hokousai a écrit :(...) Un corps peint est vivant s' il est peint au milieu des vivants, si il y est un corps agissant .C'est à l'observateur de reconnaître le contexte .Il n'est d' ailleurs pas si facile aux peintres de représenter un corps mort . (...) Les objets sont placés , ils ont une cause , ils sont pris dans des séries de cause . (...) L'expressionnisme n'est pas une manière plus efficace de représenter la nature que le serait par exemple la peinture de Chardin ( lequel ne peint que des natures mortes ) (...) L'expressionnisme exprime un rythme de métamorphose en faisant référence à la violence ,(...) Un tableau expressionniste ne bouge pas plus qu'une nature morte de Chardin. Représente t-il quelque chose qui bouge plus ?
(...)
Quelle est la vitesse de la métamorphose dans une gravure de Esher( que vous devez connaître )ou bien quelle est la vitesse de croissance d'une plante ?Ou bien plus généralement et peut-être finalement plus parlant. à quelle vitesse le temps passe t il ?
Hokousai
"Reconnaître", "représenter", "les objets sont placés" votre perception de la peinture semble essentiellement figurative, idée-tableau.
L'expressionnisme n'est-il pas au contraire la promotion d'une peinture des affects, des états intérieurs, la figure n'étant pas forcément nécessaire ?
Quand Jackson Pollock pousse la démarche jusqu'à l'"action painting", il n'y a plus "d'objet placé", plus rien à reconnaître, juste un acte de peindre et un effet qui passe ou ne passe pas.
N'est-ce pas finalement l'objectif visé par les artistes, produire un certain effet, que ce soit par une composition classique, un maniérisme, un hyper-réalisme ou autre ?
Quand Michel Ange peint des femmes baties comme des hommes (cf la Chapelle Sixtine), il ne cherche pas à représenter la réalité en tant que figure à reconnaître dans nos habitudes, mais à représenter une certaine face de la réalité. En évitant de donner aux femmes la douceur qui leur est classiquement attribuée, il garde à sa fresque un dynamisme "tout en muscle".
C'est non seulement une bande dessinée religieuse mais aussi une force, un effet qui doit passer chez la plupart des humains qu'ils connaissent ou pas l'histoire racontée.
Je dirais que l'éternité de l'oeuvre est d'une part son éternité propre en tant que production singulière (enveloppant notamment son auteur) et d'autre part en tant qu'elle exprime une certaine notion commune de l'humain, une vérité de l'humain en tant qu'être sensible à la Chapelle Sixtine, vérité qui devient d'autant plus commune que l'oeuvre est grande, tendant à un effet universel.
Comme toute chose, l'oeuvre est vivante, puissante, d'autant plus qu'elle produit un effet, et cela est indépendant de ce qu'elle représente. L'objet de la nature morte n'est pas la vaisselle représentée mais ce "quelque chose" qui fait que la vaisselle a soudain une présence, une expression qui dépasse la banalité "photographique". Non ?
La part d'éternité que détient l'oeuvre d'art est similaire à la part d'éternité que détient notre Mental en tant qu'il enveloppe plus ou moins de réalité, plus ou moins de vérité éternelle.
Ethique de l'art plutôt qu'esthétique : qu'est-ce que provoque telle ou telle oeuvre ? quelle est son action concrète ? celle-ci se dit-elle en rapport au temps ou bien, par exemple pour la chapelle Sixtine, selon ce qu'elle fit à Michel Ange et à un téléspectateur chinois, en dépit des siècles et des distances ?
L'oeuvre ou l'homme comme centres d'action se disant sans relation au temps.