposerait que nous ayons l’expérience d’une pensée indéterminée sans quoi la compréhension du commun est impossible et ces pensée n’ ayant rien de commun ne peuvent pas se comprendre .
Conclusion, de mon point de vue on ne comprend pas ce qu’ est une pensée indéterminée faute d’expérience possible .On a en revanche une forme logique qui peut convenir à ce dont les philosophes ont le désir de parler .

(j’ ai repoussé à plus tard la question de la substance )

L'indéterminé, en tant qu'en soi, infini, n'est pas le vide, le néant qui lui aussi indéterminé. Le néant est obtenu par élimination de tout fini, donc à partir du fini, donc c'est un concept limite qui n'a de sens que relativement à la finitude, pour en penser l'exténuation.
L'infini indéterminé, la substance est indéterminé autrement.
Le Concept qui la saisit n'est pas l'exténuation du fini.
C'est par un saut, d'un coup que l'on pense l'infini.
Alors, au niveau de la substance je ne crois pas qu'il y ait de déterminations; ce sont les attributs qui apportent les déterminations, mais sur fond de cette indétermination préalable, de ce saut.
Spinoza veut éviter que l'on croit que les attributs soient ds déterminations limitations, et que l'indéterminé soit l'illimité.
La vraie indétermination s'obtient par un acte pur et absolu; le pur indéterminé en ce sens est LE Concept et l'ensoi; je ne vois pas comment on pourrait ici maintenir une détermination du concept face à l'en soi.
La détermination vient avec l'attribut qui n'est pas CONCU, mais PERCU.

MAis c 'est vrai tout ceci mériterait un traitement à part entière.

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Messagepar hokousai » 04 mai 2009, 17:08

A Alcore

Excusez le lapsus (que je dirais impardonnable puisque j’avais le texte sous les yeux)
Certain lapsus s’explique ,si j’ai traduit le "par soi" en un » en soi « c’est sans doute que je le comprends ainsi . C' est bien parce que je ne vois là qu’une activité de pensée que ma langue a fourché .
Ce qui est conçue par soi est conçu comme existant en soi .(c’est ce qu’ on a reproché à Spinoza)

Le per se renvoie certes à une médiation (concevoir est une activité de pensée ) pas l’ être. La distinction du par soi et de l’en soi se justifie .
Mais Spinoza ne pense t- il pas que la substance se conçoit comme ce qui est en soi ? Je voudrait que vous me disiez si la reformulation malencontreuse « ce qui ne peut se concevoir par autre chose doit se concevoir en soi(!) « contrarie in fine sa définition de la substance car ce qui conçoit par soi n’est il pas conçu comme ce qui est en soi .

Je conteste qu' il puisse se former des concepts par soi mais je ne conteste pas que nous ayons un concept de l’en soi .Les corrélats des concept (corrélats dont vous me parlez) sont théoriques , ainsi du concept de néant il faudrait inférer la réalité ( l’esse) du néant .Pour moi ils sont théoriques ,je ne déduis pas du concept de substance (ou de l’idée ) l’existence hors de l’intellect de la substance .Tout comme je ne déduis pas de l'idée de matière (idée confuse) l’existence de la matière hors de l’intellect .

Mais je crois comprendre ta question. si la pensée de l'infini n'est pas elle même infinie, cad si MA pensée n'est pas en même pensée DE l'être même alors ma pensée n'atteint pas le cœur de la substance et du coup je n'ai aucun rapport à l'en soi.
Est cela ?

Oui cest cela .

Vous défendez bien Spinoza ,ce qui est appréciable , je ne suis pas véritablement spinoziste .
Une pensée absolue ? Certes cette idée est séduisante ,elle fut celle d’Averroès violemment contesté par Thomas d Aquin .
Mais à la pensée (ce que nous appelons pensée ) nous n’avons qu’un accès humain , c’est une manière d’ exister projetée à l’infini , dans l’absolu si cela est possible , en Dieu ( lequel acquiert de la consistance par et en cette projection ).
Puisque nous pensons il faudrait que Dieu pense .
Comment ne pourrait- il pas penser puisque la pensée est considéré comme ce que nous avons de meilleur ?

