Bonjour,
lors de la première lecture de l'Ethique, j'avais exactement le même sentiment que vous. J'avais donc barré les deux 'externes', dans la version française ET dans la version latine (car dans l'édition qui donne la traduction de Pautrat, le latin mentionne également 'externae', ce qui justifiait bien sûr la traduction).
Or entre-temps, je crois qu'il s'agit d'une erreur de notre part, et qu'il faut bel et bien respecter le latin.
Car si on relit bien le scolie, on voit qu'en fait, Spinoza y énumère TROIS 'classes' d'affects différents:
1. L'Amour et la Haine = JOIE et TRISTESSE qu'accompagne l'idée d'une CAUSE extérieure.
1.a CAUSE EXTERIEURE + OBJET EXTERIEUR:
Les Amours et les Haines dont Spinoza avait parlé jusqu'à présent, étaient tous caractérisés par le fait de se rapporter à des OBJETS extérieurs, dans le sens où nous aimons ou haïssons pe notre voisin. C'est cela qui s'accompagne de l'idée d'une cause extérieure: nous nous imaginons, en plus de rapporter l'Amour à l'objet extérieur qu'est notre voisin, que c'est bien ce voisin lui-même qui a causé l'augmentation de notre puissance, et pas nous-même.
1.b CAUSE EXTERIEURE + OBJET = moi:
Or ici (en III.30), il ajoute une deuxième catégorie d'affects d'Amour et de Haine: il s'agit toujours de Joie et de Tristesse accompagnée de l'idée d'une CAUSE extérieure, mais maintenant, l'objet de l'Amour ou de la Haine n'est plus en dehors de moi-même, car c'est moi même.
GLOIRE (traduire par 'vanité', qui traditionnellement rend le latin 'vanitas', me semble être assez absurde) = l'Amour que je ressens pour moi-même tout en l'attribuant à une cause externe (les autres qui me louent)
HONTE = la Haine que je ressens envers moi-même, accompagnée d'une idée de cause extérieure (c'est parce que les autres m'ont blâmé que je me haïs).
2. JOIE et TRISTESSE accompagnée de l'idée de CAUSE INTERIEURE + OBJET = moi:
Ici, nous ressentons une augmentation ou diminution de notre puissance, mais celles-ci ne sont plus attribuées à une cause extérieure (ce ne sont donc plus des espèces d'Amour ou de Haine). Nous nous imaginons être nous-mêmes la cause de ce changement de puissance.
SATISFACTION DE SOI-MÊME = Joie + idée d'être soi-même la cause + ressentie envers soi-même comme objet
REPENTIR = idem, mais Tristesse.
Donc voilà la raison pour laquelle je me suis dit qu'il vaut peut-être mieux réfléchir tout de même deux fois avant de commencer à barrer des mots dans le texte original ...
Louisa
PS: je pars de l'idée que la version latine qu'accompagne la traduction de Pautrat est la plus correcte ... d'où vient la vôtre? En tout cas, si l'on change le latin 'externae' par 'internae', je crains que le texte n'ait plus aucun sens. Si donc il s'avère que dans la version originale il y avait 'internae', la correction qui remplace ce mot par 'externae' est à mon sens nécessaire ... .
Y a-t-il quelqu'un ici qui s'y connaît en matière d'éditions de texte en latin, et qui pourrait confirmer/infirmer ceci ... ?
PPS : quant au scolie de 51, le problème ne se pose plus, car Spinoza y parle effectivement de cause intérieure, et donc il s'agit de la Satisfaction de soi-même et du Repentir, pas de la Gloire et de la Honte.