Je suis très dubitatif sur cette projection dans l’absolu de ce que nous avons nous même bien du mal à éclaircir , parce qu’après tout penser est plutôt difficile à objectiver en une connaissance qui ne soit pas si immédiate qu’elle nous aveugle plus qu’ elle nous éclaire .

au plaisir de vous lire
hokousai

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Messagepar Sinusix » 04 mai 2009, 17:54

Bonjour,

alcore a écrit :Enegold
La difficulté est bien réelle.

Nous en étions conscients

alcore a écrit :Voici quelques éléments de réponse

Relisons F. Alquié, c'est un peu plus clair

alcore a écrit :Explorons cette voie dit SPinoza.
Que s'ensuit il ?
on doit admettre une pluralité de substances avec chacune son ou ses attributs.
Chacune existe en soi, cause de soi, infinie, etc.
A ce point, Spinoza procède à un coup de théâtre : il sort Dieu de son chapeau.


C'est un coup de théâtre dans l'ordre rédactionnel, mais dont l'objectif à terme est cause des incohérences relevées par nombre de commentateurs entre les propositions 1 à 8 et 9 à 15. Mais il a tellement besoin de conserver ce qu'il avait dans son chapeau pour essayer de résoudre son problème peut-être principal (le sien), à savoir son salut.

alcore a écrit :On est parvenu au même résultat qu'en Eth,I, 5, sauf qu'on est parti de l'identification de l'intelligible et de l'ontologique et que l'unicité est alors plus difficile à établir.

Certains comme Alquié disent alors la chose suivante:
soit la substance absolue est incohérente, un bric à brac confus
soit Spinoza est contraint d'admettre un minimum de transcendance de la substance par rapport à ses attributs, comme le faisait déjà Descartes. Et donc nous revenons à Descartes: l'attribut est un principe d'intelligibilité et la substance est inconnaissable.
C'est une solution comme une autre.


En tout état de cause, sans vouloir donner raison à F. Alquié, je fais observer qu'il existe bien, dans l'Ethique, entre les attributs/substances, un principe qui les dépasse individuellement, c'est le parallélisme de E2P7. Qu'est-ce en effet que le parallélisme sinon un isomorphisme (pardon de rester sur ces termes mathématiques) entre les attributs, présent de toute éternité, lequel institue une réplication infinie entre les modes desdits attributs (dont nous ne connaissons que la réplication idée/objet). Il y a donc bien, en Dieu, union de substances et loi d'union. Compte tenu des définitions 3 et 4, des propositions 1 à 8, comment concevoir la substance unique autrement que constituée ab initio des attributs, sauf à devoir concevoir effectivement une action transcendante d'union desdites substances/attributs avec imposition de "fonctionnement" orchestré par le parallélisme.

alcore a écrit :Pour ma part, je dirai que chaque attribut reste un constituant de la substance; mais comment sait on qu'il y en a plusieurs, et même une infinité ?
réponses possibles :
a) on le sait parce qu'on est humain et qu'on est déjà 2.
Mauvais réponse, car l'homme n'existe pas en Ethique I !


Si, l'homme existe, en Ethique I : c'est l'auteur lui-même, Spinoza, qui ne peut sortir, par le seul langage des mots, quelle que soit la rigueur de ses contorsions démonstratives, de la logique binaire des représentations séculaires d'âme et de corps. Je pressens personnellement que l'invention de l'infinité des attributs (dont nous ne connaissons dérisoirement que deux, ce qui ne nous interdit pas de penser, malgré cela !, à la totale intelligibilité de Dieu/Nature) a pour objectif principal de justifier la sortie du dualisme (Le problème par excellence du sensible et de l'intelligible) en banalisant la place de ces deux attributs au sein de l'infinité des autres.

alcore a écrit :b) chaque attribut sait qu'il n'est pas seul.
Non, car il est infini en son genre, et ne peut rien connaître de ce avec quoi il n' a rien en commun


Réflexion bizarre : le seul attribut dont un mode peut prétendre savoir quelque chose est la Pensée !

alcore a écrit :c) il existe un Dieu extérieur à tous les attributs et qui contemple leur infinie diversité, car lui seul le peut ! C'est la thèse d'Alquié.
y en a t il une autre?


Exit Spinoza : donc ne m'intéresse pas.

alcore a écrit :d) Dire comme Brunschwicg que l'identité est celle d'un ordre intelligible, c'est chercher dans la pensée leprincipe de l'unité spirituelle de Dieu (thèse spiritualiste intellectualiste); thèse fausse puisqu'elle revient à privilégier l'attribut pensée.


En tout état de cause, l'attribut Pensée a bien un statut privilégié chez Spinoza (au delà du parallélisme intra-cogitatif cher à M. Guéroult), dont il faudra également analyser certains aspects troublants (pour moi en tout cas), au regard notamment du support imaginatif de toute pensée et de nos connaissances neurologiques d'aujourd'hui (le jeu des images/empreintes est une chose, la construction conceptuelle en est une autre, laquelle transite néanmoins par des images, celle des mots employés - d'où le problème de l'âme et du corps).

alcore a écrit :
Ou alors il faudrait admettre une SURPENSEE au dessus de la pensée. Pourquoi pas ? Mais alors Spinoza est idéaliste.


Arrêtons le massacre !

alcore a écrit :e)La substance n'est pas une du tout; on ne peut pas parler d'unité, au mieux d'unicité, et cette unicité est le strict corrélat de l'infinie infinité des attributs. On ne doit pas chercher l'unité, ni même l'union car il n'y en a pas. L'attribut est une détermination interne de la substance, cad d'un multiple. Du coup le problème du rapport un-multiple disparaît puisque la substance est unique parce qu'elle n'est jamais une.
Chaque attribut dans ce cas reste substantiel (sans être une substance), et ce qu'on appelle l'ETRE absolument infini, n'est qu'un motpour désigner l'infinie multiplicité des attributs substantiels.


Tout cela relève pour moi du jeu de mots.

alcore a écrit :Voilà ce que je peux en dire pour le moment


Il y a un f) : Le langage des mots (six mille langues différentes) n'est pas le langage symbolique adéquat pour penser le Monde, car il nous enferme dans les structures a priori de notre entendement. Si l'intelligible est isomorphe au réel, son symbolisme est universel et univoque, génétiquement déductif, etc. Il doit en outre permettre de déboucher sur une pratique humaine.
Faute de quoi, nous brassons indéfiniment du vent pendant que H1N1 progresse.

Amicalement

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Messagepar alcore » 04 mai 2009, 19:11

hokousai a écrit :Je conteste qu' il puisse se former des concepts par soi mais je ne conteste pas que nous ayons un concept de l’en soi .Les corrélats des concept (corrélats dont vous me parlez) sont théoriques , ainsi du concept de néant il faudrait inférer la réalité ( l’esse) du néant .Pour moi ils sont théoriques ,je ne déduis pas du concept de substance (ou de l’idée ) l’existence hors de l’intellect de la substance .Tout comme je ne déduis pas de l'idée de matière (idée confuse) l’existence de la matière hors de l’intellect .


C'est là le point important.
Tu penses que la substance est en soi mais qu'il faut en former le concept à partir d'autre chose, des modes je suppose.
j'étends l'objection.
Spinoza ne dit il pas que toute âme est l'idée d'un corps ? Il semblerait que nous ne puissions avoir l'idée de Dieu qu'en tant que nous sommes l'idée d'un corps.
Ce qui nous renvoie en fait à Ethique 5 où Spinozap développe la thèse suivante: mon âme est non seulement l idée d'un corps mais aussi l idée de cette idée, laquelle est en Dieu. Donc l'âme est aussi l idée de Dieu en tant qu idée de l'idée du corps, et c'est seulement par là qu il lui serait possible de concevoir la substance. chacun peut penser son âme en tant qu'elle est pensée en Dieu, par Dieu. autrement dit, il y a deux facons d appréhender notre âme, soit en tant qu'idée d objet, soit en tant qu idée de cette idée. Ce qui signifie qu'il n y a pas de conscience de soi "pure"; la conscience de soi est toujours la conscience de soi d'une conscience d'objet, pr parler comme Hegel.
Donc en ce sens tu as raison: on ne peut pas concevoir la substance comme ça, absolument; notre concept de la substance est liée à la façon dont nous pensons notre âme, idée d'un corps.
Mais cela ne veut pas dire pour autant que notre concept de la substance soit par autre chose. En fait il faudrait faire la genèse de la possibilité du concept de substance.
Je dirais donc:
notre âme est l'idée d'un corps
mais il est aussi possible de concevoir notre âme en tant qu'elle est une pensée naissant dans l'attribut pensée;
ce faisant nous pouvons former librement des concepts, sans l'intermédiaire de l'imagination (et donc du corps) tout en restant idée de ce corps;
notre âme peut remonter à la source de l'idée du corps qu'elle est et découvrir, justement parce qu'elle est idée de ce corps, l'"origine de cette pensée dans la pensée absolue; d'où le Concept absolu.
A partir de là, l'âme pense ce qui, dans ce concept absolu, fait signe vers ce qui est antérieur à la pensée même. La condition de la pensée, en son infinité, c'est l'en soi. Non plus: JE pense, mais : ça pense en moi, et prendre conscience de cela me fait prendre conscience aussi qu'il y a un en soi de lapensée (un inconscient de la pensée) et donc aussi un en soi tout court.
La possibilité de se libérer de l'imagination, tout en restant idée de ce corps, nous permet de concevoir ce qui, dans la pensée rend possible le concept. Encore une fois: le Concept pur reste lié à l'idée du corps. L'élement expressif, pré imaginatif de la pensée fait signe vers l'en soi qui rend possible le mouvement même de la réflexion (de l'idée de l'idée).
Donc en même temps que je suis idée de ce corps, j'ai l idée de cette idée, mais en fait ce n'est pas moi qui aie cette idée de l'idée; je comprends alors qu'il y a de l'en soi dans ma pensée et que cet en soi précède ma pensée et fait signe, dans la pensée, vers l'en soi qu'elle exprime, la substance.
ouf !
il faudrait thématiser tout cela intégralement.

hokousai a écrit :Vous défendez bien Spinoza ,ce qui est appréciable , je ne suis pas véritablement spinoziste .
Une pensée absolue ? Certes cette idée est séduisante ,elle fut celle d’Averroès violemment contesté par Thomas d Aquin .
Mais à la pensée (ce que nous appelons pensée ) nous n’avons qu’un accès humain , c’est une manière d’ exister projetée à l’infini , dans l’absolu si cela est possible , en Dieu ( lequel acquiert de la consistance par et en cette projection ).
Puisque nous pensons il faudrait que Dieu pense .
Comment ne pourrait- il pas penser puisque la pensée est considéré comme ce que nous avons de meilleur ?

Je suis très dubitatif sur cette projection dans l’absolu de ce que nous avons nous même bien du mal à éclaircir , parce qu’après tout penser est plutôt difficile à objectiver en une connaissance qui ne soit pas si immédiate qu’elle nous aveugle plus qu’ elle nous éclaire .

au plaisir de vous lire
hokousai


Je ne crois pas qu'il faille poser le problème en termes psychologisants.
L'argumentation de Spinoza en Eth II, 1 est plus pertinente: c'est au coeur de la pensée finie que je découvre la nécessité de poser la pensée comme absolue !
Voici comment.
Nous avons des pensées déterminées (finies) de ceci ou cela.
Partant de là on pourrait dire: ce sont des phénomènes psychologiques, et expliquer la détermination par le physicalisme (ce sont les choses qui limitent notre pensée du dehors)
DAns cette perspective, vs auriez raison: la pensée absolue n'est qu'une pensée limite, et en réalité toutes nos pensées sont des productions cérébrales.
Ce qui ne va pas dans cette vue, c'est le dogmatisme de la chose. On prétend partir de choses en soi qui limiteraient la pensée du dehors, mais que sont ces choses ?
ce sont des choses perçues, ou connues.
Comment naissent elles pour nous ?
De ce que notre imagination transforme des informations en choses réelles. on ne peut donc partir des choses puisque ce sont des idées !
Une fois le réalisme dogmatique rejeté, que reste t il comme issue ?
on ne peut pas expliquer le contenu déterminé, fini de nos pensées en invoquant un contenu déterminé, fini des choses pensées.
Ce qui est déterminé doit s 'expliquer autrement; il faut chercher la source de la détermination dans l apensée elle-même.
Là deux possibilités:
a) le cogito: mes pensées sont finies parce que Je suis fini, intrinsèquement
b) la pensée se finitise en elle même et le cogito n' est lui même qu'une pensée, une idée finie.

Le problème avec le cogito c'est que c'est une finitude trop vague: on ne peut pas expliquer tout le contenu divers avec le moi psychologique, et en plus, ce moi serait lui aussi considéré comme une chose, un point d'appui fixe. C'est le mauvais idéalisme; tout sortirait du moi.

Spinoza dit : si vous penser CECI, si votre pensée est finie, cela ne peut venir ni des choses, ni du cogito; le fini doit être compris comme terme d'un processus de finitisation, de singularisation de la pensée.
Mais alors, du coup, la pensée n'est pas un être abstrait qui viendrait de l'extérieur; la pensée est productrice des pensées dans leur détermination, contenu.
Bien sûr, la pensée est aussi imagination; l'imagination c 'est ce qui explique que je ne peçois pas tout, l'infini en chaque chose (pensée).
Quand je perçois X, c 'est Dieu qui pense en moi; donc je devrais percevoir l'infini, ce qui l'empêche c'est que mon âme, qui est une pensée, est idée d'un corps et par suite, cette circonstance opacifie l'infini et me rend passif par rapport à quelque chose, qui dès lors, m'apparaît comme un corps hors de moi. L'imagination passifie, opacifie, arrête l'expressivité de la pensée.
Et ce point d'arrêt, c'est le fini !
Bien sûr je peux remonter la pente: partant d'une pensée finie, je peux découvrir que sa source, ce qui la produit c'est la pensée, et comme la pensée est un principe PRODUTEUR de la SINGULARITE de mes pensées, elle ne peut pas être quelque chose de psychologique.
Il y a un en soi prélable à la pensée psychologique. Il y a un "en soi" de la pensée DAns la pensée. Et ce que je pense quand je pense correctement c'est ce présupposé en soi de la pensée DAns la pensée.
Ce pourquoi Spinoza dit: toute pensée déterminée enveloppe la pensée infini.
Voilà aussi pourquoi je ne sais que la pensée est un Attribut que parce que j'ai des pensées finies, déterminées ! C'est le fait d'avoir des pensées finies qui atteste de la puissance productrice de la pensée EN SOI.
A partir de là on comprend aussi que la pensée, comme attribut, nous conduise à l'en soi. S'il y a un en soi de la pensée dans la pensée, c'est qu'il y a encore un en soi qui précède la pensée ou dont l'en soi de la pensée est l'expression.
Quand je pense ceci, je pense à partir de la pensée infinie qui se singularise en soi, et donc je pense ce qui, de la pensée, est 'en soi" et exprime la substance forcément
et on revient à la définition de la substance.
Lamoindre pensée finie atteste de la substance et le COncept se forme non à partir de la pensée finie, mais simultanément avec elle.
Je pense quelque chose ET je pense cette pensée comme produite dans la pensée infinie.

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Messagepar alcore » 04 mai 2009, 19:46

Sinusix a écrit :
alcore a écrit :Pour ma part, je dirai que chaque attribut reste un constituant de la substance; mais comment sait on qu'il y en a plusieurs, et même une infinité ?
réponses possibles :
a) on le sait parce qu'on est humain et qu'on est déjà 2.
Mauvais réponse, car l'homme n'existe pas en Ethique I !


Si, l'homme existe, en Ethique I : c'est l'auteur lui-même, Spinoza, qui ne peut sortir, par le seul langage des mots, quelle que soit la rigueur de ses contorsions démonstratives, de la logique binaire des représentations séculaires d'âme et de corps. Je pressens personnellement que l'invention de l'infinité des attributs (dont nous ne connaissons dérisoirement que deux, ce qui ne nous interdit pas de penser, malgré cela !, à la totale intelligibilité de Dieu/Nature) a pour objectif principal de justifier la sortie du dualisme (Le problème par excellence du sensible et de l'intelligible) en banalisant la place de ces deux attributs au sein de l'infinité des autres.


Il faut ici s'entendre.
Personne ne dout que Spinoza soit l'auteur de Ethique I, lui même dit "JE" à plusieurs reprises.
Mais l'homme n'est pas encore possible en tant qu'objet de connaissance dans Eth I. Ce qui rend possible cette connaissance, c'est la validation a priori du champ de l'expérience, validation qui autorisera l'appel à des vérités de fait dans tout le reste de l'Ethique.
La partie I de l'Ethique n'est possible que si d ores et déjà nous nous sommes élevés au dessus de l'imagination. En termes hegeliens : que nous ayons surmonté la séparation sujet-objet et que nous ayons accédé à l'élement du SAvoir, dans lequel la pensée est immédiatement pensée objective, sans médiation consciente. Pour cette raison, la pensée se déploie dans un élément pré conscient, donc in-conscient, qui est l'en soi de la pensée. Dans cet en soi de la pensée, la pensée conçoit objectivement par elle même (alors que je reste idée de mon corps bien sûr) ce qui, de la pensée est expressif de la substance. Autant dire que la substance s'exprime dans la pensée et aussi dans le mode infini, l'entendement infini, dont mon âme est désormais une partie capable de réfléchir sa propre origine.
Donc je ne vois pas de problème: l'homme existe bien puisque je reste idée de mon corps, mais ce n'est pas en tant qu'homme je conçois tout Ethique, c'est en tant que ma pensée se déploie dans l'en soide la pensée.
Le problème est plutôt : comment Spinoza est il arrivé à ce point de vue ?
Il ne nous le dit pas. Hegel là dessus dirait: il manque une phénoménologie, une pédagogie qui conduirait patiemment chaque homme a surmonté l'imagination, l'opposition moi-objet.
Je le répète: le fait que nous ayons atteint le point où la pensée décroche de l'imagination, et nous raccroche à ce qui, de la pensée, prècède MApensée, donc l'en soi de la pensée, ne nous anéantit pas en tant qu'homme. Notre âme reste l'idée d'un corps, tout comme chez HEgel, je reste conscient de moi quand je parcours les pensées de Dieu avant la création du monde et d'un esprit fini (Préface à la Science de la logique).
Sinusix a écrit :
alcore a écrit :b) chaque attribut sait qu'il n'est pas seul.
Non, car il est infini en son genre, et ne peut rien connaître de ce avec quoi il n' a rien en commun


Réflexion bizarre : le seul attribut dont un mode peut prétendre savoir quelque chose est la Pensée !

Oui c'est une façon de parler pour dire que rien dans un attribut ne lui permet de "savoir" qu'il y en a d'autres.
Ceci dit, cette question touche à la prééminence de la pensée sur les autres attributs.
Il semble qu'on ne puisse échapper à une sorte de valorisation de la pensée par rapport aux attributs.

Sinusix a écrit :
alcore a écrit :d) Dire comme Brunschwicg que l'identité est celle d'un ordre intelligible, c'est chercher dans la pensée leprincipe de l'unité spirituelle de Dieu (thèse spiritualiste intellectualiste); thèse fausse puisqu'elle revient à privilégier l'attribut pensée.


En tout état de cause, l'attribut Pensée a bien un statut privilégié chez Spinoza (au delà du parallélisme intra-cogitatif cher à M. Guéroult), dont il faudra également analyser certains aspects troublants (pour moi en tout cas), au regard notamment du support imaginatif de toute pensée et de nos connaissances neurologiques d'aujourd'hui (le jeu des images/empreintes est une chose, la construction conceptuelle en est une autre, laquelle transite néanmoins par des images, celle des mots employés - d'où le problème de l'âme et du corps).


Il faudrait dire où Spinoza privilégie la pensée. En tout cas pas en Eth II qui semble plutôt privilégier le corps.

Aux yeux de Spinoza, il n y a pas de "support imaginatif' de toute pensée si l'on entend par là un fondement, ou substrat, car l'imagination même si elle opacifie, et passifie nos pensées reste expressive, et ce qui est le support, c'est bien l'Attribut Pensée, la pensée infinie.
Toute démonstration de mathématique suppose la pensée infinie, et je ne vois, pour ma part, aucun rapport entre l'idée d'infini (parfaitement définie par Cantor) et un mouvement cérébral.
Leproblème je le vois ici: si l'âme est toujours l'idée d'un corps, où localiser la connaissance du 3eme genre ?
Loin d'ébranler son système par le physicalisme, je chercherai plutôt pour ma part, à sauver l'esprit. Le cerveau c'est le siège de l'imagination; on peut même dire: l'imagination c 'EST le cerveau; mais le cerveau, c'est aussi un produit de l'imagination (en tant que vu). Le cerveau en lui même qu'est il (non pas celui qui est vu) ? je répondrai: pas une chose molle qui recevrait des empreintes. Plutôt: un complexe d'informations. Le corps avant qu'il soit réalisé est un complexe de signes, d'informations;aujourd hui on dirait: un ensemble de probabilités qui ne deviennent actuelles que dans une perception réelle.
La perception actuelle, réelle c'est l'âme; L'âme ne perçoit pas, elle EST le percevoir lui même.

Sinusix a écrit :Il y a un f) : Le langage des mots (six mille langues différentes) n'est pas le langage symbolique adéquat pour penser le Monde, car il nous enferme dans les structures a priori de notre entendement. Si l'intelligible est isomorphe au réel, son symbolisme est universel et univoque, génétiquement déductif, etc. Il doit en outre permettre de déboucher sur une pratique humaine.
Faute de quoi, nous brassons indéfiniment du vent pendant que H1N1 progresse.

Amicalement


Je ne vous suis pas. Comment pouvez vous savoir que notre langage est inadéquat au monde ? Cela supposerait que vous connaissiez ce que le monde EST. Comment juger de l'inadéquation d'une pensée si on n'a pas d'idée adéquate ?
Au mieux, on pourrait dire : le monde 'en soi" on ne sait pas du tout ce que c'est; peut être que notre pensée est adéquate, peut être pas, on n'en sait rien !
Alors oui.
Ca porte un nom: le scepticisme.
idem pr le thème de la fermeture: on ne peut en juger que si l'on est dehors !

Si l'intelligible est isomorphe au réel, son symbolisme est univoque ?
Là encoren qu'en savons nous ?
Soit on le sait, mais alors notre connaissance est adéquate; soit on n'en sait rien, et on ne peut rien dire sur cette question.

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Messagepar hokousai » 04 mai 2009, 22:01

A Alcore

Il me semble que vous substantialisez la pensée (au sens commun de substance) Le divers des idées seraient la production ou des figures d’ un medium commun qui serait la pensée absolue infinie et qui à la limite pourrait demeurer inactive ,en sommeil . Des divers accidents (ou qualites ) vous supposez comme une substance active ( la pensée ) , je ne suppose pas que mes idées soient produites par la pensée (comme le poirier produit des poires )

Le flux de mes idées est discontinue ( le flux conscient ,car régulièrement je perds conscience )
Que puis -je dire des phases non conscientes de ma supposée pensée ? Les philosophes ont estimé qu’ils ne pouvaient rien en dire avant que Freud ne vint ( celui-ci plus ou moins convaincant d’ailleurs )
Que dire avec clarté du flux des idées à demi conscient ? Comment pourrais- je savoir si ça pense en moi ,ou plus exactement si c’est de la pensée qui est en moi , de la pensée au sens où consciemment je la vois se produire ?

Je crois voyez- vous que le Dieu de mon chien ,s’il pouvait parler, n’aurait qu’un attribut : l’odorat .

……………………………………
Vous me dites
Tu penses que la substance est en soi mais qu'il faut en former le concept à partir d'autre chose, des modes je suppose.


Non ,non, je ne pense pas que la substance soit autre chose qu’ une idée assez confuse, encore que l’indétermination comme négation logique du déterminé soit assez claire .Je ne substantialise pas la substance. A vrai dire je ne la crois pas plus fondée que la matière par l’idée de matière .
D’une foret vierge Spinoza essaie de nous faire un jardin à la française. Certes , un jardin à la française , c’est toujours la nature mais la nature revisitée.


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